Justice au Singulier

Blog officiel de Philippe Bilger, Magistrat honoraire et Président de l'Institut de la Parole

Qui va protéger la police ?

Il est aujourd’hui plus que jamais nécessaire de protéger la police, d’instaurer une responsabilité collective afin que le groupe violent ne puisse plus échapper à sa culpabilité globale, et de refuser, avec l’énergie la plus extrême, la présomption de culpabilité qui confond les rôles, les fonctions et les légitimités.

Didier Laroche : on l’avait bien dit…

Il me semble que ce n’est pas instrumentaliser l’horreur que de considérer que pour la faire cesser, pour éviter qu’elle se reproduise jour après jour, il faudra radicalement changer notre logiciel : l’état de droit n’est pas destiné à nous faire plaisir mais à protéger la société des Laroche réels ou à venir.

Blog transféré prochainement

Notre hébergeur, Typepad, connaît actuellement de fortes perturbations. Cette fois-ci, tous les articles et commentaires publiés depuis le…

L’entre-soi : un confort ou un étouffement ?

Si j’étais comme mon être privé, un tel entre-soi médiatique, ne dédaignant pas, par ailleurs, de dénigrer les points de vue antagonistes, devrait susciter mon assentiment et ne jamais m’apparaître comme un étouffement. Pourtant, en m’examinant, j’éprouve encore plus de malaise devant cet enfermement sans recours que face à mon entre-soi intime qui serait dégradé par d’autres. Comme si l’entre-soi intellectuel et médiatique, se rapportant à des idées, butait sur l’évidente limite d’une homogénéité sans faille, trahissait le principe de la liberté de l’esprit, de cette expérience renouvelée, à la légitimité sans cesse vérifiée, selon laquelle le heurt avec la contradiction d’autrui est la seule manière non seulement de vous préserver de l’enlisement personnel mais aussi de multiplier les chances d’un échange qui vous porterait vers le meilleur.

Anniversaire

Merci pour vos voeux de bon anniversaire. J’y suis très sensible.

Revue des Deux Mondes : crise de couple ?

Il n’y a pas d’impossibilité structurelle à une cohabitation apaisée et de bonne qualité démocratique entre les juges et les politiques. En effet, alors que l’univers judiciaire, au niveau de ses organes de pouvoir, a recouvré son indépendance, et qu’enfin un grand garde des Sceaux s’occupe de son présent et de ses intérêts, je suis persuadé qu’une affirmation plus fière, par les magistrats eux-mêmes, de leur rôle capital dans l’espace républicain, serait paradoxalement un remède. Démontrer, par une pratique libre et intelligente, sans la moindre mauvaise conscience, que ce couple connaîtra des hauts et des bas, à cause seulement de la plus ou moins grande moralité des politiques et de l’obligation pour les juges d’assumer leurs devoirs dans le respect strict de la procédure, de la mission de défense des avocats et de l’attente du citoyen qui ne souhaite pas une justice qui s’enlise mais qui conclut.

Le terrorisme de la détestation obligatoire…

Il faut se battre pour la liberté d’expression, ne rien céder aux censeurs, autant qu’on peut accorder la pugnacité du fond avec la courtoisie de la forme ; il ne faut jamais, dans le débat public et médiatique, se laisser imposer le silence ou se contraindre à ne pas tout dire. La contradiction n’est pas un obstacle à l’affirmation de sa propre pensée, mais au contraire un stimulant. Ce droit fondamental, nous le devons d’abord à ceux qui n’ont pas les mêmes convictions que nous, et c’est s’égarer que d’insulter le messager plutôt que de discuter le message. Mais il me semble qu’aujourd’hui, autre chose menace l’exercice de la liberté d’expression, l’empêche d’être pleine et entière. C’est ce que mon titre appelle le terrorisme de la détestation obligatoire.

Ce n’est pas de Franck Ribéry qu’on doit se moquer !

Cette focalisation sur la qualité du verbe ne constitue pas le radotage d’une société incapable de traiter les sujets essentiels. Elle traduit au contraire la conscience du lien nécessaire entre la profondeur de la pensée et l’exigence de la langue. La langue nourrit la pensée, laquelle s’appauvrit inévitablement si les mots lui manquent.. Un dernier paradoxe : le nombre de débats, de concours, de joutes, de colloques, tournant autour de l’éloquence et de la parole, est infini mais, au quotidien, cette multitude paraît n’avoir aucune prise sur l’ordinaire de l’expression publique et de la communication médiatique.

François Hollande, député socialiste ou ancien président ?

La France est confrontée à suffisamment de conflits internationaux, de négociations à mener, d’équilibres à assurer, de sauvegardes à effectuer, pour qu’on ne puisse pas aspirer à une accalmie dans des joutes internes pour consacrer le maximum d’énergie nationale à l’essentiel. Aussi bien protéger Boualem Sansal et le faire libérer qu’empêcher le dépeçage de l’Ukraine par un Poutine diaboliquement habile et un Trump narcissiquement manipulé. Alors je conviens que François Hollande laissant l’ancien président damer le pion au député socialiste n’est pas un épisode bouleversant mais un peu de rationalité, de mesure et de réserve à gauche est toujours bon à prendre.

Retour vers le quotidien…

Le retour à Paris, c’est le retour vers le quotidien. Le temps de l’utile, de l’obligatoire, des délais contraints, de la vie sociale, des rythmes professionnels, le temps de l’attente, aussi, des prochaines vacances. Je me suis rendu compte, surtout cette année, que les vacances, outre les joies familiales et amicales, procure ce don inestimable du temps perdu, qui coule apparemment pour rien. Où on croit avoir des projets mais dont on sent qu’on n’aura pas la volonté de les concrétiser. Le temps perdu est le temps des lectures, le temps des admirations, des échanges gratuits où on se parle de l’essentiel, c’est à dire du futile, de ce qui n’a pas de prix, de ce qui peut durer indéfiniment parce que les moments du loisir n’ont pas vraiment de début ni de fin et qu’ils coulent sans que le moindre couperet d’un quelconque devoir soit venu les rompre. Le temps des dilections, des découvertes, des approfondissements.

De Jean Pormanove à « Bloquons tout » : la globalité du malsain…

Le malsain, au sens où je l’entends, dans la définition large que je lui donne, est au fond l’exclusion de toute politesse singulière ou collective : il y a des actes qui ne doivent pas se faire, des propos qu’on ne doit pas proférer, des abstentions qu’on se doit d’avoir, des initiatives qu’il est urgent de mettre en oeuvre, des attitudes qui ne sont pas négociables, de la morale qui jamais ne doit être considérée comme secondaire, de l’honnêteté à ne pas sacrifier, de l’allure à toujours cultiver. Celle-ci est le contraire du malsain.