Depuis quelques jours, on voit beaucoup à la télévision le procureur d'Angers Brigitte Angibaud rendre compte dans le détail de la disparition d'Aurélia, des recherches entreprises puis de l'interpellation d'un couple et enfin de la teneur de ses déclarations. Le couple aurait "avoué dix viols ou agressions sexuelles". Eric Fottorino a écrit à ce sujet un petit billet très pertinent dans Le Monde.
On dirait que la magistrature ne sait se soumettre qu'à l'alternative suivante : ou le silence contre-productif et un tantinet méprisant à l'égard de la société qui voudrait savoir ou le prurit médiatique qui fait que, pour ne pas donner l'impression de manquer le train de la communication, on dépasse les limites en rapportant par exemple de manière prématurée, la substance de propos initiaux et qui seront peut-être révisés.
Au fond, dans les deux cas, pour l'abstention comme pour la surabondance, c'est une forme de contentement de soi qui prédomine. Tout seul dans son silence en face des autres ou enivré de soi dans sa relation avec les autres. Il me semble que, parfois, les médias ont pris une telle importance qu'il est plus urgent pour la justice d'annoncer le crime et ses suites que d'instruire sur eux. Entre le rien et le tout, il y a sans doute une place pour une parole maîtrisée.
Je ne peux qu'approuver votre reserve et la faire mienne : les temps mediatique et judiciaire sont bien differents et il est surprenant que l'on ne tire décidement aucune leçon des erreurs passés .Et si dans quelques semaines ou mois , il s'avérait que les " aveux " des personnes mises en examen n'étaient qu'affabulations ...
Rédigé par : Parayre | 28 novembre 2005 à 21:49
Cette médiatisation d'un tel fait divers (tragique, certes) me donne l'impression d'un cirque, ou plus précisément, de la prestidigitation. On occupe l'attention collective sur un détail et cela permet de faire passer inaperçu l'essentiel.
En plus, pour un rédacteur en chef, c'est parfait, ça permet de "produire de l'info" facilement et à bas prix, et on ne risque pas de s'attirer les foudres d'un élu, d'une association ou d'une entreprise.
Rédigé par : Boulgakof | 26 novembre 2005 à 06:28
Au vu du traitement médiatique de cette affaire, je ne peux m'empêcher de penser à la tristement célèbre affaire d'Outreau.
Nous avons ici deux personnes accusées d'un crime sur un enfant. Il semble, apparemment, que ces personnes aient avoué d'autres crimes antérieurs.
On peut raisonnablement supposer que, si ces personnes sont bien les coupables de l'enlèvement de la petite fille, elles soient mentalement dérangées (je ne suis ni psychiatre ni psychologue, et j'emploie donc un vocabulaire sans doute inadapté, mais chacun aura compris). En conséquence, je serais pour ma part très prudent avant d'accorder une quelconque validité à l'aveu d'autre crimes. On a déjà vu des suspects inventer des réseaux de pédophiles, des "notables", etc.
Je suis d'ailleurs attristé par l'attitude des médias, qui embrayent immédiatement.
Rédigé par : Submarine | 25 novembre 2005 à 23:50
"une parole maîtrisé" comme vous dites, n'est elle pas un peu irréalisable?
Je veut dire par là que la personne en charge du dossier est seule face aux journalistes, et que sans conseils, elle ne sait que dire.
D'où le trop ou trop peu de parole.
Quoi qu'il en soi, je n'envie pas la position du procureur d'Angers.
Rédigé par : Pangloss | 25 novembre 2005 à 20:55
Je ne suis pas défavorable, bien sûr, à la communication par le Procureur, mais il me semble, en effet, que l'ouverture de l'information doit sinon la faire cesser du moins la rendre plus rare et que, surtout,il est très dangereux de s'engager dans une relation du fond des déclarations.C'est figer et structurer ce qui est appelé à se modifier,modifications et évolutions qui ne font pas l'objet de communiqués ultérieurs.
Mieux vaut en rester à des données fiables et intangibles:recherches, interpellation et ouverture de l'information.Surtout qu'un très bon juge Parent a été désigné!
Rédigé par : Ph B | 25 novembre 2005 à 17:34
Pour ma part, j'ai trouvé que ce procureur avait bien maîtrisé sa parole dans la phase la plus critique, celle où la vie de l'enfant était en cause.
D'autre part je préfère des informations données par le parquet, fussent-elles surabondantes, que des fuites de source indéterminée et avec des finalités orientées ou opaques qui sont souvent le lot de ces affaires criminelles ou des affaires judiciaires en général.
Rédigé par : PBi | 25 novembre 2005 à 16:49
Au début de cette affaire, la médiatisation "à outrance" a été une méthode calculée, et qui s'est avérée efficace. Une vie d'enfant étant en cause, je n'estime pas cela critiquable. Cependant, ledit procureur a saisi un juge d'instruction. Il me semble que le secret de l'instruction imposerait une certaine discrétion. Ces informations me semblent fort être un paiement en retour de l'exposition gracieusement fournie par les médias. La présomption d'innocence en fait les frais.
Il reste encore beaucoup à apprendre. Heureux en tout cas de voir qu'un représentant du parquet soit réservé, même à titre personnel.
Rédigé par : Eolas | 25 novembre 2005 à 15:56