Depuis que je l'ai lu dans le Monde daté du 9 février, je ne cesse de penser au beau portrait de Me Thierry Lévy par Pascale Robert-Diard.
Beau mais troublé par une double perception : celle que la journaliste a de son modèle, celle que l'avocat désire donner de lui-même. Je connais Me Thierry Lévy, j'ose dire que pour moi il est un ami, mais je crains de l'offenser en évoquant un tel sentiment de la part d'un magistrat... Il n'a pas un faible pour la magistrature mais sans doute pas plus que pour le barreau. Le hasard judiciaire nous a confrontés il y a longtemps devant la 17 ème chambre correctionnelle, la juridiction de la presse, et aux assises j'étais l'avocat général quand il défendait avec Arnaud Montebourg l'assassin de René Bousquet, Christian Didier. J'ai lu pratiquement tous ses livres, qu'il a eu souvent la délicatesse de m'envoyer. J'ai déjeuné et dîné avec lui mais, au final, je l'ai assez peu vu. Et après ? Puis-je dire que cette personnalité exceptionnelle m'a livré quelques-uns de ses mystères ou bien suis-je contraint, puisque je tiens à l'évoquer dans ce billet, à tenter des variations risquées sur un canevas humain qui se dérobe plus qu'il ne s'offre ?
Qu'on me comprenne bien. Ce n'est pas un professionnel de la justice - comme, au fond, ces deux termes jurent entre eux ! - qui va se permettre d'analyser le comportement et la pensée d'un avocat hors du commun, dans tous les sens. Je serais mal placé, du haut d'une position très artificielle d'observateur, pour jauger cette singularité en action même s'il est évident que l'étrange familiarité que je ressens à son égard ne vient pas de rien. Mais d'un regard à la fois très attentif et pourtant distancié. Thierry Lévy, si j'ose aller au bout de ma tentative d'élucidation, me renvoie plutôt à l'atmosphère qui me fascinait dans ma jeunesse, celle des héros, des hommes "illustres" si bien décrits par Plutarque. J'ai envie de découvrir, sans flagornerie, les secrets par lesquels cet homme est passé pour se constituer secret encore plus dense et massif aujourd'hui, les illuminations que son intelligence projette sur un monde tellement sombre qu'il lui est naturellement accordé, les forces et les limites judiciaires d'un Maître que j'admire, quoi qu'on dise de lui ailleurs, parce qu'il dépasse, de toutes manières, le champ des évaluations classiques.
Le "décryptage" qu'opère Pascale Robert-Diard à partir du livre "Lévy oblige" nous renseigne, certes, sur son enfance, sur les relations avec Paul Lévy, ce père juif qui n'hésitait pas à entretenir une "longue correspondance" avec Céline et à proposer à ce dernier les colonnes de son hebdomadaire Les Ecoutes. Chez lui "dans les églises", Thierry Lévy va peu à peu se percevoir "juif aux yeux des autres, les juifs et les non-juifs". Il n'est pas indifférent qu'il nous fasse entrer dans le royaume de l'enfance et de la jeunesse qui, paraît-il, explique sinon tout du moins beaucoup. En tout cas, son refus forcené d'être réduit à une seule identité, sa recherche obstinée, dangereuse et réussie d'un pluralisme existentiel qui lui ferait vivre comme un malaise, un enfermement, la moindre volonté d'appropriation de soi par soi. Désireux d'échapper sans cesse à lui-même, Thierry Lévy porte sur les liens d'autrui - ceux qu'on subit et ceux qu'on impose - le regard fier et dégoûté de qui est depuis longtemps AILLEURS.
On sait aussi que Thierry Lévy dénonce à juste titre la "pandémie victimaire" qui, naturellement inscrite dans l'espace judiciaire, rend de plus en plus le débat inégal et inéquitable la perception des juges, tant la souffrance visible des uns convainc plus vite et plus intensément que la douleur souvent invisible des autres. La société est atteinte par ce virus qui fait des citoyens des assistés. On n'a plus à accomplir mais à demander. On n'a plus rien à proposer mais on a droit à. Notre monde devient un vaste hôpital qui ne nous garantit pas la guérison mais au moins que notre impuissance sera favorisée.
Il faut tout de même que j'en arrive à l'essentiel. Me Thierry Lévy, l'avocat, celui qui défend, celui qui hait la prison, celui qui n'a jamais plaidé pour une partie civile quand l'adversaire était détenu, celui qui déteste, celui qui rêve de persuader et, à la fois, s'en moque. S'arrêter là serait réduire Thierry Lévy à une image trop simple, celle du refus et de la révolte, alors qu'il me semble infiniment plus complexe, plein d'une richesse dont lui-même peut-être ne cherche pas à prendre toute la mesure. Parce qu'il y a en lui aussi l'aspiration, sur le plan judiciaire, à une forme de reconnaissance ordinaire. Je me demande s'il n'est pas parfois lassé par la constance avec laquelle, et encore dans ce remarquable portrait, on l'oblige un tantinet à se camper dans la posture de l'hidalgo ombrageux, au service exclusif d'une conception roide et étouffante de la vie et de la justice.
Thierry Lévy, c'est d'abord la plus belle langue du barreau. C'est une éloquence à la fois limpide, chargée comme la gueule d'un canon, dense à exploser, tournée vers celui qui parle plus que vers ceux qui écoutent, c'est une esthétique magnifique pour une parole en colère. Une subtile contradiction déjà, entre la "rage" contenue du fond, la sauvagerie maîtrisée des propos et la splendide offrande de la forme. Comme si l'orateur, quoi qu'il en ait, n'était jamais aboli par le justicier. L'ordre somptueux de la phrase contre le désordre indigné du sens.
Thierry Lévy est-il un grand avocat et peut-être même un avocat, au sens traditionnel, voire étymologique du terme ? Je ne suis pas sûr qu'il ait pour ambition, même si son métier le conduit à "donner le change", de s'adresser à autrui dans le cadre d'un débat traditionnel où il exposerait, avec le talent qui convient, la version de l'accusé, son client, afin d'obtenir son acquittement ou la peine la moins lourde possible. Il y a dans cette configuration un respect des mécanismes judiciaires, une croyance en la validité de l'audience criminelle et du jury populaire, aussi en la neutralité des magistrats, qui, à l'évidence, n'habitent pas Thierry Lévy. Pourtant il plaide, il parle, il fulmine, il invective, il sait séduire par la vigueur de son esprit mais veille à ne jamais tomber dans une douceur suspecte, une bienveillance coupable. L'austérité abrupte ne se trouve jamais tempérée par des brises familières. Pourquoi ? Cette question n'est pas iconoclaste car, après tout, dès lors qu'il récuse l'idée qu'il desservirait par son attitude sévère et sans concession ceux qui l'ont chargé de leur défense, il est permis de s'étonner d'une pratique qui, se limitant par son rigorisme, limite ses possibilités de succès. Je me souviens d'une période où Thierry Lévy semblait accepter la rançon de son authenticité, qui était la difficulté de faire triompher sa cause. Aujourd'hui, et depuis plusieurs années, sans doute lassé par ce reproche qui le touche dans son infime part traditionnelle, il soutient que sa singularité ne le prive pas de victoires et qu'il n'a rien à envier, dans ce domaine, à ses confrères.
Utiliser cette expression au sujet de Thierry Lévy sonne comme une incongruité. Une solitude qui, absurdement, viendrait se mêler à la multitude. Cette solitude est fondamentale qui, à mon sens, dans l'espace collectif de la justice, le conduit pourtant, malgré les apparences de sa participation toujours courtoise au jeu qu'il met profondément en cause, à sauvegarder son pré carré à vif, son autarcie à la fois sûre d'elle et pleine de doutes, son être, sans jamais le laisser se noyer dans le flot des banalités consensuelles ou rituellement antagonistes. Cette volonté de ne s'impliquer que du bout de soi-même, cette incapacité à s'immiscer dans ce qui devrait mobiliser au premier chef l'avocat, ce retrait désiré ou contraint, m'ont toujours fait apparaître Thierry Lévy moins comme un avocat que comme un intellectuel de très haut niveau qui a cru ou su trouver, dans le champ judiciaire, le lieu privilégié, le prétexte idéal pour ses obsessions, ses fragilités intimes, sa puissance de réflexion, son goût de la liberté et de la contradiction, lui-même enfin.
La preuve en est dans la propre théorisation qu'il élabore pour justifier ce qu'il sent être une faiblesse. En effet, comment serait-il si peu avisé de cette exigence qui prescrit, le temps d'un discours, de feindre au moins un lien de familiarité et d'estime de principe avec ceux qu'on doit convaincre, pour pouvoir espérer un assentiment, un succès ? Thierry Lévy, comme un autre, n'ignore pas cette règle qui, sauf à vouloir de manière suicidaire saboter son rapport aux juges et aux citoyens, impose non pas une connivence mais l'affirmation claire d'une confiance. Si on n'éprouve pas celle-ci, on ne peut pas persuader, on n'est plus tout à fait avocat pour, au contraire, donner libre et brillant cours à un discours, à une interpellation qui, surgissant de ses profondeurs, sont destinés à y retourner en passant, le temps d'une écoute, dans des oreilles qui ne sont pas véritablement les bienvenues. Thierry Lévy, prenant fait et cause pour l'accusé mais à sa manière inimitable, sort du chemin classique de la stratégie judiciaire pour s'adresser à lui-même des fulgurances, des vérités et des provocations qui dépassent le particulier de sa cause au bénéfice d'un universel de la condition humaine et de son inéluctable culpabilité. Alors, de sa part, dénoncer la "connivence", qui lui donne "la nausée", entre avocats, entre avocats et magistrats, n'est qu'une façon de faire de sa solitude un impératif, de l'étrangeté de sa démarche, de son autarcie impérieuse, une politique.
Cette intuition de Thierry Lévy moins avocat d'autrui que plaideur de lui-même est confortée par la situation idéale dont il rêve et qui consisterait à "défendre l'innocence de quelqu'un que je sais coupable". Ce rapport perverti que l'avocat entretient avec la vérité ou le mensonge judiciaire, en dépit des justifications fournies par ces maîtres en sophisme, m'a de plus en plus préoccupé, en ma qualité d'avocat général auquel, j'en ai conscience, on pourrait répliquer mais sur un autre registre. Je regrette de formuler cette évidence que le vrai ou le faux sont des catégories identifiables qui non seulement structurent l'argumentation d'un accusé mais déterminent la qualité éthique d'un conseil qui, sauf à nier ce au nom de quoi il plaide, ne peut avec désinvolture arguer que venir au secours d'un prétendu innocent qu'il sait coupable, n'a pas la moindre importance. Il est trop facile de s'en tirer à bon compte par une provocation réduisant encore une fois à presque rien la légitimité judiciaire, en qualifiant la vérité de "bonne conscience donnée aux juges". Au-dessus, au-delà, il y aurait pour Thierry Lévy "la liberté absolue de celui que l'on accuse". Cette sublimation l'autorise plutôt à demeurer dans son univers et à profiter de cette "liberté absolue" en même temps qu'elle permet à son client de proférer, avec "bonne conscience", n'importe quoi.
Cette pensée mélangeant culpabilité et innocence me scandaliserait si elle n'émanait pas de Thierry Lévy auquel je prête en l'occurrence un dessein plus subtil. Entendant ce désir de défendre le faux innocent, je l'interprète comme le sentiment obscur qu'il n'y a d'innocents nulle part, que nous sommes tous coupables, Thierry Lévy le premier, et qu'on a quitté les rivages de la technique et de la justice pour ceux de la métaphysique. Lorsque Thierry Lévy prononce cette phrase immédiatement choquante, il pointe, plus que le procès lui-même et sa propre mission, la condition humaine et sa déréliction, l'honneur étant seulement de faire savoir somptueusement que la seconde est consubstantielle à la première. C'est sans doute aussi à cause de cette intrusion dans une transcendance à rebours que Thierry Lévy se trouve décalé par rapport au pur (ou impur !) avocat. Avec lui, la cour d'assises se transforme en instance du Jugement dernier et elle est précisément vilipendée à cause de son infirmité. Elle ne sera jamais à la hauteur du jugement de l'homme par l'Homme. La cause est perdue d'avance.
Je voudrais clore ce billet par une comparaison qui fera mieux comprendre mon point de vue. Me Dupont-Moretti a dit, il y a deux ans environ, à peu près la chose que Thierry Lévy. En substance, la justice est exemplaire lorsqu'elle acquitte un coupable plutôt qu'un innocent. C'est apparemment la même pensée, dont j'ai déjà discuté la teneur dans un livre, mais qui ne s'inscrit pas du tout dans le même registre. Pour l'un, on s'aventure dans les profondeurs de l'être et on peut défendre un innocent prétendu parce que la Culpabilité pèse sur tous les destins. Pour l'autre, il s'agit seulement de justifier pour demain les dysfonctionnements d'une justice qui, à cause de lui ou grâce à sa défense, confondra les genres et décrétera innocent le coupable. Thierry Lévy est un héros pour qui tout est tragique. Eric Dupont-Moretti un avocat pragmatique qui ne songe qu'à gagner.
Vraiment Maître ! On saisit mieux maintenant pourquoi je persiste à nommer Thierry Lévy Maître, avec cette lettre capitale. Non par référence à la définition professionnelle, à cet honneur donné trop vite à beaucoup d'avocats qui au mieux nous laissent de sang-froid devant ce qu'ils sont. Mais Maître comme Marcel Proust l'entendait : les écrivains fondamentaux par rapport aux "grands frères" que savent être les auteurs imparfaits et sympathiques.
Définitivement, ce n'est pas l'avocat qui me passionne chez Thierry Lévy. C'est, quand je le regarde, que je l'écoute, que je le lis, la certitude d'une imprévisibilité, d'une authenticité et d'une singularité. Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que ne vaut pas n'importe qui. Un Maître !
Philippe Bilger me fait remarquer (car je n'ai pas lu tout son blog) ce billet et ses commentaires consacrés à Thierry Lévy et je me suis pressé de m'y jeter. J'ai lu et c'est impressionnant que cet éloge de l'inflexible accusation de la défense inflexible. On rit cependant à l'association Thierry Lévy-Arnaud Montebourg ; le géant flanqué d'un nain ; moi-même encore aujourd'hui, je ne saisis pas bien le truc. En tout cas, le nain n'imite que très mal le Maître, qui conserve intact le nom à lui donné par son père. Cela me fait songer qu'à ma première carte d'identité, le fonctionnaire à l'Etat civil proposa à ma mère et à moi-même (je devais avoir 15 ou 16 ans) de franciser mon nom en le traduisant littéralement afin de mieux favoriser, sic, mon intégration, TL aurait dit assimilation. Cela donnait, traducteur à l'appui : Jésus Leblond. J'ai failli pleurer de désespoir, je me suis dit non ce n'est pas possible, je suis foutu avec un nom pareil, j'ai protesté, malgré mon jeune âge, gueulé comme un chien qu'on me laissa intact mon nom, nom de Dieu ! On acquiésa ; je devenais violent. Là-dessus, plus tard, j'en ai remis une couche en ajoutant le patronyme de ma mère, ce qui aujourd'hui me fait, certes, un nom à coucher dehors mais que j'aime bien quand même. Cependant, mes livres se vendent très mal à cause de cela, j'en ai la preuve par quelques lecteurs irréductibles qui me le dirent et même quelquefois me l'écrivirent. "Tu lis de l'Arabe, toi ?! J'ai pas" dixit aussi certains libraires à leurs clients. Hum... si le racisme n'est plus d'Etat en ce pays (quoique je n'en sois pas si sûr), il est de culture, c'est certain... Mais passons. C'est le "LEVY OBLIGE" qui me fait rédiger ici (ouvrez un blog, cher Maître, qu'on parle de vous aussi chez vous, ce serait bien). Il me semble que TL oublie quelques faits qui, à mon sens, expliquent aussi ce que lui aussi nomme, dans son livre, "la question juive" qui, pour moi, n'en est pas une à la vérité, en tout cas formulée de cette façon qui induirait en filigrane un quelconque problème juif quand le problème, puisque problème il y a eu et il y a incontestablement, est tout sauf juif et de tous sauf des Juifs. Il n'y a pas plus de question en ce sens dévoyé que de poil sur mon nez; il n'y a que les hantises humaines qu'on peut appeler aussi les frayeurs métaphysiques. Aucun livre que j'ai lu en ce domaine, si érudit soit-il, ne m'a jamais enseigné ce pour quoi, sans me l'avouer alors, je les lisais, à savoir l'origine et la raison des persécutions chroniques et millénaires des Juifs ou assimilés. Puis voyant un jour des fachos et antisémites notoires sortir d'une église où ils assistèrent pieusement (et sincèrement, peut-être) à l'office, je n'ai pu m'empêcher de penser que ces êtres dont la haine des sémites et des Juifs en particulier dépassait tous les entendements venaient de passer toute une matinée à prier un Juif (Jésus), une Juive (Marie) et tous les apôtres (des Juifs). Alors j'ai cru et je crois encore avoir compris. Jésus ce rabbin juif a créé (sans le savoir ni le vouloir, certainement) la notion de sacrifice expiatoire pour une Humanité entière dont la condition intrinsèque tend à chaque instant au doute et à l'abandon. Il s'est sacrifié, a-t-il dit, pour expier et racheter les fautes et péchés du monde. Ainsi un Juif s'est donné cette mission et l'a assumée jusqu'à son terme. Pour simplifier et faire court car le blog ne se prête pas à ce genre : ainsi, chaque fois que nous douterons et penserons que nous devons expier et racheter nos fautes et nos péchés (fautes et péchés nommés et codifiés par les Juifs eux-mêmes, cf le Décalogue entre autres), nous sacrifierons un Juif comme Jésus lui-même nous l'a montré par son exemple. Aucun peuple, a fortiori un peuple aussi petit par son nombre, aussi démuni, dispersé, désuni, n'aurait survécu à 2000 ans de persécutions et de désirs d'anéantissement par de nombreux autres peuples qui toujours lui furent supérieurs tant en nombre qu'en puissance guerrière si ces derniers n'avaient aussi à coeur de le préserver par devers. Car la puissance et l'hégémonie du christianisme s'imposant à une grande partie du monde, comment alors perpétuer le symbole vivant (et donc cette puissance et cette hégémonie) sur lequel il s'est édifié, c'est-à-dire le sacrifice volontaire d'un homme (un Juif en l'occurrence) en expiation et rédemption d'une condition humaine universelle, s'il n'y a plus de Juifs pour servir à itérer et réitérer et ainsi de suite jusqu'à aujourd'hui encore ce rituel fondateur et salvateur ? On détruit (le sacrifice, l'expiation, le pardon, la rédemption) d'un côté mais on protège de l'autre pour pouvoir continuer à détruire et sacrifier, etc. On ne peut qu'aimer et protéger le Juif car sans lui (et c'est un Juif lui-même qui l'a dit jusque sur la croix) on ne peut être pardonné ni sauvé car on ne trouverait (du fait de leur disparition due à tous ces sacrifices-persécutions) plus de Juif qui irait à chaque fois sur la croix, étant donné que nos fautes et nos péchés nous sont intrinsèques et de ce fait demeurent tant que demeure l'homme. "Buvez, ceci est mon sang", "Mangez, ceci est ma chair", en effacement de vos péchés et de vos fautes et en rédemption éternelle. Mais c'est le sang et la chair d'un Juif, un rabbin même, un docteur de la Loi, Jésus ! On tue l'autre pour se sauver soi-même et puisque l'autre a été Juif et s'est proposé lui-même à cette mort pour nous sauver, alors aimons-le et tuons-le... Le salut vient des Juifs, dit-on ; oui, à condition qu'ils meurent. Chaque fois qu'un homme s'en prend à un homme uniquement parce qu'il le sait Juif, c'est la logique chrétienne qui est toute entière inscrite dans cet acte. C'est aux Institutions chrétiennes, à travers leurs personnes physiques comme leurs liturgies, à dénouer ce terrible noeud qu'elles ont contribué entièrement, au fil des siècles, à créer dans l'inconscient collectif des peuples. Nulle part dans le monde sauf dans les contrées christianisées au fil de ces siècles, on ne trouve trace de ces persécutions anti-juifs telles qu'elles ont eu lieu, constantes, systématisées et générales et in fine du seul fait que ces personnes étaient juives. La "question juive" telle que l'ont soulevée longtemps les glosateurs et quelques philosophes et que reprend par moment TL dans son livre n'a son explication nulle part ailleurs qu'entre le Golgotha et le chemin de Damas.
Aïssa.
Rédigé par : Aïssa Lacheb-Boukachache | 18 mai 2008 à 03:58
"Tout est pur pour celui qui est pur"
Rédigé par : panoptique | 18 février 2008 à 12:46
@Laurent Dingli
«Ce fut encore le cas hier. Sauf lorsqu’il a rappelé que la volonté d’assimilation des Juifs par les révolutionnaires de 1789 répondait avant tout au désir d’éliminer le judaïsme en tant que spécificité religieuse et non pas au nom de je ne sais quel respect de la différence. »
Votre remarque me rappelle l'un des ouvrages de Pearl Sydenstricher Buck, femme de lettres américaine prix Nobel de littérature, et ouvrage qui remplaça comme livre de chevet à lire et à relire, «Le journal d'Anne Franck» lequel m'avait beaucoup impressionnée, et même marquée, étant petite, en particulier parce que ayant à l'époque un peu plus de la moitié de l'âge de l'héroïne, je me demandais si son aventure pouvait arriver à toutes les petites filles, et que liée à certains épisodes de l'histoire de ma propre famille et probablement aussi au fait que l'un de mes noms de baptême est 'Anne', il me reliait directement par là aux phénomènes de persécution religieuse, ce livre avait été à l'origine, je pense, de quelques cauchemars dont je me souviens encore.
Or, «Pivoine», le roman de Pearl Buck et ma fleur préférée, raconte l'histoire d'une dénommée Pivoine, en fait esclave dans une famille juive qui l'avait achetée dans la Chine d'avant Mao et qui aime David, le fils de ses maîtres. La mère de David ayant d'autres ambitions pour son fils, je suis donc sortie du destin insoutenable de la jeune juive pour passer au destin pathétique - mais que la nature fictionnelle du texte permet de sublimer- de la jeune esclave chinoise qui n'a jamais pu s'appartenir que grâce à son douloureux sacrifice perpétuel, puisqu'elle sera également au service de la jeune épouse de David.
Comprendre que les persécutions et l'intolérance sont comme la Justice pour Pascal, possibles en deçà absentes au-delà, donc relatives, puisque les juifs, non prosélytes, n' ont pas été l'objet, comme l'ont été en revanche les missionnaires - et tout bien considéré pour les mêmes motifs qu'au Japon d'ailleurs, à savoir des motifs éminemment politiques- , de l'attention des autorités chinoises, et aussi qu'on pouvait à la fois respecter une tradition et s'insérer dans un tissu culturel autre, avait également été très salutaire, tout comme l'attitude de Pivoine devant des traditions qui n'appartenaient pas à sa culture d'origine et n'étaient donc pas celles du voisin de l'autre côté de la rue, mais étaient devenues siennes et par l'éducation du fait qu'elle avait été achetée très jeune et que si je me souviens bien ça avait dû lui valoir notamment des pieds libres de toute entrave à défaut du reste, et par l'amour.
C'est à peu près à cette époque qu'on m'a offert un jardin sec japonais en miniature...
Rédigé par : Catherine JACOB | 16 février 2008 à 10:02
Note (1). Madame Wieviorka écrivait elle-même en 1994 dans un article qui reste d’actualité : « Enfin, la mémoire procède aujourd'hui largement par identification avec les victimes prises individuellement. L'idée de nommer les victimes a été présente dès l'après-guerre. Les livres du souvenir, dont nous avons parlé, contiennent des listes des morts de la ville ou du shtetl. Yad Vashem s'était assigné la tâche de rassembler les noms. En France, la publication des listes de déportés par Serge Klarsfeld constitua un véritable choc. Aujourd'hui ces noms sont lus publiquement, en Israël comme en France, le jour de Yom Ha-Shoah, qui est en train de s'acclimater en France.
« L'identification individuelle à une victime de la Shoah est poussée à son point extrême au mémorial de Washington où chaque visiteur est muni d'une carte portant l'identité réelle d'un enfant pendant la Shoah et suit son parcours. Si cette identification aux victimes, de plus en plus poussée, de plus en plus extrême, paraît caractériser la relation des nouvelles générations à la Shoah, on peut légitimement se demander si ce phénomène transnational est un phénomène transitoire, marquant l'acmé de la mémoire avant le passage inexorable à l'histoire, ou s'il est destiné à créer une forme inédite de mémoire, qui ne connaîtrait pas l'oubli » (Nicolas Weill, Annette Wieviorka, La construction de la mémoire de la Shoah: les cas français et israélien in Les cahiers de la Shoah n° 1, 1994. ISSN 1262-0386 © Les Éditions Liana Levi, 1994).
Rédigé par : Laurent Dingli | 15 février 2008 à 19:29
J’ai regardé avec beaucoup d’attention la très bonne émission de Frédéric Taddéï dont Maître Thierry Lévy était l’un des invités. Je le connais trop mal pour me permettre de le juger. Je constate seulement que, chaque fois qu’il intervient à la télévision, je suis en désaccord avec lui. Ce fut encore le cas hier. Sauf lorsqu’il a rappelé que la volonté d’assimilation des Juifs par les révolutionnaires de 1789 répondait avant tout au désir d’éliminer le judaïsme en tant que spécificité religieuse et non pas au nom de je ne sais quel respect de la différence. Il a cité Mirabeau, il aurait pu tout aussi bien se référer à l’abbé Grégoire et même à Voltaire. Je comprends par ailleurs sa volonté de ne pas être identifié, répertorié, catalogué, sur le seul fondement de son patronyme. Ce rétrécissement identitaire, cette image que l’autre projette sur vous en fonction d’une série de clichés accolés à votre origine religieuse ou ethnique, sont en effet insupportables. Le débat sur l’identité nationale était par ailleurs très intéressant. La récente déclaration du président de la République à propos de la mémoire et de l’enseignement a été évoquée. Je constate qu’elle suscite un levée de boucliers et de réactions indignées comme à chaque fois, ou presque, que Nicolas Sarkozy prend une décision. Faut-il personnaliser l’enseignement de la Shoah par la voie du « parrainage » des enfants juifs déportés ? On agite l’épouvantail communautaire, on nous menace de conflits, on lève la bannière de la sacro-sainte Loi de 1905 - que nos dévots sortent régulièrement du reliquaire laïc pour s‘affranchir de penser. Et puis il y l’argument « historique », c‘est-à-dire l‘éternelle opposition entre mémoire et histoire. Ce matin encore, interrogée par David Abiker sur France Info, Annette Wieviorka mêlait sa voix d’historienne, spécialiste de la Shoah, à ce concert de réprobations, sous prétexte que l’Histoire ne devait être qu’une affaire d’historiens, ce qu’elle ne fut jamais.
Les enfants de CM1 sont-ils trop jeunes pour s’identifier à ceux de leur âge qui furent déportés dans des camps, sous l’impulsion même de l‘Etat français ? Je ne le pense pas ; j’estime par ailleurs que l’identification est un très bon moyen d’enseigner la « catastrophe » (1). Je sais bien que les enseignants n’ont pas attendu l’actuel président de la République pour faire connaître cette période (à des élèves plus âgés, il est vrai, et d‘une toute autre manière). Pour ma part, je n’oublierai jamais la visite que j’ai faite du camp d’Auschwitz-Birkenau, à quatorze ans, avec mon professeur d’Histoire du lycée Janson de Sailly (que je salue au passage). Tout cela existe donc, et depuis longtemps, mais, je le répète, le projet éducatif en question ne constitue pas, selon moi, un danger de crispation communautaire, comme l‘affirme, entre autres, Pascal Bruckner ; interrogé par le Figaro, ce dernier mélange allègrement la mémoire de la Shoah et la lutte qu’il faudrait engager, selon lui, contre les présidents Kadhafi et Bouteflika…. Plutôt qu’instrumentaliser la tragédie d‘hier, dit-il en substance, luttons contre celles d‘aujourd‘hui.
L’identification est la voie royale de la compréhension et du respect de l’autre, pour ne pas dire la seule. Cinq ou six millions de Juifs ? On ne perçoit pas la monstruosité du génocide, si l’on ne met pas un nom, si l’on n’imagine pas une vie derrière ces victimes, de même que la souffrance et la mort d’un million et demi de Poilus peuvent facilement devenir une entité abstraite. Je ne voudrais pas développer ici la question de l’identification. C’est un processus psychique qui n’est pas donné à tout le monde. Certains ne pourront jamais s’identifier ni à un déporté ni à qui que ce soit ; d’autres s’assimileront de manière excessive à une victime, exutoire de leur propre névrose ou simple projection de leur psychose ; d’autres, enfin, auront besoin d’images là où leur sensibilité et leur imagination leur feront défaut… ceux-là, il faudra toujours leur mettre le doigt dans le sang. L’identification me paraît donc nécessaire, même à cet âge. Je considère seulement qu’il faudrait élargir l’idée, et ne pas la limiter à la Shoah. Les enfants des villages malgaches, assassinés avec leurs parents par l’armée française en 1947, font aussi partie de notre histoire (je ne compare évidemment pas les massacres coloniaux avec le génocide nazi). Il ne s’agit pas de personnaliser chaque victime ; il ne s’agit pas non plus d’élaborer une école victimaire qui égrènerait sans fin la liste de nos crimes et de nos fautes, prétendues ou réelles. C’est au contraire un véritable cours d’humanisme qu’il faudrait délivrer aux enfants, un cours positif pendant lequel on leur enseignerait le respect de la diversité et du vivant sous toutes ses formes. C’est à cet âge qu’on apprend le mieux, que l’on peut se rendre le plus disponible, parce qu’on n’est pas encore accaparé par les affres de l’adolescence (cela ne veut pas dire que l‘on n’apprend pas après douze ans, ce dont j’ai pu faire l’expérience, comme je l’ai dit, en visitant Auschwitz). Bref ! Il ne s’agit pas de singulariser ou d’opposer les mémoires, de rompre l’unité républicaine comme le redoutent certains observateurs souvent hostiles d’avance à tout ce que dira ou fera le président de la République. Lorsque je regarde le film « Au revoir les enfants » de Louis Malle, je ne me dis pas : et les esclaves noirs ? Je ne me dis pas : et les Arméniens, les Rwandais, les Tibétains ? De même que, lorsque j’étais enfant et que je regardais la fiction Roots - Racines, je ne me demandais pas : et les juifs ? Non, je fus seulement ému par les victimes, par l’humanité que ces histoires filmées, que ces excellentes fictions leur restituaient. Je ne veux pas à présent ouvrir un autre débat, celui de la pertinence de la fiction comme vecteur de mémoire. Vaut-il mieux projeter le chef d’œuvre de Louis Malle que de parrainer un enfant déporté ? Je n’en sais rien. Etudions donc la question, réfléchissons aux avantages et aux inconvénients d’un tel projet, prenons le temps, pour une fois, de réfléchir avant d’applaudir ou de condamner. Mais ne nous trompons pas de débat. Ce à quoi nous assistons aujourd’hui, ce n’est pas au combat, très improbable, entre la liberté d’enseigner et le venin de la propagande politique, ce n’est pas à la lutte entre le chevalier blanc de la morale laïque et républicaine et le vilain diffuseur de peste mémorielle et communautariste - ce à quoi nous assistons c’est à l’opposition, au rapport de force entre deux visions subjectives, parfois historicistes - celle des Gardiens du Temple scolaire et celle du Pouvoir, deux visions par définition engagées et partielles.
Rédigé par : Laurent Dingli | 15 février 2008 à 19:28
Je quitte à l'instant maître Lévy qui vient de m'accompagner avec Alain de Benoist et quelques autres sur mon canapé pendant "Ce soir ou jamais" .
Et bof, désolé d'être en contradiction avec vous, mais je ne l'ai pas trouvé brillantissime, je ne parle pas du point de vue, avec lequel je ne peux être qu'en désaccord, ce n'est pas un critère, mais des idées et de l'éloquence. C'est une intelligence opaque et confuse avec une gueule, ce qui fait passer quelqu'un pour brillant parce qu'énigmatique ou alors il était grippé ce soir.
J'ai trouvé le banquier essayiste et le jeune homme fondateur de l'observatoire des communautés autrement profonds, instruits et éloquents.
Maître Lévy n'a aucun reconnaissance pour l'affranchissement des juifs par Napoléon et là, je l'approuve par contre, il n'a pas à remercier pour être libre et vivant, c'est au-delà d'un droit, un statut d'être humain social.
C'est amusant dès que l'on parle d'identité française, il ne faut que cette identité soit trop ancienne dans ce type de débat, car à part de Benoist, il n'y avait comme toujours pour traiter ce sujet délicat que des français juifs et des français arabes qui n'ont parlé que de juifs et d'arabes... les autres n'existent pas dans notre nation et encore et toujours la conflit israélo-palestinien et la Shoah. Mais il paraît à les entendre que tout va bien sauf qu'ils sont victimes et discriminés. On se demande en regardant de façon impartiale qui l'est vraiment de nos jours ?
Rédigé par : Ludovic Lefebvre | 15 février 2008 à 01:15
@ F.
" Il y a d'autres lieux qu'un prétoire pour soigner ses névroses ou ses angoisses métaphysiques..."
Parce que vous pensez sérieusement que c'est soigner sa névrose ou calmer son angoisse métaphysique que de maîtriser et de surmonter sa colère, sa déception et son découragement en n'abandonnant pas celui en qui on a cru.
C'est pour moi savoir rester à la hauteur de la situation.
Je fais allusion ici à Maître Lévy et à son client, Patrick H.
@ Cactus
Un de mes classiques préférés. Extrait de La prière, Francis Jammes:
" Par les gosses battus, par l'ivrogne qui rentre
Par l'âne qui reçoit des coups de pied au ventre
Et par l'humiliation de l'innocent châtié
Par la vierge vendue qu'on a déshabillée
Par le fils dont la mère a été insultée
Je vous salue, Marie.
Par la vieille qui, trébuchant sous trop de poids
S'écrie: " Mon Dieu ! " par le malheureux dont les bras
Ne purent s'appuyer sur une amour humaine
Comme la Croix du Fils sur Simon de Cyrène
Par le cheval tombé sous le chariot qu'il traîne
Je vous salue, Marie.
Par les quatre horizons qui crucifient le monde
Par tous ceux dont la chair se déchire ou succombe
Par ceux qui sont sans pieds, par ceux qui sont sans mains
Par le malade que l'on opère et qui geint
Et par le juste mis au rang des assassins
Je vous salue, Marie."
@ Le petit poucet
"Or, donc comme le savez jeune fille"
Euh... jeune fille, c'est très vite dit...
Rédigé par : Véronique | 14 février 2008 à 08:09
"@ Marcel
Ah pardon !
Je vais finir par croire que je suis à peu près la seule dans ce blog à lire des classiques." nous récite Dame Véronique !
"non non Véronique , z'êtes pas toute seule !"
la preuve là , à citer _juste pour vous_ Le Grand Jacques ( je n'ai pas dit Jack :-)
( sinon LES TEMPS SONT DIFFICILES nous chantait Léo Déferré il y a d'illustres lustres même pas poussiéreux aujourd'hui encore- je l'ai wizzzé en mon nu-air-elle au fait )
Continuez votre "combat" , je suis sincère , Véronique , en notre pays où tant de moutons de fuir la guerre des boutons ( et vice versa ) et de se complaire en un consensus mou ;
( je sais je sais que Charles de Gaulle , bien avant Astérix , avait parlé d'une France dévote avec ses veaux doux ! )
Vous êtes un peu notre Jeanne d'Arc à nous ici hoooo ; alors soyez rassurée , je ne brûle jamais qui j'ai adorée - voir Carla , autre fil pas doux ! - je continuerai donc à vous élire et pas qu'entre les lignes !
Rédigé par : Cactus un peu Jeff , rebondissant tendrement sur Véronique | 13 février 2008 à 20:04
Que dirait-on d'un procureur qui avouerait : "Moi mes plus belles affaires, c'est quand j'arrive à faire condamner à une lourde peine un accusé dont je sais l'innocence." ?
C'est à peu près ça dont se vantent mais en sens inverse certains avocats sans que ça choque grand-monde.
Si ce n'est pas un mépris de la justice, qu'est-ce ?
Thierry Lévy est de ceux-la et se permet de sortir des énormités régulièrement sans que ça ternisse sa réputation de "grand avocat à la haute stature intellectuelle".
Pour moi,Thierry Lévy est plutôt à la justice ce que Knock était à la médecine: Knock aussi avait de l'éloquence !
Aucune indulgence pour ce sinistre histrion !
Il y a d'autres lieux qu'un prétoire pour soigner ses névroses ou ses angoisses métaphysiques...
Rédigé par : F. | 13 février 2008 à 10:40
@Cactus pater austère un peu groupe hi
"qualis pater, talis filius",
Si, vous me permettez, cela ça vaut surtout pour les petits fêtards, veinards heuh têtards, ces bébés de la grenouille ou encore du crapaud, qu'une fée carabosse a transformé en petits poisons!
http://www.jardinoise.com/pages/page6d.asp
@Véronique
"Je vais finir par croire que je suis à peu près la seule dans ce blog à lire des classiques."
Et, sans doute, croyez-vous avoir ancré vos rêves dans le monde par les grattements d'une plume de rappel !!
Or, donc comme le savez jeune fille, "Le premier titre auquel pensait Jean-Paul Sartre était Jean sans terre, qu'il fallait comprendre selon Jean-Bertrand Pontalis comme Jean sans père"
Rédigé par : Le petit poucet | 13 février 2008 à 08:38
Je ne connais pas l'homme et n'ai pas envie de le rencontrer (non pas comme l'homme qu'il est ; tout simplement parce que je me souhaite de n'avoir jamais besoin des services d'un avocat, vu que dans des cas comme ceux-là, les ennuis ne sont jamais très loin)
Rédigé par : Thierry L | 13 février 2008 à 01:22
@ Marcel
Ah pardon !
Je vais finir par croire que je suis à peu près la seule dans ce blog à lire des classiques.
Conclusion de Philippe :
"Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que ne vaut pas n'importe qui. Un Maître !"
Dernière phrase de... Jean-Paul Sartre dans "Les Mots" - excusez du peu - :
"Si je range l'impossible Salut au magasin des accessoires, que reste-t-il ? Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n'importe qui."
Mon allusion à l'anti-héros sartrien c'était pour dire à Philippe que j'avais saisi l'emprunt.
"Défendre l'innocence de quelqu'un que je sais coupable".
Oui, Marcel.
Je pense qu'un grand avocat est celui qui parvient à mettre à jour la part d'innocence et d'humanité de celui qu'il sait coupable.
A Philippe de confirmer ou d'infirmer mon estimation. Mais je pense que ceux que Philippe a en face de lui dans son tribunal sont plus souvent coupables qu'innocents.
Alors dans ces cas de figure plutôt fréquents, le rôle de l’avocat est de dire ce qui doit être sauvegardé. C’est ce que la justice appelle des circonstances atténuantes. Autrement dit, même à l’état infime et de poussières, une certaine forme d’innocence.
Rédigé par : Véronique | 12 février 2008 à 21:37
"la certitude d'une imprévisibilité, d'une authenticité et d'une singularité. Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que ne vaut pas n'importe qui. Un Maître !"
vous parlez de vous là, en fait, en maître blog'heure ! De façon déguisée, certes, car vous êtes modeste, en plus : c'est pour cela que je vous vouvoie ainsi..... pour ça aussi ! !
Sinon :
"Freud appelle cela ‘tuer le père’ !
Rédigé par: Catherine JACOB | le 10 février 2008 à 18:00 "
n'oubliez pas, Catherine J. : "qualis pater , talis filius", non ?
Sissi souvent !
Rédigé par : Cactus pater austère un peu groupe hi | 12 février 2008 à 18:19
"Vous interprétez ce désir de défendre le faux innocent comme le sentiment obscur qu'il n'y a d'innocents nulle part, que nous sommes tous des coupables".
Oui, je comprends et j'admets que nous sommes tous ou presque "capables" d'être des coupables. Humilité inscrite dans l'homme habitant un monde déchu ou vision pessimiste d'un homme marqué par la vie ?
Cette croyance doit-elle cependant conduire à faire innocenter le coupable - injustice majeure à mon sens - et donc à charger la victime de tous les péchés du monde ?
Si je pense que nous serions capables, dans certaines conditions, d'être coupables, je ne suis pas convaincu que nous accepterions d'être des victimes flouées par la Justice.
Le drame de Saint-Nazaire qui vient juste d'être jugé donne à réfléchir dans ce sens.
Rédigé par : mike | 12 février 2008 à 15:53
"Pour l'avoir fréquenté professionnellement, je peux vous dire que l'homme n'est pas toujours, hélas, à la hauteur du portrait que vous dressez."
L'adverbe, ici, est rassurant...
Enfin... voire, dit Panurge.
Rédigé par : sbriglia | 12 février 2008 à 14:12
Pour Véronique, « Maître Lévy [serait] l’anti-héros ténébreux, glacé et révolté à vie... à la Jean-Paul Sartre ». La comparaison n'est pas nécessairement flatteuse. Un révolté à vie de la trempe de ceux qui traitent de chiens ceux à qui l'histoire à donné raison (oui, le communisme est une idéologie génocidaire, en tout cas dans ses incarnations connues du temps de Sartre) ? Un révolté qui accepte, sans mot dire, de récupérer la chaire d'un exclu des lois antisémites du régime de « l'Etat français » ? Un anti-héros pourtant présenté comme héros et modèle ?
Et, par ailleurs « Défendre l'innocence de quelqu'un que je sais coupable » serait « l'une des définitions les plus justes du métier d'avocat » ? Moi, benêt que je suis, j'aurais imaginé que la définition idéale puisse être « Défendre l'innocence de quelqu'un que je sais innocent ». Mais une telle idée est bien trop simpliste, j'en conviens. Mieux vaut un violeur ou un assassin qui erre libre, qui peut sourire à la face de ses victimes ou de leurs proches, qu'un simple innocent défendu dans ses droits de partie civile face à un oppresseur.
Rédigé par : Marcel Patoulatchi (pas l'autre Marcel) | 12 février 2008 à 11:41
Nous sommes tous coupables, donc innocents, tant l'existence est dure à endosser. Mais la contrition existe, en bien et en mal. J'aurais aimé à cet effet qu'on parle de responsabilité car nous sommes aussi responsables de l'autre, le Renard et celui qui veut l'apprivoiser.Thierry Lévy a voulu le faire pour Patrick Henry. Je plains ce grand Maître car l'éthique hébraïque commande d'être responsable de celui qu'on enseigne. Saint-Exupéry, qui était un homme de bien sans être un saint, écrivait la même pensée.
Rédigé par : francis | 11 février 2008 à 21:37
Curieux panégyrique d'un avocat à l'évidence brillant mais également hautain, désagréable avec de nombreux magistrats et apprécié, disons, modérément, par la majorité de ses confrères. Pour l'avoir fréquenté professionnellement, je peux vous dire que l'homme n'est pas toujours, hélas, à la hauteur du portrait que vous dressez.
Rédigé par : Anne L | 11 février 2008 à 21:18
Je comprends mieux votre ‘éloge assassin’ de Maître Lévy en voyant que le titre de son ouvrage - dont on peut trouver au besoin un résumé à cette adresse : http://culture.revolution.free.fr/en_question/2005-03-11-Thierry_Levy-Eloge_barbarie_judiciaire.html - est : « Eloge de la barbarie judiciaire ».
Du coup je comprends aussi la succession des Lévy unis par le mot « barbarie », dans la chronologie de vos billets, puisque l’ouvrage par lequel le héros du billet précédent s’était fait connaître est en effet : «Barbarie à visage humain» parue chez Grasset en 1977 et qui est réputée avoir créé le phénomène "BHL", cet « enfant naturel d’un couple diabolique, le fascisme et le stalinisme » qui a écrit : « L'Etat totalitaire ce n'est pas la force déchaînée, c'est la vérité enchaînée. » est donc paru pour sa part en 04/2006 et chez Odile Jacob.
Vous parliez de plusieurs ouvrages, j’ai trouvé en effet, sur le modèle de ‘Noblesse oblige’, « Lévy oblige » chez Grasset (01/2008), « Convaincre », coécrit avec Jean-Denis Bredin chez Odile Jacob 09/2002, « Justice sans dieu », toujours chez Odile Jacob en 03/2000 et enfin « La Société des femmes » chez Flammarion en janvier 01 sur les douze ouvrages qu’il est réputé avoir publié.
Il semblerait qu’à la différence du jeune avocat général Philippe Bilger qui n’a pas eu à requérir avant l’abolition de la peine de mort, ainsi que vous nous l’avez dit quelque part, je ne me rappelle présentement plus à quel endroit exactement, Maître Thierry Lévy ait « vu tomber une tête. Il avait 27 ans, c'était en novembre 1972, et celui sur lequel la guillotine s'est abattue était l'un de ses tout premiers clients, Claude Buffet. L'avocat de son complice Roger Bontems, dans le double meurtre d'un gardien et d'une infirmière à la prison de Clairvaux, s'appelait Robert Badinter. » écrit le Monde en publiant un cliché de bel hidalgo ombrageux, en retrait, dardant vers l’objectif cet œil noir, miroir de l’indicible où, toute sémiologie de l’art mise à part, se reconnaissent les gens qui ont ‘vu quelquefois ce que l’homme a cru voir, vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très antiques’…
De l’article du monde, je retiendrai ceci qui me parle :
« Ce qu'il défend dans sa vie, ce droit à ne pas être réduit à une seule identité - "Identité, c'est un mot pour la police" »
Cela me parle parce que je défends moi aussi depuis toujours le droit d’être celui ou celle qui se tient purement et simplement là, dans la présence, avant d’être ce nom qui s’inscrira sur une éventuelle liste et par lequel commencera la mainmise d’autrui sur mon existence.
1. De ce fait, j’ai fait choix de ne pas commencer par apprendre à mes élèves à dire : « Bonjour, je m’appelle … / et toi (vous) quel est ton (votre) nom?»? mais à mettre un sourire dans le regard pour dire : « Il fait beau. » ou encore « Il pleut.», ou encore « Comme c’est amusant!», à savoir un registre d’énoncés qui me situe et l’autre dans l’immédiateté et la spontanéité du moment qui peut-être ne se répétera pas et dont, peut-être, ou peut-être pas, on gardera dans la mémoire juste une impression, plus profonde qu’un nom à oublier… , qui nous situe à jamais, toute psychologie hasardeuse du souvenir reconstruit mise à part, dans ce qu’il est convenu d’appeler la présence.
Le nom, qui vient en son temps, c’est autre chose. D’ailleurs, il peut, et pas seulement depuis une phonétique étrangère, poser des problèmes de prononciation, donc de restitution etc.… Enfin, avoir établi un premier pont par la mise en commun du vécu du moment, présente également l’avantage d’ouvrir l’écoute pour des choses plus difficiles, comme peut l’être ne serait-ce que la prononciation impossible depuis la phonétique du japonais - qui rendra donc nécessairement l’écoute et la restitution tout aussi impossible – du simple nom de notre hôte qui, aussi court soit-il, comporte cependant deux tiers de sons imprononçables et indistinguables l’un de l’autre, pour une seule syllabe répétable ; mais quelle syllabe il est vrai, puisqu’il s’agit d’un homonyme en japonais de ce concept qu’est « Le beau » : BI. Le ‘L’ en effet n’existe pas, et le son réclamé par une prononciation française de l’initiale de la syllabe « GER », à savoir un « J » non plus. Donc on ne saurait entendre puis restituer qu’un gloubiboulga de sonorités où une chatte ne retrouverait pas ses petits !
Le choix de ne pas commencer par apprendre par se présenter, vient également de ce que les relations interpersonnelles sont aussi compliquées que les deux tiers du nom de notre hôte sont un véritable défi à la langue, japonaise s'entend. C’est donc là un phénomène auquel on ne peut s’accoutumer que progressivement. Apprendre à se situer dans un contexte qui prend en compte un nombre considérable de paramètres qui incluent notamment la place respective de chacun dans le tissu social, en tant que on se situe toujours nécessairement à l’extérieur ou à l’intérieur d’un ensemble donné (celui constitué par ‘les japonais’ ou les ‘non japonais’, ou ‘la même famille’, ou ‘la même école’, ou ‘la même entreprise’, ou ‘la même université’, ou ‘la même entreprise mais pas la même place dans l’entreprise’, ou ‘la même famille mais pas la même place dans la famille’ etc.… ,) et toutes distinctions qui prévalent sur une distinction de sexe ou de nombre, surtout pour des Français, et surtout pour les français actuels d’ailleurs, c’est très, très, très, très, très compliqué. Donc, d’habitude on se contente de leur faire apprendre des formules réputées passe-partout, mais qui dès qu’elles sont utilisées mal à propos les font passer pour des beubeu ou encore goujats, mais aussi ce que de toute façon ils sont la plupart du temps, donc c’est pas grave.
En revanche, l’expression spontanée des impressions, notamment du sentiment de la nature, efface toutes ces distinctions et ouvre sur un espace hors contexte social et surtout non discursif, vers ce que les Japonais qui sont d’incurables romantiques même quand ils ont l’air d’être des ‘fourmis’, adorent positivement comme étant réputé ‘très japonais’.
2. De ce fait également, lorsque je n’ai pas à devoir éventuellement justifier de la possession d’un véhicule et de l’habilitation à sa conduite, je suis la plupart du temps sans papiers d’identité. Ce que par ailleurs, la loi me permet, mais ce qui n’est pas toujours très évident. Par exemple, l’autre jour, mon animal m’ayant devancée dans mes projets d’aller le promener, je suis sortie précipitamment dans la campagne vêtue d'une vieille robe de chambre élimée, les jambes nues, le cheveu en bataille. Lorsque je suis revenue, les joues et les jambes rosies par le froid vif et la chevelure échevelée de Méduse, ma sœur a fait observer d’un œil réprobateur : « Si les gendarmes avaient rencontré l’une des mes patientes dans la tenue dans laquelle tu as osé sortir, ils l’auraient jugée en errance et reconduite à l’hôpital sur-le-champ. » !
« Kû-soku-zé-Shiki : Le Ciel est un autre nom pour les couleurs...»
Rédigé par : Catherine JACOB | 11 février 2008 à 18:04
Comme Pierre-Antoine, j'attends un billet de l'Avocat général Bilger sur la justice et l'affaire Société générale - Kierviel.
Cela dit, le billet sur Maître Thierry Lévy est très intéressant. Pour le comprendre, j'ai du consulter le récent article de presse cité par l'Avocat général.
Il est certain que Maître Thierry Lévy est une personne qui, par ses prises de position, stimule toujours la réflexion. Il a souvent critiqué la tendance actuelle de la justice à ne plus raisonner qu'en termes d'intérêts de la victime. Le fait que l'Avocat général Bilger consacre un billet élogieux à cet avocat qui parfois a été son adversaire, est la preuve de l'honnêteté intellectuelle du magistrat.
Les avocats pénalistes inscrits au barreau depuis de nombreuses années, sont souvent de brillants intellectuels.
Rédigé par : LABOCA | 11 février 2008 à 13:56
"Défendre l'innocence de quelqu'un que je sais coupable"
Voilà à mon avis l'une des définitions les plus justes du métier d'avocat.
C'est vrai que Thierry Lévy illustre le grand avocat tel qu'on l'imagine dans la littérature et tel qu'on voudrait qu'il soit et qu'il parle dans la réalité.
L'Innocence, la Culpabilité, le Bien le Mal, le Juste et l'Injuste. La condition humaine accusée et défendue en même temps. Ce que peut être un grand procès d'assises.
Pour ma part, je retiens de Thierry Lévy l'avocat inlassable, fidèle et constant de P. Henry, celui qui a dit qu'on ne peut pas, sans dégâts à venir, faire d'un libéré conditionnellement le symbole de la réinsertion. Que la charge et la responsabilité du symbole étaient trop lourdes.
Mais je pense que parfois, pour une bonne justice, il vaut mieux des pragmatiques à la Dupont-Moretti. Vous savez celui qui a dit que le doute doit profiter à l'accusé. Même si celui-ci est trop pauvre, trop laid, trop bête et que de surcroît, il couche avec sa belle-sœur.
C’est un genre de pragmatisme que je pense plus efficace que les vérités vraies exprimées par Maître Lévy.
Patrick Henri libéré. Je pense qu’un ours rugueux à la Dupont-Moretti, à qui faut pas trop en raconter, aurait été plus enrobant et plus sécurisant pour PH que Maître Lévy, l’anti-héros ténébreux, glacé et révolté à vie... à la Jean-Paul Sartre :
" ...Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que ne vaut pas n'importe qui. Un Maître ! ".
Rédigé par : Véronique | 11 février 2008 à 11:48
Surprenant éloge en effet... Alors que l'actualité est si riche d'occasions d'exercer votre verbe, vous nous emmenez dans une drôle de "séquence nostalgie". Vous savez, ces séquences que l'on sort et ressort à la télévision quand on n'a plus d'idée pour faire du neuf…
Drôle non pas au sens comique du terme, mais au sens de singulier et de curieux.
Ce que je sais de vous deux, sans vous connaître personnellement, mais seulement par voie de presse ou de blog, me donne l'image de deux personnes que tout oppose. Professionnellement bien évidemment, vous réclamez des têtes, il les défend. Intellectuellement aussi, son style est plus incisif que le vôtre, mais cela est devant le "Goliath" judiciaire, une nécessité pour la défense des "David".
Chez Lévy le juif laïc, cette histoire biblique a certainement tracé le sillon de son admirable engagement de défenseur. Bien plus que de voir un de ses premiers clients perdre sa tête…
Mais cela n'enlève rien à ma déception de ne pas vous lire sur d'autres sujets que l'actualité judiciaire nous fournit ces jours-ci. Notamment sur l'incarcération jugée "expiatoire" par l'avocate du "trader solitaire", pauvre cow-boy, perdu dans les marécages de la finance.
PS : en voilà une avocate qui a de la trempe, elle aussi. Une trempe inversement proportionnelle à sa notoriété, mais cela va changer, actualité médiatique oblige, elle va se faire une voix de ténor ! Elle ose s'attaquer à deux Goliath en même temps.
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 11 février 2008 à 10:35
Votre billet donne envie de le "connaître", je veux dire sa vie, son oeuvre, ses interventions pénales. Je l'ai "croisé" médiatiquement de temps en temps et il est vrai que l'homme dégage de l'esprit, de la personnalité.
Je comprends la subtilité du "nous sommes tous coupables donc tous innocents", mais nous fonctionnons comment dans la société avec ce paradigme ?
La théorie est belle comme celle de Platon, mais l'application ?
Le pourquoi certainement, mais le comment là-dedans ?
C'est ce qu'il y a de terrible dans les personnalités riches et attachantes, nous avons une furieuse envie de leur donner raison, nous acharnant à trouver des messages cachés, à les mettre dans notre hotte tant elles sont séduisantes. Mais si je trouve Emmanuel Todd extrêmement brillant et sympathique, que je ne peux qu'adorer le charisme et la belle colère de maître Lévy que vous décrivez et qu'il me tarde tant de découvrir, il me faut bien garder à mon détriment la distance, l'opposition nécessaire avec la cohérence de mon point de vue, de celui que je trouve le plus juste (peut-être découvrirais-je un jour qu'il l'est le moins ?). Peut-être un autre jour des événements venant chambouler notre jugement, nos obligations nous mettront-ils côte à côte dans des pensées et des priorités totalement neuves ?
Je suis heureux que son père ait proposé à Céline un espace dans son journal, cela reflète bien un esprit malin et ouvert à la fois que j'apprécie et peut-être a-t-il su déceler au-delà des trois pamphlets virulents celui qui fut le seul à mettre "sa peau sur la table" pour reprendre son expression, le moment de rencontre avec la grande littérature ?
Ha, il reste étonnant ce Céline, génie en étant médecin, déjà un sacré paradoxe. Il nous a apporté une nouveauté en lettres ce qui est rare, la catastrophe fut ces rejetons, tous ces apprentis subversifs qui passèrent leur vie à le rester, n'ayant pas compris depuis le début qu'il ne suffit pas de devenir la voix de son maître pour être, faisant de la provocation un marché facile. Si nous avons eu un troupeau comme Coluche, Nabe, les soixante-huitards, Choron , Gaccio, Moix, Benamou, Ardisson etc c'est bien parce qu'il y eut l'étrange et talentueux Louis-Ferdinand Destouches, encore une coquetterie du réel.
Rédigé par : Ludovic Lefebvre | 11 février 2008 à 09:54
Que la « pandémie victimaire » actuelle puisse être interprétée comme une forme particulière d'assistanat, soit, même si j'ai le sentiment qu'il s'agit plutôt du paroxysme manifeste (et donc forcément abusif) d'un courant pourtant fondamentalement légitime, redonnant une place à la victime/plaignant dans la procédure judiciaire au-delà de la saisine/plainte.
Me semble être une trace plus flagrante de l'assistanat « le sentiment obscur qu'il n'y a d'innocents nulle part, que nous sommes tous coupables ». Si nous sommes tous coupables et si personne n'est innocent, il n'y alors plus de discrimination entre l'assassin, le voleur de pommes, le grossier personnage et le gentilhomme. Que chacun s'en donne à coeur joie, il vaut l'autre.
Rédigé par : Marcel Patoulatchi | 11 février 2008 à 09:04
Je n’ai jamais rien lu, ni entendu, de maître T.Lévy, mais je n’ai jamais rien lu non plus de si étrange que cet éloge qui consiste à parcourir un jardin embaumant le délicat parfum du jasmin et brillant de tout l’éclat vernissé des feuilles de thé, en sautant de pavé en pavé par-dessus l’étang qui agrémente de sa fraîcheur cet espace singulier.
Quelle renaissance pour celui que vous venez d’immoler sur l’autel de « sa liberté absolue », sur cet autel où « l’exemplarité de la justice se doit de préférer l’acquittement des coupables à celui des innocents», et pour cet «homme fait de tous les hommes, qui vaut n'importe qui et que n'importe qui ne vaut pas. » ???
Freud appelle cela ‘tuer le père’ !
Rédigé par : Catherine JACOB | 10 février 2008 à 18:00
Magnifique portrait de cet avocat hors norme, tel qu'en lui-même l'éternité le change... On pense ici à l'éloge de Stephen Hecquet par Jean-Denis Bredin : il y a de plus mauvaises comparaisons !
...et il est vrai que son arrivée, dans une salle d'audience, renvoie tous les autres à leur petite humanité... Un "monstre", tel un Antonin Artaud... Sous la Révolution, aurait-il été Saint Just ou Marat ?...
Combien la comparaison avec Montebourg est cruelle : mais la comédie judiciaire s'accommode des deux...
On peut rêver d'un Colonna défendu en appel par Lévy sur vos réquisitions : casting, hélas, improbable...
De l'imagination, de l'audace, messieurs les secrétaires, une Berryer Bilger/Lévy. Thème : "Peut-on envoyer en prison pour médiocrité les prostatiques de l'éloquence ?"
Rédigé par : sbriglia | 10 février 2008 à 17:47