Justice au Singulier

Blog officiel de Philippe Bilger, Magistrat honoraire et Président de l'Institut de la Parole

Et le peuple du RN, on en fait quoi ?

Derrière cette indifférence, il y a du mépris : non seulement pour ces sinistrés de la politique, pour ces abandonnés en nombre d’une démocratie qu’ils récusent comme n’étant plus faite par et pour eux, mais aussi pour ce qu’ils pensent, désirent et refusent – et d’abord, pour leur exigence de sûreté et de tranquillité, à la fois personnelles et publiques. On en fait quoi de ce peuple du RN ? Je crains que le progressisme, allant au bout de son indifférence et porté par les vents de l’Histoire admissible, ne réponde : « Rien », et qu’il s’en moque !

La vérité est dehors…

Dans son dernier livre, passionnant et empreint de nostalgie, Franz-Olivier Giesbert dresse un magnifique portrait de Giacometti, saisissant de vérité et d’admiration. L’artiste y formule quelques injonctions – comme, par exemple, celle de ne ressembler à personne, de suivre son seul chemin – et livre des pensées, notamment celle-ci, qui me semble d’une justesse absolue : « L’idéologie vous enferme, la vérité est toujours dehors ».

Pasolini : un mort si proche…

Pasolini est un mort proche, si familier, à la fois tellement à part, mais si terriblement, si tragiquement, si lucidement humain, qu’il demeure, malgré le passage du temps, en nous, tel un mystère que nous n’essayons pas de déchiffrer à notre mesure. Parce que ce mystère, c’est moi, c’est nous – avec lui.

Gérald Darmanin face à des élèves…

Que la diversification du corps s’amplifie et s’enrichisse, soit, mais rien ne serait pire que l’abolition de la distance, de la tenue, de cette légitimité et de cette autorité, qui, dans les temps de crise que nous vivons, est le moyen le plus radical pour perdre l’estime des citoyens et le respect des politiques. Profondément, la magistrature peut avoir des origines multiples mais pour rien au monde le magistrat ne doit être comme tout le monde, sinon il perd tout crédit pour juger. Cet écart nécessaire, c’est sa force et son honneur.

Marine Tondelier, hélas…

Dans le monde des gens sérieux (apparemment, rien que des hommes, sauf si Ségolène Royal s’en mêle), combien d’ambitions vont se manifester, aussi ridicules que la sienne, aussi dangereuses pour la victoire finale que celle de Marine Tondelier ? À droite comme à gauche, on les sent frémir, ces conquérants de la dernière ligne droite, ces importants de fin de course qui, après tout, se murmurent : « Pourquoi pas moi ? »

Encore un effort pour tout détruire …

La destruction qui nous guette n’est pas de celle qui, organisée et créatrice, serait le terreau d’une renaissance — parce que même nos meilleurs politiques ne nous rassurent pas sur leur lucidité et leur courage. Mais, insinuante, progressive, quasiment irrésistible ici, irréversible là, décourageante à force de résistance aux efforts qui cherchent à la réduire, elle représente un poison qui, en 2027, nous tuera si personne ne sort du lot pour nous sauver.

Quelle justice possible après le maelström Sarkozy ?

Je n’ai pas fait le compte de tout ce qui a été dit et écrit sur la condamnation de NS par ses soutiens, sur un mode totalement décalé et périphérique, sans le moindre lien avec le problème de justice essentiel. Pour ma part, et nous sommes nombreux à éprouver ce sentiment, je n’ai jamais douté du courage de NS à Neuilly-sur-Seine, de son amour de la France, du fait qu’en certaines circonstances il a été un grand président, de l’affection de ses enfants pour lui, de l’amour et de l’admiration de son épouse à son égard, de sa personnalité hors du commun, pour le meilleur comme pour le pire. Mais ce ne sont pas les données prioritaires qui vont mobiliser demain la cour d’appel. Est-il coupable ou non des quatre infractions que le Parquet national financier lui a reprochées et dont trois sur quatre ont été écartées par les premiers juges ?

Cédric Jubillar : justice de places…

Le journaliste, quelle que soit sa tendance, n’est pas spontanément accordé, sur le plan judiciaire, avec l’ordre. Souvent il préfère les incertitudes troublantes aux vérités trop évidentes. Alors, quand de surcroît on a un Cédric Jubillar qui conteste obstinément, et que le corps de la victime demeure introuvable, les médias ne se sentent plus !

Bruno Retailleau n’est pas « détruit »…

Je ne doute pas que sorti des miasmes de ces derniers jours, Bruno Retailleau va comprendre que rien n’a changé dans son rapport avec la majorité de l’opinion publique et que le fait de n’être plus ministre ne va pas obérer son futur, qu’il soit celui d’un candidat ou d’un auxiliaire essentiel pour quelqu’un d’autre. Il me semble que sa liberté d’aujourd’hui va lui permettre de se consacrer à sa tâche capitale de créateur ou de restaurateur d’une droite retrouvant l’estime publique non pas avec des promesses démesurées et démagogiques mais avec la capacité de tenir les engagements plausibles et raisonnables qu’une pensée conservatrice se doit de cultiver.

Donald Trump, faites libérer Boualem Sansal !

Boualem Sansal est en train de disparaître, de subir l’inaction coupable de nos dirigeants, même si cette personnalité extraordinaire et indomptable ne s’efface pas de nos mémoires. C’est pourquoi, aussi absurde que soit mon appel, aussi utopique qu’apparaisse, à ce point, l’immixtion de Donald Trump dans nos affaires, je me résous à adresser au président américain cette injonction admirative : Donald Trump, faites libérer Boualem Sansal !

Pourquoi le peuple leur fait-il si peur ?

Rares sont les moments où, dans une démocratie, les extrémismes ont raison. La France insoumise et le Rassemblement national ne réclament que la dissolution et, dans un registre différent, le départ anticipé du président de la République. Des personnalités politiques plus modérées, notamment Jean-François Copé et Édouard Philippe, sont sur cette dernière ligne, laquelle serait programmée par le président lui-même. Le président, uniquement préoccupé par la fin de son quinquennat et ne parvenant plus à maîtriser les orages qu’il a engendrés et libérés, s’obstine à refuser au peuple le droit de trancher une crise inextricable qui, sans le recours à celui-ci, pourtant, demeurera sans solution.