Les droits de la défense sont devenus très extensifs.
Hier, un collectif comprenant notamment des avocats se permettait de saisir le Conseil supérieur de la magistrature au prétexte que la cohérente réorganisation de la cour d'appel de Paris, sous l'égide de son Premier président et de son seul ressort, ne lui convenait pas. En même temps, sept avocats pénalistes réputés déploraient vivement le changement d'affectation, au bout de dix-huit années, d'un président de la cour d'assises de Paris et mettaient en cause la réforme structurelle engagée par Jean-Claude Magendie. Je ne vois pas en quoi ils pouvaient s'estimer fondés à protester contre le premier ou la seconde puisque leur champ de compétence ne s'élargissait pas à ce point. Demain, si l'envie m'en prend, pourquoi n'irais-je pas dénoncer le fonctionnement du Conseil de l'Ordre à Paris ? Mon ignorance et mon immixtion ne seraient pas supérieures à la leur.
A la suite des procès Ferrara et Colonna et des incroyables péripéties de ces audiences, l'analyse qui en est faite aujourd'hui, comme je le pressentais, impute la seule responsabilité de toutes ces dérives qui ont stupéfié le citoyen aux présidents concernés. C'est vraiment trop charger la barque d'un côté et oublier l'autre. Une vision équitable se devrait au moins de rappeler l'attitude collective de plusieurs accusés et de leurs conseils au cours de la première affaire, et d'Yvan Colonna assisté notamment par Me Sollacaro lors de la seconde. On a entendu, durant celle-ci, des insultes adressées à un président jamais proférées, d'après mon expérience, dans une salle d'audience et qui auraient mérité une réaction à leur hauteur d'insupportable virulence. Cette manière dont les avocats sont en permanence exonérés de tout par la plupart des médias au prétexte que leur cause serait forcément la meilleure et que défendre constituerait une mission si noble qu'elle en deviendrait intouchable ne manque pas de commencer à en irriter plus d'un. Peut-être serait-il opportun aussi de s'interroger sur ce qui a fait subitement tomber le Barreau d'une pugnacité qui savait demeurer polie, dans une guerre qui donne l'impression non plus de rechercher la vérité mais au contraire d'empêcher sa révélation. Le pire serait qu'après ces tumultes qui représentent le degré zéro de la justice, on se trompe et qu'on ait la tentation de désavouer les victimes du désordre et non pas les fauteurs de trouble. Pour parler net, quoi qu'on puisse alléguer à l'encontre du président Wacogne, il s'en est "pris plein la tête" et il serait paradoxal qu'il ne soit pas crédité de son stoïcisme et de sa tenue judiciaires. J'espère que Le Monde, annonçant "son désaveu" avec une objectivité dissimulant mal un contentement certain, se trompe. Une telle position ouvrirait grande la porte, pour demain, aux pires escarmouches. On ne gagnera pas forcément le procès mais on aura au moins "détruit" le président. Je n'ose penser que le magistrat souhaité devrait être, selon les critères médiatiques, celui ou celle qui saurait ne complaire ostensiblement ou subtilement qu'à la défense. C'est vraiment d'une telle cour d'assises dont la justice et notre société ont besoin ?
On a le droit de se poser la question lorsqu'on lit dans Le Figaro l'excellent article de Laurence de Charette et Stéphane Durand-Souffland "Une réforme des assises est à l'étude". Ce serait le nouveau chantier de la Commission Léger qui a achevé prématurément, à mon sens, sa réflexion sur l'éventuelle suppression du juge d'instruction. Il s'agirait de modifier la procédure criminelle et d'instituer un président arbitre. Pourquoi pas ? L'esprit est bon qui substituerait au président omnipotent d'aujourd'hui un arbitre impartial et compétent. Il faudra d'abord le, les trouver. Le mauvais président d'hier demeurera un piètre arbitre. Pour occuper cette fonction, les qualités devront être encore plus exceptionnelles et la personnalité incontestable. Le hasard du journalisme fait qu'un ancien président est questionné dans l'article. Bernard Fayolle, probablement le plus grand président que la France judiciaire a connu aux assises ces dernières années.
Ce qui me frappe, c'est que sont évoquées également la possibilité de délocaliser l'appel criminel - Me Thierry Herzog y est favorable - et la motivation des arrêts - Me Gilles-Jean Portejoie la souhaite comme son confrère - parce que l'intime conviction ne serait pas fondée sur la raison. L'intime conviction est une certitude, ce n'est pas une impression. Parce qu'elle est personnelle, elle n'a pas besoin d'être motivée. Le contraire, tant les modalités d'une délibération collective seraient difficiles à mettre en oeuvre, reviendrait probablement à alléger la cour d'assises de la présence du jury. Il constitue encore un obstacle, parce qu'il impose des obligations et des abstentions, à la banalisation de la cour d'assises en une super-correctionnelle, mouvement déjà amorcé par la procédure de l'appel criminel.
L'étonnant est que grâce à cet article qui semble bien documenté, on se rend compte que le rôle des avocats semble déterminant dans cette Commission où pourtant il y a des magistrats, dont le procureur général Le Mesle qui n'est certainement pas prêt à laisser cette instance nous "fabriquer" une justice par les avocats et pour les avocats. Parce qu'il ne faut plus se leurrer et feindre une familiarité intellectuelle de bon aloi alors que nous sommes clairement engagés, les uns et les autres, magistrats et avocats, sans qu'on s'en réjouisse, dans un rapport de force dont les seconds sortent inéluctablement vainqueurs des premiers. Parce que ceux-ci, même les plus combatifs, ne peuvent pas aller, dans la forme, jusqu'à un affrontement vulgaire et qui ferait de la justice pénale française une véritable et triste foire d'empoigne. Parce que les médias, quelle que soit leur tonalité politique, préfèrent le barreau, ses séductions, ses facilités, au dur métier de requérir et de juger. Il vaut toujours mieux brandir devant les journalistes la défense d'un homme clamant son innocence - sans y regarder de trop près - que le soutien à une société qu'ils adorent dénigrer sauf lorsqu'elle leur propose des tueurs en série où l'indignation est obligatoire et la compréhension. contre-productive. Beaucoup de ces médias, ensuite, prêts à se scandaliser devant telle ou telle mansuétude ou libération anticipée sans percevoir qu'on ne peut vouloir la rigueur et, à la fois, caresser le rêve d'une justice d'avocats. Et Outreau est venu, avec sa vague tragique, recouvrir, pour longtemps encore, tout ce qu'ailleurs la magistrature possédait, et largement, d'honneur et d'efficacité !
Les citoyens, les parlementaires, s'ils n'y prennent garde, un jour auront à affronter cette redoutable contradiction. A force de piétiner une magistrature qui se laisse trop faire, ils auront bonne conscience, enivrés par le sentiment d'oeuvrer du bon côté, celui des humiliés et des offensés, même s'ils sont délinquants ou criminels d'habitude. Les jurys acquitteront des coupables en particulier parce qu'Outreau a fait planer un doute général et à la longue absurde. Mais, demain, si leur indignation se réveille, si le peuple se redresse et exige humanisme et vigueur, si le laxisme scandalise parce qu'on a confondu l'intérêt social et sa sauvegarde avec une nursery pleine d'adorables adultes réadaptables, que personne ne se plaigne. Il faut choisir. On ne peut pas avoir une procédure de douceur dans un monde où le bien et le mal existent, où la vérité est contredite, où le mensonge dissimule.
Les magistrats ont laissé, laissent les avocats prendre la barre. Bien au-delà de l'espace des audiences. J'espère ne pas galvauder ce très beau mot mais la résistance, cela existe, non ?
Monsieur Bilger,
Je viens d'entendre votre interview sur France Culture au sujet de votre nouveau livre. J'ai été surpris que vous écartiez la notion de collégialité, c'est pourtant une pratique constante dans les métiers qui peuvent présenter des risques pour la sécurité des personnes, par exemple dans le domaine nucléaire, dans la santé...
Pourquoi cette collégialité ne serait-elle pas efficace pour éviter des erreurs d'appréciation dans les dossiers judiciaires ?
Rédigé par : CF | 10 avril 2009 à 15:41
Excusez ces métaphores incohérentes mais ne serait-ce pas l'histoire de l'arroseur arrosé : les membres du syndicat de la magistrature ne cessent de scier la branche sur laquelle ils sont assis. Et comme souvent, la punition retombe sur toute la classe.
Rédigé par : Grain de poivre | 04 avril 2009 à 22:02
Il n’est pas admissible que pour faire face à l’accroissement du contentieux devant les juridictions administratives on supprime des garanties pour les justiciables en traitant la question par des réformes de procédure.
pour aller plus loin, http://usma.apinc.org/article.php3?id_article=263
Rédigé par : Zaf | 04 avril 2009 à 21:00
Dans tous les commentaires brillants, celui de naolin me rassure quelque peu. J'ignore bien évidemment son rôle dans l'aréopage des gens de robe, mais il dénonce le mépris dans ces propos, mépris affiché par des corporatismes qu'il a sans doute côtoyés. Voila qui est sage ! Toutefois, il n'est pas d'accord avec vous ! Où a-t-il acquis sa science et son humanité ?
Rédigé par : ROUTA VILLANOVA | 04 avril 2009 à 01:32
@sbriglia
Bien cher Maître, je ne sais pas si "sbriglia" en italien veut dire brillant mais vous l'êtes assurément, sans flagornerie. J'ai lu vos commentaires récents, toujours pertinents. Je vous aime bien en somme. Si je devais recourir un jour aux services d'un avocat, j'hésiterais entre vous et Maître Eolas. Mais entre deux pseudonymes, il est bien difficile d'établir un contact. Ce n'est nullement une critique, j'use moi-même du procédé, il le faut bien lorsque notre profession ne nous laisse guère d'autre choix.
Bien cordialement et avec toute mon estime.
Rédigé par : Ludovic | 03 avril 2009 à 21:39
Je n'y connais rien en droit et n'ai pas d'avis argumenté, seulement une impression.
Yvan Colonna a mal joué. Est-ce sur le conseil de ses avocats ou s'est-il coincé comme il l'avait déjà fait en s'enfuyant dans le maquis ? Quand on a de bonnes raisons de tirer dans le dos d'un homme, on a le courage de les défendre soi-même.
Rédigé par : mike | 03 avril 2009 à 19:05
@ sbriglia
Je ne parlais pas du procès Colonna concernant les bidonnages et faux témoignages avérés produits par le parquet (je ne connais de cette affaire que ce que la presse en dit, je ne me prononce pas), mais oui, j'en ai vu régulièrement et jusque très récemment par un procureur de la République lui-même et je ne vais pas ici donner des noms et des détails mais je les tiens à votre disposition. C'est édifiant.
Il y a mille et une façons de téléguider les juges du siège sur des affaires sensibles, les laissant effectivement tranquilles sur 99% de leur travail. Mais, cher Sbriglia, quand vous aurez reçu un SMS d'un parlementaire via la Chancellerie qui vous annonce exactement le verdict dune cour d'assises avant même la fin des plaidoiries et l'entrée du jury en délibération, vous aurez compris que les connexions existent pour donner des instructions au siège, même si vous ignorez les circuits qu'elles empruntent et la négociation qui y prélude : tu me donnes ça et je te donne ça. Je ne vais pas citer de nom ici non plus.
Un président qui fabrique des moyens de cassation au cas où, là encore, ils savent faire, surtout les plus anciens qui n'ont pas grand-chose à perdre. Ils vous livrent les moyens de cassation dès avant l'audience par de multiples bourdes volontaires que le parquet ne peut pas voir.
Entendons-nous bien : je ne veux pas singulariser le propos ; je pars d'un constat et du billet de Philippe qui unifie les magistrats contre les avocats. Je demande simplement à ce qu'on admette que, dans les affaires sensibles et uniquement celles-ci, il y a le parquet, le siège, les avocats et le pouvoir politique, et que cela fait plus d'antagonismes que Philippe ne le suggère pour s'emparer de la barre.
La mauvaise foi d'un avocat général en audience répond à celle des avocats de la défense, c'est la règle de ce jeu de rôle : si, mon cher Sbriglia, vous n'avez entendu requérir que des avocats généraux de bonne foi et uniquement soucieux de la recherche de la vérité, soit vous avez rêvé, soit vous pistez Bilger à la trace où qu'il se trouve. Pour moi, mon expérience se limite à des fripouilles, intelligentes ou stupides, parfois même sympathiques, mais des fripouilles. Pas eu de chance sans doute.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 03 avril 2009 à 11:49
@admirateur éperdu
Encore un qui n'a pas compris. Pouvez-vous admettre que Philippe Bilger ne pouvait tout simplement pas s'exprimer sur l'affaire Colonna avant que le verdict ne soit rendu ? Pour le reste je suis plutôt d'accord avec vous.
Rédigé par : Ludovic | 03 avril 2009 à 09:00
Monsieur Bilger, votre commentaire eut été un million de fois plus acceptable et plus convaincant si au lieu de ne strictement rien dire sur votre blog (est-ce que je me trompe ?) pendant les six semaines du procès vous aviez dit ce qui vous semblait aller et ce qui était du sublime foutage de gueule, autant de la part des magistrats que des avocats.
Que dire par exemple de cet avocat général qui n'a trouvé rien de mieux, pastichant Audiard, que d'insulter un témoin en lui disant : "quand on est con et pleurnichard". Bien sûr ce témoin surprise qui venait dire qu'on avait sciemment étouffé des écrits, gênait et il fallait le casser.
Et là je parle de ce proche du préfet Erignac dont le Président Wacogne n'avait pas, soi-disant, lu la lettre..
On rigole encore d'un aussi misérable alibi.
Comme on rigole des contradictions sur ce sujet entre le magistrat Bot et les hauts responsables policiers.
Mais il y a un homme qui a pris perpète...
Donc votre billet eut été un million de fois plus convaincant si vous aviez livré en direct vos doutes (ou vos absences de doutes) comme l'a bien fait S. Durand-Souffland du Figaro.
Rédigé par : Admirateur Eperdu | 02 avril 2009 à 18:08
@ Avis aux amateurs et autres fans inconditionnels !
Une intéressante interview de Philippe Bilger vient d'être publiée ce jour sur le blog criticus de Roman Bernard.
En voici le lien
http://criticusleblog.blogspot.com/2009/04/entretien-avec-philippe-bilger.html
Rédigé par : Ludovic | 02 avril 2009 à 17:16
Cher Aïssa,
Ce n'est pas le lieu, ici, de parler de soi : détestant l'éclat qui divulgue, je vous dirai simplement avoir prêté serment quelques années avant la triplette (le "l" est important) d'avocats qui ont réussi cette performance, sur l'appel interjeté par leur client et par leur désertion en rase campagne, d'aggraver sa condamnation de première instance : le moins que l'on puisse dire, c'est que ce n'est pas glorieux.
J'ai suivi quotidiennement, sur trois "blogs" de sensibilités différentes (Véran, Madelin et Durand-Souffland), les péripéties de ce procès...
Quoique l'on pense de la présidence de l'audience, le verdict a été rendu par des magistrats professionnels qui ont eu tout loisir, dans le secret du délibéré, de marquer leur éventuelle opposition à celui qui assura la police de l'audience.
Ce que j'ai voulu dire, Aïssa, et sur ce point vous ne m'avez pas lu attentivement, c'est que le choix stratégique de la défense conduisait nécessairement à un tel verdict. La thèse de JDR, pour séduisante - mais torturée - qu'elle soit, me laisse dubitatif... Des magistrats aux ordres ? alors même qu'ils n'ont cessé de s'opposer à la Chancellerie et de défiler sur les marches du Palais ? Ils avaient là l'occasion rêvée de marquer leur indépendance !
Quant au "bidonnage" (sic) des pièces ou aux "faux témoignages avérés" dont se gausse JDR, sans preuve, je lui laisse la responsabilité de ses affirmations. Pour ma part je n'en ai jamais vu volontairement produits par le Parquet...
Encore un mot, cher Aïssa : de même qu'il ne vous viendrait pas à l'esprit de défendre tel de vos collègues qui, par la pose déficiente d'un cathéter, aurait causé un décès, de même l'esprit de corps et l'amour de la robe qui sont les miens ne me rendent pas pour autant aveugle : l'enflure médiatique et les effets de manche sont depuis longtemps passés de mode... Les meilleurs avocats ne sont pas toujours face aux caméras... (c'est même, souvent, inversement proportionnel !)
On peut plaider avec force et conviction sans mépris, insulte ou gesticulation... et emporter la décision.
Mais comme aurait dit ce grand philosophe qu'était Monsieur de la Palice, encore faut-il plaider !
Cordialement
Rédigé par : sbriglia | 02 avril 2009 à 16:37
Jugement signifié hier, pour un jeune crétin pour lequel la mère me demande conseil :
Prévenu d'avoir séjourné irrégulièrement sur le territoire français et d'avoir fait obstruction à une mesure de reconduite à la frontière.
Comme l'imbécile ne s'est pas présenté à l'audience, il a été condamné à X jours-amendes sans que personne, juge, procureur, greffier, laveur de carreau, n'ait lu une ligne du dossier. En effet,
Trois lignes plus haut :
M. Untel, nationalité : française
Cela inspire-t-il le respect ?
C'est tellement fréquent ces âneries judiciaires, ce copier-coller routinier. On en rit en attendant qu'un policier vienne choper le garçon à Champigny pour le reconduire à la frontière ... à Strasbourg, Menton, Hendaye, il y a le choix en TGV.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 02 avril 2009 à 14:33
Je ne sais pas si mon commentaire sur l'immixtion d'un tiers dans un ordre professionnel et parti trop tôt du fait d'une erreur de frappe, mais bon tant pis, pressée je reprends donc juste mon commentaire sur l'essentiel qui était avait trait à l'intime conviction, pour dire qu'il me semble qu'il en va du 'Oui, coupable' ou du 'Non Coupable' comme du 'Oui, je le veux' devant monsieur le maire ou encore l'officiant du culte concerné parce qu'on est convaincu qu'il s'agit de la bonne personne, pour souligner qu'en effet, il paraîtrait judicieux de d'accompagner de l'exposé des motifs ayant guidée l'intime conviction à se constituer.
Rédigé par : Catherine JACOB | 02 avril 2009 à 12:30
Oui, Aïssa, la cour d'assises, c'est la guerre. Ceux qui ne connaissent pas ignorent à quel point. Je dirais même que ceux dont c'est le métier, tels les magistrats ou les avocats, minorent cette identité guerrière. Et oui, tous les coups sont permis. A un témoin tenté par l'indulgence, je répète avant son audition : "C'est un fusil à un coup, tu flingues ou tu es flingué." Les coups bas pleuvent et, excusez-moi, mais le parquet est souvent aux avant-postes des coups tordus. La recherche de la vérité est une mascarade, côté parquet comme côté défense, il s'agit de gagner par tous les moyens, les bons comme les mauvais, d'abattre l'autre, fusse au prix de faux témoignages avérés, de pièces bidonnées, de rumeurs infondées dont le parquet, rétribué par le contribuable cependant, fait un usage généreux.
Est-ce que la tactique des avocats de Colonna était injurieuse, ceci ou cela, on s'en moque après tout, et le parquet le premier qui joue les vierges effarouchées : c'est le résultat qui compte, rien que cela. Au regard du verdict qui indique bien que c'était plié d'avance, ils ont eu raison en s'inscrivant dans la suite de la procédure. Rodomontade tactique. Et le parquet était catastrophé devant un président pourtant expérimenté qui ne parvenait pas (ou ne tenait pas) à endiguer les bévues du dossier. Ce qu'on reproche aujourd'hui à Wacogne en le sanctionnant, ça n'est pas la foire à l'audience, c'est d'avoir retourné l'opinion publique en faveur de Colonna alors qu'elle lui était originellement hostile.
Je ne suis pas loin de penser, après réflexion, qu'il y avait dès l'origine une hostilité parquet-siège dans ce dossier d'appel, que vous masquez en opposant magistrats et avocats, comme si les magistrats faisaient corps dans ce dossier. Deux avocats généraux, commissaires politiques en l'occurrence, pour requérir devant un jury de juges professionnels, ça sent la grande méfiance, ça ressemble à l'appel d'Outreau où l'on somme le jury de suivre les réquisitions. Avec un jury populaire benêt, on comprend, avec des "collègues", moins.
Je sais comment un président fabrique volontairement des moyens de cassation quand il sent son dossier miné et qu'il veut ménager une porte de sortie. En suivant mot pour mot les réquisitions du parquet, je ne suis pas loin de penser que les juges ont signifié à leurs collègues de la Cour de Cassation : "on a obéi aux ordres mais on a miné le terrain, on vous a donné tout ce qu'il faut pour casser, à vous de jouer".
Philippe, dans votre partie de billard avec les avocats, vous oubliez la troisième bande, le pouvoir politique, lequel dans ce dossier si précieux à l'ancien ministre de l'Intérieur, prétend tenir seul la barre, sans magistrat incertains ni avocat venimeux. Alors résistance de qui contre qui ?
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 02 avril 2009 à 10:15
Bonjour Monsieur,
Et merci pour cette analyse que je ne partage pas. Je suis de ceux qui pense que le moindre doute doit profiter à l'accusé. Je préfère un assassin en liberté qu'un innocent en prison. Dans le cas Colonna, la multitude de doutes imposait absolument l'acquittement, quoi qu'on puisse penser de l'individu, peu reluisant il est vrai. Colonna est très probablement tombé parce qu'on ne tue pas un préfet impunément. Voilà le message. En ce sens, les juges de cette cour ont à mon sens jeté un profond discrédit sur une justice mal en point et contre laquelle les avocats n'hésitent plus à présent à se révolter.
J'ai travaillé Monsieur pendant quatre ans au ministère de la Justice, un an dans un TGI. J'ai été profondément choqué par ce que j'ai vu, et la manière assez dégoûtante dont travaillait la plupart des juges : un jour, un magistrat m'a carrément reproché mon trop d'objectivité et que cela le gênait pour rendre la décision qu'il avait déjà prise avant l'audience ! "Vous donnez des arguments aux avocats" me reprochait-t-il. (J'étais chargé de faire des rapports d'expertise familiale et éducative) Le mépris des faibles et des étrangers était patent et les couloirs résonnent encore des plaisanteries et paroles blessantes des juges à l'encontre des justiciables. Non Monsieur, les moeurs de notre pays vont mal, et ce délitement généralisé de la morale publique frappe à la porte des palais et on lui ouvre bien souvent. Le niveau de civisme baisse, les ambitions s'exacerbent, les jalousies, rancoeurs, ambitions, envahissent l'ENM et les palais. L'Homme est broyé dans ce vaste courant de perte de morale et de l'abandon du civisme et de la vertu. Les juges de Colonna n'ont pas résisté à cette vague qui emportera tout.
Rédigé par : Naolin | 02 avril 2009 à 09:16
@Ludovic
C'est ainsi, il faut croire que les iliens se sentent toujours colonisés par la métropole. Il leur suffit probablement d'être pauvres pour se croire exploités.
Il n'y a pas de limite à la sottise en l'espèce : voyez la Guadeloupe qui ne produit que 7% de ce qu'elle consomme, et doit tout le reste à la générosité des métropolitains. Eux aussi développent des fantasmes de réduction en esclavage, sans beaucoup de décence vis-à-vis de ce qu'ont réellement vécu leurs trisaïeuls.
Si seulement notre chère capitale pouvait se débarrasser de pareils boulets... Nous vivrions dans l'aisance, en ayant la paix !
Rédigé par : Gaétan B. | 02 avril 2009 à 00:02
@Godihlaire,
Votre commentaire est abscons. Qu'est-ce que c'est que ce salmigondis mêlant tout à la fois avocats, juges, syndicats enseignants, colonialisme européen, URSS et République française ? Arrêtez les stupéfiants, vous en devenez incohérent.
Plus sérieusement, il y en a assez de parler d'Etat colonial en Corse. Les nationalistes corses sont ultra minoritaires, ils imposent la loi du silence (la fameuse omerta), pratiquent le racket, commettent des crimes, pratiquent le terrorisme.
Quand la Corse a-t-elle été indépendante dans son histoire ? Il faut remonter avant la conquête romaine et encore. La Corse est devenue française dès le XVIIIème siècle, cédée à la France par la République de Gênes.
Que l'on donne l'indépendance à la Corse, pourquoi pas après tout. Je serais curieux de voir ce qu'il en résulterait pour les Corses eux-mêmes.
La Corse ne souffre d'aucun statut d'exception, elle se compose de deux départements, les Corses sont des citoyens de la République au même titre que les Parisiens, les Lorrains ou les Bretons.
Quelle serait l'horrible oppression dont la Corse serait victime de la part de la République ? De quels droits ses habitants seraient-ils privés ?
Pierre Joxe porte le tort immense d'avoir, lorsqu'il était ministre de l'Intérieur, parlé du "peuple corse". Il n'y a qu'un peuple sur le territoire de la République, c'est le peuple français.
Rédigé par : Ludovic | 01 avril 2009 à 21:43
Un homme touche au grandiose ici, là il atteint à l'infamie ... Ainsi de Gaulle dont nous causions tantôt. J'ai toujours des scrupules à l'insulter car j'ai, dans le même temps, conscience qu'il a été grand en d'autres endroits, moments ... Mais c'est ainsi et cela signifie toujours que en toute chose comme en chaque être chacun verra en premier ce qui le lie personnellement à cette chose ou à cet être ... Et de même d'un homme quant à un groupe d'homme et d'un groupe quant à un autre groupe ... Ainsi, aujourd'hui, PB et les avocats de la défense. Il n'y a rien à tirer de cette lettre sinon l'expression d'une totale -et légitime en cela qu'elle est toute entière humaine- subjectivité ...
Je suis cependant étonné de ce que Sbriglia, avocat (de la défense, je pense), exprime ici ... De deux choses l'une, cher Maître, ou vous n'êtes pas avocat ou vous n'avez rien compris à cette profession, et je dis cela sans aménité aucune contre vous, croyez-le, car je vous estime réellement ... Car enfin, je l'ai écrit ici et je l'écris à nouveau: Le tribunal a fortiori une cour d'assises c'est la guerre! Et comme dans toute guerre réelle il y a des conventions, des règles légales, etc., celle-ci n'y fait pas défaut ... Sauf que dans la réalité guerrière, on sait ce qu'il advient de ces procédures, ces manières, ces préambules et puisqu'il en est ainsi ici, il en sera de même là ... En Justice pénale, l'enjeu est souvent 15, 20 années de réclusion contre un homme, une femme, un groupe, quand ce n'est pas la perpétuité, quand ce n'était pas hier la guillotine. Qu'ai-je à faire d'un avocat qui, durant une suspension d'audience, irait boire le café avec le procureur ou le président?... On croit rêver!... Ou il est tout entier avec moi ou il est contre moi, point! Dans le cas contraire, qu'il change de métier ... Ses états d'âmes, ses opinions, tout ce qu'on veut, comme je l'ai écrit dans le PLAIDOYER POUR LES JUSTES (Cf. L'APOSTROPHE AUX AVOCATS)/ (publicité), on n'en a rien à foutre dans les prisons!
J'ai regardé avant hier cette excellente émission qui retraçait le parcours exceptionnel de Christian Laplanche, ex détenu et condamné pour des vols avec port d'arme et devenu depuis docteur es Droit ... On y voyait son parcours incroyable pour se faire inscrire aux Barreaux de Nîmes, d'Avignon, d'Alès ... Les Conseils de l'Ordre des susdits Barreaux qui l'envoyaient carrément paître ... "Qu'est-ce qu'il vient nous emmerder ici à vouloir faire avocat, celui-là?...", ainsi s'est exprimé devant la caméra le bâtonnier de Nîmes ... "Qu'est-ce qu'il vient nous emmerder ...". Mais c'est lui qui emmerde tout le monde, le sait-il seulement ce bâtonnier à la noix?! Ainsi, ce serait cela l'honneur, l'éthique des avocats: "Qu'est-ce qu'il vient nous emmerder, celui-là ..."?... Après des années de galère, le Barreau de Paris vient de l'inscrire, sauvant in extremis la crédibilité de toute cette profession, sa dignité pareillement ...
Face à Laplanche désormais Maître, le juge d'instruction qui a eu à instruire l'affaire qui le fit juger et condamner jadis ... Ce juge est devenu désormais moine dominicain ... Il s'est déplacé jusque Paris dans sa tenue de religieux pour assister à la prestation de serment de "son" ex inculpé et instruit et renvoyé par lui face la Cour d'assises 25 ans auparavant ... C'était étonnant ... et émouvant. Mais quoi! c'est ça les avocats?... cette bande "morale" qui jugeait Laplanche et le condamnait à nouveau, le considérant comme une pestilence au sein de leur immaculé Ordre?... La belle affaire! Et puis, c'est ça les juges?... des futurs moines?... Quel monde singulier, n'est-ce pas?...
La guerre, rien autre!
Quant à l'intime conviction, il est nécessaire non pas tant de motiver l'arrêt -ou le jugement- de culpabilité -ou d'innocence-, bref de motiver celle-ci, que de motiver et sérieusement le quantum de la condamnation quand celle-ci l'emporte, ce qui est différent ... Parlons chiffres, années, c'est moins hypocrite ... Pourquoi ici tant? et pourquoi là tant?... Pourquoi telle peine et non telle autre, en regard de la fourchette?... On rirait souvent tiens!...
Aïssa.
Rédigé par : Aïssa Lacheb-Boukachache | 01 avril 2009 à 21:12
Monsieur Bilger,
Très bel article à nouveau que celui-là.
Je ne peux néanmoins que soulever une interrogation - bien que je soie novice en la matière judiciaire : ne mélangez-vous pas, dans votre analyse, les torchons (anonymes) et les serviettes (médiatiques) ?
Pour un Yvan Colonna, pour un désastre d'Outreau, combien de procès où les avocats ne partent pas "inéluctablement vainqueurs" ?
Je comprends le sentiment de malaise que peuvent ressentir les magistrats lorsque j'observe le traitement (souvent injuste) qui leur est réservé dans l'espace médiatique.
Mais ce malaise-là, sous une autre forme, n'existe-t-il pas chez les avocats eux-mêmes, pour d'autres raisons que celles-ci ?
La défense et les avocats sont-ils donc si bien vus en France, pays du bracelet électronique, de la rétention de sûreté ?
Peut-être est-ce la présence de ce "rapport de force", cher M. Bilger, qui vous fait aborder un des côtés de la pièce dont vous voyez sans doute les deux faces tournoyer successivement devant vous.
Qui vous fait croire que l'opinion se dresse contre vous, alors qu'elle girouette successivement contre tous, sans constance ni cohérence.
Car ce que je crois moi, c'est que le désaveu que subissent les magistrats est également subi par la défense, que les médias plantent indifféremment leurs crocs dans toutes sortes de viandes, et que le législateur, profitant de l'émotion suscitée, soigne successivement son image par des lois incohérentes, traduisant leur opportunisme. Personne parmi nos dirigeants ne regarde d'un si mauvais oeil les magistrats comme vous semblez le croire : ils ne font que suivre le faisceau lumineux de l'émotion médiatique, légiférant sur le fait et perdant en cohérence ce qu'ils gagnent dans l'urne.
Rédigé par : ElCharpi | 01 avril 2009 à 20:02
Je suis tout à fait d'accord avec vous
Rédigé par : Marie-Christine BLIN | 01 avril 2009 à 19:56
Cher Philippe,
Notre justice se déchire.
Les dorures de la République vacillent sous les jurons.
La puissance du juge se désacralise.
Les avocats se veulent rois.
Les notaires défendent leur galette.
La symbolique fétichiste perd pied.
La passion détrône la raison.
La colère triomphe.
La force de la chose jugée agonise.
Le pouvoir des mots, des symboles rend un dernier soupir.
De grands chevaux blancs galopent, tous derrière et lui devant.
Des qualités humaines, de la conscience professionnelle sont demandées à tous les juristes, à tous.
Il faudrait communiquer beaucoup plus sur la recherche du raisonnable.
Nous nous taisons, pour ne pas dire plus de bêtises, dans ce qui ne se veut pas une analyse mais un simple tout simple avis.
françoise et karell Semtob
Rédigé par : semtob | 01 avril 2009 à 19:44
J’avoue que si je partage l’indignation sur l’apparente partialité du président, je n’ai pas compris pourquoi les avocats et le prévenu se sont enfermés dans une telle stratégie de rupture. Car Colonna se prétend innocent, et je parierais peu sur la pertinence politique de la démarche indépendantiste. Ce comportement extrême de remise en cause de la légitimité donne finalement l’impression qu’ils ne sont pas convaincus par leurs arguments pour démonter l’accusation.
En somme, si le Président avait besoin de raisons pour condamner malgré le doute, il a été servi.
Mais peut-on demander à quelqu’un de se faire enfermer 30 ans par un jury partial, et d’avoir le bon goût de rester poli ?
Le mépris dont vous vous plaignez avec raison, cher Philippe Bilger, ne prend-il pas sa source dans celui affiché en haut lieu envers la présomption d’innocence ?
You’re going to reap just what you sow, comme dirait Loulou à ce Président de la République qui désacralise tout…
Rédigé par : Alex paulista | 01 avril 2009 à 19:39
Je crois plutôt que les compétences des juristes sont employées pour collaborer au colonialisme français en Corse... Pourquoi faudrait-il que le colonialisme français ou parisien ne s'exprime qu'après avoir passé des océans pour des territoires d'outre-mer ? N'y a-t-il aucune collaboration au centralisme démocratique parisien ? (je vois les juges et les avocats, mais aussi les enseignants et leurs syndicats, mais aussi tous ceux qui vivent de ce colonialisme européen - après l'URSS, quand la République Française ?)
C'est bien dommage qu'avocats et juges soient employés par la démocrature républicaine ou oligarchie parisienne.
Il ne faut pas oublier quand même que c'était un procès d'exception.
Rédigé par : Godilhaire | 01 avril 2009 à 19:23
@Gaëtan B.
Il me semble que vous vous trompez en affirmant: "Je m'étonne que les règlements de justice soient aussi laxistes à l'égard d'avocats qui deviennent de véritables délinquants de prétoires, se gargarisant de leur immunité". En effet, les avocats n'ont aucune immunité particulière, le président Wacogne pouvait parfaitement engager une procédure pour outrage à magistrat. Par ailleurs des sanctions disciplinaires pouvaient également être prises devant l'Ordre des Avocats. Alors, pourquoi Didier Wacogne n'a t-il pas réagi autrement que par une suspension d'audience ? Il faudrait lui poser la question, mais le procès partait déjà en vrille et on peut imaginer qu'il était plus sage de ne pas verser d'huile sur le feu.
Rédigé par : Ludovic | 01 avril 2009 à 19:12
Résistance passive : on fulmine dans son coin.
Résistance active : on prend en otage Rachida Dati (ex juge Bac + 2) et Nicolas Sarkozy (ex avocat d'affaires) devant les caméras de Mireille Dumas en exhibant des banderoles "Sarkozy m'a trahie" et "Dati m'a tuer".
Retombées médiatiques garanties, prenez exemple sur les salariés de Caterpillar. Bon après ça, il vous faudra un bon avocat, Spizner par exemple qui hurlera face caméra votre douleur et avancera même l'idée d'un racisme anti-juges.
Rédigé par : SR | 01 avril 2009 à 18:05
"mais la résistance, cela existe, non ?"
Passant par là, j'ai repensé au contenu d'un blog qui démontre l'impossibilité de l'idée même de résistance chez les magistrats pour les raisons suivantes données par le blogueur anonyme :
"Je vous rejoins sur une forme de lâcheté du corps.
Ce n'est pas dans notre culture de faire des vagues.
Ce n'est pas dans notre culture de devoir nous défendre médiatiquement, nous qui "communiquons" sur nos décisions par la seule voie légale : la motivation des décisions.
Ce n'est pas dans notre culture de nous organiser collectivement."
"Finalement, je ne crois pas qu'on soit lâches. On est plutôt déprimés, dépités, déboussolés, anesthésiés"
http://www.maitre-eolas.fr/2008/07/29/1042-passe-passe-tour-de-expression-populaire-entourloupe-d-une-illusioniste#c65803
Rédigé par : Mm | 01 avril 2009 à 15:50
Cher Monsieur Bilger,
Résistance ! Le mot est bien choisi, bilatéralement, en quoi un magistrat maltraité ne pourrait-il-pas répondre ? Au nom de la sérénité ? Un homme insulté doit se défendre et résister fut-il magistrat.
Le Corse que je suis s'interroge : évidemment, Moro, en son temps aurait été plus diplomate, humoriste, conciliant que Sollacaro, mais, ôtez-moi d'un doute : Maître Maisonneuve, avocat associé d'Yvan Colonna n'est-il-pas AUSSI l'avocat de Fabrice Burgaud ? Il n'y a pas d'erreur à chercher dans un procès politique !
Rédigé par : ROUTA VILLANOVA | 01 avril 2009 à 14:07
BRAVO ! Magnifique réquisitoire, qui rencontre les préoccupations de citoyens mesurés, excédés par les rodomontades d'avocats médiatiques adeptes de la défense de rupture.
Je m'étonne que les règlements de justice soient aussi laxistes à l'égard d'avocats qui deviennent de véritables délinquants de prétoires, se gargarisant de leur immunité. Quel déplorable exemple offrent-ils à leurs propres clients, confortés dans leur attitude victimaire et leur refus des règles ! Mesurent-ils combien ils les éloignent de l'effort de remise en cause personnelle nécessaire à leur réinsertion ?
Il faut 30 ans de subversion de l'ordre légal dans les esprits pour en arriver là. La vieille taupe a bien creusé, depuis Oswald Baudot. La presse orientée a fait le reste. Rajoutons la télé dans les prétoires, et c'en sera fini de la justice.
Rédigé par : Gaétan B. | 01 avril 2009 à 13:16
Une fois de plus, que c'est merveilleusement bien dit. Mais surtout combien votre analyse est pertinente. Je suis persuadé qu'une grande majorité de citoyens mais aussi de membres de ma profession - avocat - la partage pour l'essentiel ; mais la majorité est souvent silencieuse.
Rédigé par : Alain BEGEL | 01 avril 2009 à 12:21
"Demain, si l'envie m'en prend, pourquoi n'irais-je pas dénoncer le fonctionnement du Conseil de l'Ordre à Paris ?"
Vous n'irez pas et vous n'auriez pas à y aller tout simplement parce que le conseil de l'ordre ne fait pas partie du service public de la justice. A contrario c'est ce qui légitime que les usagers de ce service public, et les avocats en premier lieu, sont légitimes à s'inquiéter de ce que vous considérez comme le pré carré du président Magendie. Je sais que le Code de l'Organisation Judiciaire vous donne raison, mais le COJ lui-même est très loin d'être exempt de reproche.
Quant aux nombreux reproches que vous faites dans ce billets aux avocats pénalistes en général, ils devraient s'adresser plutôt à quelques personnalités qui font profession d'avocat d'une manière qui n'a pas l'heur de vous plaire, ce qui, convenez-en, importe peu, dans la mesure où, si ces avocats ont franchi des limites, il existe des procédures pénale et disciplinaire pour les sanctionner.
Quant à votre vision d'un affrontement entre magistrats et avocats dont ces derniers "sortiraient toujours vainqueurs" parce que les magistrats se refuseraient à un "affrontement vulgaire" elle me semble sans fondement et inutilement méprisante pour le métier d'avocat (tout comme votre opposition entre les facilités et séductions de l'avocat face au dur métier de juger...).
C'est au final, pour le fidèle lecteur mais nouveau commentateur, un sentiment amer que laisse votre billet qui sent plus l'humeur (mauvaise) que l'analyse.
Et puis, terminer sur la résistance... ne peut-on admettre qu'historiquement la résistance a toujours été du côté des avocats plus que des magistrats...
Rédigé par : Gavot | 01 avril 2009 à 12:15
Voilà un commentaire qui n'a certainement pas vocation à être publié, mais bien plutôt à vous faire savoir à quel point votre analyse exprime, en des mots que je n'aurais probablement pas trouvés, le sentiment qui est le mien. En forçant à peine le trait, je dirais que j'ai été presque ému par la justesse de votre point de vue, et soulagé de constater que d'autres magistrats, bien plus expérimentés que moi, partagent cette position.
Cordialement
Rédigé par : F.A | 01 avril 2009 à 11:50
Bonjour M. Bilger,
On attendait bien votre réaction après le rocambolesque procès Colonna. Le verdict étant rendu, vous pouvez enfin vous exprimer sur cette affaire.
Vous vous indignez de la saisine du Conseil Supérieur de la Magistrature par un collectif comprenant des avocats pénalistes au sujet de la réorganisation de la cour d'appel de Paris par son Premier président.
Pour être tout à fait honnête, il faut rappeler que selon l'article 69 de la Constitution: «le CSM peut être saisi par un justiciable dans les conditions fixées par une loi organique». S'il peut être saisi par un justiciable, il peut tout aussi bien l'être par plusieurs, qu'ils soient avocats importe peu en soi.
Par ailleurs, il convient de rappeler que dès le 9 mars dernier, le club Droits, Justice et Sécurité, présidé par Thomas Clay, professeur des Universités, et votre collègue magistrat Gilbert Flam, a saisi ledit Conseil Supérieur de la Magistrature sur le même sujet, considérant que la réorganisation envisagée par Jean-Claude Magendie pouvait conduire la cour d'appel de Paris à être «suspectée dans sa composition et son impartialité».
Quant à Didier Wacogne, si on peut convenir de la conduite outrancière des avocats d'Yvan Colonna à son encontre, encore qu'il s'agisse d'une stratégie de défense dans un procès dont l'issue était programmée d'avance, on ne peut que déplorer sa lamentable présidence du procès. On apprend d'ailleurs ce matin sur Europe 1, que Didier Wacogne ne devrait plus présider de cour d'assises à partir de septembre prochain, ce qui, si l'information est confirmée, ouvre un boulevard aux avocats de Colonna dans la perspective d'un procès en cassation.
L'affaire Colonna était mal engagée dès l'arrestation de ce dernier. En déclarant publiquement que Yvan Colonna, l'assassin du préfet Erignac, était arrêté, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, faisait fi de la présomption d'innocence. Le procès n'était plus alors envisagé par le ministre que comme une formalité ne pouvant aboutir qu'à la condamnation du berger de Cargèse.
Le procès en appel fut un naufrage, faisant de Colonna un martyr de la cause nationaliste corse. Sans doute est-il coupable, ce que deux condamnations ont établi, encore avait-il droit à un procès irréprochable qui ne puisse être entaché par la partialité.
Rédigé par : Ludovic | 01 avril 2009 à 11:07
C'est le bazar à la cour d'appel de Paris et vous aurez vraiment du mal à faire passer l'éviction de D. Wacogne, quelques jours après le procès Colonna, comme un mouvement anodin de personnel. La règle semble devenue : à procès sensible, foirage judiciaire. Ne plus déférer au tribunal que les voleurs de vélos car au-delà, la cour se prend les pieds dans le tapis.
Je bondis à chacun de vos paragraphes. Les avocats chercheraient à empêcher la révélation de la vérité : vous faites désormais dans le surréalisme ! Qui planque les pièces du dossier ? Qui rejette les demandes de reconstitution, alors que les témoignages et la constitution physique d'un accusé font planer un sacré doute ?
Je me moque de Colonna et ceux qui me connaissent savent en quelle médiocre sympathie j'ai la mentalité corse. Mais s'il n'y a pas de doute aujourd'hui sur la culpabilité de tireur de Colonna, je ne sais pas ce que vous appelez doute. Ne doutons plus de rien, Philippe ! Que l'intime conviction soit une certitude ne place pas celle-ci sous l'empire de la raison. Il y a en qui ont la certitude d'avoir vu des ovnis ou des aliens verts, vous ne leur en ferez jamais démordre. L'intime conviction, je l'ai déjà dit, est l'alibi commode pour évacuer toute notion de droit d'un jugement de cour d'assises. Je le rappelle : un jury de cour d'assises a pour obligation de ne tenir compte d'aucun élément de droit, il a obligation de se prononcer hors de toute loi, seule l'intime conviction, substitut républicain du Jugement de Dieu, en dehors de toute autre considération. C'est archaïque, magique, catharsique, tout ce que vous voulez, mais pas raisonnable. Une cour d'assises qui condamne une première fois à 15 ans, qui acquitte une seconde fois, qui condamne à 8 ans une troisième et condamne à 5 ans en acquittant à moitié une quatrième, pour les mêmes faits, vous qualifiez cela de rationnel ?
J'en termine avec la vulgarité des avocats mise en balance avec l'élégance discrète du parquet : et les réquisitions de M. Nachbar, les insultes inlassablement répétées par les avocats généraux lors des réquisitions Colonna, c'est pas du vulgaire, ça ? Est-ce que cela participe d'une expression rationnelle et sereine ?
Allez, Philippe, vous croisez tout ce monde dans les couloirs du palais chaque jour, vous les connaissez, ils sont vos collègues ou vos supérieurs, et, peu ou prou, certains vous apprécient ou vous détestent mais ils vous attendent tous au tournant sur votre blog, puisque vous êtes le seul à oser ce mode d'expression. "S'il n'en parle pas, c'est qu'il approuve la curée". Vous êtes, moralement j'entends, en service commandé, porte-parole obligé. Vous ne pouviez pas vous taire et vous ne pouviez pas dire autre chose.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 01 avril 2009 à 10:20
Un billet qui mériterait, sur-le-champ, toute affaire cessante, tapis rouge déployé, que vous soyez nommé à la Chancellerie !
Boursouflé de son ego, apprenti sorcier de la défense de rupture, oubliant que n'est pas Vergès qui veut, s'autorisant, dans la défense du berger Corse, à confondre cour d'assises et porcherie, délaissant le nécessaire devoir d'insolence au profit de la dérisoire jouissance de l'insulte et du plaisir solitaire qu'il y a à mépriser ses juges, plus à l'aise dans ses frétillements hors prétoire que dans ses contorsions à la barre, adepte du coup de sang des hommes à front de taureau, qui croient ainsi lever l'étendard de leur conviction alors qu'ils ne font que s'éponger le front du mouchoir blanc de leur renoncement, le Bâtonnier d'Ajaccio - ils le sont tous, là-bas, comme à Brive-la-Gaillarde, à tour de rôle, parfois même plusieurs fois - saura, lors de l'arrêt de la CEDH qu'il ne manquera pas de saisir après le prononcé de l'arrêt de Cassation, si sa défense de rupture au petit pied était, en l'état d'un prévenu clamant son innocence, et, par conséquent, toute motivation politique exclue ou hors de propos, la plus adéquate des stratégies...
Avec de tels avocats, dans un contexte autrement difficile, où la "veuve" rôdait encore, où les cris "à mort ! à mort" fusaient et assourdissaient la plaidoirie magnifique de Robert Badinter tandis que les crachats, les insultes et les menaces lui étaient abondamment prodigués, tandis qu'était absolue sa solitude, Patrick Henry aurait été coupé en deux, et le verdict rendu devant la chaise vide des ses défenseurs, occupés qu'ils auraient été à habiller, devant de sémillantes journalistes, leur fuite des parures de la vertu outragée...
Et dire que j'ai regretté pour vous le choix du Parquet !
Vous auriez trop souffert, comme ont dû souffrir, en silence, les assesseurs du Président face aux insultes : Cyrano et Sollacaro n'ont en commun que la finale ; tandis que l'un est tout panache, l'autre est quelque peu ganache...
Rédigé par : sbriglia | 01 avril 2009 à 09:26