Un médecin généraliste s'est suicidé à Asnières, au commissariat de police, dans des circonstances qui ont été rapportées par le Parisien. Le procureur de la République s'est immédiatement rendu sur place et toutes les diligences nécessaires ont été ordonnées à la suite de ce drame.
Ce ne sont pas les modalités de l'enquête ni le comportement des fonctionnaires qui m'interessent en l'occurrence. D'ailleurs, à quel titre pourrais-je me permettre de les évoquer ?
Dans cette tragédie, dont un homme de soixante ans a été à la fois l'auteur et la victime, je suis seulement obsedé, depuis que je l'ai lue, par la dernière phrase qu'il a prononcée. "C'est pour mon honneur". Rien n'est plus vulgaire que de tenter d'expliquer un suicide, comme si les vivants pouvaient s'arroger le droit d'emprunter un chemin que seule l'imminence de la mort rend accessible. Prétendre apposer sur les obscurités de l'âme et la confusion d'un être des clartés raisonnables revient à défigurer la nuit pour la faire ressembler au jour. Toutefois, devant certaines disparitions, l'illusion nous saisit d'une possible compréhension. Une lettre est laissée, le malheur était devenu insupportable, la difficulté d'être trop douloureuse. Mais c'est sûr, on sait pourquoi cet homme qu'on aimait, cette femme si douce et familière a décidé de nous abandonner ! Même en face de ces apparentes évidences, on se trompe presque à tout coup. Le suicide est illisible, tout suicide est un mystère qui, probablement, échappe, à l'instant ultime, même à ceux qui croient trancher un fil en réalité déjà douloureusement érodé et fragile.
Pour ce médecin d'Asnières, il vient, par ce terrible mot de la fin à l'antique, nous jeter en plein coeur aussi bien l'ambiguïté de la vie que celle de la mort. "C'est mon honneur" ! L'honneur parce que son innocence est souillée ? L'honneur parce qu'il a failli, au contraire ? On ne saura jamais, même une fois l'enquête terminée. Le rideau tombe sur une destinée qui, s'achevant, ne nous donne aucune clé.
Je suis fasciné par ces territoires qui ne sont foulés qu'une fois, dans une solitude absolue, et confrontent, un millième de seconde, le goût même affadi d'hier au dégoût irrésistible de demain.
Puis c'est le silence.
Il vous faut à tout prix acheter mon livre pour apprendre plus sur ce type de sujet et sauver votre âme sur ce blog :
http://outreau-ludo.blogspot.com/
Meuh, non ce n'est pas de la pub, juste de l'information d'utilité publique.
Rédigé par : Ludovic Lefebvre | 20 janvier 2008 à 03:20
Pour avoir côtoyé des personnes qui se sont suicidées par la suite (en milieu carcéral - le pire milieu en poucentage de suicides) j'en retire une constante que tous ou toutes m'on dit alors qu'ils envisageaient le suicide comme une porte de sortie, "je suis seul, personne qui m'écoute".
Bien sûr ils ne parlaient pas de l'écoute professionnelle, mais de l'écoute "compréhensive" qui permettrait de dire à celui qui parle "je vous ai compris, non pas dans votre intention de vous suicider, mais dans ce qui vous conduit à vous suicider". Et ce qui conduit au suicide relève des méandres de l'âme.
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 19 janvier 2008 à 19:37
Le mis en cause étant décédé, en tout état de cause, on ne connaîtra pas le fin mot de l'histoire, vu l'extinction de l'action publique - l'enquête n'est-elle pas close dès à présent.
Laboca,
Je ne vois pas en quoi il serait souhaite de criminaliser la calomnie. C'est un acte grave comme le sont l'ensemble des délits. Mais il ne cause pas mort d'homme - lorsqu'une personne se suicide, c'est son choix, sans contrainte. Sinon, ça s'appelle un homicide.
Dan,
Vous écrivez que « ce suicide n’est pas le premier lorsqu’une personne est mise en cause pour abus sexuels sur dénonciation ou calomnie ».
De fait, tout mis en cause l'est par dénonciation. Une plainte est une dénonciation, qu'elle soit calomnieuse ou pas.
Le problème n'est donc pas dans la dénonciation du fait.
Rédigé par : Marcel Patoulatchi | 19 janvier 2008 à 10:58
Laboca
"Que faire pour éviter que l'esprit public soit définitivement contaminé par ces clichés ? "
Peut-être publier honnêtement des statistiques comparatives. Par ex. On crie toujours haro sur les chiens dangereux mais il faut savoir qu'en huit ans il y a eu seulement (façon de parler) quinze accidents mortels dont huit concernaient des enfants tandis qu'on pourra compter trente accidents de spéléologie par an dont les sauvetages qui n'ont pas toujours d'issues favorables coûtent, tout comme les accidents de montagne dus à l'imprudence, à l'administration et non pas uniquement à leur fédération un argent fou. De plus je ne sais pas dans quelle mesure on attache une importance quelconque à déterminer les criconstances exactes de la survenue des accidents canins, préférant la solution de facilité qui consiste à incriminer la seule dangerosité du chien.
Or, que je sache, un revolver ne part tout seul que si un imbécile a d'une façon quelconque actionné le mécanisme de déclenchement de l'arme.
De même si vous mettez un môme de très petite taille revêtu de l'odeur des courses au rayon boucherie, en présence d'un chien que vous auriez oublié de nourrir mais laissé en liberté, il y a un risque que, pour peu qu'on ne lui ait pas appris à ne pas voler, ce dernier cherche simplement à s'emparer du sachet de steak que l'enfant peut éventuellement avoir à la main dans le but de participer et d'aider sa mère, puis croque le marmot dans la foulée de la viande de boucherie ???
Patrick Pike
"Sachant que c'est toujours à celui qu'on accuse de prouver son innocence, ne serait-il pas plus sage d'en venir à l'inverse?"
Vous regardez trop les séries américaines car en France c'est l'inverse, d'où certains cas d'acharnement de l'accusation dans le dos des suspects (mais vu le secret de polichinelle des instructions dans certains cas, pour le plus grand dommage donc de ceux d'entre eux qui se révèleront innocents mais dont la vie aura été détruite au nom d'un sacro saint principe de précaution appliqué comme on n'oserait même pas jouer une partie de go), alors que faire coopérer à l'enquête celui qui a le plus grand intérêt, étant suspecté à tort, à l'établissement de la vérité, autrement dit le système d'outre-atlantique, n'est pas nécessairement la plus mauvaise chose !
Rédigé par : Catherine JACOB | 19 janvier 2008 à 10:36
Honorons les morts, tous.
Ils nous attendent.
Rédigé par : mike | 19 janvier 2008 à 10:13
Patrick PIKE
"en se posant les questions suivantes:
-Pour quel symptôme cette patiente a-t-elle consulté?"
Pour le savoir sans doute suffirait-il de demander au Conseil de l'Ordre qu'il récupère les dossiers médicaux de ce praticien, lesquels restent couverts par le secret professionnel et ne sauraient donc faire l'objet d'aucune saisie, puis communique ensuite à qui de droit les seuls renseignements utiles à cet égard.
Rédigé par : Catherine JACOB | 19 janvier 2008 à 10:07
Je ne disserterai pas sur le suicide dont Jouffroy disait "que celui qui tue n'est pas identique à celui qui est tué". Et encore moins sur la culpabilité, ou non, de ce médecin.
Beaucoup l'ont fait avec humanité et délicatesse.
Je voudrais juste dire que nos concitoyens souffrent aujourd'hui d'une pathologie qui se déclare à tout propos, et que j'appellerai la "plaintonite" pour créer un néologisme en rapport avec cette épidémie.
Sans vouloir douter ou non de la plainte de cette jeune femme, je constate, pour rester dans l'univers médical que je connais un peu bien que n'étant pas médecin, que de plus en plus de praticiens refusent désormais de consulter seuls avec des adolescents, refusent les examens gynécologiques et hésitent même à pratiquer le toucher rectal sur des patients, patients qui n'hésitent pas à les menacer de plaintes lorsqu'ils jugent être l'objet d'une erreur, fondant leur jugement sur la lecture d'ouvrages de vulgarisation, de coupures de presse ou des commentaires de la voisine.
C'est ainsi que, même pour un banal examen en milieu hospitalier, on vous fait signer désormais une décharge à l'entrée.
Pour en revenir à l'affaire qui nous préoccupe, il serait sans doute facile de déterminer la véracité de l'accusation, à tout le moins de s'en approcher puisque désormais il manque malheureusement un protagoniste, en se posant les questions suivantes:
-Pour quel symptôme cette patiente a-t-elle consulté?
-Pour quelle pathologie, quelle douleur ou quel examen ce médecin avait-il pratiqué une injection "de produits"? (terme employé par la jeune femme).
-Impose-t-on à une patiente une intra-musculaire ou une intra-veineuse sans au moins une raison, même fallacieuse, sans son consentement ou sans lui indiquer le pourquoi de l'injection?
-A-t-elle consulté au cabinet du médecin, ou l'avait-elle fait venir à son domicile? Quel jour? Quelle heure?
-Va-t-on consulter uniquement pour dire bonjour (encore que je pourrais vous citer des exemples) ou pour un trouble précis?
-Depuis combien de temps était-elle suivie par ce médecin?
-Que dit son dossier médical?
-Pour quelle raison ce médecin avait-il été déjà l'objet d'un interrogatoire en 2006? Car il y a aussi et comme dans toute société, des brebis galeuses au sein de cette corporation, comme nous le rappelle douloureusement Ludovic Lefebvre.
Les réponses à toutes ces questions, et d'autres que je me pose, permettront de cerner la vérité.
Car il y va de l'honneur de deux êtres: celui de cet homme mort s'il est innocent ou celui de cette femme si ce qu'elle dit est vrai.
Je ne pense pas qu'on puisse ne savoir jamais. Je ne le souhaite pas ne serait-ce que pour les proches de ce médecin dont le deuil ne sera jamais terminé tant qu'une réponse précise n'apaisera pas leurs doutes.
Pardonnez-moi Philippe Bilger d'avoir introduit la bestialité du quotidien, par la brutalité de mes propos, dans la tragédie et les dissertations philosophiques qui l'entourent et la magnifient, mais ce suicide devrait être un exemple pour tous nos contemporains qui ont une tendance fâcheuse à prendre la justice pour leur exutoire.
Sachant que c'est toujours à celui qu'on accuse de prouver son innocence, ne serait-il pas plus sage d'en venir à l'inverse?
Rédigé par : Patrick PIKE | 19 janvier 2008 à 03:04
Avec tout le respect que nous devons à ce médecin qui s’est donné la mort « pour son honneur », je me permettrai de dire que ce suicide n’est pas le premier lorsqu’une personne est mise en cause pour abus sexuels sur dénonciation ou calomnie. A la fin des années 90, suite à l’affaire Dutroux, la société a lancé une « chasse aux sorcières systématique » pour mieux exorciser son laxisme passé dans ce domaine. Les médias ont pris le relais du lynchage car le sujet était vendeur ! La justice a, pour sa part, trop souvent ignoré le respect de la présomption d’innocence dans ce domaine. Tout cela a conduit au chaos d’Outreau et à de nombreuses incarcérations injustifiées sur de simples dires d’adultes ou d’enfants considérés immédiatement comme totalement crédibles alors que tout élément à décharge était bien souvent retourné à charge contre la personne mise en cause ! Ce climat a créé la terreur dans l’esprit de toute personne mise en cause et plus particulièrement chez les innocents victimes de la calomnie. La honte d’être « pointé » comme un violeur potentiel, même si un non-lieu est ordonné, même si un acquittement intervient après un jugement définitif peut orienter vers le choix immédiat du suicide plutôt que de se battre de manière impuissante contre l’absurdité. C’est une manière de « sauver son honneur » et de dire « merde » à la prétendue morale d’une société dégoulinante de vice et de pornographie…
Mais en lisant votre papier, Mr Bilger, je ne peux m’empêcher de me souvenir de Daniel Fouchard, médecin accusé au début des années 2000 par 4 personnes de son village, condamné à 8 ans de prison puis acquitté en appel. Ce médecin était intervenu à la télévision dans un débat télévisé sur l’affaire d’Outreau auquel vous participiez. Vous, en tant qu’avocat général, avec toute l’influence que vous pouvez avoir sur le public, vous n’avez pas hésité à dire que vous n’étiez pas certain de l’innocence de ce monsieur malgré son acquittement, bafouant ainsi la décision de justice et soufflant sur le feu du dicton « Il n’y a pas de fumée sans feu »!
Que faut-il donc faire, pour une personne accusée à tort, afin de laver l’affront et retrouver son honneur si les magistrats, eux-mêmes ne respectent pas le devoir de réserve lorsqu’un acquittement définitif est ordonné ?
Peut-être, ne reste-t-il à l'innocent, accusé injustement, qu’à se suicider tout de suite pour dire « merde » à cette société ?
Pour comprendre le calvaire des innocents, j’invite vos lecteurs à lire le blog des innocents injustement accusés à l’adresse suivante : http://blogdesinnocents.canalblog.com/
Rédigé par : Dan | 19 janvier 2008 à 00:08
Il y a dans certains cas, il est vrai une volonté égocentrique dans le suicide à avoir "le mot de la fin".
Je ne sais pas si c'est le cas pour ce monsieur, le fait que je fus violé par un médecin généraliste ne me donne pas la haine heureusement de tous les médecins généralistes accusés de viol.
Rédigé par : Ludovic Lefebvre | 18 janvier 2008 à 23:04
Ce qui est forcément puissant pour tous à la seule évocation du mot "suicide", c'est que l'on aspire plus ou moins tous à vivre, sans souffrances et éternellement. Après, on peut se raisonner, faire de beaux mots, dire qu'on est de passage etc... L'instinct de vie est le + fort pour notre espèce. Ainsi, lorsque la vie impose des souffrances et des morts prématurées, le fait d'entendre qu'une personne a choisi le jour et l'heure de sa propre main, forcément, cela ne peut que troubler.
Le droit de tuer (la condamnation à mort dans certains pays) celui que l'on condamne semble moins déranger que celui de se tuer soi-même.
Comme vous l'écrivez Philippe, avec le suicide, on ne saura jamais. Rien, le silence.
Lorsqu'il y a un accident on peut expliquer.
Losqu'on injecte à un prisonnier le venin de la mort, on sait pourquoi.
Dans le cas du suicide, on est face au néant, au questionnement sans fin, face à une volonté laquelle si elle se justifie intimement, ne se justifie pas aux yeux du Monde, de l'opinion.
Cela peut aussi perturber l'esprit car cela remet en question le sens de l'existence.
Bonne nuit, Philippe et Catherine !
Rédigé par : Parisot Catherine | 18 janvier 2008 à 21:51
Effectivement, il sera compliqué de savoir si oui ou non, il était coupable des accusations portées contre lui. Que ce soit vrai ou non, la personne accusatrice va se trouver avec un énorme poids sur les épaules, à tort parce que de toute façon, le suicide est un acte personnel quelles que soient les circonstances, quand bien même la personne serait harcelée, poussée au suicide.
Il y a des instants où on oublie l'impermanence de la souffrance, où la mort ne fait plus peur. J'ai toujours pensé, peut-être à tort, que vouloir mourir est ne plus accepter cette vie là, que dans ces moments-là, il fallait en changer, cela m'a, en tout cas, sauvé la vie. Je ne connais pas l'horreur d'être accusé d'être un violeur que ce soit fictif ou réel, j'ai eu très peur de le devenir parce que j'avais vécu cela, il paraît que les violeurs sont d'anciens violés. J'ai eu de l'empathie, de la compassion contre les personnes contre qui j'ai déposé plainte, il paraît que j'avais tort parce que celles-ci n'en avaient eu aucune à mon égard pendant ces années de viol, je n'en suis pas si sûr. Toutefois leurs façons de réagir ne m'ont pas appartenu, je n'ai pas fait cette démarche contre eux, mais pour moi.
Rédigé par : Ludovic Lefebvre | 18 janvier 2008 à 21:26
PS : On ne se lave pas impunément les mains.
Rédigé par : francis | 18 janvier 2008 à 21:00
Je trouve d'un égoïsme cynique, à moins d'avoir vécu isolé, de penser que la mort par suicide entraîne de ce fait la purification d'une faute. Le plus souvent après une telle fin, demeure un entourage, une famille éplorée pour qui la faute d'un être proche restera encore plus une tache indélébile.
Rédigé par : francis | 18 janvier 2008 à 20:57
Le problème avec le suicide, c'est que quand ça marche c'est irréversible. C'est bête à dire mais je sais hélas de quoi je parle. J'ai ainsi perdu il y a cinq ans un proche vraiment très proche.
Rédigé par : Grain de poivre | 18 janvier 2008 à 20:34
Il est difficile de s'exprimer devant un acte aussi grave que le suicide.
Le système pénal français est actuellement pensé comme fondamentalement un système favorable aux victimes.
Le texte sur l'indemnisation des propriétaires de voitures endommagés, actuellement discuté devant le Parlement tend à ajouter à cette tendance qui veut que les intérêts de la victime hypothétique soient privilégiés par rapport à la présomption d'innocence - que le Parlement a cru cependant renforcer en mars dernier.
Il est souhaitable que la dénonciation calomnieuse reçoive le statut de crime : cela amenerait les gens à éviter d'accuser trop légèrement.
Un avocat m'a informé qu'une personne dénoncée qui a été finalement reconnue innocente par le tribunal, ne peut pas obtenir directement du même tribunal le remboursement des dépenses par elle exposées pour assurer sa défense ; elle doit, à l'issue du procès lors duquel elle été innocentée, intenter un procès spécial pour obtenir ce remboursement : est-ce normal?
Pourquoi lui faire perdre du temps, comme si la dénonciation calomnieuse dont elle a été l'objet ne lui avait pas déjà infligé une grosse souffrance?
Le gouvernement est fondé à défendre les victimes d'infractions. Mais l'homme honnête peut constater qu'il tourne le dos à sa propre politique en ne défendant pas les personnes dénoncées calomnieusement.
Actuellement tous les hommes sont considérés comme des pédophiles potentiels ou de violents campagnons ou maris potentiels ; les étrangers sont regardés comme des délinquants en puissance ; les hommes d'affaires sont présumés malhonnêtes : notre société devient une société de l'insécurité, tant chacun risque toujours d'être dénoncé calomnieusement, dans le temps que la présomption d'innocence n'est pas défendue avec hargne.
Que faire pour éviter que l'esprit public soit définitivement contaminé par ces clichés ?
Rédigé par : LABOCA | 18 janvier 2008 à 19:09
Je viens de jeter un œil sur l’article du Parisien que vous évoquez. Je laisse de côté la question de fouille pas fouille, arme, pas arme, autrement dit celle de la possibilité du passage à l’acte suicidaire, pour m’attacher uniquement à l’ aspect revêtu par cette situation fermée dans laquelle le seul moyen de préserver un bien moral, notamment la réputation d’un individu ou de sa famille, lui paraît dans l’instant, ne pouvoir résider ailleurs que dans la suppression de ce par quoi le bien est présentement mis en péril, autrement dit sa propre existence en tant qu’objet de suspicion. Le sentiment qui pousse à la préservation de ce bien quoiqu’il en coûte, donc au prix même de sa propre vie, est vraisemblablement ce que l’on appelle ici : « L’honneur » et on peut sans doute considérer qu’il est exacerbé par la charge émotive induite par les circonstances.
On peut peut-être l’entendre de deux manières :
La première est : « Je vous crie mon innocence au prix de ma vie, car cette dernière ne me paraît plus digne d’être vécue dès lors qu’elle est susceptible de rester entachée de ‘quelque chose’ », ce ‘quelque chose’ dont il est symptomatique qu’il soit faussement imputé au Beaumarchais du ‘Barbier de Séville’ sous la forme : « Calomnions, calomnions, il en restera toujours quelque chose ! » et dont on nous dit qu’il est en réalité à imputer à Sir Francis Bacon sous la forme « Audaciter calomniare semper aliquid haeret, in De dignitate et augmentis scientiarum :Du progrès et de la promotion des savoirs,VIII, 2 –1605 » qui dit : « Calomniez audacieusement, il en restera toujours quelque chose. » à savoir le parfum de soufre que laisse toute diabolisation quand, en effet, on y est allé adonf !
La seconde résulte sans doute dans l’espoir que la mort soit, comme le feu, porteuse de purification et qu’elle puisse effacer toute souillure réelle ou supposée, qu’elle soit le fait de l’individu qui se sacrifie à cet effet ou de toute personne qu’il peut souhaiter protéger.
La question qui me tourmente maintenant est celle-ci :
notre société qui veut faire comparaître les fous pour la satisfaction des victimes, va-t-elle vouloir faire comparaître les suicidés sur le modèle de l’ancienne société scandinave qui permettait d’attraire les morts pour leur ordonner, par exemple de laisser les vivants en paix… !
Plus raisonnablement l’action est-elle éteinte ou le parquet va-t-il se préoccuper de déterminer si selon toutes vraisemblances le présumé innocent était véritablement coupable ou hélas victime ?
A l’usage de nos autocrates, une petite citation de Sir Francis qui fut aussi procureur général :« On ne commande à la nature qu'en lui obéissant. » (Natura enim non nisi parendo vincitur) Novum Organum, I, 95 Or donc si on entreprenait de faire parler le mort, il conviendrait sans doute de le faire en obéissant à sa nature.
Pourquoi cette balle dans le cœur et non dans la tempe ou dans la bouche comme on le voit souvent au cinéma ?
Quel lien entre la demande de se rendre aux toilettes et les derniers mots de son interlocuteur ?
Le mot de la fin n’est pas toujours seulement le terme d’un cheminement mais parfois aussi l’invitation à en suivre d’autres qui sait ?!
Rédigé par : Catherine JACOB | 18 janvier 2008 à 17:37
Votre billet de ce jour est d'un tragique tout à fait insoutenable.
Rédigé par : Catherine JACOB | 18 janvier 2008 à 16:03