J'avoue qu'on ne comprend plus trop bien ce qui se passe à propos de la suppression projetée du juge d'instruction. Le comité Léger avait semblé vouloir le faire disparaître par la porte mais si on lit bien le récent entretien de la garde des Sceaux (Le Monde) et son discours devant les congressistes de l'Union syndicale des magistrats (USM), il n'est pas absurde de s'interroger sur son éventuel retour (nouvelobs.com, lefigaro.fr).
Certes, rien ne me semblait plus important que de prolonger une réflexion qui n'avait pas vocation à s'arrêter au mois de juin. Le Pouvoir a perçu cette nécessité, aussi bien le président de la République que la garde des Sceaux et son Secrétaire d'Etat, sans oublier le rôle capital joué par beaucoup de députés (dépités ?) UMP, sous l'égide de Jean-Paul Garraud, qui en ont assez d'une stupide inconditionnalité malgré ce jumelage obscène de leur parti avec le parti communiste chinois. Techniquement, toutes les aspirations étaient à l'unisson pour tirer le meilleur du rapport Léger en lui apportant les aménagements généralement souhaités.
Je ne suis pas persuadé que la garde des Sceaux ait senti ce qu'une telle démarche appelait de consensus. Selon l'USM, les trois personnalités chargées de poursuivre la tâche "ne représentaient qu'elles-mêmes". Qui sont-elles, d'ailleurs ? Sans vouloir tomber dans un narcissisme singulier ou collectif, on a le droit de s'étonner des choix qui sont faits. Veut-on à toute force écarter ceux qui risqueraient de penser autrement, de s'opposer, d'ouvrir des chemins nouveaux ? J'approuve pleinement l'USM qui a protesté sur ce plan et qui aura, paraît-il, à la suite de ses récriminations, la chance de se voir soumettre l'avant-projet. C'est la moindre des concessions.
La garde des Sceaux, dans ses réponses à Cécile Prieur et à Alain Salles, journalistes au Monde, a évoqué deux hypothèses pour apaiser les inquiétudes, tout en affirmant, comme une pétition de principe, qu'il n'y a pas de "risque qu'un dossier sensible soit enterré". S'il y a une contestation entre le procureur et le juge de l'enquête sur le renvoi ou non d'un mis en cause devant une juridiction, il serait envisagé que le second puisse, aussi, prendre cette décision ou qu'une audience soit organisée à l'issue de laquelle il serait à même de statuer. Au regard de cette alternative, il est évident que le recours à une audience constituerait une solution qui serait moins incohérente que la première.
Il faut se rappeler ce qu'à l'origine devait être ce juge de l'enquête. Sa mission aurait été seulement de trancher les conflits entre défense et accusation et d'autoriser les actes "lourds" relatifs aux libertés. Lui confier directement la faculté de renvoyer, contre l'avis du Parquet, le doterait d'une prérogative fondamentale - celle d'un véritable magistrat instructeur - sans qu'il ait évidemment la connaissance étendue de la procédure comme ce dernier. Cette hypothèse, si elle était confirmée, ferait en effet revenir dans le jeu le juge d'instruction par la fenêtre. L'audience aurait au moins le mérite, étant évidemment publique, de permettre un contrôle sur la validité des thèses antagonistes et de crier au scandale si celui-ci advenait au regard de l'apparence.
Pour nous éclairer, Jean-Louis Bruguière, qui a été d'une infinie prudence sur France Inter, ne sera pas d'un grand secours. Il souligne seulement la nécessité d'un "juge de l'enquête" sans se prononcer sur le maintien ou non du juge d'instruction. De sorte qu'il propose une généralité qui ne l'engage pas.
Si on veut aller plus loin pour tenter d'analyser les raisons de cette démarche ministérielle qui semble prête à faire du nouveau avec de l'ancien, il convient de prendre conscience d'un double refus.
Le Comité Léger n'a pas osé aller jusqu'à une véritable procédure accusatoire dans ses conclusions, sans doute au nom d'une tradition française qui y serait rétive. Mais comment le savoir à l'avance ? La ministre de la Justice à l'évidence n'a jamais manifesté l'intention de pousser les feux dans cette direction qui aurait pourtant tiré toutes les conséquences de la disparition du magistrat instructeur. On a préféré rester entre deux eaux à cause surtout du second refus.
Alors que Jean-Marie Bockel, avec cette fraîcheur des gens intelligents qui, devant l'inconnu, s'imaginent que tout est possible, avait d'emblée accepté au moins une interrogation, voire une remise en cause du statut du Parquet, Michèle Alliot-Marie a fermé toutes les portes de ce côté. On sent bien qu'elle ne parle pas en son seul nom et que le président de la République n'est absolument pas disposé à se priver, au bénéfice de l'Etat, d'une emprise parfois utile sur le processus judiciaire. L'indépendance du Parquet va demeurer un sujet tabou même si on feint d'être assuré que le problème ne se pose pas. J'ai moi-même sous-estimé cette difficulté et je fais amende honorable. Certain que les comportements humains sont capables de dominer les structures, je n'ai pas bien mesuré le poids de celles-ci. Je ne sais pas si le Parquet est gravement dépendant et obéissant dans la gestion des affaires que le Pouvoir estime relever de son impulsion mais en revanche l'air du soupçon, l'ère de la méfiance, au coeur de l'opinion publique, n'autorisent plus qu'on laisse un système aussi gravement décrié en l'état sans tenter au moins de réfléchir à sa métamorphose. Il faut trouver les moyens techniques et politiques, d'abord, pour rassurer le citoyen sur les apparences de l'indépendance.
Parce que la garde des Sceaux s'oppose à ce débat fondamental qui, correctement négocié, rendrait sinon souhaitable du moins indolore pour la plupart la suppression du juge d'instruction, on n'est pas loin de redonner de la vie à ce dernier.
Le paradoxe, c'est qu'en désirant démontrer son inutilité, par manque d'audace on le légitime. C'était cela, le but ?
A la suite du post d'Aïssa je voudrais dire que concernant le projet de disparition du juge d'instruction, ce n'est pas la conséquence de l'étouffement des affaires politico-financières qui me trouble en premier.
Il n'est simplement pas envisageable que toute affaire médiatisée et sensible ne devienne qu’un instrument pour défendre via le Parquet les intérêts des gouvernements en place et des groupes de pression pour lesquels ils sont très à l’écoute.
C'est aussi cela le risque de la disparition d'un juge indépendant dans toute procédure pénale touchant les politiquement convenus et promotionnés dans le débat public comme des caisses de résonance des dogmes à l'oeuvre dans les groupes de défense d’intérêts privés ou particuliers.
Outreau n'aurait pas existé sans un parquet général reprenant totalement et inconditionnellement à son compte pendant trois ans d'instruction, sans aucune indépendance intellectuelle, les "croisades" des politiques contre la pédophilie.
Dans l'esprit de ces gouvernants convertis par les groupes de pression et médiatiques, la pédophilie était devenue forcément le crime de M. et Mme tout le monde forcément organisé en réseau. "Le mythe de la pédophilie" avait déclaré le procureur Lesigne lors la commission d'enquête parlementaire.
Par ailleurs, ce que je souhaiterais de la part des magistrats auxquels le GDS soumettra son avant-projet, c'est une grande vigilance au sujet de l'intitulé et du positionnement de ce juge de l'enquête.
Si ce juge doit intervenir à la manière du juge des libertés et de la détention, c'est-à-dire seulement comme un sigle juste plaqué dans la procédure, histoire d'entretenir l'illusion du contradictoire, alors je ne comprendrais pas qu'au regard de l'expérimentation JLD sur une période de dix ans, le gouvernement, avec l’assentiment des magistrats, s'obstine à encombrer la procédure pénale d'une sorte de pièce dupliquée et rapportée qui, jamais, ne trouvera son identité et sa place.
"Très souvent, et c'est ici le cas je crois, la meilleure réforme est celle qu'on ne fait pas." a écrit Denis Monod-Broca.
Je pense que concernant la création du JLD cette observation est très vraie. Je crains que de la même manière la création d’un juge de l’enquête n'entraîne une totale désillusion du même type.
Je n’arrive pas à saisir comment un juge peut garantir les droits aux justiciables alors qu’il ne sera saisi que ponctuellement, pour un dossier dont il ne maîtrisera rien.
Il me semble que son mouvement naturel sera de s'en remettre à son collègue procureur et à son appréciation... comme les juges des libertés et de la détention l'ont systématiquement fait dans l'affaire d'Outreau.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 10 novembre 2009 à 05:45
Je pense plutôt que c'est l'instruction qui se rebiffe et de quelle manière!... Prenant le citoyen directement à témoin, elle lui montre son indépendance et son impartialité en n'hésitant pas à renvoyer, quand le dossier y suffisait, ceux qu'on aurait pensé intouchables, ministre, Premier ministre, Président de la République, au tribunal, en correctionnelle… On a l'impression d'une course contre la montre, d'un Siège de l'instruction las d'avoir si longtemps été impressionné quand ce n'était pas carrément dominé par un Parquet d'accusation puis maintenant trahi par lui qui ne voit rien à redire à sa disparition et prendre sa place immédiatement, un Siège de l'instruction donc s'élevant face ce dernier et décidé à lui tenir désormais la dragée haute, lui fixer ses limites, lui réassigner son rôle, le renvoyer dans ses cordes, bref le cogner aussi fort que celui-ci s'est abstenu de le défendre … Comment le citoyen ne verrait-il pas dans cette nouvelle attitude du juge d'instruction (attitude qui somme toute aurait dû toujours être celle-là) le véritable rempart contre tous les excès et malversations du pouvoir politiques?... C'est grâce aux juges d'instruction qu'ils sont démasqués et jugés; un procureur aurait étouffé ces affaires, voilà ce qui se dit et contre cela, on ne peut pas dire que la défense du Parquet soit à la hauteur, lui qui aujourd'hui est quasiment pour l'Opinion synonyme d'occultation et d'étouffement des «affaires» comme on dit ... C'est une guerre intra-judiciaire à laquelle on assiste en direct et je ne crois pas que le Parquet, malgré l'esbroufe et les professions de foi, soit de taille à lutter et vaincre. Le Parquet reste globalement le caniche judiciaire du pouvoir politique; le juge d'instruction la protection ultime du citoyen contre les abus; les choses sont énoncées ainsi en ce conflit et le citoyen observateur n'est pas dupe … Face à un Eric Halphen, un Van Ruymbeke, un feu Thierry Jean-Pierre, une Simeoni, les Marin et autres Courroye ne font pas le poids qui n'ont d'yeux doux et sont soumis que pour le haut (les puissants) le protéger et pour le bas (la populace) généralement qu'une sorte d'imbécillité systématique de répression et d'accusation réellement fondées ou non n'importe … Le juge d'instruction s'est par trop longtemps fourvoyé et a trahi sa mission de protection sans condition des libertés individuelles en cédant implicitement le pas face au Parquet qu'il s'était mis en tête par je ne sais quel tour de sorcellerie ou d'auto-hypnose que celui-ci lui était supérieur et d'une certaine façon, puisqu'il ouvrait l'information et lui enjoignait d'instruire, le commandait et aujourd'hui, face à la menace de sa disparition, il se réveille enfin et réagit. Vous pensiez quant au Parquet que les personnalités y seraient à même de bousculer les structures et vous en êtes revenu … Cependant assistez avec quelle énergie et volonté les personnalités de ce Siège de l'instruction eux les bousculent et les rétablissent pleines et entières. Ils réasseoient sur ses bases solides leur pouvoir qui est autrement impartial et indépendant que celui du Parquet; supérieur à ce point que celui-ci n'en finissait plus ces jours de baver pour se l'approprier entier ... Un changement en direct des mentalités des juges d'instruction, c'est de cela dont il s'agit et quel tonnerre de bruit autrement plus vrai et franc que les petits moulinets rhétoriques d'un Parquet étranglé de tirer en vain sur sa chaine et son collier … Mais ce changement ne portera ses fruits et ne les sauvera (les juges d'instruction) que s'ils ne trahissent pas encore une fois le citoyen qu'ils se doivent de protéger; que s'ils ne s'asseoient pas à nouveau sur les principes et leur statut; que si le citoyen puisse encore et toujours le saisir directement et constater chaque jour et clairement qu'il ne sera pas moins bien traité que le Président de la République lui-même. Si le juge d'instruction est capable de ne plus s'en laisser compter par aucun pouvoir ni Parquet; s'il est capable d'être enfin ce à quoi la loi l'a de si longtemps désigné, assigné et confirmé et s'il cesse irrévocablement d'être comme l'éternel subalterne soumis du docile subalterne parquetier, alors oui il faut le conserver!
NB/ J'ai généralisé à escient; j'ai bien conscience qu'il est des membres du Parquet qui ne le cèdent en rien à l'authenticité et la loyauté à certains juges de l'instruction qui aiment à japper très fort et faire le beau pour se faire remarquer et récompenser, d'où la trahison du Siège ... Mais ce serait entrer dans des considérations de détail et cas par cas qui n'apporteraient rien de significatif à mon propos.
Aïssa.
Rédigé par : Aïssa Lacheb-Boukachache | 09 novembre 2009 à 18:55
@ Christine,
Le billet "Survol" est de janvier 2006, vous le trouverez en cliquant sur archives à gauche. En le cherchant je suis tombée sur un autre très beau billet dont voici un extrait :
...." je ne suis pas sûr qu'en dépit de quelques exceptions remarquables dont, pour n'en citer qu'une, celle de Renaud Van Ruymbeke, l'indépendance des magistrats instructeurs soit totale. Elle donne plutôt l'apparence de l'être et les médias complaisants ou ignorants n'y voient que du feu. Il me semble qu'on devrait plutôt évoquer des indépendances "ciblées" qui s'en prennent aux puissants de toutes sortes, après une sélection dont les critères sont clairs pour les gens avertis. Pour la multitude des dossiers "non sensibles", l'indépendance est complète pour la seule raison que son contrôle s'avérerait inutile faute d'intérêt".....
Voilà. Je maintiens : la fraude juridique est ce qu'il y a de plus terrible pour le justiciable...
Je ne sais pas s'il est possible de demander la révision d'un procès (même le plus banal et le plus "civil") pour subtilisation de preuves mais ça devrait.
Duval Uzan
Rédigé par : Duval Uzan | 08 novembre 2009 à 19:57
Le juge d'instruction peut déjà requalifier les faits puisqu'il est saisi "in rem", c'est-à-dire qu'il n'ait saisi que des faits et rien que des faits.
Il n'est pas tenu par les qualifications des faits retenus par le réquisitoire introductif du parquet.
Il en est de même pour le Tribunal correctionnel ou la cour d'assises.
Rédigé par : Raoul Conakry | 08 novembre 2009 à 18:37
Réponse à Duval Uzan.
Que ce soit en matière civile ou pénale, les conclusions des avocats sont toujours signées.
Mais la portée des conclusions diffèrent selon le type de procédure.
Quand la procédure est écrite (Ministère d'avocat obligatoire), les conclusions priment les plaidoiries.
Quand la procédure est orale (le ministère d'avocat n'est pas obligatoire), le juge n'est pas tenu par les conclusions remises à l'audience.
Rédigé par : Raoul Conakry | 08 novembre 2009 à 18:30
"Certain que les comportements humains sont capables de dominer les structures, je n'ai pas bien mesuré le poids de celles-ci."
Oui, comme toujours, il y a les institutions, les procédures, etc. et il y a ce que les hommes en font.
Ni celles-là, ni ceux-ci ne sont parfaits.
Corriger institutions et procédures parce que les hommes les utilisent mal est une tentation permanente mais qui me semble parfaitement injuste vis-à-vis d'elles.
D'autant plus que institutions et procédures sont d'autant meilleures qu'elles sont pérennes, immuables, et donc connues et comprises tant par les professionnels que par les simples citoyens, ici par les justiciables.
Il appartient à chacun, dans le cadre d'institutions et de procédures bien connues, aux qualités et défauts bien répertoriés, d'agir avec autant de correction, d'honnêteté, de civisme que possible...
L'idée que ce sera mieux parce qu'on aura changé (et qu'on ne voit pas encore tel ou tel défaut que la pratique révèlera) me semble dangereuse.
Très souvent, et c'est ici le cas je crois, la meilleure réforme est celle qu'on ne fait pas.
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 08 novembre 2009 à 17:10
Bonjour, quelqu'un pourrait-il mettre un lien afin que je puisse découvrir le billet "Survol" ? Merci beaucoup.
Rédigé par : Christine L. | 08 novembre 2009 à 16:40
Pourquoi ne pas élargir cette souveraineté de la Cour d'assises à d'autres Cours ?
Pourquoi le juge d'instruction n'aurait-il pas le droit de faire des recherches lui-même ou de requalifier les faits en fonction des réponses apportés par la pré-enquête de la police judiciaire ?
Et pourquoi le justiciable qui a porté plainte avec constitution de partie civile et qui a payé la consignation doit-il dépendre d'un avocat pour lire les pièces qu'il a lui-même demandées ?
Car de deux choses l'une : ou bien il a le droit de demander les pièces ou bien il n'en a pas le droit.
Enfin je trouve tout à fait légitime de soulever le problème du juge d'instruction, car il s'agit presque d'un pré-arrêt.
Le juge décide seul de l'envoi en correctionnelle ou pas ! Ce qui fait que le procès devient d'une certaine façon le procès du juge d'instruction.
Enfin ce n'est pas un procès vierge et je ne trouve pas cela normal mais je ne connais pas grand-chose en Droit .
Je trouve étonnant qu'on aille faire une enquête pour savoir s'il faut ou non supprimer le juge d'instruction alors que les citoyens ne savent pas grand-chose sur ce qu'est un juge d'instruction, qu'ils confondent avec le vénéré Maigret.
Donc Madame la garde des Sceaux devrait entreprendre une action d'information et de formation des citoyens sur le Droit comme vous l'aviez si bien suggéré dans votre billet SURVOL que je conseille de relire.
Il ne faut pas faire de ce SAVOIR un POUVOIR.
Duval Uzan
Rédigé par : Duval Uzan | 08 novembre 2009 à 15:33
Véronique, une précision : la cour d'assises est souveraine et peut procéder à tout acte d'instruction qu'elle juge nécessaire, ainsi qu'à la requalification des faits. Elle n'est pas enfermée dans la procédure qui lui est présentée.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 08 novembre 2009 à 13:08
MAM a dit qu'il n'y a pas de "risque qu'un dossier sensible soit enterré".
Ca tombe bien, j'ai justement écrit il y a une quinzaine de jour au garde des Sceaux, au Premier Ministre, au Président de l'Assemblée nationale, au Bâtonnier et aux syndicats de magistrats, qu'il existait au sein du pouvoir judiciaire une machine à enterrer et à garantir l'impunité qui devait être détruite, avec le mode d'emploi pour aboutir.
Rédigé par : Papi Ensoleillé | 08 novembre 2009 à 12:00
Bonjour,
Juge d’instruction ou pas, victime ou accusateur, ce qui est urgent de faire c’est la promulgation d’une LOI (ou décret ?) concernant la procédure, faisant obligation aux parties, qu’elles soient accusatrices ou victimes, en procès civil comme en procès pénal, d’apposer leur signature sur chaque page des conclusions transmises à la Cour, ainsi que sur chacune des pièces jointes.
Qualifier pénalement toute transgression de cette loi, quel que soit l’auteur l’ayant commise.
Considérer que l’accusation devient victime quand on détourne ses dires par des moyens frauduleux.
Permettre aux justiciables de consulter eux-mêmes leur dossier.
Car il n’y a rien de pire pour un justiciable que de n’être pas entendu.
Dans l’état actuel des choses aucun justiciable n’a les moyens de vérifier et de savoir de façon précise ce qui a été réellement transmis à la Cour !
Si je me trompe j’aimerais qu’on me le dise.
Aucune justice n’est possible tant que les dés peuvent être truqués.
Duval Uzan
Rédigé par : Duval Uzan | 08 novembre 2009 à 10:56
J'avoue qu'on ne comprend plus trop bien ce qui se passe à propos de la suppression projetée du juge d'instruction. "
Il faut peut-être simplement considérer que les sondages effectués pour le compte de l'Elysée une demi-heure avant l'intervention du GDS chez vos collègues de l'USM ont confirmé la tendance nette chez les sondés que non, non, rien à faire, c’est définitivement non, l'échantillon n'approuve pas la disparition du juge d'instruction.
Très sérieusement, je pense que cette idée de Nicolas Sarkozy de supprimer le JI en réaction à une garde à vue maladroite ordonnée par un juge contre un journaliste de Libération, sans que ce juge n’ait eu la "souplesse" de téléphoner aux avocats du quotidien n'apparaît pas à l'opinion comme une justification suffisante pour démolir un système pénal très imparfait et violent, certes, mais qui puise sa source dans un héritage culturel profond - la malheureuse, ce juge, trop gonflée tout de même, vous vous rendez compte faire ça à un médiatique ! Euh, je n'ose pas imaginer la réaction du ministre de la culture si celui-ci avait été à l'époque Frédéric Mitterrand.
Et puis, Philippe, entre nous, essayez de dire à votre procureur Marin que ses initiatives sont à elles toutes seules des publicités contre la disparition du JI.
Dans cet héritage et dans cet imaginaire collectifs, il y a très simplement, et sans doute très confusément, l'attachement non négociable à la promesse d'un juge indépendant, dont le principe est la seule garantie de l'idéal et de l’espérance d'une justice impartiale.
Ce n'est pas rien.
"En effet, dans le système américain, c'est la personne mise en cause qui choisit la procédure (coupable=procédure de plaider coupable ; non coupable=procès) et surtout les procureurs sont élus (dans 39 Etats)."
(Raoul Conakry)
Dans le remarquable documentaire "Justice à Vegas" diffusé sur Arte il y a quelques semaines, je n'ai pas eu l'impression que dans le système américain la personne mise en cause CHOISIT la procédure.
En réalité, concernant l'alternative plaider coupable ou procès, les choses se résument à peu près à choisir entre la peste et le choléra.
Par ailleurs le fondamental qui structure notre procédure pénale repose sur la recherche de la vérité. Le plaider coupable façon "Justice à Vegas" homologue un accord relatif à la peine entre l'accusation et le défense. La vérité des faits ne devient que très secondaire.
Quand il y a procès, j'ai cru comprendre que l'affrontement entre défense et accusation ne se déploie qu'entre les limites strictes de la qualification des faits retenue par l'accusation.
Exemple : ce qui va à la fois progressivement et subitement transformer un homme de 72 ans en un assassin plein de sauvagerie à l'encontre d'un homosexuel n'intéresse pas le tribunal.
L'accusation dit qu'il y a eu intention de massacrer, la défense dit qu'il y a eu légitime défense. Les débats ne porteront que sur la question de la légitime défense, c'est-à-dire que les audiences n'interrogeront et ne se pencheront que sur les quelques minutes qui vont transformer un homme apparemment paisible en un déchaînement de furies et de violences.
A l'issue du procès, retour à la case départ. Le verdict et la condamnation vont valider la proposition initiale des procureurs si l'option plaider coupable avait été retenue.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 08 novembre 2009 à 05:12
Qu'est-ce qui vous autorise, Monsieur l'Avocat général, à dire que la grande réforme pénale souhaitée par Nicolas Sarkozy sera abandonnée, au sens où le juge d'instruction sera probablement maintenu - avec cependant des pouvoirs qui le rapprocheraient d'un juge de l'enquête ?
La réforme aura bien lieu mais Sarkozy ne la présentera que l'été prochain. Cette date peut s'expliquer par la volonté de Sarkozy de ne pas proposer rapidement une réforme à laquelle les Français, agréablement surpris par les audaces de la juge d'instruction Simeoni, ne seraient pas prêts à se convertir.
Le rapport Léger intègre les grands principes de la réforme voulue par Sarkozy. Ce dernier ne pourrait donc enterrer un rapport par lui-même demandé.
Contrairement à ce que vous affirmez, Monsieur l'Avocat général, le rapport Léger, s'il ouvrait sur un projet de loi, transformerait la procédure pénale française en l'alignant sur l'américaine. C'est un rapport révolutionnaire, qui prône sans le dire l'abandon définitif de notre procédure pénale.
Le rapport Léger est également intéressant par sa proposition d'une codification de l'ensemble des infractions pénales, dont certaines, actuellement, sont portées par des textes non codifiés. Aujourd'hui, on ne trouve pas un document officiel unique répertoriant l'ensemble des incriminations. Pour avoir une connaissance relativement exhaustive de celles-ci, le public doit se contenter du code pénal édité par les éditions Litec (il faut souligner ici l'important travail réalisé par l'actuel président de la chambre criminelle de la Cour de cassation, Monsieur Pelletier et l'Avocat général honoraire, Monsieur Perfetti).
Rédigé par : LABOCA | 07 novembre 2009 à 23:58
"J'ai moi-même sous-estimé cette difficulté et je fais amende honorable."
Pourquoi ai-je un sentiment de déjà lu...
Rédigé par : Catherine JACOB | 07 novembre 2009 à 18:43
Cher Procureur
Réforme du juge d'instruction ou pas, le problème est que nous n'avons plus, nous les citoyens contribuables, confiance en vous, magistrats !
Ni pour nous défendre face aux délinquants, ni pour apprécier notre innocence quand, par malheur, nous croisons vos routes ...
Vous êtes devenus une caste coupée des réalités, soucieuse de son indépendance et assez peu de ses devoirs, si j'en juge par la réprimande du juge Burgaud ou l'utilisation outrancière de la détention préventive.
Le pire est que notre peuple de veaux en redemande, si j'en juge par le score de la mère fouettarde norvégienne qui s'est présentée en vert pomme aux dernières élections.
Peut-être qu'un peu d'échevinage ferait du bien. Qu'un peu d'électif casserait le jeu compliqué de vos syndicats et l'inévitable corporatisme de vos professions, avocats inclus ?
En tous cas, il faudra bien un jour, c'est vrai, rompre avec l'ancien régime.
Cordialement
Rédigé par : david | 07 novembre 2009 à 17:08
Le peuple et la justice.
Comment puis-je croire en la justice de mon pays. Trop de scandales, de vices de formes, de gens emprisonnés sans raisons, de magistrats "aux ordres" .J'arrête.
Le salut ne peut venir que de la magistrature elle-même qui, d'une façon qui lui conviendra, forcera les politiques au respect, agira véritablement au nom du peuple, saura retoquer et rendre inutiles les multiples lois incohérentes, contradictoires, votées sans avoir été confrontées à l'arsenal juridique existant.
Les politiques et les magistrats se doivent d'être des gens au-dessus de tout soupçon, les manquements, comme pour un soldat sur le champ de bataille, doivent avoir le même effet foudroyant.
Que c'est bon de rêver, ça aide à oublier la réalité, c'est d'ailleurs fait pour cela.
P.S: il me plaît à imaginer que la justice est moins éloignée de mon idéal que la politique, mais elle a encore bien du chemin à parcourir.
Rédigé par : yves | 07 novembre 2009 à 16:23
@PB
Je ne suis ni pour ni contre la disparition du juge d'instruction, je suis pour une équité de traitement aussi bien entre la victime et l'accusé.
Ce que je préconise et qui ne coûterait pas grand-chose à mettre en oeuvre, ce sont des procédures très simples.
En premier garantir à la défense les mêmes droits qu'à l'accusation. Permettre à tout mis en cause comme témoin assisté, dès le début de l'instruction, de consulter TOUT le dossier.
En deuxième, les experts psy devraient expertiser sans avoir accès au dossier. Comme ça ils ne seraient influencés par aucun a priori.
Un mis en cause devrait pouvoir refuser d'être expertisé par un expert dans lequel il n'aurait pas confiance. (La réputation de certains experts côtoie celle de certains magistrats).
La défense devrait pouvoir exiger des actes et des expertises sur des points précis, notamment sur certains témoins... leur crédibilité en sortirait éclairée sous un angle différent. Aussi sur la victime dans certaines situations, notamment en cas de négation du mis en cause, elle devrait être expertisée dans ce sens.
Il y a des situations où la victime est sans équivoque victime, mais il y en a d'autres où la victime ne l'est pas tant que ça. Quand c'est parole contre parole il devrait y avoir autant de présomption d'innocence que de présomption de victime.
Le procureur devrait siéger au même niveau que les avocats des deux parties et ne pas faire de réquisitoire contre l'accusé, mais une synthèse équilibrée, y compris redonner la place au "doute qui doit bénéficier à l'accusé".
Laisser le jury populaire estimer en son âme et conscience la peine à infliger. Ces jurés devraient motiver leur verdict.
Le jury populaire pourrait augmenter en nombre, avoir accès au dossier ou du moins consulter des pièces sur leur demande. Le délibéré devrait se faire sans le président et ses assesseurs.
L'influence qu'exercent ces magistrats professionnels sur les jurés est opaque et mieux protégée qu'un secret défense.
Ensuite, interdire aux associations de défense de se constituer partie civile.
Elles ne devraient même pas être citées comme témoin, payer l'avocat des victimes si nécessaire, mais pas intervenir.
Pour terminer, le garde des Sceaux et deux tiers des membres du Conseil Supérieur de la magistrature devraient être élus comme les autres représentants du peuple. Elus pour cinq ans au suffrage universel pour la garde des Sceaux, un an après l'élection du Président de la République. Et par un collège de grand électeurs, pour cinq ans également, non renouvelable, pour les membres du CSM.
Ça coûterait combien ?
Pas grand-chose..
Combien ça rapporterait ?
Un blason redoré pour la Justice et les magistrats.
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 07 novembre 2009 à 15:31
"Il faut trouver les moyens techniques et politiques, d'abord, pour rassurer le citoyen sur les apparences de l'indépendance."
C'est important, oui. Un premier pas permettant de renouer le lien entre citoyens et politiques sur ce sujet, mais pas le dernier à faire.
Une indépendance de fait serait aussi souhaitable.
Rédigé par : W. | 07 novembre 2009 à 13:25
"Je sais qu'à mon poste, il n'y a pas meilleur que moi en France à l'heure actuelle. Cela peut paraître prétentieux mais j'en suis persuadé." (Patrick Viera dans L'Equipe, écarté de la sélection pour le match de barrage France-Irlande).
Rédigé par : SR | 07 novembre 2009 à 09:56
Pourquoi ne peut-on toujours pas, 220 ans après la disparition de l'ancien régime, préparer, débattre et finalement décider de réformes aussi lourdes de sens et de conséquences pour le peuple, de façon démocratique, c'est-à-dire transparente, voire publique? C'est inacceptable et scandaleux. Il est simplement consternant que l'ensemble de nos politiques, d'une aile à l'autre, semblent s'y résoudre. Avec la bénédiction de la presse.
Rédigé par : Christian C | 07 novembre 2009 à 08:14
Comme vous, je pense que les structures sont ce que les hommes en font.
Moi, juge d'instruction ou pas, j'attends le procès de Julien Coupat.
Je sens qu'on rirait tellement (jaune) qu'ils s'arrangeront pour qu'il n'ait jamais lieu...
Rédigé par : Alex paulista | 07 novembre 2009 à 04:18
Monsieur,
Vos analyses sont toujours pertinentes et notamment sur la réforme de la procédure pénale.
Toutefois, je constate que vous invoquez le système accusatoire et en particulier le système américain (celui qui est dans la tête de notre président) sans pour autant en souligner les principes essentiels.
En effet, dans le système américain, c'est la personne mise en cause qui choisit la procédure (coupable=procédure de plaider coupable ; non coupable=procès) et surtout les procureurs sont élus (dans 39 Etats).
Je crois que malheureusement, la réforme projetée ne va pas dans ce sens et je ne pense pas que le monde judiciaire français actuel soit préparé à ce type de système.
Que dire des politiques qui en sont restés à l'Ancien Régime et à la peur des Parlements empiétant sur le pouvoir exécutif l'empêchant de se réformer.
D'ailleurs, notre monde politique serait-il prêt à accepter que des procureurs soient élus et concurrencent donc leur légitimité.
Et le parquet serait-il prêt à cette révolution ?
Rédigé par : Raoul Conakry | 07 novembre 2009 à 00:46