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21 décembre 2005

Commentaires

Jean-Yves Bouchicot

Billet sincère et fort nuancé, cher Philippe, mais je me demande comment vous pouvez achever un tel développement en oubliant d'aborder la question de l'indépendance du parquet. Je sais, vous n'êtes pas juge, et je comprends vos regrets comme je rends hommage à votre esprit d'équité. Vous êtes sans doute le seul membre de l'accusation devant lequel je ne craindrais rien si par malheur j'étais traîné en Justice. Encore une fois, je n'ai pas confiance dans la justice de mon pays. Je ne suis passé qu'une fois en correctionnelle, pour un excès d'alcoolémie au volant de 0,1g, à quelques centaines de mètres de chez moi, lors d'un contrôle de routine. Me défendant moi-même, j'ai dû attendre cinq heures pour passer en audience, où la juge m'a coupé la parole en disant qu'il fallait que je quitte les métiers du spectacle et en concluant la condamnation avec sursis avec un infini mépris : "Et vous avez des enfants, en plus... ça promet !"
J'ai appris par la suite qu'elle avait un mari peintre sans clients, alcoolique profond, à qui on a retiré son permis à vie et qui est sous la menace d'une curatelle.
Je me rappelle avoir, en rentrant chez moi à bicyclette, feuilleté un album de Daumier sur les "gens de Justice". Que voulez-vous, les artistes, même ratés et alcooliques, ont parfois besoin de réconfort...

patfalc

c'est vrai, vous avez raison de le souligner, que le risque est grand qu'après l'épisode Outreau, une commission de l'A.N. enterre le sujet, au nom de la difficulté de réformer la justice du pays.Un chiffre seulement: il n'y a qu'un peu plus de 500 juges d'instruction pour près de 8000 agents de la justice. Comment peut-on demander à des juges de considérer sérieusement toutes les affaires qu'on leur demande de traiter, avec aussi peu de moyens?
sûr que le rapport Pébereau, sur la dette publique ne va pas arranger les choses...
Autre aspect,plus édifiant celui-là, sur la liberté qui existe dans nos sociétés: 5% des affaires seraient traitées par de juges, c'est-à-dire que 95% de celles-ci se traitent directement entre policiers et procureurs, donc en interne, sans que la défense ne puisse exerce le moindre début de contradiction.
bon courage.

arcade

La seule réflexion que je me fait : hier tous coupables, aujourd'hui tous innocents. C'est tout de même un peu surprenant non ? N'est ce point une dérive complète...

mike

Nous vivons uns époque de communication.
A lire la presse, à écouter les radios, j'observe que la première cour d'appel a lieu dans la rue. On y voit et entend les avocats refaire l'audience. Ce n'est pas toujours innocent ou "fair play" mais c'est inévitable . Les juges semblent plus tenus à un devoir de réserve, encore que certaines affaires: Bruay par exemple aient prouvé le contraire.
Mais il faudra bien que l'institution judiciaire se fasse entendre,clairement et à bon escient. C'est ce que ce site essaye de faire; son audience est peut-être encore insuffisante. En tout cas, bravo !

jlhuss

Merci de cette note, une fois de plus très documentée et interessante, mais je vous trouve un peu péssimiste quand même.

Thea

Merci beaucoup pour votre réponse, elle me conforte dans la façon dont j'ai toujours envisagé le métier de magistrat, cela plus une bonne dose de passion pour le droit et l'être humain. Vaste programme mais beau programme.
Précieux conseils que ceux-ci que je conserve

Philippe

Tout simplement, Thea, se battre. Tirer les conséquences des catastrophes. Ne pas fuir nos responsabilités. Ne pas éluder celles des autres. Compter sur la compétence et la déontologie. Fuir le corporatisme. Satisfaire le citoyen. Communiquer sans complaisance avec les médias. Etre convaincue que le métier de rendre la justice est un grand métier et qu'on ne peut pas l'exercer dans la routine. Vaste programme.

nicolas

Bonjour,

Le dernier paragraphe de votre billet me dérange vraiment. Souhaiter une présence policière au sein des établissements scolaires est une fausse réponse aux problèmes rencontrés actuellement, voire le meilleur moyen de mettre le feu aux poudres. Les élèves "à problèmes" ont besoin de surveillants, d'assistants sociaux, de personnes à leur écoute capables de chercher une solution à leurs difficultés, pas de policiers judiciarisant le moindre comportement hors cadre. En outre, il ne faut pas oublier que le chef d'établissement a la faculté de faire intervenir les forces de l'ordre si le besoin s'en fait ressentir.

Lorsque l'on travaille avec des ados, on se rend très vite compte que l'important, c'est le sentiment d'appartenance à un groupe. Quand un élève est en échec, fait doublé souvent par des problèmes sociaux hors du cadre scolaire, il sort de la société des élèves normaux et, pour ne pas se sentir "tout seul", rejoint n'importe quel groupe prêt à l'accueillir, qui sera souvent la bande des "durs". Coller un policier dans leur dos et judiciariser le moindre de leur comportement ne fera que renforcer leur sentiment d'exclusion de la société normale, d'appartenance aux "rebelles" et conduira à terme à une désocialisation complète.

Les solutions, on les connait, elles existent. Il faut renforcer le nombre de surveillants, d'accompagnants scolaires, de conseillers d'éducation, d'assistants sociaux, de médecins scolaires. Malheureusement, cela a un coût important et ce n'est pas aussi visible médiatiquement que des uniformes patrouillant dans la cour de récré. Toutes les personnes travaillant dans les établissements scolaires regrettent les emplois jeunes, pourquoi les avoir supprimés alors que le résultat de leur travail était évident ? Les assistants sociaux intervenants dans les collèges et lycées ont chacun plusieurs établissements comptants des centaines d'élèves à couvrir, comment espérer qu'ils fassent un travail efficace ? Le tissu associatif périscolaire a complètement été détruit à causes de coupes budgétaires, pourquoi ? Même chose pour les associations de quartiers !

L'école est le lieu de formation et d'éducation du futur de notre société. Remplacer les éducateurs par des policiers laisse, à mon avis, mal augurer de cet avenir.

Nicolas

Thea

Plusieurs questions me viennent après la lecture de votre article.
Que dire au personnel judiciaire en proie à la suspiscion? Mais aussi que faire, qu'enseigner aux prochaines promotions de l'ENM, la promotion 2006 fera son entrée à l'école dans une atmosphère difficile, post-traumatique en quelque sorte. Ce qui est fait d'Outreau actuellement par les pouvoirs publics, les répercussions que l'on note déjà dans les tribunaux sont problématiques pour la justice même car le climat est celui d'une chasse aux sorcières, on va casser du juge ou lieu de juger des affaires dans les tribunaux(je sais que cette appréciation est tout à fait subjective mais c'est ce que je ressens).
Alors que faire pour retrouver un semblant de confiance avec le justiciable et pour que la justice et ses magistrats conservent la place qui leur est due dans les enceintes de justice et dans la République?

GroM

Je ne partage pas votre point de vue, bien plus éclairé que le mien par votre pratique quotidienne du sytème, sur la place prépondérante des droits de la défense.

Il me semble au contraire que nous observons depuis 2002 à un renforcement systématique de l'accusation. Je citerai à cet effet (et de mémoire, avec donc les imprécisions que vous pourrez corrigez) l'augmentation des délais de garde à vue, les possibilités de perquisition et d'écoute plus étendues, la valorisation des repentis, la mise en cause pénale des avocats dans certains cas qui étaient auparavant du ressort disciplinaire.

J'ai tendance à penser que ces mesures n'ont pas été pour rien dans l'affaire d'Outreau, puisqu'elles ont créé une ambiance favorable.

Pour ce qui est de la présence des policiers dans les établissements scolaires, bien qu'étant membre du PS, j'y suis favorable. Il me semble nécessaire qu'il y ait une meilleure coordination entre les services de l'état alors qu'on constate trop souvent que les proviseurs ont tendance à étouffer les affaires qui les gênent (consommation de cannabis, violence, racket). Je ne suis pas inquiet par le syndrôme "un flic dans chaque classe", l'état est bien trop pauvre pour se le permettre ;-) Cele ne doit pas pour autant dédouaner l'EN de mettre assez de surveillants dans les collèges et lycées. Mais on en revient au même problème: cela ne se fera pas car l'état est trop pauvre.

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