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16 novembre 2006

Commentaires

benson

Quel avenir pour les victimes de viol ? Aucun ou quasiment pas : 9 cas sur 10 ne sont pas réglés par la justice... qui n'évoque que les affaires qu'elle traite. Quel Parquet, qui n'a légalement aucune obligation à agir même saisi d'une affaire flagrante, ira se soucier des victimes en errance, dont bon nombre n'ont l'idée que de témoigner de la destruction de leur existence sur tel ou tel forum ? Aucun. Deux affaires sur trois mènent au sacro-saint non lieu... Combien d'experts psycho traumatologues (et non des spécialistes de la résilience, concept si intéressant pour le trésor public) au sein des tgi ? Quel respect pour les victimes, les lois récentes qui les protègent et leur donnent légitimement accès à la procédure pénale, quelles applications de la circulaire d'E.Guigou dans les bureaux capitonnés des juges ?

RIEN.

Kim Larche

Bonjour!

Aujourd'hui je suis rendu a 19 ans et je peux vous dire que oui peut-être qu'il y a une vie après mais pour quelque années elle est très difficile... Je suis une grosse victime...
tout à commencé a l'age de 5 ans et cela c'est terminé à l'age de 14 ans...Il me touchais , je criais je pleurais mais il me menacais de tuer ma famille... Je n'ambarquerai pas dans les détaille mais juste pour vous dire que tout est traumatisant ... j'ai passer en cours et tout le tralala et On tombe très bas dans ces moments. Ils a été jugé coupable et il s'est tuer après avoir eu sa centance... 5 ans après je commence a vivre une vie, je recommance a vivre. Par contre il est partie avec mon enfance, il me la voller, il m'a détruit pendant 10 ans de temps... Il y a un avenir après oui mais tu dois avoir parler, L'avoir dénoncer et tu dois rester forte et courageuse... Moi c'est ce que j'ai fait et aujourd'hui j'ai mon secondaire 5 et je suis entrain de suivre un cours en secrétariat et puis par la suite je ferrai mon cours en comptabilité... J'ai un appartement et je suis heureuse! Vous vouler en parler écrivez moi je suis toujours la pour en parler pour faire comprendre des choses a d'autre... j'aime mieux en parler qu'en pleurer

[email protected]

Marcel Patoulatchi

(Parayre,

Je ne pense pas que monsieur Bilger ait à se sentir visé. Tout d'abord, d'après ce que j'ai lu de ses ouvrages, je n'ai pas du tout la sensation que sa carrière fut linéaire. Ensuite, les guignols dans mon propos ne sont pas ceux qui « ont eu une vie sans détours » mais bien ceux que ça « gênerait que [...] qu'on puisse avoir eu dans sa vie des occupations très diverses ».
Je crois de toute façon avoir déjà dit à monsieur Bilger la haute estime que j'ai pour le magistrat qu'il m'apparaît être.

Je n'ai pas vécu plusieurs vies, mais je continue à en vivre une que j'espère aussi intense pour les années à venir que pour les années passés. Je me moque de savoir si c'est de la prétention où pas, mais je sais ce que c'est de mettre un bleu à 6 heures du matin et découper de la tôle sur échelle avec une disqueuse (oui, le code du travail précise pourtant que l'échelle n'est pas censée servir à travailler mais uniquement à se déplacer, mais ça je l'ai appris des années plus tard), tout comme de travailler dans un centre de recherche international en ne côtoyant presque que des docteurs, tous d'une origine culturelle finalement assez différente. Je n'ai pas envie de donner plus détails ici car je tiens à rester anonyme sur internet quand j'exprime des vues qui me sont propres, il serait donc ridicule que je m'étende et que je donne plus de détails qui permettraient à ceux qui ont déjà eu mon CV entre les mains de me reconnaître.
Alors quand on dit de moi que je serais un petit prétentieux se croyant omniscient, je n'en ai cure. Prétentieux, je le suis sans doute. J'ai la prétention de ne pas oublier ce que j'ai vu et entendu, car c'est ce qui m'a formé, a fait de moi ce que je suis. Je suis sans doute de ceux qui ont excessivement confiance en eux, mais je ne le vis pas mal et je crois qu'avoir une haute estime de soi est une bonne motivation pour tenter de toujours agir de manière honorable. Il est évident que personne n'est omniscient, que le champ du savoir, à l'échelle de l'humanité comme à celle d'un individu, est toujours plus restreint que le champ de l'ignorance. Pour ma part, je ne ressens pas le besoin de m'exprimer sur internet sur des sujets que je ne connais pas du tout - c'est pour ça que l'accusation de prétention à l'omniscience est biaisée, puisqu'il s'agit d'un raisonnement a silencio (tirer des conclusions de ce que je ne dis pas). Concernant le respect, pour ma part il n'est pas affaire d'éthique. Seule la tolérance est une affaire d'éthique pour moi : on doit tolérer ce qu'on n'aime pas parce que chacun à le droit d'être ce qu'il veut, tant qu'il ne nuit pas délibérement ou manifestement à autrui. Mais le respect, c'est autre chose. Je me réserve le droit d'être seul juge de déterminer à qui je l'accorde. Ceci étant dit, je ne suis pas très rancunier car ma mémoire est relativement sélective et a tendance à oublier assez vite le mauvais côté des choses. J'ai parfois la sensation que la mémoire a une capacité limitée, qu'on ne peut l'encombrer de trop de bêtises au risque de ne plus avoir de place pour ce qui en vaut la peine.

Pour ce que vous dites de votre vécu d'officier de marine, c'est tout à votre honneur de vous être opposé à des pratiques criminelles ou délinquantes. Ce que vous dites n'est pas surprenant, malheureusement -si ces sujets vous intéressent, je vous suggère vraiment de lire le bouquin de Fussel, bien traduit de l'anglais (évidemment, si vous aimez l'anglais, il vaut mieux prendre la version originale, quoique pas si facile que ça à trouver en France), « A la guerre, Psychologie et comportements pendant la Seconde Guerre Mondiale » dont j'ai donné la référence plus haut-, toutefois, ces pratiques-là ne recouvrent pas la définition du crime contre l'humanité que j'évoquais plus haut. Il est important de s'en tenir à une définition stricte. Si on dilue le sens de termes comme « épuration ethnique », « génocide », on ne saura plus de quoi on parle. Même s'il est toujours vrai qu'il est délicat de hiérarchiser l'horreur.

Je conclue sans avoir peur de radoter, je pense que c'est important : qu'une personne soit violée du fait de soudards militaires, dans l'indifférence ou la suggestion de leur hiérarchie, ou du fait de soudards militaires qui obéissent sans conscience à une stratégie décidée et planifiée par leur hiérarchie, visant à détruire un groupe d'individus, la victime subit le même outrage. Surtout, que personne n'imagine que la distinction opérée entre les deux cas vise à minimiser quoi que ce soit.


Marcel Patoulatchi

Merci Guillermito pour le lien, c'est bien aux travaux de Lilly que je songeais. Disons qu'il est certainement plus facile pour un Nord-Américain ou un Britannique de traiter de ce genre de sujets sans passer pour un ingrat.
Vous avez raison de signaler que cette partie de l'histoire reste assez confidentielle en France. Le sujet est d'autant plus trouble que, si je me souviens bien, les recherches mettent en lumière une sur-représentation manifeste des GI noirs, chose qu'on ne peut pas dire partout sans se faire vite prêter des intentions (j'en parlais en septembre dernier : http://riesling.free.fr/20060927.html ).

LEFEBVRE

@ Véronique,
Je suis en accord avec Ph Bilger sur sa sémantique. La honte tend à nous faire mentir, à nous faire taire; voici pourquoi même si nous ne sommes pas coupables, nous avouons. Ce n'est en rien péjoratif.
Merci chère Véronique de savoir ne pas me résumer à cette partie humiliante de mon vécu, je vais vous faire un "aveu" : Je pourrais être beaucoup plus serein que je ne le suis, il suffirait de penser différemment, de ne pas m'occuper des sujets qui fâchent et de faire de la sophrologie. Seulement, j'aime ce mauvais caractère, la polémique, la responsabilité citoyenne, le débat. Il est bon de se sentir en vie avec de la joie, du calme, mais aussi de la tristesse, de la colère.
Je ne suis de surcroît pas humble et n'ai pas envie de l'être. Mon seul souci est de ne pas être méprisant, de ne pas me construire une estime en dévalorisant l'autre.

Parayre

@Marcel Patoulatchi : je m'efforce , depuis les propos , inqualifiables et toujours inexpliqués , que vous avez cru bon , sans me connaître , de tenir à mon endroit , de vous lire cependant avec aménité ...Certains de vos propos m'ont intéressé voire même touché tant ils laissaient transpirer une passion , un souci de vérité , une personnalité attachante .

Vos derniers commentaires sur " les guignols " - auxquels je ne peux m'identifier tant j'ai eu une vie professionnelle diverse - m'ont à nouveau choqué comme dirigés notamment vers notre hôte qui poursuit une carrière linéaire ...et vers tant de mes proches que je respecte même s'ils n'ont pas connu , comme moi ou vous , apparemment , une existence " plurielle" .

Vous avez , à vous lire , vécu plusieurs vies : moi aussi mais je n'en tire aucune vanité et ne me considère pas moins "guignol" que ceux que l'existence a amené à tracer un sillon régulier !

Pour revenir à votre échange " public " avec " Doc" , j'ai , jeune officier de marine , eu à m'opposer à ma hiérarchie sur les comportements , en terre étrangère , commis pas certains de mes subordonnés .

Leurs exactions , sinon cautionnées , étaient favorisées , suscitées même par ma propre hierarchie : je ne l'ai pas accepté .

Pardon de vous interpeller mais , véritablement , vos certitudes arrogantes m'interrogent même si , par éthique , je vous respecte .

Puissiez-vous en faire autant de ceux qui échangent sur ce blog !

Guillermito

Marcel Patoulatchi : "le nombre de viols commis par des GI est loin d'être anecdotique". Il est estimé, pour la France, à 3500 de juin 44 à mai 45, et ils ont notamment conduit a 21 condamnations a mort par l'administration militaire US. Voir les recherches de l'universitaire américain J. Robert Lilly a propos de ce sujet difficile et relativement escamoté de l'histoire. Un article ici : http://superfrenchie.com/?p=941

Marcel Patoulatchi

Doc,

En effet, « l’épuration ethnique fait partie de nombreuses stratégies de conquêtes et elle passe souvent par le viol ». Heureusement, l'épuration ethnique n'est pas le lot commun de toutes les guerres. Malheureusement, le viol est omniprésent partout où il y a des rapports de forces trop déséquilibrés (des hommes en armes face à des populations effrayées, par exemple), donc pendant la plupart des guerres (je dirais bien toutes mais je veux bien admettre ne pas avoir des connaissances sur toutes, c'est la seule raison de cette nuance) il s'en produit à large échelle, même lorsque ce n'est absolument pas une stratégie.

A titre d'exemple, le nombre de viols commis par des GI est loin d'être anecdotique (en Allemagne, mais aussi en France), alors qu'on ne peut soupçonner l'autorité nord-américaine de quelconque stratégie de cet ordre.

Ce n'est pas parce qu'un fait se produit à grande échelle et grande régularité qu'il est forcément la mise à exécution d'un plan concerté destiné à détruire un groupe d'humain (ce qui est la définition du crime contre l'humanité, cf Truche Pierre, « Qu'est-ce qu'un crime contre l'humanité ? » in L'Histoire, n°168, juillet 1993, p. 72-73). Les camps de concentration n'ont pas été inventés par les nazis (je parle bien des camps de concentration, pas ceux d'extermination), ils ont été pratiqués régulièrement par les grandes puissances coloniales. Dans ces camps-là, les maladies tuaient massivement. Mais faute d'intention manifeste, on ne peut vraiment parler de crime contre l'humanité (le crime contre l'humanité n'est pas défini par le dol éventuel).

Pour encore creuser cette question d'omniprésence de délits et crimes sexuels lorsqu'existent des rapports de force de grand déséquilibre et des situations mi-chaotiques, on fera bien de se pencher sur les accusations faites il y a quelques années à propos de certaines missions humanitaires, certaines ONG (critiques émanant notamment de l'intérieur même de ces ONG), notamment à propos de ces histoires de couvertures données contre des faveurs sexuelles.

Hors sujet : J'ai vu plus d'un élève de prépa ayant raté l'entrée à l'École des chartes, admis en licence, qui effectivement ne maîtrisaient pas un certain nombre de bases acquises par les étudiants en deug (oui j'emploie les termes d'avant LMD). Les prépas formatent très bien l'acquisition d'un certain nombre de savoir. Question développement de l'esprit critique et questionnement épistémologique, c'est une autre affaire.
(et s'il faut mettre des arguments d'autorités pour avoir le droit de s'exprimer, précisons que j'ai parmi mes proches à la fois des anciens « prépa » mais aussi des gens qui enseignent à des prépas ; je ne dénigre en rien les prépas, je constate simplement que leur objet et méthode est très différent de ce que propose l'université)

J'insiste, un article sur le site d'une association qui pour source prend wikipédia, qui confond allègrement les concepts, moi je n'appele pas cela de l'expertise. Je ne dis pas que ce n'est pas bien que des néophytes essayent de parler d'un tel sujet. C'est très bien qu'ils le fassent. Ce sont des sujets qui méritent la publicité. Mais non, pour moi, ce ne sont pas des experts.

Puisque vous voulez savoir ce que je considère comme de l'expertise en histoire militaire dans ses incidences pour les civils, voici une petite liste :

Walzer Michael, Just and unjust wars, London, 1978.

Fussel Paul, A la guerre, Psychologie et comportements pendant la Seconde Guerre Mondiale, Paris, Seuil, 1992

Crane Conrad C., Bombs, Cities and Civilians, Lawrence, University Press of Kansas, 1993.

Harmon Christopher C., « ''Are We Beasts ?'', Churchill and the Moral Question of World War II Area Bombing », in The Newport Papers, n. 1, Newport, Rhode Island, War College Newport RI, 1991, p. 1-34.

Schaffer Ronald, « American Military Ethics in World War II: The Bombing of German Civilians », in The Journal of American History, Vol. 67, 1986, p. 318-334
et
Schaffer Ronald, Wings of Judgment. American Bombing in World War II, New York, Oxford University Press, 1985

etc.

Doutez-vous que si, à un moment où à un autre, j'ai été amené à lire bon nombre de bouquins de 400 pages en langues étrangères sur le thème, à obtenir des articles publiés dans des revues publiées seulement outre-atlantique, ce n'est pas tout à fait par le plus grand des hasards, ce n'est pas tout à fait par simple curiosité personnelle...
(Tant pis si ça gêne des guignols qu'on puisse avoir eu dans sa vie des occupations très diverses - tant pis pour eux s'ils ont eu une vie sans détours)

Véronique pour Lefebvre

Lefebvre, la question que vous soulevez à 20:56 m’apparaît également très intéressante. Ce que j’ai envie de vous dire et qui me semble capital, c’est le chemin que vous avez accompli pour pouvoir vivre avec le mal qu’on vous a fait.

La transmission de cette épreuve n’est pas un aveu. L’emploi de ce mot en fin de note de Philippe pourrait m’apparaître très discutable. Dire, expliquer, transmettre c’est exprimer qui on est, ce qui nous a constitué intimement, dans le malheur ou le bonheur. Dans la phrase de Philippe, je retiens donc l’adjectif serein qui, pour le coup, est pour moi le plus important.

Dans mon commentaire au sujet de ce post, j’exprimais une réserve quant à la médiatisation parfois très impudente de certains traumatismes, violences ou maladies. Car, à mon sens, cette médiatisation peut compromettre sérieusement la sérénité à laquelle a droit et qui est nécessaire pour toute personne qui a traversé quelque chose de très grave, de très difficile.

A vous lire depuis quelque temps sur ce blog, rien ne fera que je vous identifierai à ce que vous avez bien voulu nous dire. Vous n’êtes pas cela. Vous êtes une personne pleine de sérénité, de finesse et d’expériences et qui , dans une circonstance de sa vie a surmonté la violence qu’on lui a faite et l’a vaincue.

LEFEBVRE

Comment s'étendre sans se répandre ?
Voici la question que je me pose.
Je pense au coming-out de Véronique Sanson sur son alcoolisme. Plus personne ne lui parlait de son album, mais bien de son addiction.
Comment ne pas être réduit à son vécu singulier lorsque l'on fait le choix de le révèler ?
Trois craintes m'assaillent :
- Celle d'être plus pris pour Le Faible plutot que Lefebvre.(la peur du jugement.)
- Celle de ne plus être critiqué, d'avoir un statut d'intouchable par l'attention et la gentillesse des autres.
- Celle que mes révoltes, ma désapprobation soit prises comme éléments de mon vécu.
J'ai essuyé beaucoup de rejets de mes confessions antérieures, je ne réussis pas pourtant à me taire. C'est comme cela, j'essaie d'apprendre à ne pas me juger. Je ne suis pas un exemple, à suivre, certainement une anti-thèse. J'ai fait ce que j'ai pu, le plus souvent et parfois ce fut bien pitoyable, mais toujours je me suis battu pour aller devant.
Dépenser tant d'énergie pour moins souffrir était nécessaire, j'aurais préféré pouvoir dépenser autant de force à la construction socio-professionnelle.
Espèrons que ce ne fut pas qu'un lamentable gâchis et que ces gros efforts me seront salvateurs et donneront une force supplémentaire pour des enjeux encore plus importants, encore plus riches. Je ne peux pas dire tout ce qui me pèse sur ce blog, aussi je m'en tiens à un fond vague. J'étais brillant et costaud alors que le faible à lunettes ou le gros qui dort au fond de la classe, ce fut cruellemnt plus logique. Étais-je un morceau de choix pour le prédateur rencontré ou étais-je une victime qui s'ignore ?
J'ai pris le goût du combat parce qu'il faut que je le mène pour mon fils et moi et me suis découvert des ressources insoupçonnées comme le courage, une honnêteté vis à vis de soi et l'humanité. Ce sont de belles récompenses. Je suis un peu moins écrasant et arrogant avec les autres, un peu moins "sale con", c'est déjà ça à prendre.

doc

Merci Marcel pour vos précisions et aussi de bien vouloir me transmettre votre bibliographie experte.

Il n’en reste pas moins que l’épuration ethnique fait partie de nombreuses stratégies de conquêtes et qu’elle passe souvent par le viol.

(Marcel, vous avez raison : je n'ai effectivement pas pu bénéficier des enseignements d'une première année d'histoire, ayant été pris sur titres en troisième année, ce fut a priori une erreur…)

cactus

presque rien à voir mais du coup j'ai revu " vol au-dessus d'un nid de coucou "
merci à vous !
il s'agit d'un viol aussi en fait la lobotomie , non ?

Parayre@yahoo.fr

Pour rester dans l'" objet" de ce blog et surtout dans ce que je connais - n'étant pas , moi , omniscient - le tribunal pénal international de La Haye a reconnu le 27 juin 1996 et qualifié de crimes contre l'humanité, les viols commis en temps de guerre en Bosnie , en particulier à Foca , courant 1992 ...

Marcel Patoulatchi

Doc, toujours sur le sujet un peu hors-sujet du viol comme arme de guerre,

Relisez : « La tolérance des viols par la hiérarchie militaire dans de nombreux conflits n'est qu'une manière de calmer les troupes à moindre coût, pas un outil. ». Notez en particulier le « dans de nombreux conflits », une précision qui n'a pas été placée là par hasard.

Mon affirmation est plus nuancée que votre « Depuis des temps très anciens, les XXX ont toujours voulu », phrase type de celles qui en histoire sont vouées à être démenties (je vous assure, ça ne marche presque jamais, c'est d'ailleurs la première chose qu'on apprend aux étudiants d'histoire en première année : oubliez les phrases qui commence par « de tous temps », concept si fragile qu'il atteste plus de ce qu'on ne sait pas que du reste)

Le fait que le viol soit une pratique immémoriale n'implique pas qu'il ait été systématique et organisé, utilisé comme arme de guerre, cela partout et tout le temps.

Lorsque le viol est considéré comme du butin humain, ce n'est pas spécifiquement une arme de guerre. Pas plus que la mise à l'état d'esclave des mâles de la cité vaincue. Où alors tout et n'importe quoi est arme de guerre et le terme n'a pas plus de sens.

(Concernant les liens que vous donnez, excusez-moi d'estimer qu'il n'y a pas là la marque d'une expertise - je ne parle même pas du fait qu'ils se référencent entre eux. Dois-je vous fournir une bibliographie de ce que je considère être de l'expertise en la matière ?)

Quant à l'exemple donné par le premier lien, il est d'une pertinence discutable à ce propos. Il prouve qu'au cours d'une guerre le viol fut utilisé comme arme de guerre. En quoi cette guerre-là serait-elle représentative de toutes les guerres ?

Est-elle représentative de des guerres du Golfe ?


PS : Nous sommes bien d'accord que pour la victime, que ce soit une arme de guerre ou pas ne change rien à l'affaire.
PPS : Nous sommes bien d'accord qu'en prison aucun crime ne devrait pouvoir être commis.

Sophie

Merci.

doc

Marcel,

Prenez le temps de mettre "viol arme de guerre" dans votre moteur de recherche.
Ils sont nombreux à penser qu'il s'agit d'un outil, d’une arme :

http://www.unhchr.ch/Huridocda/Huridoca.nsf/0/07b643696b04ee478025666d005928db?Opendocument
http://web.amnesty.org/library/index/fraAFR540762004
http://www.amnesty.be/spip.php?article1116
http://fr.wikipedia.org/wiki/Viol
Etc.

Depuis des temps très anciens, les conquérants ont toujours voulu procéder à une épuration ethnique, en tuant les fils pour éviter qu’ils vengent les pères ((cf. le sort d’Astyanax fils d’Hector et d’Andromaque) et en violant les femmes pour s’assurer une descendance acquise à eux, tout en humiliant les vaincus.

Que par ailleurs cela fasse partie avec le pillage des comportements de la soldatesque en territoire conquis est une chose mais on ne peut pas dire qu’il n’y a pas une démarche sensée de la part des chefs, un élément de leur stratégie donc une arme…

Vous avez très bien écrit sur ce sujet du viol. Devant les souffrances exprimées ici sur ce sujet, je ne développerai pas ce point « militaire » par rapport à votre opinion qui diverge de celle de nombres d’experts voire les liens non exhaustifs en supra.

J’aimerais aussi qu’en évoquant le viol, on n’oublie pas que de tels crimes sont commis sur des prisonniers en France…

Marcel Patoulatchi

Je ne sais pas si vous connaissez le blog « postsecret ».

C'est un site qui tous les dimanches publie des cartes postales envoyées anonymement par des gens qui confient un secret - souvent pesant.

La première carte postale de la série de ce dimanche évoque, je crois, le sujet de cet article. Et pour ce sujet, je pense que la parole des concernées est toujours bonne à écouter, à lire :

La carte :
http://photos1.blogger.com/blogger/994/593/400/reclaiming.jpg

Le site « postsecret » :
http://postsecret.blogspot.com

LEFEBVRE

Toute ma compassion pour Sophie, son époux et leur gamin. Les voies thérapeutiques et judiciaires sont les meilleures à prendre, vous avez bien raison. Je jure à votre fils que ses horribles crises d'angoisse s'atténuent avec le temps. Soyez patient, ce peut être long. Pensez à vous tous surtout et ne cherchez pas à comprendre la folie d'autrui, vous ne pouvez pas avoir la même logique intellectuelle que ce genre d'individu. Que votre fils n'oublie pas qu'il est victime et que le malade est l'autre. Bon courage à vous tous pour le rétablissement de votre petit qui viendra en son temps.

Marcel Patoulatchi

Une arme de guerre désigne un outil ou une pratique censée, dans l'esprit de ceux qui la manient, donner un avantage militaire.

La tolérance des viols par la hiérarchie militaire dans de nombreux conflits n'est qu'une manière de calmer les troupes à moindre coût (partage du butin humain), pas un outil. Ces pratiques ont d'ailleurs toutes les raisons de renforcer la cohésion de ceux en passe d'être vaincu. Je comprends parfaitement qu'un gamin de 15 s'engage s'il croit par cela pouvoir faire échapper le calvaire à sa mère et sa soeur.

Sophie

J'ai lu avec intérêt l'interview de C. Autain et votre texte. Pour être la mère d'un jeune adulte qui nous a confié, il y a près d'un an, qu'il avait été violé par une personne, ayant autorité comme on dit, qui lui a fait subir des abus sexuels pendant plusieurs années à l'adolescence, je peux vous dire que c'est très dur à vivre. Pour lui d'abord bien sûr (sentiment de culpabilité, manque de confiance, troubles de la mémoire, divers symptômes post-traumatiques). Même si le fait de nous en avoir parlé et de trouver notre compréhension et notre soutien total l'aide. C'est très dur aussi pour nous parents car la culpabilité de ne pas avoir compris, ne pas avoir pu protéger notre enfant, est ravageuse. De pouvoir mettre des mots sur le mal-être perçu chez notre fils a cependant ouvert une nouvelle étape, et le soutien d'une association luttant contre la maltraitance est précieux. Il a récemment décidé d'engager une démarche judiciaire (nous y étions favorables mais il lui a fallu du temps pour trouver la force de faire cette démarche), motivé par l'idée d'empêcher que d'autres jeunes puissent subir le même sort. Mais, voyez à quel point cela est difficile, le jour où il devait appeler avocat et psy, il a du être brièvement hospitalisé suite à une énorme crise d'angoisse. La souffrance est immense, peut-être encore plus chez les garçons car le tabou est lui aussi immense. Je fais des voeux pour que la justice soit efficace et ne saurait trop insister sur la nécessité qu'elle agisse avec tact car les défenses qu'il s'était construit pour survivre étant tombées, une très grande fragilité en résulte dans un premier temps.

doc

Il faut peut-être croire que quand nous sommes impliqués professionnellement dans de telles affaires, nous apprenons, par notre humanité, l’humilité et donc connaissons la difficulté à nous exprimer sans vouloir avoir la forfanterie de celui qui croit connaître, et sans l’innocence de celui qui, revêtu de tous les atours de son humanisme, avance sur cette lande sans crainte…

Lande qui se révèle être un des marécages de la turpitude humaine…

On est toujours « petit » devant de telles détresses humaines.

Voilà Jean-Dominique pourquoi j’aurais préféré me taire…

Mais il faut avoir l’humilité de savoir qu’on ne sait pas vraiment.

doc

Jean-Dominique,


Vous avez raison : « …c’est terriblement délicat. »

Je le redis d’autres ont su mieux ici s’exprimer que moi…

J’ai un jour discuté avec un homme qui avait « récupéré » une femme allemande venant d’être violée par environ 70 soldats soviétiques et qui saignait fortement pour ne pas vous faire subir son expression plus triviale : « elle pissait le sang… ».

Le viol reste dans ce monde, comme au Darfour ou ailleurs, aussi une arme de guerre.

Il en va de la grandeur de notre Nation d’être impitoyable sur ce sujet avec nos ressortissants (P. B. m’a fait savoir son désaccord avec mon opinion sur des peines trop faibles dont acte…) mais aussi de faire entendre la voix de la France sur ces actes de viols collatéraux à nombre de conflits.


Jean-Dominique Reffait

Marcel, mon propos visait essentiellement notre attitude à l'égard de victimes de viols. En tant qu'hommes, nous avons une responsabilité particulière pour se placer dans une situation d'équilibriste : ne pas banaliser mais aussi dédramatiser. J'admets que c'est terriblement délicat. Je m'interroge.

Sur le plan judiciaire, je n'ai évoqué que le cas du mensonge, qu'il faut bien déceler. La justice ne peut pas être compassionnelle lorsqu'elle doit démêler le vrai du faux. La possibilité du mensonge pollue la réalité des vrais crimes.

Ainsi je parlais de femmes dans un jury et non de magistrates. Mon expérience m'a montré qu'elles étaient plus pertinentes, plus clairvoyantes. Elles observent, elles croisent les regards et les décryptent, de femme à femme.

Je veux dire simplement notre responsabilité d'hommes à l'égard de nos compagnes ou amies : notre rôle est d'apaiser, d'aider à la résilience, de ré-anoblir le corps avili, de couronner la reine déchue. Elle est là, la virilité.

Alliolie

Merci d'avoir mis des mots d'une telle justesse sur un ressenti, au sortir de l'audience, bien difficile à qualifier.
En ce qui me concerne, notre affaire est close depuis l'arrêt en appel de la Cour d'Assises, début octobre. 10 ans de réclusion criminelle, cela ne résout rien, mais enlève il est vrai, en la rejetant sur l'AUTRE, un peu de culpabilité.

doc

Jean-Dominique,

Je n’ai jamais voulu dire qu’il faille se taire sur la dénonciation de ce crime.

Sur un plan social, il est évident qu’il faut condamner haut et fort un tel acte.

Se taire signifiait pour moi éviter une maladresse, une « compassion maladroite » pour reprendre votre très juste expression.

Ce crime est tellement ravageur au niveau de la personnalité de la victime que je ne me sentais pas les compétences de parler de leurs souffrances à la place de victimes qui ont chacune, par ailleurs leur vécu avant et après.

Quand vous dites :
« …aura su vite laver la souillure… » ou « …qu'il n'est pas possible de parler d'un viol comme d'une autre agression justement en raison de notre attitude spécifique à nous qui ne sommes… », je n’ai pas abouti à ces conclusions avec mon maigre vécu dans ce domaine.

Je ne connais pas la jeune femme en question et je suis très heureux si dans son cas elle semble avoir surmonté ce cataclysme personnel.

Pour ma part, j’ai plus connu des femmes brisées n'arrivant à verbaliser leur souffrance que de nombreuses années après, parfois jusqu’à 30 ans…

La meilleure reconnaissance de ce crime par les différents intervenants et l’amélioration de la prise en charge psychologique permettent certainement une meilleure acceptation d’un deuil d’une partie de son âme perdue par ce traumatisme.

Lefebvre et Marcel ont très bien écrit sur ce sujet et il ne faut pas oublier le pourcentage de viols non connus, laissant la victime isolée en danger moral.

Quant à la sanction pénale, les peines me semblent dans l’ensemble faibles pour une qualification criminelle.

Parayre

Le bon goût est effectivement sévère à l'égard du mauvais .Ce n'est pas le premier ou le second qu'il faut défendre mais , comme Voltaire , le droit à l'un et à l'autre , de se montrer , car il en est du goût comme de tant d'autres choses qu'il est très difficile de distinguer les unes des autres .

Il entre beaucoup de sectarisme dans les exclusives et de préjugés dans les excommunications .Affaire de nuances ? Oui .Souvent , mais aussi oui et non parfois , car le choix est impossible ou bien il se situe ailleurs .

Je n'ai rien vu d'aussi beau sur l'orgueil que "Lord Jim " de J.Conrad .Il ne s'agit pas d'orgueilleux antipathiques.C'est , sbriglia , vous avez raison , trop facile .On les condamne et on se croit débarrassé de l'orgueil . Non , il s'agit d'orgueilleux parfois sympathiques , attachants et qui se perdent , ou bien tout d'un coup , sans que les badauds y comprennent quoi que ce soit , comme le grand Briarly , commandant le plus beau bateau de la ligne des Indes , comblé par la fortune , et qui se jette à l'eau , ou bien au bout du long chemin comme le jeune Jim et qui , après un contretemps dû autant aux circonstances ironiquement défavorables qu'à ses propres qualités de rigueur et de noblesse , en fait dix fois plus qu'il n'en faut pour être un héros mais qui , toujours hanté par le souvenir d'une occasion manquée , avance de dangers en dangers , de désespoir en désespoir , et rencontre enfin , apparemment par hasard la mort salvatrice .

Marcel Patoulatchi

Sujet éminemment délicat.

Je doute qu'il existe une bonne manière et une mauvaise d'aborder ce problème, je pense qu'il en existe une panoplie, plus ou moins mauvaises, et que, comme le dit stellar, « cette résilience n'est pas donnée à tout le monde ».

Le viol est très courant, les statistiques à ce sujet sont effrayantes (notamment quand elles posent la possibilité que moins de 10 % des viols connaissent un début de suite pénale). Il n'est donc pas dur de rencontrer au cours de sa vie une femme - ou un homme - ayant subi cela. Selon la personnalité de cette victime, cela peut avoir des conséquences très différentes. Certaines jeunes femmes deviennent obèses et martyrisent leurs corps. D'autres se prostituent (symboliquement ou réellement - un article du Monde dont j'ai perdu la référence estimait que la plupart des actrices de films porno ont été violées lorsqu'elles étaient jeunes). D'autres se contentent d'être mal dans leur peau et de se haïr sans trop de démonstrations exubérantes. D'autres, comme Clémentine Autain (je n'ose pas citer Lefebvre dans son commentaire précédent), parviennent à se bâtir, à être de fortes têtes charimastiques - mais il reste toujours quelque chose, malheureusement, manifestement. Même si ce quelque chose n'obère pas forcément tout avenir (pour reprendre le titre du billet de monsieur Bilger), heureusement.

Ceci étant dit, il me semble que les idées défendues par Clémentine Autain sont globalement niaises. « L'intelligence sur les plateaux de télévision » ne me semble pas être ce dont la France à besoin. On en a déjà un stock, d'intelligents « sur les plateaux ». Bref. Ce n'est pas le sujet, bien entendu, il convient néanmoins de garder un certain sens de la mesure quand on la décrit.


Jean-Dominique,

En février 2005, j'abordais le cas d'un procès pour viol (correctionnalisés pour certains, les faits restent des viols) dont le traitement me semble assez loin d'une complaisance de la magistrature pour les victimes.

Je vous invite à lire http://riesling.free.fr/20050205.html
(et, pour être honnête, http://riesling.free.fr/20050228.html )

Vous verrez que certains magistrats (juge des enfants, décidement, on a du mal à les oublier) pensent que l'audience d'un procès pour viol est le bon moment pour discuter de problèmes familiaux de la victime, comme si ces problèmes-là entraient en ligne de compte pour juger des agressions répétées (le charmant jeune homme avait eu le soin, à sa deuxième tentative qu'il n'avait pas pu concrétiser - c'est-à-dire sans pénétration pour une raison indépendante de sa volonté - d'avertir sa victime que « la prochaine fois elle y passera »). Un jeune homme qui selon la juge des enfants « ne comprend pas ce qu'il a fait de mal » : mais elle a quand même tenu à ce qu'un type qui ne comprend pas en quoi c'est mal de violer évite la prison.

Alors, Jean-Dominique, admettons que tous les cas ne sont sans doute pas semblables..

Et le juge dans cette affaire était une femme. Donc l'idée que les femmes comprennent mieux les autres me semblent somme toute très théorique.
La pratique immonde de l'excision est souvent le fait des femmes. Oui, des femmes arrivent à mutiler leur enfant avec un tesson de bouteille... On idéalise la femme comme avenir de l'homme tout simplement parce qu'on n'a pas remarqué que la délicatesse féminine était le corollaire de leur manque de pouvoir. Libérées, les femmes montrent qu'elles sont aussi fortes que les hommes ; dans le pire et le meilleur, que ce soit à Outreau, Abu Graib ou Séoul.


Lefebvre,

Je ne vous dirai rien sinon que je suis certain que vous avez raison de croire en vos chances - croire en soi, n'est-ce pas cela le plus important. Je ne veux rien dire de précis car après votre message je ne saurais que dire de juste. Quoi qu'il en soit, je me moque de savoir s'il est bon ou mauvais de compatir, de parler ou de se taire, je veux juste vous dire que vous avez toute ma sympathie, pour ce que ça peut valoir.


LEFEBVRE

Il y a heureusement une vie après le viol, plus la même. Pas forcément une pire à terme. Ce qui est évident est qu'un grand bouleversement, une grande peur (celle d'être tué, de mourir dans l'instant) marque au plus profond de soi. La mort est présente alors dans la pensée, la conscience de ne plus être un jour aussi. Ces grands chocs obligent à accepter sa propre mort un jour prochain. L'acceptation : voici une clef supplémentaire à une vie plus sereine surtout pour éviter les combats perdus d'avance. Se battre, par contre, pour l'essentiel, le réaliste, est une motivation qui vaut la peine d'être vécue. Pour un magistrat, une victime, un philosophe : quel plus beau challenge d'aller chercher le juste, de le trouver parfois, de voir qu'il y a des êtres humains dignes de ce nom, qu'ils ne sont pas la marge, mais le plus grand nombre. Voir la belle vie, aller vers les bonnes personnes, s'offrir l'opulence de joie en récompense est certainement plus difficile que de se suicider ou de devenir meutrier. Un jour de grande fatigue et de faim, un homme du seizième, pourtant si décrié pour son argent, son statut, m'a emmené manger un bon steak dans un restau à viande des halles sans que je ne lui demande rien, nous avons parlé longtemps, très longtemps de nos vies, mais aussi de nos conceptions de vie, de culture... Lorsque je me suis retrouvé seul, ce fut le cul par terre que je me suis retrouvé comme dans la chanson de Brassens devant tant de gentillesse, je n'ai jamais oublié ce moment. Il n'y pas que les médecins qui sauvent des vies, d'autres avec leur coeur, leur profession, leur ressenti le font aussi. Je défendrai toujours la justice pour cela aussi, parce que, au delà de l'idéal républicain, elle a un rôle primordial pour l'individu. Si un homme, une femme, un enfant est martyrisé, la justice et son appareil le défendent du mieux de leurs capacités, lui évite même et surtout de sombrer dans la basse vengeance. Il y a certes des progrès notables en Europe et ils s'expriment essentiellement à travers la justice. Que de progrès en plus de vingt-cinq siècles sur le droit latin ou grec, sur le droit féodal, sur ce qu'était encore la justice au début du siècle dernier. C'est avec raison qu'il faut rendre hommage à de nombreux magistrats et être vigilant pour éviter toute régression. Dans notre raisonnement, il faut savoir inclure le maximum de nuances en n'omettant pas qu'il n'y pas que du gris clair et du gris foncé, mais aussi parfois du blanc et du noir. Que chaque situation demande examen et a sa complexité, tous les cas sont présents dans la réalité, d'autres surviendront entièrement inédits. La pire des paresses n'est pas physique, mais bien intellectuelle. La magistrature et la police, mais aussi les politiciens ont beaucoup fait pour les victimes de la pire des humiliations ces dernières décennies, c'est vrai.

LEFEBVRE

Il y a dans le viol une destructuration profonde, je peux écrire quelques belles pages, en avoir des feed-back valorisants tout en me sentant analphabète, tellement idiot, aller courir deux heures, puis faire de la musculation et me sentir faible, si faible. Plaire à quelques femmes, recevoir des compliments plutôt flatteurs et me sentir laid, si laid. Cette sous-estimation, de l'ordre du maladif n'est donc pas rationnelle, j'en suis conscient et elle me dérange, bien évidemment, je ne l'exprime d'ailleurs jamais, c'est la première fois car elle fait pleurnicheur . Cette belle masculinité à la Hemingway, je l'aime, j'y suis attaché, je l'ai eue avant ces années de viol, je sais encore faire semblant de l'avoir, je sais aussi que je la retrouverai à terme à force de persévérance, de courage, d'actions allant dans le sens d'une reconstruction. Il y a une nuance entre la peine authentique et le désastreux apitoiement sur son sort que je n'ai pas. Par peur de ce dernier, je n'ai pas versé de larmes depuis de longues années, ces dernières sont coincées, ne sortent pas, me compressent la gorge et la machoire. Avoir eu la force de dépasser la peur qui me cloîtrait chez moi de façon systématique, quelle que soit son intensité me donne par contre une force morale impressionnante, c'est cette démarche qui fait de moi un opposant à l'Islam, au corporatisme où qu'il soit, au conformisme, à l'apriorité. Je prenais déjà la défense du plus faible jadis,je le fais à nouveau. Il ne faut pas avoir peur d'avoir peur, ce n'est qu'une émotion comme une autre et elle ne reste pas, elle se dépasse. Personne n'est condamné par son vécu, les addictions développées en réaction lors de l'adolescence sont maintenant loin derrière, une victoire que tant d'autres n'ont pas su obtenir, une autre fierté qui vient peser du bon côté de la balance. Un jour, justice viendra donner un sens à tous ces efforts, le chemin viendra apporter tout son lot de récompenses en sus. Il est malheureusement impossible de mener tous les combats avec la même intensité et l'énergie dépensée en rétablissement ne peut être mise ailleurs. J'adorais déjà les lettres avant l'humiliation et je serais devenu écrivain malgré tout, j'avais portant de meilleurs résultats en math car c'est une science qui donne des résultats objectifs... Je suis contre une littérature privée d'esthétisme et réduite à une forme de thérapie. Les stoïciens ont oublié hier, ne se soucient pas de l'incertitude de demain, seul compte aujourd'hui et chaque homme, chaque femme peut surmonter les problèmes d'une seule journée. Voici mon astuce, elle ne vient pas de moi, mais de Sénèque et Marc-Aurèle. Nous pouvons tous réussir avec un peu d'entraînement philosophique à être heureux aujourd'hui puisque c'est une journée unique où nous sommes nés ce matin et mourrons ce soir. Aujourd'hui mon jeune fils va me sourire, ma compagne va plaisanter avec moi, je vais aller contempler de beaux paysages, m'instruire, écrire quelques pages, aller courir, lire les bons billets de ce blog dont je fus privé quelque temps et chaque journée me restant sera obligatoirement ponctuée de joies similaires puisque j'ai fait l'examen de ce que j'aimais et détestais et que je me tourne en priorité vers les premières pour pouvoir mieux affronter les secondes. Simone Veil a été confrontée à une autre horreur, elle a continué de se battre sa vie durant et de quelle manière, voici mon modèle, ce qui fut possible pour elle, le sera pour moi. Les valeurs soit-disant obsolètes que sont l'honnêteté, le courage, la grandeur d'âme sont mon remède face à la petitesse de mes agresseurs. Tant pis si la facilité des escrocs intellectuels me fait passer pour un imbécile, un populiste, un mégalomane, l'abus de confiance est si bas. J'ai choisi ma voie et je crois en mes chances, je refuse d'être un condamné, une eternelle victime ou un nouveau bourreau. Je ne serai que rarement agresseur et toujours, je me défendrai.

Véronique

Il y a, à mon sens, chez C. Autain plus que du courage personnel à exprimer publiquement le viol qu’elle a subi. Elle parle ainsi, non seulement en son nom, mais au nom de nous toutes, de vous tous, de nous tous. Je suis d’accord, sans les historiques du féminisme, rien, en matière pénale et du point de vue de la société, n’aurait été possible quant à la criminalisation du viol et de sa possible réparation judiciaire.

Mais c’est aussi grâce à ces mêmes historiques qu’une libération des mœurs a pu se produire et permettre ainsi une société plus civilisée pour ce qui est des rapports entre les hommes et les femmes.

" …à croire que la libération des moeurs a exacerbé la sexualité au lieu de l'apaiser et de la civiliser - "

Quand Madame restait à la maison pour faire le destin de son époux et de ses enfants, quand Madame n’avait que peu d’idées sur le fonctionnement de son corps et de ses virtualités, et quand Madame et Monsieur n'avaient que très peu de possibilités de contrôler les naissances, je ne suis pas certaine que côté sexualité civilisée, c’était réellement du top top.


Ce qui me semble également important dans votre note, c’est la question de la médiatisation de la victime.

Une femme comme C. Autain a le recul, la maturité et la construction intellectuelle pour maîtriser ce qu’elle veut nous dire au sujet du viol qu'elle a subi . Il y a parfois, notamment dans le domaine de l’édition, de la presse ou de la télé, des imprudences et des mises en spectacle de la victime qui, à mon sens, peuvent contribuer à la fragiliser encore plus. En matière de témoignage, l’emploi du " je " est évidemment capital . Mais il peut être aussi fatal. Je pense à certaines célébrités qui, en raison d’une impasse dans leur lisibilité médiatique, vont raconter, ou à qui on fera raconter, des traumatismes en tous genres.

La transmission d’une expérience de viol ou de toute autre violence , je suis naturellement d’accord avec cela, et ce, quand d’autant plus, un singulier rejoint un universel. Mais le témoignage brut et non maîtrisé, je ne dis pas qu’il ne se justifie pas et que les victimes n’ont pas le droit de l’exprimer, je dis seulement qu’il peut y avoir là aussi, de la part de la société, une sorte d’exposition malsaine. Un devoir de protection vis-à-vis de ces personnes s‘impose parfois pour permettre après le viol ou la violence infligée, non seulement de survivre, mais de vivre.

Jean-Dominique Reffait

Permettez-moi Doc, mais non, il ne s'agit pas de se taire. C'est justement ce silence des autres, cette compassion spécifique qui persuade les victimes de la tâche indélébile qui les frappe. Ce que Clémentine Autain exprime, c'est qu'il n'est pas possible de parler d'un viol comme d'une autre agression justement en raison de notre attitude spécifique à nous qui ne sommes pas victimes.

Le viol est un crime immonde. En tant qu'homme, il me fait honte. Mais on ne sert pas la reconstruction des victimes en adoptant un silence gêné ou pudique qui renforce la souffrance plus qu'elle ne l'apaise.

Jean-Dominique Reffait

J'ai lu aussi ce témoignage de Clémentine Autain. J'aime bien cette fille qui a un beau regard vrai. Comme vous le dites son témoignage est d'autant plus courageux qu'il ne s'inscrivait pas dans une nécessité, de nature psychothérapique ou judiciaire.

Plus que le sentiment de culpabilité je crois que c'est la honte de la salissure qui domine. Une femme violée peut très bien savoir qu'elle n'est en rien coupable de ce qui lui est arrivée, il demeure que son intimité a été fouillée, qu'elle a été possédée par un homme qui en garde le souvenir. Notre compassion, à nous les hommes, peut amplifier ce sentiment de salissure profonde. La chance de C. Autain a peut-être été d'avoir eu un compagnon qui aura su vite laver la souillure en réconciliant le corps et l'âme de la jeune femme. En demeure la conscience d'une agression sans la honte de l'avoir subie.

Cette compassion maladroite que nous pouvons manifester confirmerait en effet que la salissure est bien là, que la femme qui est devant nous, l'amie, la soeur, la compagne est authentiquement sale. Il nous revient à nous hommes, les compagnons, d'effacer cette saleté par une tendresse vraie, par une "fête intime" qui rétablisse la joie du corps et le respect de l'âme.

Sur le mensonge. Connaissant un tantinet le sujet pour l'explorer depuis plus de dix ans, je crois que votre méthode, pour brutale et paradoxale qu'elle puisse paraître à l'audience, est la seule possible. En la matière, le statut de victime pré-existe toujours, les magistrats cajolent, adoucissent, dorlotent. Pour la vraie victime, le procès est de toute façon une épreuve épouvantable qui ne sera pas aggravée par un questionnement un peu poussé. En revanche, dans le cas d'une plaignante menteuse, elle ne tiendra pas la distance si celui qui est censé être son partisan la pousse dans ses retranchements. Les avocats de la défense ne peuvent pas le faire, passant immédiatement pour des barbares. Seul le ministère public peut se le permettre. Et pour ce que j'en connais, il ne le fait jamais.

Dernier point : faire confiance aux femmes dans un jury. Une femme sait ce qu'il en est, elle voit le regard de la plaignante et sait ce qu'elle ressent ou pas. Les hommes sont tentés de donner des gages et ne discerneront pas le vrai du faux de peur qu'on les soupçonne de laxisme. Dans ces affaires, mon expérience me montre qu'un jury majoritairement féminin est plus clairvoyant.

bulle

Chut ! Ne faites pas trop de bruit aujourd'hui dans le “salon" de notre hôte pour qu'on entende loin, très loin, sa voix. Copier/coller/envoyer pour qu'il soit lu aussi !

doc

J’aurais à dire comme médecin mais Philippe Bilger a très bien exprimé la chose : aucune parole ne sera jamais assez intelligente pour avoir la prétention d’expliquer un tel vécu à la place des victimes…
J’ai donc la décence de me taire.

stellar

Il me semble qu'on ne peut reprocher aux avocats des parties civiles de plaider "une catastrophe à vie".
Au moment du procès, la victime est encore dans le traumatisme et ne s'est pas recontruite.
De plus, cette résilience ne semble pas donnée à tout le monde et la personnalité de Clémentine Autain semble assez exceptionnelle.
Enfin même, elle avoue que "ce n'est pas facile à porter, même avec le temps qui passe". Il s'agit donc bien d'un événement qui affecte une vie pendant une grande partie de celle-ci, voire la totalité.

Je ne sais pas s'il y a une différence (de nature, de degré) entre le traumatisme d'une victime de viol et celle d'une autre agression très violente. Avez-vous des éléments?

Parayre

Quand on a tout perdu
Au sortir d'un naufrage,
Que l'on est convaincu
Qu'il faut tourner la page,

Un vent léger se lève
Nous soufflant au visage
L'envie d'une autre grève,
D'un autre paysage.

On tend alors la toile
Pour un autre départ,
Admirant les étoiles
Au fond d'un ciel tout noir

Et les vagues nous mènent
Où les pousse la brise
Murmurant leur antienne
Dont notre âme se grise.

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