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20 novembre 2005

Commentaires

zaki

combien ya t-il de jurés ?
qui ne pas etre jurés

Boulgakof

Bien que pas d'accord avec vous sur plein de sujets, je ne peut que vous féliciter de votre succès impressionnant, qui peut-être s'est au détriment de votre frère Pierre dont je suis l'un des derniers survivants, malgré la qualité de son blog.
En plus, cela flatte mon égo déjà surgonflé que de me dire que j'étais le premier à vous faire réagir.
Bonne chance pour l'avenir!

Edouard

" (...) Et ce, d'autant plus que le magistrat a pour mission de guider les jurés dans leur réflexion, d'éclairer leur prise de décision. Ils ne doivent pas aller jusqu'à les influencer : mais guider quelqu'un, l'aider à s'orienter dans la pensée, n'est-ce pas déjà le conduire où l'on voudrait qu'il aille? "

Il m'a toujours paru pour le moins gênant que les avocats ne puissent être présents - en silence (pour une fois) - lors des délibérés. Leur durée, parfois particulièrement longue, n'aide pas à ne pas penser que le procès est "plaidé" une seconde fois à cette occasion.

lhommedanslalune

Pour un professeur d'histoire et d'éducation civique votre initiative, signalée par le blog de maître Eolas est très utile, nous nous sentons souvent sans culture juridique quant il faut aborder des affaire en cours

Jean-Baptiste

La question des jurys populaires suscite à l'évidence des interrogations très diverses, dont ce blog se fait l'écho : celle de la responsabilité des jurés ; celle de leur rémunération ; ou encore, celle de leur légitimité. Pourtant il me semble que l'auteur de ce blog ne s'est pas véritablement expliqué à ce sujet, et à mon tour je m'interroge : qu'est-ce qui justifie le fait qu'on fasse appel à des citoyens pris au hasard pour juger un homme aux Assises?
J'ai bien conscience que ce débat dépasse largement la seule sphère judiciaire et renvoie aussi bien à des interrogations d'ordre politique ou philosophique. La voix du peuple a toujours eu pour fonction et ce, depuis les origines du droit, de contrebalancer le pouvoir des juges et des politiques, en matière criminelle. Et j'entends bien qu'il s'agit également d'un devoir civique, dans la mesure où chaque jugement est rendu au nom de la République. Mais, pour autant, je ne vois pas pourquoi l'on devrait faire appel à de simples citoyens, ignorants du droit, pour juger un homme, dans une procédure grave et sérieuse, alors même que des magistrats pourraient le faire eux-mêmes, de manière sans doute plus juste, en tout cas moins incertaine.
Manifestement l'on a tendance à croire que les magistrats ne sont pas des citoyens comme les autres : ils seraient trop portés sur la technique juridique, et pas assez conscients des réalités du monde qui nous entoure ; donc ils auraient besoin d'être épaulés, secondés par un jury populaire, moins prévenu, plus au fait de la vraie vie. C'est profondément absurde. Et ce, d'autant plus que le magistrat a pour mission de guider les jurés dans leur réflexion, d'éclairer leur prise de décision. Ils ne doivent pas aller jusqu'à les influencer : mais guider quelqu'un, l'aider à s'orienter dans la pensée, n'est-ce pas déjà le conduire où l'on voudrait qu'il aille? Autrement dit, les jurés, pour autant qu'on puisse les considérer comme indépendants de la vision du magistrat qui les a en charge (et qui les a sélectionnés auparavant), ne sont-ils pas simplement une manière de légitimité factice que la magistrature se donne pour prononcer ses jugements?
Plaçons-nous justement dans cette position que certains redoutent d'avoir à assumer un jour. Si je suis juré : bien sûr, je vais me prononcer en mon âme et conscience. Mais dans un cas de figure aussi grave qu'un meurtre, n'aurais-je pas toutes les raisons de suivre l'assentiment du magistrat qui me conseille? Pourquoi, en tout état de cause, est-ce que je me permettrais d'avoir un avis différent? Au nom d'une plus grande humanité? De quel droit et à quel titre? Le magistrat, lui aussi, est un homme : lui aussi, il fait partie du peuple. En toute logique je dois suivre l'avis de celui qui sait. Il me propose : je dispose certes ; mais je ne saurais me prévaloir d'une connaissance et d'une maîtrise du dossier égales à la sienne, tandis que lui peut prétendre avoir la sensibilité humaine nécessaire pour ajuster la loi. Je me retrouve donc inutile, voué à la redondance, à l'adhésion, précisément parce que je n'ai pas les mêmes compétences que le magistrat.
Par où l'on voit que c'est le statut du juré qui met en question le rôle du magistrat, plus que celui de l'accusé. Et peut-être le dernier ouvrage de Philippe Bilger, roman où il rend compte d'un procès aux Assises à partir du point de vue de l'accusé (point de vue qui est, depuis Camus, une sorte de lieu commun romanesque) aurait-il été plus dérangeant encore, conçu à partir du point de vue d'un juré. Car le juré est l'autre du magistrat, alors même qu'il est censé comprendre l'accusé : il est en ce sens une sorte de figure hybride de l'univers juridique.
Finalement la question que je me pose n'est pas : est-ce que je serais prêt à être juré? Mais comment je vivrais le fait d'être jugé, voire condamné par un jury populaire?

Edouard

Certes, le droit est une science qui fait parfois penser que ses praticiens sont de grands (et dangereux ?) monomaniaques. Pourtant, lorsqu'on la cotoie de plus près, on découvre au contraire qu'elle est relativement flexible, et que les juges - sur proposition des avocats - font évoluer la norme par rapport aux attentes de la société, grace à la jurisprudence (enfin... parfois). D'ailleurs, les juges au pénal ont l'obligation de prendre en compte la personnalité du prévenu en correctionnelle, comme de l'accusé aux assises. Grossièrement, une défense peut s'organiser autour de deux axes : soit la culpabilité ne peut être établie justement parce que l'élément matériel et l'élément intentionnel, que j'évoquais dans un précédent commentaire, ne sont pas réunis (autrement dit, la technique juridique protège de la condamnation exclusivement morale), soit la culpabilité ne peut être contestée (flagrant délit par exemple) et le juge choisira la peine la plus adaptée à la personne qui se trouve en face de lui, suite au débat entre le procureur et l'avocat (prison ferme, sursis, mise à l'épreuve, travaux d'intérêt général, etc.).
Sur ce travail de personnalisation, bien loin de tout automatisme que la "psychorigidité" du droit pourrait supputer, je ne saurais trop conseiller le film "10e chambre", de R. Depardon.

Sébastien

Je tenais juste à signaler que le rôle du jury n'est pas seulement de se prononcer sur la culpabilité, mais aussi sur les circonstances, ce qui permet de faire intervenir un élément que les magistrats prennent naturellement en compte, mais peut rester en arrière-plan : la conscience sociale. Je pense à un cas (sans doute particulier, mais qui pose un vrai problème de conscience) : l'euthanasie. Meurtre ou « bienfait » ?
Peut-être les juges auraient-ils tendance à se concentrer sur le crime, là où le jury examinera peut-être si le prévenu n'a pas agi avec un esprit très différent... Je parle avec une certaine inexpérience en ce domaine, mais si je ne commets pas d'erreur sur ce point, il suffirait déjà largement à légitimer la présence des jurés en nuançant la « psychorigidité » caractéristique des juristes.

Didier

Ne vous étonnez pas des débuts prometteurs de votre blog. L'expérience de celui de votre frère vous donne la mesure de ce qui peut se passer. Vous traitez d'un sujet fondemental - la manière dont un pays "traite" sa Justice n'est il pas symptomatique de ce qu'il est ? Et cette Justice rencontre beaucoup de problèmes. Merci à vous bien sûr mais aussi merci à ceux qui écrivent les commentaires bien interessants.

Edouard

"(...) l'intime conviction étant une certitude mais intime et personnelle qui dépasse le pur schéma juridique-, il [le juré] apprend vite à devenir un juge avec la force de la collectivité qui le soutient et en faisant appel à son coeur et à son esprit. Rien ne me paraît plus éloigné de la réalité que je vis que la référence à un jury criminel, en première instance et en appel, qui serait incompétent, léger ou dépassé. C'est la meilleure justice qui soit parce qu'elle est précisément rendue par le peuple."

Mais si la répression des infractions est soumise à la dialectique juridique, si la procédure est effectivement un garde-fou contre l'arbitraire, s’il est nécessaire de réunir un élément matériel et un élément intentionnel - qui ne sont pas suffisamment simples pour que l'on se dispense d'en enseigner le contenu aux étudiants en droit – pour priver quelqu’un de liberté, l’intime conviction ne laisse-t-elle pas trop de place à l’émotion ?

La collectivité soutient le juré, il arrive également qu’elle l’oppresse : n’est-ce pas dans l’affaire Ranucci que les jurés délibérèrent cernés par les cris de la foule scandant « à mort ! », « à mort ! » ? Les débats sont jetés dans la salle des pas perdus par les péroraisons tardives de certains avocats, puis dépouillés des éléments juridiques qui en font la spécificité, par l’entremise de la presse, à tel point qu’un magistrat a dû être nommé pour canaliser l’information entourant un procès d’assises (Outreau I, de mémoire). Ces « juridictions de gala » ne seraient-elles pas, en définitive, frappées d’un trop fort aléa – précisément induit par l’intime conviction – là où les enjeux requerraient au contraire le plus de rigueur dans l’application (et l’appréciation) de la norme ?

Mon intention n'est pas de susciter une polémique, mais plutôt d’avoir, grâce à ce blog, un autre regard sur des réflexions peut-être par trop théoriques.

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