C'est comme un prélude qui contient l'opéra à venir et dont chaque thème sera développé par la suite.
Depuis quelques jours, sur tous les plans, l'actualité a brillé de mille feux grotesques, pathétiques, tragiques, judiciaires, politiques et même littéraires. Je ne vais qu'allusivement les effleurer avant sans doute, plus tard, de reprendre les principaux. Je profite aussi de ce billet pour indiquer que je ne pourrai répondre aux commentaires qu'à partir du 27 au soir.
Fanny Ardant, dont les provocations sont habituellement mieux inspirées, aurait du se taire plutôt que de qualifier le fondateur des Brigades rouges, Renato Curcio, de "héros", avec d'autres stupidités à la clé. Etre actrice ne donne pas le droit de dire n'importe quoi. C'est une grande sagesse que de savoir rester dans son champ de compétence.
On a interpellé et mis en examen la personne soupçonnée d'avoir tué de 52 coups de couteau cette vieille dame de 96 ans. On ne connaît que son prénom et la première lettre de son nom. Les lecteurs de journaux sont-ils des débiles auxquels il faut cacher la vérité sur les origines des malfaiteurs présumés ?
Yasmina Reza vient d'écrire un livre - un étrange récit, au fond un dialogue - sur la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, sur celui-ci et sur elle-même. Ce qui frappe, c'est la forte présence du personnage de l'auteur Yasmina Reza, en dépit de sa modestie affichée. Nicolas Sarkozy, pris, épinglé, loué et observé dans mille séquences parfois aussi rapides que l'éclair, le temps d'un songe, d'une pensée, d'un regret, d'un souffle, est nimbé d'une aura romanesque, d'un brouillard flou d'aventurier triste et d'exceptionnel artisan de son triomphe exclusif. C'est mieux qu'un livre réussi, c'est un regard nouveau sur une réalité vieille comme le monde et sur une personnalité sans égale : la passion du pouvoir et Nicolas Sarkozy. Et, derrière, on sent, dans ou entre les lignes, Yasmina qui répond à Nicolas ou qui se retient pour ne pas le faire.
Surtout, ce sont les suites de l'affaire Evrard. Il est clair qu'à propos de cette criminalité sexuelle, de cette pédophilie gravement renouvelée, les bonnes orientations ont été décidées. Exécution complète de la peine puis, après avis d'une commission, enfermement thérapeutique s'il y a lieu. Je ne me dissimule pas le paradoxe qu'il y a à mettre en oeuvre cette sévérité exemplaire à l'encontre de condamnés qui, sans abus de langage, sont à la fois victimes de leur constitution et inéluctablement engagés dans le pire. Il m'a toujours semblé, bien avant la campagne présidentielle, que notre système d'exécution des peines, notamment criminelles, était absurde puisqu'il posait comme un principe la nécessité de libérations avant l'heure, quelles que soient les catégories délictuelles ou criminelles considérées. J'espère que l'impulsion décisive donnée pour mieux défendre les enfants saura être étendue, après réflexion, à des situations et des comportements concernant la criminalité agressive et violente. Il me semble pertinent de m'inscrire en faux contre une affirmation de l'un de mes collègues, M. Janas, soutenant qu'une peine est faite pour être "aménagée". Non, une peine est faite pour être exécutée.
Enfin, la politique, projetée ou réalisée par Nicolas Sarkozy dans le domaine pénal, fait l'objet d'une critique de gauche, où l'humanisme est invoqué de manière mécanique contre les réformes que la sûreté publique impose et que la sauvegarde des personnes et des biens rend urgentes. C'est par exemple le "populisme pénal" qui lui est reproché par deux avocates dans Libération récemment. Pour ma part, modestement je voudrais offrir ma contribution à une appréciation favorable de ces mesures tout en mettant en évidence le besoin d'une méthode qui laisse à l'intelligence le temps de se déployer, aux professionnels et spécialistes le temps de se concerter et d'envisager une hiérarchie lucide des réformes, aux politiques le temps d'accomplir leur tâche dans la sérénité et non dans une précipitation que le fait de vouloir coller à la réalité risque, si on n'y prend garde, de rendre inévitable et permanente. Ainsi, je ne suis pas persuadé qu'en matière judiciaire, il faille faire sortir du chapeau présidentiel une floraison d'idées dictées par les drames ou les inconséquences du présent. Notamment en remettant à l'ordre du jour la tenue d'un "faux" procès pour les malfaiteurs déclarés irresponsables au nom d'un travail de deuil qui devient une tarte à la crème sans véritablement consoler les victimes. La justice s'accommode mal d'une politique à réactions.
Il faut accepter de penser lentement et longuement pour agir vite, et pour longtemps.
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