Pour une fois, je me trouve d'accord, totalement, avec Eric-Emmanuel Schmitt qui est interviewé avec d'autres par le Journal du Dimanche. Le Salon du livre, dont Israël est l'invité d'honneur cette année, a fait une erreur et l'appel au boycott lancé par plusieurs gouvernements et syndicats arabes en est une autre.
A partir du moment où on fait entrer l'Etat, n'importe lequel même s'il n'est pas neutre en ces moments dramatiques de la vie internationale que celui d'Israël soit en première ligne à Paris, on risque inéluctablement de dénaturer la littérature et les livres. Ceux-ci ont des visages, certes, mais c'est celui de leur auteur. Les voix singulières, "le grain unique de la voix" qu'évoque Schmitt, les paroles nées des tréfonds intimes de chaque homme ou femme qui a eu envie de s'exprimer et de communiquer sa vérité sur le monde, les écritures si dissemblables, torturées ou lisses, classiques ou syncopées ont tous ce superbe point commun de n'appartenir qu'à l'humanité sans frontières quand la tentation peut saisir les organisateurs d'en faire des écrivains enclos dans des pays. C'est un grave malentendu que de prétendre, avec bonne foi mais avec des conséquences infiniment perverses, faire entrer la politique dans la littérature sinon par la porte, du moins par la fenêtre. Israël aujourd'hui invité d'honneur, demain une autre nation aussi admirée que contestée, et ce Salon du livre ne constituera plus qu'une immense vitrine derrière laquelle on verra moins des auteurs que des représentants, moins des stylistes que des symboles, plus des étrangers que des frères. Cette manie, quand on peut faire simple et beau pour favoriser la nudité de l'universel, d'aller mettre en avant de la bureaucratie et des régimes, pour créer d'inévitables dissensions !
J'ai envie de rapprocher la paix rendue possible par le livre, de la violence maîtrisée grâce au livre. Il y a longtemps, aux assises de Bobigny je crois, je me suis trouvé en face d'un accusé, Abdel Hafed Benotman, volubile, intelligent et frondeur. Aucune institution ne résistait à ses critiques enflammées. Même excessives, elles ne laissaient pas indifférent. Ce n'était pas la première fois, et ce ne serait pas la dernière que m'affrontant à des criminels - lui, c'étaient des vols à main armée si je me souviens bien - je songerais au formidable gâchis de talents et de qualités gaspillés pour de mauvaises causes. Comme si la morale et l'honnêteté relevaient moins du bagage personnel que de la direction et du sens qu'on lui assignait. J'ai suivi de loin en loin son parcours. J'ai su qu'il écrivait des livres. Dans Libération, et cela ne m'a pas étonné, des articles enthousiastes lui ont été consacrés. Un malfaiteur qu'on pouvait célébrer dans le registre qui plaît tant à ce quotidien, quelle aubaine ! Un condamné condamnant, en quelque sorte.
Le JDD, sous la signature d'Anne-Laure Barret, effectue une analyse de la personnalité de Benotman en évoquant la parution de son dernier roman, un polar. Je ne suis pas obligé d'adhérer à la vigueur sulfureuse et provocatrice de certains propos de cet auteur. Ainsi Benotman, à mon sens, affirme n'importe quoi au sujet de la rétention de sûreté quand, pour la dénoncer, il souligne : "...Pour convaincre les gens, on prend l'exemple des pédophiles tueurs d'enfants mais on les trompe." Quelle étrange et absurde assertion que celle qui s'abrite derrière l'exemple des "pédophiles tueurs d'enfants" justifiant la rétention de sûreté, pour vitupérer celle-ci ! Que Benotman, ayant longtemps été incarcéré, éprouve de la haine pour des dispositifs répressifs pourtant nécessaires, on peut le comprendre. Mais qu'il ne fasse pas passer les effets de sa subjectivité souffrante et personnelle, son éructation révoltée pour une réflexion décisive et lucide !
Anne-Laure Barret, reprenant la substance de son point de vue, indique que pour Benotman "une société qui élimine au lieu de réinsérer, c'est la négation même de la justice et du sens de la peine." Comme on aimerait tous croire au sexe des anges, nourrir les illusions les plus douces et les plus tendres, se persuader que la nature humaine est toujours perfectible, que la rédemption de tous ceux qui ont perpétré le pire est possible et qu'il n'existe pas dans notre communauté une infime minorité irrécupérable ! Dans ces pensées qu'un humanisme confortable réchauffe, il y a en permanence l'accusation selon laquelle les défenseurs de la loi et de l'ordre éprouveraient de la volupté à mettre en oeuvre des mesures contraignantes alors qu'elles ne résultent que de l'écoute du réel et d'une approche à la fois généreuse et lucide des mille comportements humains. Ce n'est jamais par plaisir que le dur métier de gouverner pour tous s'enracine dans la quotidienneté publique. Quand on ne parvient pas à réinsérer, est-ce éliminer que de maintenir en détention ou en sûreté quand on n'a pas d'autre choix ? Que les idéalistes abstraits cessent de donner des leçons à ceux qui, dans l'action, tentent de faire le mieux possible avec les moyens du bord et les limites de l'humanité !
Mais ce ne sont pas ses erreurs qui m'intéressent chez Benotman. C'est le fait qu'il formule : "Je suis un écrivain qui est devenu voleur et pas l'inverse." Ainsi, le livre crée la paix quand, contrairement au Salon du livre, on lui laisse toute la place sans l'altérer avec des considérations internationales innopportunes. Mais le livre, c'est aussi une chance pour une personnalité dissidente mais de qualité, condamnée hier mais aujourd'hui intégrée, de pouvoir se servir de lui pour ouvrir, s'ouvrir d'autres chemins.
Paix bienfaisante, guerre légitime. A l'extérieur ou à l'intérieur de soi. Vivre livres, c'est l'essentiel !
VIVRE LIVRE® est une marque déposée par ENTRE DEUX !
Pourtant, le Salon du Livre de Toulouse, organisé par le Centre Régional des Lettres Midi-Pyrénées et le Conseil régional Midi-Pyrénées a choisi de s'emparer de cette marque !
Après une première intervention de notre part, le Salon du Livre a choisi l'appellation VIVONS LIVRE !
Nous nous insurgeons contre cette démarche qui fait fi de toute légalité et qui pénalise une entreprise qui a créé cette marque et la fait vivre depuis août 2006 en éditant des cabas illustrés pour les libraires et un recueil de textes de la chanteuse MeLL intitulé QULTURES.
De plus, le slogan que le Centre Régional des Lettres Midi-Pyrénées utilise dans son catalogue, “ La qualité de nos librairies est unique, le prix du livre aussi ! “ est un grossier plagiat d’une accroche qui figure sur nos cabas depuis un an “Le Prix du livre est unique, mon libraire aussi !”.
À l’heure où les petites entreprises se battent dans un marché pour le moins difficile, il est assez étrange que nous soyons spoliés de notre travail et de notre image par un Conseil Régional qui affiche pourtant une politique sociale dite “de gauche”.
Rédigé par : VIVRE LIVRE® | 15 novembre 2008 à 19:54
"comment accepter, lorsqu'on est arabe, de célébrer le 60ème anniversaire d'Israël ?"
Cette phrase peut être considérée comme collector.
Ne pensez-vous pas qu'un homme puisse réfléchir autrement que par son appartenance à une religion ou à une ethnie ?
Rédigé par : Dav | 19 mars 2008 à 01:08
Vive les livres verte, mais à bas le néo colonialisme !
Rédigé par : litim | 18 mars 2008 à 23:34
LE VILLAGE DE L'ALLEMAND
un livre de Boualem Sansal !
écrivain Algérien interdit en Algérie..
que dit ce livre ???
j'ai tout oublié sauf ce mot PAPA PAPA PAPA,
Duval Uzan
Rédigé par : Duval uzan | 12 mars 2008 à 13:42
Le choix d'honorer Israël au Salon du livre l'année du 60ème anniversaire de sa création est une erreur monumentale : les écrivains israéliens méritent bien mieux que d'être assimilés à un événement politique contesté qui les réduit eux-mêmes à n'être que les thuriféraires d'un Etat dont les politiques posent tant de problèmes.
Dany Laférrière, écrivain d'origine haïtienne, vient de publier "Je suis un écrivain japonais" : il revendique ainsi l'universalité du travail de l'écrivain qui n'est pas enfermé dans un culturalisme communautaire. Les écrivains israéliens, comme les autres, ont droit à cette universalité qui seule permet le dialogue par delà les oppositions politiques ou nationalistes.
L'appel au boycott n'est pas satisfaisant mais il s'agit de la seule réponse possible à une instrumentalisation politique : comment accepter, lorsqu'on est arabe, de célébrer le 60ème anniversaire d'Israël ?
L'entrée en prison doit être considérée, avec les moyens et les comportements qui vont avec, comme la conclusion d'un contrat de réinsertion entre le condamné et la société. Dès le premier jour, comme lors de l'entrée dans une entreprise, le détenu doit être présenté, la prison doit lui être présentée, les implications de réinsertion de la détention doivent être immédiatement mises en oeuvre. La détention doit être rentable tant pour le détenu que pour la société.
Le monde carcéral est un monde de barbarie, non que les détenus y soient tous des barbares, mais l'oisiveté et l'inculture induisent des comportements de barbarie : loi du plus fort, compétitions animales de domination, exacerbation des ego. Le livre et l'écrit n'y tiennent pas de place. Il y a des bibliothèques dans les prisons, elle y sont approvisionnées par les quelques détenus qui, lorsqu'ils quittent leur villégiature, font don de leurs livres aux autres. Mais, tandis que la majorité des détenus glandouillent, les bibliothèques sont vides. La presse est exclusivement cantinée, ce qui écarte de celle-ci la majorité des détenus, trop occupés à consacrer leur maigre argent à acheter des savonnettes minuscules hors de prix.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 11 mars 2008 à 10:30
Désormais il ne peut y avoir une quelconque manifestation en France sans qu'on offre en supplément un invité dont on pense qu'il sera le pôle attractif du chaland goguenard.
Le phénomène prolifère même dans le moindre des comices agricoles. Quel intérêt ? Je me le demande d'autant que la plupart de ceux qui payent leur entrée ne va dans ces foires, salons ou autres expositions que dans le but de trouver la solution à leurs recherches ou leur plaisir.
Je doute fort que les visiteurs du futur Salon du livre, du moins ceux qui auront l'intelligence de ne pas le boycotter, n'iront pas pour l'invité d'honneur mais pour y respirer l'odeur du vélin et de l'encre fraîche.
Cela étant, l'Etat d'Israël sera l'heureux gagnant de cette année et il faudra présentement faire avec, comme l'an prochain accepter un nouvel invité. L'ambiguïté est née de la teneur de l'appellation. Le Salon du livre n'est pas une exposition universelle et il eût été préférable de parler d'écrivains israéliens plus que d'Etat d'Israél, d'autant que la majorité des auteurs qui seront présents ne sont pas en adéquation avec la politique de leur pays et militent pour la création d'un Etat Palestinien, la fin d'une occupation illégitime des territoires et l'ouverture de négociations avec le Hamas. En ce sens le refus de participer venant des gouvernements Arabes est une seconde erreur. Et cette accumulation d'erreurs participe à l'entretien des dissensions, de la haine et des hostilités.
Toute littérature comporte ses bas-fonds et ses sommets. Les littératures arabes et juives regorgent d'auteurs immenses et lorsqu'on lit quelques-unes de ces oeuvres on ne peut que souscrire à cette constatation, ils sont bien cousins germains et cette lutte incessante sur le terrain n'est qu'une guerre fratricide.
Mon propos n'est pas d'analyser ici qui a tort ou raison, qui a commencé, qui est le plus grand dans les massacres ou le plus à plaindre dans la souffrance. Ce discours m'exaspère car il exacerbe à l'infini la violence réciproque et tue toute velléité de réconciliation.
Or la littérature peut être porteuse de cet espoir et dans le passé fut une arme plus redoutable que toutes les roquettes d'aujourd'hui. Je lis d'ailleurs dans Le Monde de ce soir que seront présents, au sein de la délégation, deux auteurs arabes israéliens, Sayeb Kashua et Naim Araidi, ce dernier étant aussi un délicieux poète né et vivant en Galilée.
Voici un extrait d'un de ses poèmes, "Nouveau retour au village" (traduit par Marlena Braester)
"Me voici à nouveau de retour
au village
Qui sait convertir.
Si on me demande pourquoi je suis retourné
Je dirai cette fois-ci:
Ce n'est pas à cause de la nostalgie
Ni du refus répété
D'une amante citadine trop exigeante
Cette fois-ci j'ai juré de ne pas dévoiler
Le secret
Merveilleux
Du lait maternel et des pleurs du naissant
Et du paysage fabuleux..."
Voici un autre extrait d'un poème de Mahmoud Darwich , poète palestinien, "Je suis de là-bas" (traduit par Abdellatif Laâbi)
"Je suis de là-bas. Et j'ai des souvenirs. Je suis né comme naissent les gens. J'ai une mère.
Et une maison aux nombreuses fenêtres. J'ai des frères. Des amis. Et une prison avec une froide lucarne.
J'ai une vague dérobée par les mouettes, mon paysage favori, l'herbe folle
Une lune aux confins de la parole, l'obole des oiseaux et un olivier immortel..."
N'y trouve-t-on pas correspondance et même amour ?
Rédigé par : Patrick PIKE | 11 mars 2008 à 00:15
Je ne comprends pas bien cette loi de rétention de sûreté : l'autre jour, au journal de France 2, Rachida Dati explique qu'il faut protéger les Français, je cite : des "tueurs en séries, des violeurs en série et des pédophiles". Mais je ne pense pas que les tueurs en série à qui aucun jury n'a jamais épargné la réclusion à perpétuité soient concernés par une loi qui ne vise que des condamnés à temps. D'un autre côté, l'assassin du RER D à Creil, il y a quelques mois, était certes récidiviste, mais il avait été précédemment condamné à une peine de quatre ans (si ma mémoire est bonne, en tout cas de moins de dix ans) pour un viol commis sous la menace d'une arme. Il n'aurait donc pas pu être concerné, lui non plus, par une loi qui ne vise que ceux qui ont été condamnés à 15 ans et plus. Une loi est censée être d'application générale. Celle-ci n'est-elle pas, en définitive, inapplicable car prise sous le coup d'une émotion due à quelques faits divers spectaculaires, et donc... démagogique ?
Rédigé par : Zorana | 10 mars 2008 à 23:03
Quand on aime les livres on ne va pas au Salon du livre qui est devenu une immense vitrine de la globalisation. On fabrique des auteurs à coups de marketing et les nègres attendent leurs chèques derrière le rideau.
Rédigé par : SR | 10 mars 2008 à 21:30
@ Véronique :
:-)))))))))))
@Laurent Dingli :
""" "un trait très grossier" - il fallait oser l'écrire !""" dites-vous !
pourquoi ? le style est limpide , non ? ( et le "très" .point. caricatural du tout ! )
Rédigé par : Cactus | 10 mars 2008 à 17:34
Dès lors que l’invitation de l’Italie a donné lieu par le passé à l’émotion que l’on sait, il ne pouvait en être autrement concernant Israël, et comme rien n’a été tenté semble-t-il pour faire de cette invitation une contribution à l’apaisement, il est normal qu’elle contribue à l’affrontement. Que les organisateurs en soient surpris relève de la mauvaise foi (ou de la bêtise ?).
Sans doute cette invitation dessert-elle encore plus son projet : nous incite-t-elle à lire les écrivains de langue hébreu ?
Rédigé par : Jean-Marie | 10 mars 2008 à 15:54
"un trait très grossier" - il fallait oser l'écrire !
Rédigé par : Laurent Dingli | 10 mars 2008 à 15:52
Je préfèrerai pour ma part employer le terme de réhabilitation que celui de rédemption. Car le débat sur la Justice ne devrait pas relever de la querelle théologique. Je ne dis pas cela pour écarter l'inspiration religieuse de la réflexion, mais pour éviter les confusions. D'autre part, je redis ce que j'ai écrit il y a quelques mois, nous voyons s’opposer deux conceptions de l'homme ; l’une, en apparence assez optimiste, héritière d’une tradition évangélique, a en quelque sorte laïcisé l’idée de salut. Ce courant privilégie le facteur social, c’est-à-dire environnemental, comme explication du mal et de la « déviance ». C’est, pour simplifier à l‘extrême, la philosophie de la gauche. L’autre courant considère que c’est le défaut de répression, le laxisme dans l’application des règles qui favorise beaucoup, sinon la plupart des crimes. Elle accorde plus volontiers ses faveurs à l’exemplarité de la peine qu’à la prévention. C’est, de manière tout aussi caricaturale, la vision de la droite. Entre ces deux pôles résumés en traits très grossiers, je l‘accorde, il existe évidemment une multitude de positions bien plus complexes et nuancées. Pour autant, les deux références conservent leur valeur de modèle dans notre société. J’ai dit la difficulté qu’avait l’homme à concevoir la possibilité du salut (religieux) ou de la réhabilitation (profane), parce que celles-ci remettaient en cause l’idée de sa maîtrise sur le monde, c’est-à-dire, en réalité, son impuissance face à sa propre mort. Cette hantise, la façon particulière que chacun de nous a de l’affronter, influent sans doute largement sur notre prise de position, autant sinon plus que des considérations purement techniques.
@ Tshok la littérature n’est jamais un jeu pour les vrais écrivains.
Rédigé par : Laurent Dingli | 10 mars 2008 à 12:52
@ tschok
"C'est un message d'espoir assez désespéré : le littéraire qui est en vous semble avoir plus confiance en l'homme que le professionnel que vous êtes."
dites-vous à Philippe Bilger.
PB exprime ainsi la tension - le conflit permanent - présents en lui entre le littéraire et le professionnel qu'il est.
" Et vous terminez votre propos par un constat de rédemption, celui-là même qui est remis en cause par la loi sur la rétention."
Enfin tschok !
Quelle peut être la sérénité intérieure d'un JAP qui prononce une libération conditionnelle alors que les voyants sont au rouge et qu'il ne dispose pas du pouvoir de faire en sorte que le détenu libéré soit encadré et suivi dès sa sortie ?
Pourquoi la question de la rétention n'est-elle jamais posée ainsi ?
Rédigé par : Véronique | 10 mars 2008 à 12:43
@ Cactus
Non, non, je ne me livre pas.
Je veux juste encourager M. Bilger à écrire à Mme Dati pour que les livres donnent de la liberté à ceux qui sont en prison.
Evidemment, il ne faut pas que M. Bilger, dans sa lettre au ministre, commette des fautes d'orthographe. Vous ne serez pas toujours là pour le corriger...
Rédigé par : Véronique | 10 mars 2008 à 11:31
"Dans ces pensées qu'un humanisme confortable réchauffe, il y a en permanence l'accusation selon laquelle les défenseurs de la loi et de l'ordre éprouveraient de la volupté à mettre en oeuvre des mesures contraignantes alors qu'elles ne résultent que de l'écoute du réel et d'une approche à la fois généreuse et lucide des mille comportements humains. Ce n'est jamais par plaisir que le dur métier de gouverner pour tous s'enracine dans la quotidienneté publique. Quand on ne parvient pas à réinsérer, est-ce éliminer que de maintenir en détention ou en sûreté quand on n'a pas d'autre choix"
Bonjour Monsieur Bilger,
Tout va bien dans le meilleur des mondes alors. Aimons notre police et notre justice puisqu'elles ne nous veulent que du bien, que du bonheur (je caricature à peine).
C'est un discours très auto centré que vous tenez. Ceux qui sont en charge de la répression - qu'il faut soigneusement distinguer de l'oppression - n'ont jamais l'impression de faire le mal.
Ils ont même franchement l'impression de faire le bien. C'est même plus qu'une impression: c'est une conviction.
Prenons l'exemple de Papon : avait-il l'impression de faire le mal lorsqu'il a ordonné la répression brutale d'une manifestation indépendantiste à Paris pendant la guerre d'Algérie ?
Je pense que non. Maintenant, on sait qu'il n'a pas réprimé, mais opprimé. Il a franchi la frontière. Et ce n'était pas la première fois : avant les manifestants des Algériens à Paris, il l'avait franchie avec des enfants juifs à Bordeaux.
Vous dites qu'ils ne trouvent jamais de plaisir à la répression. Mais certains d'entre eux y mettent un tel zèle qu'on a des doutes. Et puis il y a aussi la façon de s'y prendre, comme à un jeu sanglant.
Mais c'est finalement la dernière partie de cette citation qui me dérange le plus: trouver dans le fait de ne pas avoir d'autre choix une justification au franchissement d'une frontière de civilisation.
Somme toute c'est classique. Je veux dire banal.
Nécessité fait loi, quoi.
Mais du coup, vous tenez en symétrie le même genre de discours que votre accusé voleur-écrivain ou plus exactement écrivain devenu voleur, poussé par les nécessités de son existence à braver la loi et qui trouve, ensuite, une justification à cela.
Et vous terminez votre propos par un constat de rédemption, celui-là même qui est remis en cause par la loi sur la rétention.
Sauf que vous, vous l'appliquez au livre et pas à la peine.
A vous lire on comprend que la peine n'est plus rédemptrice, mais que la littérature l'est encore.
C'est un message d'espoir assez désespéré : le littéraire qui est en vous semble avoir plus confiance en l'homme que le professionnel que vous êtes.
Mais la littérature est un jeu d'élite. Il y aura donc peu d'élus à cette rédemption-là.
Rédigé par : tschok | 10 mars 2008 à 11:27
"Oui, les livres sont un essentiel."
dites-vous !
ne vous livrez point trop quand même !
(ou alors arrêtons-nous à l'étape une : lecture de message subliminal !!!!!!!!!)
Rédigé par : Cactus classique à Dame Véronique | 10 mars 2008 à 11:16
«Que les idéalistes abstraits cessent de donner des leçons à ceux qui, dans l'action, tentent de faire le mieux possible avec les moyens du bord et les limites de l'humanité !»
Comment peut-on défendre cet écrit qui ne vit que de la force de l'abstrait et du symbole qui seuls parlent aux puissances obscures qui nous agitent un langage qu'elles entendent même si elles y mettent le temps, et dénier à ce point toute réalité au principe ? Ce n'est pas à l'humanité que vous devez assigner des limites, Monsieur l'avocat général, mais à la barbarie!
Pourquoi donc quand on ne peut que vous suivre sur tant de points ne peut-on que s'opposer radicalement à vous sur celui-là?
Si je devais désespérer autant des imbéciles assujettis à l'opinion tel le sourcier à sa baguette de coudrier, que vous de l'homme, je ne serais déjà plus de ce monde, et pourtant j'en connais qui en tiennent une couche aussi épaisse que leur titre est ronflant, croyez-moi !
Rédigé par : Idéaliste abstraite | 10 mars 2008 à 10:36
Je ne suis pas d’accord avec vous et ne crois nullement que les responsables du Salon du livre, dont Israël est l'invité d'honneur cette année, aient fait une quelconque erreur. Peut-être avez-vous lu le petit billet que j’ai écrit samedi dernier sur ce sujet. Pourquoi l’invitation de la Russie et de la Chine, comme invités d’honneur, en 2004 et 2005, n’a-t-elle pas suscité autant de condamnations ? Je ne partage nullement l’avis d’Eric-Emmanuel Schmitt. Pour le reste, c’est-à-dire la question de la rédemption, c’est un sujet qui mériterait sans doute plus qu’une réponse de quelques lignes sur un blog.
Rédigé par : Laurent Dingli | 10 mars 2008 à 09:54
Oui, les livres sont un essentiel.
Mais Philippe, quand écrirez-vous au ministre, garde des Sceaux pour que les bibliothèques ne soient plus maltraitées dans les prisons ?
Rédigé par : Véronique | 10 mars 2008 à 08:51
Vous m'empêchez de dormir monsieur Bilger.
Dois-je comprendre que vous vous associez aux insultes de ce pauv'con d'Aaron Shabtai, alors que le Président de l'Etat d'Israël, Prix Nobel de la Paix, est reçu en visite officielle en France?
Savez-vous que la ministre des Affaires étrangères est en train de consulter des juristes pour savoir quelle est la riposte aux attaques la plus légitime ? Peut-être vous demanderait-on votre avis aussi, pourquoi pas ?
Car les enfants se sont les mêmes, à Sdérot comme à Gottingen. Pourquoi personne ne prend la défense de cette population de Gaza qui est quasiment prise en otage par les terroristes ? Devons-nous nous déclarer vaincus face à des assaillants qui utilisent des enfants, des femmes et des vieillards en guise de bouclier ?
J'espère que nous aurons bientôt la réponse juridique. Les civils qui acceptent que des roquettes soient tirées de leur toit sont-ils encore des civils ?? Ou s'ils n'ont pas le choix ne sont-ils pas des otages à sauver ?
Je perds mes mots aussi je me contenterai de vous copier un morceau d'article... Je ne sais pas si j'ai le droit. Je prends le risque.
Quant à l'indistinction nationale que vous prônez, nous sommes beaucoup à en rêver mais pas au point de nous dissoudre dans une autre identité nationale par absorption.
Je tiens beaucoup à vos billets monsieur Bilger et ils ne peuvent être que français.
Nous avions évoqué la morale dans l'un de vos billets. Je maintiens qu'elle doit s'enseigner, car les raisins sont trop verts pour monsieur Aharon Shabtai il faut l'en excuser.
et voici l'article que j'intitulerai le CRI de SDEROT
......"Un devoir d’ingérence dans le langage ministériel français, celui des Affaires étrangères, que certains n’ont pas hésité à qualifier d’ « un siècle de trahison ».
Je ne retiendrai que deux phrases.
L’une appelant Israël à faire « encore des sacrifices ».
Encore. Retenez bien le « encore »…
L’autre, perfide, sournoise, d’acier plutôt que de bois. Vous avez appelez à l’arrêt des tirs de Qassams, non pas pour les dégâts occasionnés aux habitants de Sdérot, mais bien pour les « réactions brutales » qu’elles suscitent de la part d’Israël.
Alors monsieur Kouchner, il nous est un devoir d’ingérence de vous dire de vous taire.
Nous aurions pu vous répondre à la façon d’un Nicolas Sarkozy, s’adressant à un badaud qui refusait de lui tendre la main au salon de l’Agriculture, mais la décence, et somme toute le respect que nous vous devons encore, sachant l’amitié qui vous lie à nous, éloigneront de nos propos tout langage malveillant.
Ne venez pas nous dire que ce sont des « phrases sorties de leur contexte », que ce n’est pas cela que vous avez voulu insinuer, que sais-je encore, de ces circonvolutions verbales d’homme politique pris en flagrant délit de c…..ies !
Je ne vous croirais pas. Et les miens non plus.
Encore, avez-vous dit…
Encore des sacrifices.
Voilà un mot que le peuple Juif ne veut plus entendre. Il me semble que vous ne l’entendez pas de cette oreille.
Cela fait plus de deux mille ans que nous faisons des sacrifices monsieur Kouchner !
Deux mille ans que l’on nous sacrifie plus exactement.
Deux mille ans que nos parents et nos enfants sont montés sur le bûcher, passés au fil de l’épée, brûlés et -comment dirais-je ?- holocaustés… monsieur Kouchner.
Alors faites-en vous des sacrifices et laissez-nous avec le souvenir des nôtres.
Depuis 60 ans, monsieur Kouchner, Israël n’a fait que des sacrifices.
Il faut en faire des sacrifices lorsqu’on est entouré de millions de barbares qui cherchent à vous exterminer. Des barbares qui se sacrifient aussi, il faut le reconnaître. Tant et si bien qu’ils sacrifient leurs propres enfants et leurs civils juste pour bien nous sacrifier…
Il y a sacrifice et sacrifice monsieur Kouchner…
A l’aube de notre naissance, ai-je besoin de ressasser ce poncif, ils furent des millions à vouloir nous jeter à la mer, au motif qu’il était impensable que nous Juifs, nous osions nous installer ici, sur terre d’islam.
Nous sommes les plus anciens réfugiés du monde et jamais ni l’UNRWA, ni la Croix Rouge, ni aucune ONG, si prompts à s’émouvoir (dans le cas qui nous concerne, les « palestiniens », depuis 60 ans « réfugiés » préfabriqués) ne se sont intéressés aux assiégés que nous sommes.
Il serait donc dit que seuls les arabes victimes de leurs frères en 48 et chassés de leurs foyers par ces mêmes frères, auraient le droit de retrouver une terre au motif qu’ils sont devenus par la grâce des organisations internationales les réfugiés les plus riches du monde ? Maintenus à l’état de réfugiés malgré les milliards de dollars déjà offerts par la communauté des nations depuis soixante ans ?
Et pourquoi des réfugiés ne reviendraient-ils pas chez eux après deux mille ans d’exil pour y vivre en sécurité ?
Si Gaza ou Djénine sont des camps de réfugiés, Israël est le plus grand camp de réfugiés au monde. Amputé du tiers du peuple juif parti en fumée dans les camps de concentration nazis…
A la différence près, et de taille, c’est que les israéliens ne se sont pas contentés de vivre du subside des autres et ont transformé leur pays en paradis fleuri, en puissance économique et industrielle, la plus grande pépinière de cerveaux au monde. On ne compte plus les apports dans tous les domaines que ce grand camp de réfugiés a fait et continue de faire malgré l’état de guerre permanent. De la médecine aux nanotechnologies en passant par l’agriculture, l’industrie militaire, l’aéronautique, le high-tech, la musique, les arts et les lettres, collectionnant ainsi le plus grand nombre de prix Nobel en si peu de temps.
Au prix d’immenses sacrifices.
Alors encore une fois, ingérez-vous de votre devoir d’ingérence et faites-nous le sacrifice de vous taire. Cela vous évitera bien des désillusions en revenant dans la région.
Réactions brutales d’Israël dites-vous ?
Vous abondez peut-être dans le sens du rapport de l’ONU qui estime que «le terrorisme palestinien a son origine dans « l'occupation israélienne et les lois qui rappellent le régime de l'Apartheid en Afrique du Sud » (Guysen International News 26.02.2008 à 19h22). Il veut dire par là que les attentats sont la résultante de l’occupation et que le régime abhorré sioniste pratiquant l’Apartheid, il ne faut pas s’étonner des « réactions brutales » des palestiniens…
L’auteur du rapport, John Dugard, juriste de profession, est un fieffé menteur. Il se joue en tous cas une sacrée comédie en présentant son rapport devant le Conseil des droits de l’homme de l’Onu. Dont il sait pertinemment qu’une immense majorité des Etats qui le composent sont des modèles de démocratie… Mais il sait surtout, et ne le dit pas, que le terrorisme n’a pas commencé avec l’ « occupation » mais bien avant 1967. Que l’ « occupation » comme il dit, ne posait pas de si grands problèmes avant les déclarations de guerre d’Arafat de sinistre mémoire, Arafat plus grand terroriste que la terre n’ait secrété, sur la tombe duquel vous êtes allé vous incliner en catimini, n’est-ce pas monsieur Kouchner…
Alors réactions brutales ?
J’apprends aujourd’hui, qu’un accord de coopération anti terroriste a été signé entre l’Arabie Saoudite et la France par Michèle Alliot-Marie et son homologue le prince Nayef.
« Nous partageons les mêmes menaces et la même volonté de les éradiquer » a dit votre collègue de l’Intérieur.
Le Parisien qui rapporte la nouvelle, rappelle qu’ « il y a un an jour pour jour, quatre Français étaient assassinés par un groupe de fanatiques armés près de Médine ».
Et puis plus loin : « la situation a changé. Il suffit de constater les moyens colossaux déployés par les Saoudiens pour assurer la sécurité : check-points, quartiers d’affaires ou diplomatiques bunkerisés, ici aussi la menace terroriste est omniprésente ».
« Les attentats commis sur leur propre sol ont profondément choqué les Saoudiens, Ils n’y étaient pas préparés, mais ils se sont adaptés très vite », remarque un officier de sécurité français en poste à Riyad. Dois-je mettre entre guillemets les mots « fanatiques » ou « terroristes » ?...
Les centaines de check points ne seraient tolérables qu’en Arabie Saoudite ou dans les Balkans mais pas en Israël pour protéger ses citoyens ?
Je n’ose imaginer les centaines de morts qu’une armée française aurait provoquées si des roquettes « artisanales » tombaient sur le territoire français, à la cadence des roquettes gazaouites, depuis, voyons voir, depuis le pays basque par exemple, ou la Corse. Je dis ça au hasard…
J’aurais pu écrire, que des roquettes « artisanales », presque inoffensives à en croire la presse française, lancées depuis le Trocadéro sur le bâtiment du ministère des Affaires étrangères (toujours par hasard), n’occasionneraient que de minimes dégâts sur le gazon bien tondu du parc attenant.
Réactions brutales dites-vous ?
Pour paraphraser l’un de vos prédécesseurs, de sinistre mémoire aussi, monsieur Michel Jobert : est-ce que tenter de neutraliser les barbares qui envoient des roquettes sur une ville plusieurs fois par jour, les éliminer les uns après les autres de façon ciblée est une agression brutale ?...
Non ! C’est un devoir d’ingérence…
Regardez bien cette carte monsieur Kouchner. Elle représente les points d’impact des roquettes « artisanales » ces derniers jours sur Sdérot. Pas un coin de cette ville n’est épargné.
Quinze secondes, monsieur Kouchner. Quinze secondes savez-vous ce que cela représente ?
Le temps qu’ont les habitants de Sdérot, quel que soit leur âge, pour gagner leur abri, monsieur Kouchner. Ingérence pour ingérence, ça vous dirait de venir partager quelques semaines dans ces conditions ? Je voudrais vous y voir. Quinze secondes cela doit être suffisant pour un homme sportif comme vous non ?... Tenez, j’ai fait demander - sous toutes réserves et avec l’accord de la municipalité de Sdérot, me dit-on à la rédaction- de vous faire parvenir un exemplaire de roquette artisanale, explosée. A poser sur votre bureau, en solidarité avec les habitants de Sdérot. Ingérence à distance…
Rédigé par : Duval uzan | 10 mars 2008 à 05:14