Aujourd'hui à Aix-en-Provence va s'ouvrir le procès en appel de Jean-Maurice Agnelet. Je connais les avocats et l'avocat général. Tous trois de très grand talent.
Maître Hervé Temime, qui va plaider pour la partie civile à la place de Maître Georges Kiejman, a déclaré que "le bénéfice du doute ne doit pas se confondre avec le bénéfice du cynisme".
Formule lumineuse qui, à mon sens, est de nature à expliquer quelques acquittements incompréhensibles rendus par des cours d'assises.
J'espère que le barreau ne m'en voudra pas de rendre hommage à l'un de ses membres en citant, dans les débats criminels à venir, cette pensée qui dénonce les déguisements qu'emprunte la culpabilité pour tenter d'échapper aux foudres de la justice populaire.
Malheureusement, parfois, cela marche.
Je n’ai pas eu le temps d’envoyer ce post, là où il devrait figurer. Mais après tout, il n’est jamais trop tard pour le poster.
Vous avez intitulé l’un de vos récents billets :
« Un avocat requiert » et de vanter la formule de H. Témine sur « le bénéfice du doute » en vous excusant de le citer dans les débats criminels à venir.
Mais, un « avocat général plaide », lui aussi, lorsqu’il dit :
« Lorsqu’un corps se délite par le bas, c’est que le haut est déjà fortement atteint » (rapporté dans le Monde du 17/09 page 9).
Vous ne m’en voudrez pas de m’en resservir et de citer non seulement la « formule » mais aussi son auteur, dans des débats criminels à venir.
Car votre remarque est séduisante pour la défense.
Je voudrais en tester l’efficacité du côté de la défense !
Mais il suffirait d’un signe de votre part pour que je taise le nom de l’auteur de cette formule illuminante, en me limitant à la citation.
Cela donnerait de manière un peu pompière (dans un premier jet!) :
« Récemment un avocat, singulier certes, mais avocat général tout de même, requérait en disant "Lorsqu’un corps se délite par le bas, c’est que le haut est déjà fortement atteint", Mmes, Ms de la Cour faites vôtre cette lumineuse formule.
En condamnant mon client, n’oubliez pas que c’est le bas d'un "corps" que vous frappez et que le haut, lui, continuera à se déliter sans ne jamais encourir les foudres de la société qui l’accuse et que représente M. L’AG.
Deux parties d’un même corps, deux poids et deux mesures. C’est à la tête qu’il vous faudrait frapper, mais l’on ne vous offre que le bas. C’est plus facile ! Ne suivez pas M. l’avocat général dans la rigueur de ses réquisitions».
Je vais retravailler ma conclusion… ce n’était pour le moment qu’un draft !
Rédigé par : j.wedry | 23 septembre 2007 à 11:05
"L'acquittement d'Agnelet doit beaucoup à la léthargie judiciaire locale de l'époque, relayée par les relations maçonniques supposées(sic) de l'accusé."
L'acquittement de l'intéressé, présumé innocent et non "cynique" coupable au sens de notre code de procédure pénale, s'explique surtout - et heureusement - non par le talent, certes réel de son défenseur - celui de l'avocat général qui occupe en appel le siège du ministère public comme en 1° ressort n'est guère moindre - mais, par l'absence absolue de preuves concrètes réunies à son encontre d'avoir commis le crime qui lui est reproché ...
Le jury et la Cour peuvent-ils répondre et l'accusation comme la partie civile sont-elles en mesure, aujourd'hui comme hier, de les y aider, aux questions suivantes : où a été commis l'éventuel assassinat, à quelle date, selon quel modus operandi ?
De surcroît, sont-elles capables de démontrer avec certitude, non seulement qu'Agnès Le Roux est, d'une part décédée et d'autre part, que sa mort éventuelle résulte d'un meurtre prémédité ?
A l'évidence NON !
Les douze jurés d'appel (trois de plus qu'en première instance) et les trois membres de la Cour seront, le 12 octobre, lors de leur délibéré commun, comme l'ont été leurs prédécesseurs le 20 décembre 2006, dans l'incapacité de localiser, dater et détailler les éléments constitutifs de l'assassinat reproché à Jean-Maurice Agnelet.
Ils s'interrogeront certes sur l'intérêt à agir de ce dernier, sur sa personnalité aussi trouble que déplaisante mais heureusement, tout au moins au regard des principes qui régissent notre droit pénal, se remémoreront avoir juré et promis d'examiner avec l'attention la plus scrupuleuse les charges portées à son encontre, de ne trahir ni ses intérêts, ni ceux de la société qui l'accuse, ni ceux de la victime ; de n'écouter ni la haine ou la méchanceté, ni la crainte ou l'affection ; de se rappeler que cet accusé est présumé innocent et que le doute doit lui profiter ; de décider d'après les charges et les moyens de défense, suivant leur conscience et leur intime conviction, avec l'impartialité et la fermeté qui conviennent à des femmes et des hommes probes et libres ...
Ils n'acquitteront donc pas au bénéfice du cynisme mais simplement, à l'instar de la Cour d'assises de Paris dans l'affaire dite d'Outreau, au nom du droit et du serment qu'ils ont prêté ce jour d'en faire loyale application notamment en ce qu'il exige, encore une fois, que le doute bénéficie à l'accusé !
Rédigé par : Parayre | 17 septembre 2007 à 22:37
Formule pertinente incontestablement ! Mais l'acquittement d'Agnelet doit beaucoup à la léthargie judiciaire locale de l'époque, relayée par les relations maçonniques supposées de l'accusé. Son conseil, F. SAINT PIERRE, est un avocat réputé et de talent. Il sait les faiblesses de l'accusation et les développe habilement. Cet acquittement, s'il est confirmé, sera autant une victoire de la défense que l'échec de l'institution judiciaire à traiter décemment une procédure criminelle tant en terme de délais qu'en terme d'enquête.
Rédigé par : Thierry SAGARDOYTHO | 17 septembre 2007 à 17:07
Il y a quand même quelque chose d'étrange dans cette affaire.
Voilà 30 ans qu'une femme se bat pour essayer de savoir qui a assassiné et fait disparaître sa fille.
Fort heureusement, la justice, un peu tardivement, essaie de lui donner un coup de main.
Mais qui a analysé et condamné les causes multiples de ces 30 années d'hésitation, d'obstructions (influence de la mafia ? de certains membres de la franc-maçonnerie ? compromission d'une partie du milieu judiciaire niçois ? influences politiques ?).
A mon avis, cela vaut bien l'affaire Clearstream.
Rédigé par : Polochon | 17 septembre 2007 à 16:11
Quelle pertinente formule !
A inscrire en déontologie, nous la retiendrons ainsi que son auteur.
Rédigé par : Ludo Lefebvre | 17 septembre 2007 à 15:46
Je forme le voeu, en vain, je crois, vue l'ambiance ici et là, que la justice populaire ne soit pas foudroyante, justement.
Rédigé par : olivier | 17 septembre 2007 à 14:39
@Philippe
le tribunal n'échappe pas hélas à la règle commune et la forme l'emporte souvent sur le fond. Le talent oratoire y fait souvent office de vérité. Pour avoir du suivre des procès d'Assises, j'ai pu constater que pour être un avocat efficace auprès du jury mieux valait être un comédien né, capable de tirer des larmes ou de la révolte à des pierres qu'un excellent connaisseur du dossier et un rigoureux homme de droit. Je vous avouerai toute honte bue et sans craindre les cris d'orfraie, que cette fréquentation m'a amenée à penser l'impensable - en tout cas pour moi à cette époque - que le jury populaire pouvait être un dévoiement démagogique de la démocratie. Il en est de même pour un accusé, roublard , charmeur et sans scrupules, il aura toutes ses chances. En tout cas la plupart du temps. Il existe heureusement, grâce à certains avocats et magistrats des exceptions à la règle. Pas assez fréquentes à mon goût.
Rédigé par : catherine A. | 17 septembre 2007 à 13:03
Il est vrai que pour un joueur d'échec,il est plus séduisant de requérir contre un petit agneau que contre des ânes bâtés...
Rédigé par : sbriglia | 17 septembre 2007 à 12:00