Jean Genet a dit un jour : "Je ne me moque jamais, j'ai trop à faire d'aimer ou de haïr".
Je ne suis pas persuadé que cette référence plaise à Alain Minc, invité de la matinale de France Inter. Il n'empêche que je n'ai cessé de songer à ce refus de la dérision, à cette volonté d'aller vers le grave, en écoutant l'essayiste-homme d'influence-faiseur de carrières-conseiller de Nicolas Sarkozy.
Je sais, je n'aurais pas dû. J'aurais dû m'occuper du fond, admirer l'intelligence et la vivacité, goûter la pertinence, parfois, des réponses et des comparaisons - comme celle si lucide entre journalistes et politiques qui en effet, en France, ne sont pas loin de faire le même métier -, être séduit par cette personnalité brillante qui accomplit tant de choses et sur tant de registres sans jamais s'égarer, apparemment, dans l'entrelacs de ses entreprises et démarches multiples. Mais je n'ai pas pu.
Parce qu'il y a le ton insupportable. Rien n'est sérieux, tout est futile, le pouvoir qu'on a est une bénédiction, un cadeau, tellement dévolu à qui le mérite qu'il serait indécent de le justifier. La République française est un immense terrain de jeu qui permet de bien s'amuser entre puissants. Les autres, ceux qui ne savent rien, les malheureux qui ne sont initiés à rien, ceux qui n'ont pas l'élégance de prendre leur infortune sans protester, tant pis pour eux. Ce ton à la fois condescendant et ironique que, journaliste, je n'aurais pas accepté. Cette manière désinvolte de distribuer les bons et les mauvais points de telle sorte que tous en ressortent rapetissés, celle qu'il prétend estimer, Martine Aubry, ceux qui ont le culot d'afficher des ambitions présidentielles sans être évidemment à la hauteur de ce à quoi ils aspirent et même, pour faire bonne mesure, Le Monde ! Il y a le pouvoir, ses serviteurs, ses profiteurs et au-delà une bêtise crasse qui ne mériterait pas l'ombre d'une attention s'il n'y avait cette insatiable et ridicule curiosité médiatique.
Si je n'avais pas ce défaut grave d'avoir l'indignation facile, je me laisserais aller, citoyen heureux et complaisant. Je raffolerais des niches, des piques et des saillies. Mais le ton, mon dieu ! Il n'y pas de conflit d'intérêts, jamais, pas plus que de l'intérêt à avoir pour les conflits. Tout va bien, monsieur le Président. Il y a derrière cette constante causticité une manière très française de faire de l'esprit sur tout, de se servir de la dérision pour ne surtout pas donner l'impression d'une once de sérieux, qui entacherait la divine et si distinguée légèreté. Il n'y a que "les ploucs" qui se font du souci. Parlons net : si je n'étais pas du nombre des agités et des lourds, j'adorerais Alain Minc qui, au fond, avec talent et constance, a pour vocation de "se foutre du monde". Ses traits le font rire et causent suffisamment de mal pour toucher mais pas assez pour susciter une riposte digne de ce nom. C'est pour cela qu'Alain Minc n'aime pas ceux qui l'obligent à prendre la défense de sa propre personne. Quoi de plus pénible qu'un Laurent Mauduit qui ne vous lâche pas les basques et qu'on ne peut renvoyer dans son coin d'un revers de main !
Mais ce ton qui domine tout et vient imprégner chaque propos d'une insoutenable légèreté ! Ils sont des amis, Bernard-Henri Lévy et lui, mais force est de reconnaître que si leur intelligence est commune, le premier offre au moins à son contradicteur l'hommage d'une parole authentique ! BHL aime ou hait : il ne se moque pas. Il semble admettre, même s'il ne doute pas de lui, qu'il vit dans un univers au moins virtuellement composé d'égaux.
Alain Minc sans doute croit jouer ainsi une partition mozartienne, toute de retenue et de finesse. Il serait redoutable s'il changeait de ton. Pourquoi ne le ferait-il pas un jour puisqu'il est clair qu'il s'écoute ?
"Et si Alain Minc avait raison ?"
Titre ironique pour article ironique...
Ironie du sort, je publie aussi un article sur Alain Minc (entre autre) aujourd'hui sur mon propre blog
Alain Minc, comme tous les sophistes libéraux, a profité de notre crédulité, sorte d'état de "minorité intellectuelle" que fustigeait déjà Emmanuel Kant dans "Was ist Aufklärung ?".
En surfant dernièrement sur la Toile, j'ai lu qu'Alain Minc avait eu droit au Prix du livre d'Économie pour l'un de ces récents ouvrages, intitulé "Les prophètes du bonheur" (Grasset, 2004).
Comment peut-on attribuer un prix d'économie à Minc ??? J'essaie d'y répondre : l'attribution de ce prix, c'est aussi une des expressions de notre servitude volontaire.
LPR
Rédigé par : Luc Paul ROCHE | 20 avril 2010 à 20:01
@ oursivi
"Une décoction de Guéant appliquée sur le fondement, (...) personne n'y pense pour soigner les engelures et autres vergetures, quel gâchis."
Pour le fondement, vous avez oublié les hémorroïdes !
Cordialement,
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine @ oursivi | 17 avril 2010 à 11:53
Ben mince alors !
Rédigé par : mike | 17 avril 2010 à 09:57
"Je trouve qu'il y a un peu de Karl..."
Chacun trouve ce qu'il veut (ou peut...).
Rédigé par : jpledun @ Achille | 17 avril 2010 à 00:29
"C'est l'émotion… excusez-moi… Atchoum !... Snif..."
Rédigé par: Aïssa Lacheb-Boukachache | 16 avril 2010 à 19:25
Une décoction de Guéant appliquée sur le fondement, et hop, remis d'aplomb l'Aïssa !
C'est bête, on ne pense jamais à la décoction de Guéant, c'est pourtant simple et économique (enfin, pas tant que cela) mais personne n'y pense pour soigner les engelures et autres vergetures, quel gâchis.
Avant, on avait la poudre Pilhan aussi, mais il paraît qu'ils ont égaré l'urne.
Ahhh, les maladroits.
Clic, clic, zzzzzreuereuu.
AO
Rédigé par : oursivi | 16 avril 2010 à 22:45
Je n'abonderai pas dans votre sens, cher PB… Les journalistes a fortiori ceux du service public ont raison de nous exhiber, populace (dixit Imbert) que nous sommes, ces modèles parfaits d'inutilité totale, de parasitisme absolu, d'incompétence vertigineuse en tous domaines, érigés par une certaine idéologie en exemple de toute chose. Ces journalistes ont raison à intervalles réguliers de nous montrer en quoi consiste concrètement le travailler nul pour gagner un maximum, érigé implicitement en credo social. Il faut que la populace (dixit Imbert) ignorante voie et sache comment sont ces spécimens qui la grondent, la vilipendent, lui donnent des conseils, des leçons, des ordres même… Quel service public rendrait un Minc caché éternellement dans une cave quelconques des lambris républicains dorés ? Il ne servirait à rien... Il faut l'exposer naturellement, le laisser parler, qu'on sache comment c'est fait ces gens-là, qu'on sache qu'ils existent et qu'ils sont plus nombreux qu'on le croit… Il faut que les Français aient la preuve qu'ils produisent eux-mêmes leur vanité crasse et qu'elle prospère gaiement de leur abrutissement chronique. Vous vous rendez compte ! Il va poser ses fesses une heure sur un fauteuil en cuir d'un conseil d'administration ou de surveillance ou de directoire pour écouter une lecture quelconque d'un rapport quelconque ou pour ne rien dire, simplement, observer les mouches, le plafond et durant ce temps si long (oh, une heure, une heure de ce labeur, que ça n'en finit jamais…), c'est le salaire de mille bougres ouvriers qu'il ramasse pour ce sacrifice… Aussi, éternel Raspoutine du Pouvoir capitaliste, comment ferait-on l'impasse sur lui sans porter gravement préjudice à l'intérêt public et démocratique… Non non, je ne vous suis pas ; il nous faut ces guides, ces phares (ces journalistes qui exhument de leur trou ces Minc de tous acabits) pour nous amener à plus de méditation. J'avais écrit qu'un grand journaliste est celui-là qui produit de la pensée. Je maintiens et confirme et ajoute : qui suscite pareillement de la pensée. Comment serait-on instruit et intelligent autrement de ces singularités que de grands journalistes nous laissent à entendre et à voir… Il faut du Minc, tous les jours du Minc, à la télé, à la radio, dans les journaux, Le Monde, Biba, Hot vidéo, dans les blogs, Internet, les tchat, les culs d'autobus en affiches, les colonnes Morris, les paquets de tabac à la place du «Fumer tue» et pour finir le pinard juste au-dessus du «Buvez avec modération»… La populace (dixit Imbert) a besoin de sa dose de Minc, qu'elle sache à quels abîmes de stupidité elle est tombée, mais que des remèdes sont possibles, la Recherche tenace et constante poursuit en cette dure chose ses laborieuses et complexes recherches… Merci, merci cher PB, notre ami, notre cousin, que dis-je notre cousin, notre frère de contrition et d'espérance, de nous servir encore une fois ce terrible brouet Minc ; ainsi nous ne désespérerons pas de sauver notre peau même si la voie demeure étroite… Merci aussi à Demorand, merci à Paoli, merci à tous et particulièrement France Inter ma favorite, merci, merci, j'en ai quelques gouttes qui larment au long de mes joues… C'est l'émotion… excusez-moi… Atchoum !... Snif...
Aïssa.
Rédigé par : Aïssa Lacheb-Boukachache | 16 avril 2010 à 19:25
Achille @ jpledun | 16 avril 2010 à 11:22
« Karl Zéro (que je n'aimais pas) va finir par devenir ma référence journalistique.
Chez lui au moins, quel que soit le sujet, la discussion avance. »
Je trouve qui y a un peu de Karl et beaucoup de Zéro chez notre Président, à commencer par cette manie de vouloir tutoyer son entourage et même les grands de ce monde un peu comme s’ils étaient des potes de comptoir...
Rédigé par : Achille | 16 avril 2010 à 16:51
@Achille | 16 avril 2010 à 10:53
"Achille @Ludovic | 16 avril 2010 à 09:46
« Faisons preuve de compassion et offrons Alain Minc à la Pologne. Je ne doute pas qu'il y fera des merveilles »
On peut lui offrir d’autant plus volontiers qu’il est, me semble-t-il, d’origine polonaise..."
A tous les deux, PB n'est pas YALTA !
Rédigé par : Catherine JACOB@Achille &Ludovic | 16 avril 2010 à 15:02
Philippe,
Est-ce que je vais chez Demorand, un des rares bons journalistes du moment, pour faire dans la dérision, pour jouer le jeu du moment qui consiste á commenter ce que le " milieu " dit ?
Non.
Alors oui, je ne suis pas fana de la personnalité de M.Minc. Et alors ?
Humblement, je sais que lui et d'autres peuvent me donner les clés sur un problème financier ou politique. Je l’écoute pour cela et non pas pour approfondir son caractère.
Les journalistes sont-ils tous obligés de faire dans le comique et dans la dérision ?
Faut-il qu'ils s'alignent tous sur Guillon ?
Joli programme en perspective.
Karl Zéro (que je n'aimais pas) va finir par devenir ma référence journalistique.
Chez lui au moins, quel que soit le sujet, la discussion avance.
En fait, le journalisme français est bien malade et les politiques en face en profitent.
Rédigé par : jpledun | 16 avril 2010 à 11:22
Oh Catherine A, j'ai une très large propension à m'enthousiasmer pour des personnalités originales, je ne pense pas être le seul. Il se peut que vous confondiez l'enthousiasme avec le cirage de pompe, c'est un peu dommage pour vous. Pour ma part, je me réjouis toujours qu'une personne m'entraîne à l'admirer, je n'ai aucune crainte d'amour-propre à dire mon admiration.
Alain Minc se dézingue tout seul, en se faisant condamner, par exemple, pour "plagiat, reproduction servile et contrefaçon" (Spinoza, un roman juif). C'est de la fausse monnaie, il brille de l'éclat des autres et, puisqu'il est si gourmand de visibilité médiatique, il est légitime de lui envoyer quelque tartes à la crème dans la figure, ça lui va bien au teint.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 16 avril 2010 à 10:54
Achille @Ludovic | 16 avril 2010 à 09:46
« Faisons preuve de compassion et offrons Alain Minc à la Pologne. Je ne doute pas qu'il y fera des merveilles »
On peut lui offrir d’autant plus volontiers qu’il est, me semble-t-il, d’origine polonaise...
Rédigé par : Achille | 16 avril 2010 à 10:53
Bonjour M. Bilger,
Alors que la Pologne vient de perdre cruellement ses élites, nous faisons la fine bouche et ne savons pas apprécier à sa juste mesure le génie d'Alain Minc.
Faisons preuve de compassion et offrons Alain Minc à la Pologne. Je ne doute pas qu'il y fera des merveilles.
Rédigé par : Ludovic | 16 avril 2010 à 09:46
Je suis encore une fois surprise par l'importance que vous accordez aux Minc / Demorand / France Inter le matin / les visiteurs du soir de l'Elysée, etc..
Je partage ce qui est dit par Jean-Dominique dans son commentaire.
Et puis, tous ces conseillers dont nous avons vu il y a quelques jours avec le très affligeant épisode des rumeurs - le rien à son zénith - à leurs yeux, une affaire d'Etat gravissime nécessitant impérieusement de mobiliser tout un appareil d'Etat (police, justice, services secrets, médias) pour déjouer "le complot" contre le président.
Ces intimidations de si bas étage des hommes de main de l'Elysée qui ferait sourire si en même temps nous pouvions oublier que le détournement des missions de la police et de la justice à des fins exclusivement privées, eh bien non, ce n'est pas rien.
Alors les conciergeries d'Alain Minc et de Nicolas Demorand...
Comme si tout cela était sérieux et grave.
"Rien n'est sérieux, tout est futile, le pouvoir qu'on a est une bénédiction, un cadeau, tellement dévolu à qui le mérite qu'il serait indécent de le justifier. La République française est un immense terrain de jeu qui permet de bien s'amuser entre puissants."
Voilà, c'est juste ça.
J'ai écouté des extraits de l'interview d'A. Minc sur France Inter.
Sincèrement, Philippe, j'ai beau me concentrer, je n'entends Alain Minc que comme un Pierre Charon. L’expression est un peu plus élaborée. C’est tout.
@ Catherine A
Faut quand même pas pousser, Catherine.
On nous inflige il y a très peu la vulgarité insigne des conseillers et des avocats du président essentiellement occupés avec leurs langues de vipère à exploser des complots imaginaires contre... le couple présidentiel, et N. Demorand ne trouve rien de mieux que de nous affliger encore et encore avec la promotion d'une des figurines du baby-foot elyséen.
Dans l'esprit de N. Demorand, en quoi les propos d'A. Minc seraient-ils seulement pertinents et crédibles pour informer les auditeurs de France Inter sur les jeux de ballon des pouvoirs ?
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 16 avril 2010 à 06:31
22 commentaires pour Minc, c'est beaucoup moins bien que pour le Pape ou la Pologne.
Juste hiérarchie des valeurs ?
Rédigé par : Polochon | 16 avril 2010 à 00:42
@PB
Houlala, à lire ce billet, j'ai eu l'impression de lire du Yves Coppens paléontologiste et paléoanthropologue, inlassable chercheur du chaînon manquant et accessoirement amoureux de Lucy !
AM serait donc le chaînon manquant entre l'intelligence d'un BHL et le cynisme des Gaccio-Guillon et consorts :-)
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine @ PB | 16 avril 2010 à 00:06
Je dirais même plus!
Car, vous l'avez compris, les protagonistes MM. Alain Minc et Bernard-Henri Lévy, les voilà uniquement pour commentaires, comme en sortie de pantomimes.
Le lynchage, c'est la pire des choses, la première pierre dans l'édifice de la médiocrité.
Ainsi, ces messieurs sont édifiants, généreux tandis que soupçonnés d'indifférence, mais peut-être simplement plus autant à jour qu'hier !
Sûr, si M. Minc était le Machiavel des puissants, nous serions en pleine Renaissance !
Mais, pourquoi énerve-t-il, et en quelles jalousies agite-t-il, confortablement comme vous dites ?
Quoi de commun entre Bernard-Henri Lévy et Alain Minc sinon la fréquentation des lieux de pouvoir ?
Vous les décrivez ainsi que va le regard sur qui brille, disant alors le devoir dévoyé avec l'élite.
L'un comme l'autre, pour aujourd'hui et pas pour trop loin demain, par l'un trouvant contre-valeur en argent ainsi qu'aujourd'hui, par l'autre comme ce que pourrait être autant de valeurs avec, mais sans assez, le même argent, agitent l'attente à jamais inouïe du même temps pérenne.
Effectivement, ils sont dans le même monde, un monde fort mais qui vacille.
Et leurs arguments, consolident-ils ou éloignent-ils ?
Gageons qu'ils consolident, comme vous le posez, tandis que Bach fut à Mozart....
Sûr aussi, nous ne sommes pas en situation de renaissance, cela est bien dommage, car les moyens techniques d'une telle bienvenue sont tous là, tandis que ni M. Minc, ni M. BHL, n'y voient quelque partageable bénéfice, du genre qui émulerait, comme ils en conçoivent autrement le sens, ainsi que vous le dites !
Rédigé par : zenblabla | 15 avril 2010 à 19:38
Bon... on a habillé Minc pour l'été, PB, qui est le suivant ?
Clic clic, zzzzzreuereuu, j'affute mes ciseaux.
Où ai-je bien pu fourrer mes épingles ?
Ah bah, elles sont toutes restées dans la dernière poupée...
Magie noire quand tu nous tiens !
Et qui a pris ma 7ème boule de cristal ?
JR, c'est encore votre galopin... Clic clic, zzzzzreuereuu.
AO
Rédigé par : oursivi | 15 avril 2010 à 19:37
Je ne connais pas Alain Minc (perso s'entend) et franchement il m'indiffère mais cette espèce de défoulement collectif me dérange sérieusement. Autant que le cirage de pompes. A dire vrai, les deux sont pour moi les faces d'une même médaille. En toc.
Rédigé par : Catherine A : dézingage, cirage de pompes, même combat | 15 avril 2010 à 19:09
Il est vrai que Minc fait autant de mal aux Français qu'à la France.
Pour une fois que votre opinion rejoint celle du bon sens.
Rédigé par : Patrick Handicap expatrié | 15 avril 2010 à 18:44
On m'avait dit, lorsque j'étais beaucoup plus jeune, qu'Alain Minc portait en réalité un pseudonyme, et qu'il était apparenté de très près au grand Professeur Minkovski, à l'égard duquel je nourrissais une admiration très vive, tant pour ses idées que pour sa manière de les exprimer et, de façon plus générale, d'être.
J'avais entendu Alain Minc une ou deux fois alors et j'eus vite fait de déduire de ces premières auditions que la génétique était encore un balbutiement, assez comique dans ce cas précis.
Vous dites, Monsieur, qu'Alain Minc s'écoute lui-même. Il a bien raison. Rien ne vaut son auto-écoute pour se délecter de l'idée qu'on est le plus intelligent de tous.
Ce n'était pas le cas du Professeur Minkoski, toujours souriant et réservé.
Je suis de l'avis de Jean-Dominique, car je n'ai plus rien entendu ni rien lu de ce personnage, dont les avis me sont indifférents : ne vous faites pas de mal à tenter de trouver, fût-ce en creusant profondément, un trésor que cette personne ne renferme pas. Parmi nos contemporains, il y a des gens plus intéressants, ô combien !
Le comparer à Mozart ? Pas plus qu'à Wagner ou à Lully ! Si vous voulez vraiment lui conférer un sens musical, parcourez une partition, n'importe laquelle. Arrêtez-vous au premier "soupir". N'allez pas jusqu'à la "pause" : il ne connaît pas.
Rédigé par : Jean Reffait | 15 avril 2010 à 17:28
@ Catherine A
Vous ne lisez pas droit.
La seule chose que, personnellement, j'ai reproché à Guillon c'est de n'être pas drôle sur le sketch en question.
Quant à mon commentaire sur Minc, c'est simplement la description de ce que je crois être la source de sa tendance à la raillerie.
Philippe Bilger a noté très justement la différence avec BHL, qui a ses défauts mais pas celui de se considérer autre chose que l'égal de son interlocuteur, le temps d'une conversation (pour l'enfumer, mais c'est une autre histoire).
Ça se passe dans le regard, la voix, le langage du corps.
Les contempteurs sont souvent ceux qui ont un passif avec eux-mêmes. Je pense que Minc se sent plus à l'aise près de Sarkozy qu'à côté d'Attali.
L'ENA, c'est un concours de culture générale où l'on accède de cinquante façons. Major de sortie cela ne veut rien dire car toutes les notes dépendent de la voie choisie. À part être major du léchage de bottes durant les stages, peut-être.
Peut-être plagiait-il déjà les livres pour ses dissertations. Tenez, cette condamnation honteuse, encore quelque chose qui le rapproche plus d'Ardisson que de ce qu'il rêverait être.
En privé avec un vrai intellectuel, il a intérêt à être moins moqueur, sinon ça donnerait quelque chose du style Poelvoorde:
- Si je puis me permettre...
- Tu ne te permets juste rien du tout. Tu vas d'abord me soigner cette vilaine peau et après tu pourras éventuellement te permettre...
Rédigé par : Alex paulista | 15 avril 2010 à 15:52
Sûr, ce qui manque à M.Minc, c'est ce qui ne me manque pas.
Mais je ne connais pas ce monsieur !
Il passera, m'a l'air d'avoir un côté solennel un peu daté, et la puissance de sa lumière nuit sans doute à la profondeur de son ombre...
Mais, cela ne me... regarde pas.
Rédigé par : Zenblabla | 15 avril 2010 à 15:19
J'ai regardé cette interview en ligne sur le site de France Inter et Alain Minc a quelques raisons me semble-t-il d'être badin eu égard aux questions qu'on lui pose afférentes aux lancinantes rumeurs et à leur gestion médiatique un peu confuse, il est vrai, de la part de l'Elysée. Mais on a connu un Demorand un peu plus inspiré; le début de l'émission, c'était France Inter à l'heure de RTL dans le créneau d'Aphatie: recherche du scoop pour le nom d'un promu ou confidences présidentielles jetées en pâture aux journalistes. Nicolas Demorand s'est donc fait logiquement et aimablement renvoyer dans les cordes avec l'ironie mondaine qui sied aux salons littéraires. A un moment de l'interview Alain Minc a même réclamé des questions sérieuses déplorant la légèreté des questions posées; convenons que
ça n'a pas duré et que les journalistes se sont repris. Convenons également que l'Elysée qui nous occupe a plus de contempteurs que d'adorateurs parmi les
journalistes de la matinale de France Inter (je m'avance peut-être) et que certains invités sont justement sur leur garde. L'ironie, cet art de la feinte
au sens de Montaigne, a plutôt été bien jouée par Alain Minc avec un brin d'auto-satisfaction qui a le bon droit d'irriter notre hôte de ce blog. Résumé
de cette interview: un doigt de kitsch dans l'océan de gravité du monde actuel. Comme disait Kundera (dont s'inspire le titre de ce billet), "le kitsch, c'est le besoin de se regarder dans le miroir du mensonge embellissant et de s'y reconnaître avec une satisfaction émue". On ne saurait mieux dire de cette interview de France Inter.
Rédigé par : Dioscure | 15 avril 2010 à 13:31
15 Avril 1949/15 Avril 2010 : Happy Birthday, Mister Minc ! Un costume a été taillé à votre intention chez Bilger, en tissu d'une insoutenable légèreté, idéal pour les beaux jours...
Rédigé par : sbriglia | 15 avril 2010 à 11:42
Catherine A, votre commentaire perfide à l'endroit des commentateurs illustre absolument Alain Minc : tout le monde a des défauts et Alain Minc a les défauts de tous. Bravo.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 15 avril 2010 à 11:40
Bonjour Philippe Bilger,
Concernant Alain Minc il ne s’agit pas d’un univers composé d’égaux, mais plutôt d’ego. C’est un peu le défaut de ces « faiseurs de rois » qui gravitent autour du Président.
J’ai écouté comme vous Alain Minc hier sur France Inter. C’est vrai qu’il est assez déplaisant d’écouter le ton condescendant de ce monsieur « je sais tout » qui en plus prétend être le dernier des marxistes et le rappelle d’ailleurs chaque fois qu’il en a l’occasion (et pas plus tard qu’hier). Sans doute une façon pour lui de montrer son attachement au monde des travailleurs mais qui manifestement relève du discours jésuitique le plus cynique.
Quand l’intelligence est ainsi mise au service de la suffisance au dépens de l’efficacité, on se dit quelque part que c’est du gâchis. Les résultats de ses visions « fulgurantes » qui pour la plupart des cas sont tombées complètement « à côté de la plaque », suffisent à le démontrer.
Il est vrai que chez BHL on sent un côté « bon enfant » qui le rend plutôt sympathique même quand il se prend un « râteau » magistral comme avec l’affaire Botul...
Chose qu’il est bien difficile de retrouver chez Alain Minc.
Rédigé par : Achille | 15 avril 2010 à 10:16
J'adore ! Ceux-là même qui fustigent Guillon et son "regard de fouine", "indigne" bien sûr (ne pas oublier pour dire ça de mettre la bouche en cul de poule) et qui évoquent de Minc la petite taille et la voix ; ceux-là même qui dénoncent l'ignarité (pas la peine de crier au barbarisme, je sais mais je le préfère à ignorance !) et le manque d'objectivité des journalistes et qui n'évoquent que l'Ecole des Mines (ce qui au passage suffirait à en satisfaire plus d'un (e)), alors qu'il fut major de l'ENA ; ceux qui, modèles d'humilité, cela va de soi, dénoncent sa faconde orgueilleuse. Il y a vraiment des jours où la lecture de tant de mauvaise foi est extrêmement réjouissante.
Si Minc n'existait pas, il manquerait visiblement à certains.
Rédigé par : Catherine A : il n'y a que la mauvaise foi qui sauve | 15 avril 2010 à 09:33
Cher Philippe Bilger,
Votre scepticisme face à la brillante carrière d’Alain Minc me consterne.
Créateur d’une grande entreprise française, AM Conseil, il s’est pourtant illustré par de hauts faits d’armes :
Conseil de nombreux dirigeants d’entreprise, il s’est fait une spécialité du conflit d’intérêts.
Son rôle de grande ampleur à la gouvernance du Monde a laissé de douloureux souvenirs à la société des rédacteurs.
Son aura de grand spécialiste de l’économie a fait de lui une référence du genre, surtout depuis qu’il s’est brillamment illustré en ne voyant rien venir de la crise financière fin 2008 ; ce qui ne l’empêche pas une seconde de vanter ses mérites à qui veut bien lui tendre un micro.
Son rôle dans la suppression de la publicité sur les écrans de la télévision publique a, selon ses dires, été éminent ; dans l’intérêt de la collectivité, de Nicolas Sarkozy, de Stéphane Courbit (son client), d’Alexandre Bompard (son poulain), ou d’Alain Minc soi-même ? On se perd en conjectures.
Le costume qui, selon moi, lui siérait le mieux, ce serait un peu de goudron et des plumes.
Rédigé par : Christian C | 15 avril 2010 à 09:01
Quel régal, votre portrait ainsi que les commentaires ! On n'est pas loin de La Bruyère.
Un petit rajout : à la fin de la conversation, une délicieuse cuistrerie : "que Nicolas Demorand eusse décidé..."
Rédigé par : dédé | 15 avril 2010 à 08:45
Alors là, je vais pouvoir être bref :
bravo Philippe !
Rédigé par : Jiel | 15 avril 2010 à 08:11
M. Bilger,
Un éditeur astucieux pourrait glisser votre billet dans "Les Caractères", de La Bruyère , il ne déparerait pas les savoureux portraits qu'on y trouve et le lecteur se dirait : "Ce Minc, tout de même ! Quelle boursouflure ! Pauvre Louis XIV, supporter des guignols pareils à la Cour !"
L'accablement redouble à entendre ces journalistes en livrée, plumeau à la main, brosse à reluire dans l'autre.
On regrette que Christian Clavier ne réactualise son rôle de "Jacouille La Fripouille" et interprète un journaliste d'aujourd'hui.
Une galerie de portraits nous réjouirait :
-Le journaliste qui interviewe Marine Le Pen et qui se croit obligé de prendre des postures de Jean Moulin devant la Gestapo.
-Celui qui se vautre, à plat ventre, devant un "sherpa" qui annonce doctement ce que sera la France en 2075...
Quelle rigolade ce serait !
A ma connaissance, je n'en connais qu'un seul, Taddéï, sur FR3, qui recevant le sublimissime BHL, lui a dit : "J'ai toujours l'impression désagréable que lorsque je vous pose une question qui vous dérange, vous allez me traiter d'antisémite !".
Beau joueur, BHL esquiva dans un bafouillis oxfordien ("The Oxford stuttering").
Rédigé par : Savonarole | 15 avril 2010 à 06:56
Cela me rappelle la vieille plaisanterie sur Salieri, qui se lamentait des pâmoisons saluant l'arrivée de Mozart en leurs salons viennois
- Mozart est là, Mozart est là, on ne va pas en faire un fromage !
Là, c'est la position en haut du mirador qui m'amuse,
Minc guette Minc guette... alors pas de quartier !
Vivrait pas longtemps en ceux-là, celui-là.
Rien que l'idée, brrr, il en frissonne, tout seul tout là-haut, à s'en décoller les poudres.
AO
Rédigé par : oursivi | 15 avril 2010 à 00:34
Il aimerait avoir de la prestance et possède une voix insupportable, ce n'est objectivement pas de sa faute.
Il aimerait toiser mais est ridiculement petit, ce n'est objectivement pas de sa faute.
Il est rentré par la petite porte des Mines dans les Grands Corps d'État, et aurait aimé y être rentré par la porte principale (celle des deux canons). On ne peut pas lui en vouloir pour ça, chacun faisant ce qu'il peut pour assouvir ses envies.
Pour résumer, c'est quelqu'un qui se voudrait grand et se croit petit. Non qu'il le soit mais pour relativiser les choses il faut d'abord les atteindre.
Le Président et lui sont faits pour se comprendre...
Rédigé par : Alex paulista | 14 avril 2010 à 22:47
Cher Monsieur Bilger,
Oui, Monsieur Minc, regards en vrilles, sourire en coin, a alloti parfaitement dans la séquence matinale de France Inter la masse votante et pensante en deux sections.
D'un côté, les Gazaouis, "ploucs", et de l'autre la pensée du meilleur de l'élite : les puissants qui drainent les esprits faciles à séduire, au profit d'une caste à têtes multiples, rouée, savante.
Une partition mozartienne, ciel !
Détournement haïssable !
Vite à l'écoute de Mozart,celui qui fut un passionné, maître à vivre du "léger", recalé à l'accession du mot pouvoir.
Rédigé par : Lcaggini | 14 avril 2010 à 22:13
«Alain Minc sans doute croit jouer ainsi une partition mozartienne, toute de retenue et de finesse. »
Je vous aurais prêté a priori une autre écoute de Mozart que celle qui le compare à ceci :
1.«On ne fait pas boire un vieil âne qui n'a pas soif. Donc on peut changer de sujet. »
2.«Entre vieux gitans on ne se raconte pas la bonne aventure, vous (Nicolas Demorand) êtes un vieux gitan, j'en suis un. Vous ne me ferez pas parler.» ( la question posée avait trait à l'identité du futur président de France Télévisions dont on ne saura donc pas si Alain Minc la connaît ou non.)
Bien, enfin l'essentiel est sans doute finalement que ni l'un ni l'autre ne soient réellement de ces « voleurs de poule » contraints à vivre d'expédients... Quoique, bien qu'en ce qui les concerne on ne les aie pêché ni l'un ni l'autre dans le vivier de la «main d'œuvre peu exigeante et très malléable» de ces malheureux qui sont loin d'être tous dans le jazz manouche, si on y réfléchit bien, que sont au fond les « participations infimes » de droite et de gauche dans les entreprises des uns et de autres (notamment Stéphane Courbit, producteur d'émissions telles que Combien ça coûte ? etc..) sinon une forme d'expédients.
D'expédients plus rentables que France Télévision soi-même dont ledit Courbit est réputé négocier présentement l'achat de la régie publicitaire, sans doute, mais d'expédients tout de même...!
Bref, en un mot comme en cent, ce n'est pas aux vieux singes qu'on apprend à faire l'âne pour avoir du foin !
Rédigé par : Catherine JACOB | 14 avril 2010 à 21:08
Vous vous faites du mal Philippe. Quelle faute inavouable tentez-vous d'expier en vous infligeant ce silice irritant au-delà de toute mesure qu'est Alain Minc ? Ah il faut bien la constance du magistrat habitué aux discours hébétés des grands criminels pour tenter, encore et toujours, de discerner une once d'idée neuve dans l'enfilage des évidences auquel se livre avec constance notre Sganarelle. Vous vous reprochez presque de ne pas entendre les fulgurances de ce grand esprit, tout enserré que vous êtes par l'insupportable morgue du bonhomme : ne vous flagellez plus, rien, il n'y a rien à comprendre des mots d'Alain Minc qui ne fait que répéter en beau langage ce que vous entendrez plus ordinairement au café du commerce ! La grande astuce consiste à faire passer une pensée squelettique maquillée comme un camion volé pour la limite infranchissable du raisonnement, au-delà de laquelle il trahirait des secrets stratégiques qu'il est seul à détenir. Il sait. Il ne dit rien mais il sait, et toute la partition grinçante qu'il débite n'a d'autre but que de vous en persuader. Homme d'affaires incertain, conseiller occulte, essayiste laborieux qui parvient au prodige de se planter à chaque publication, il est l'archétype du second couteau, sans autre crédit que sa faconde orgueilleuse qui distrait dans les palais, les longues soirées d'hiver.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 14 avril 2010 à 18:30
Portrait dans le mille, si j'ose ce barbarisme.
Oui, ils sont toujours amusants ces décideurs nés, sitôt repérés par le système, ils s'installent sur une sorte de mirador, de strapontin moulé à l'aisance de leur fondement, eux dont la raison d'être n'en a justement point.
"La bourgeoisie, c'est l'intérêt parvenu à satisfaction" écrivait, je crois, Hugo.
Ils ne font ni n'ont fait ni ne feront jamais rien, ils se situent, juste cela, et au mieux de leur intérêt.
Une vie entière allongés à grappiller bonnes lectures et à tenter de pondre bons mots, quelques décennies à ricaner, à avaler sa dose d'oxygène et les matières carbonées qui se consumeront avec celle-là.
Heureusement, il est une fin à tout.
Il devrait prendre l'avion plus souvent, celui-là*.
AO
* pour me placer dans son registre, en volerai-je plus haut, pas sûr.
Rédigé par : oursivi | 14 avril 2010 à 17:59