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21 mai 2010

Commentaires

Mary Preud'homme

@ Véronique
Merci de nous avoir rappelé ce très beau texte d'Anne Sylvestre.

Véronique Raffeneau

@ Mary

Je n'ai pas ressenti dans le dialogue Badiou / Finkielkraut la condescendance que vous leur prêtez.

France 3 réunit sur un même plateau pour 1h30 deux intellectuels. L'un est (était) professeur à l'Ecole Normale Supérieure, l'autre enseigne à Polytechnique.

Je pense au contraire que ces deux intellectuels ont su dire chacun avec simplicité - seuls les grands pédagogues sont capables de cette simplicité sans simplisme - et souci des autres ce qui les a construit, ce qui les anime comme intellectuels, ce qui les sépare et ce qui les unit.

Après vous pouvez trouver leurs propos superficiels, plein de clichés et d'images convenues, mais toujours est-il que je pense que cette conversation avait la qualité de la rareté pour bon nombre d'entre nous qui n'avons fait nos humanités ni à Normale Supérieure ni à Polytechnique.

Mary Preud'homme

@Véronique Raffeneau
Quote
"...ce que chacun de nous sait, ressent et voudrait défendre, mais de façon très confuse et contradictoire concernant les sujets d’actualité discutés..."
unquote
------
En écrivant cela, vous avez mis très exactement le doigt sur ce que j’ai trouvé d’exaspérant (ou de crispant si vous préférez) et surtout de très réducteur chez ces deux hommes, qu’ils aient la prétention de vouloir récapituler à eux seuls - et chacun de leur côté - ce que pensent et vivent leurs contemporains, en faisant un prêchi-prêcha insipide, une casuistique verbeuse qui n’en finissait pas du haut de leur chaire de philosophie télévisuelle, un saupoudrage de critiques vagues, voire de clichés, sans propositions alternatives qui prendraient en compte l‘extrême complexité de la société actuelle, mais aussi celle du pouvoir, de l‘économie etc. Ajouté au fait que l’homme est insaisissable par nature et plus encore dans un monde où les frontières et les anciens repères sont en voie de disparition. La question qui se pose est donc essentiellement : comment s‘adapter à cette situation qui perdure depuis la décolonisation et que tous les pouvoirs politiques ont ignoré jusqu'ici. Et non plus continuer à proposer des pistes qui se terminent en impasse, à savoir se cramponner au passé ou à des idéologies chimériques ou antédiluviennes. Homélie à deux voix discordantes sur la forme, mais accordées sur le fond (image de marque oblige), éternel combat binaire, toutefois modéré pour la circonstance - surtout ne pas faire de vague - avec, en contrepoint, jouant le rôle de l’enfant de chœur, un Taddéï extatique qui balançait sa tête de gauche à droite comme un encensoir.
Une philosophie virtuelle en somme, où la rhétorique pure se substituait au témoignage, comme si la pâte humaine ne devait servir qu’à asseoir ou justifier les fondements d’un système où le pouvoir étant partout à la fois ne serait nulle part, où des prophètes de pacotille viendraient de temps à autre administrer la bonne parole, celle du savoir, rabaissant le petit peuple à sa condition première, l’ignorance et la soumission béate…
Que du vent !

Véronique Raffeneau

Philippe, je suis trop contente d'avoir retrouvé cette chanson. En lien en cliquant sur mon nom.

Je voudrais la dédier aux Catherine(s), Florence, Mary, Marie, Cécile etc., bref à toutes les femmes de votre blog.

En grand écart, c'est pour témoigner de l'héritage féminin et féministe dans la tradition française à la conversation Badiou / Finkielkraut.

zenblabla

@Christian Paillotin.
Merci votre commentaire,

Peut-être faut-il voir du côté des "attachements", comme depuis très longtemps déjà, ils se refusent d'être examinés par les déclarations philosophiques en général car ils furent tellement marqués, les attachements, au cours du XX° siècle avec les religions ou les idéologies, qu'ils s'abandonnèrent d'emblée en philosophie les attachements, puis ne font désormais que se défendre en sorte d'oppositions. Ex: Badiou/Finkelkraut.

Les attachements,ils sont devenus trop intimes en notre monde bien mieux renseigné, il n'appartiennent plus à l'ailleurs admissible, comme lorsqu'entre attachés l'ailleurs été surplombé entre soi pouvoir être autrement, alors que cela ne tient plus, et qu'adviennent en force des expressions trop "extimes".
Les attachements, ils reviennent inexorablement par des fenêtres.

De la morale qui examine l'individu en regard de l'universel, apparaît celle qui oppose l'individu pris en attachements assez forts pour constituer réseaux, réseaux extrêmement accessibles, réseaux extrêmement constitués, mais entre eux qui s'ignoreraient, sauf alors chancelante si pérenne car à redire universalité.
J'ai beaucoup lu, non pas A.Badiou/A.Finkelkraut, mais A.Finkelkraut/P.Sloterdijk, et fait beaucoup le reproche à A. Finkelkraut de n'avoir relevé le "souffle" ainsi que justement vous le dites, au sujet de préceptes moraux qui s'attendent à discuter avec les dire de P. Sloterdijk, alors qu'ils sont en œuvre dramatiquement, car toutefois ils ne se déclarent pas, en morale ainsi qu'elle serait apaisée pour aujourd'hui, entre individus-réseaux-universalité.
L'ailleurs devient simplement être ici.
Il faut même ajouter que A.Finkelkraut et P.Sloterdijk paraissent plus complices que A.Badiou et A.Finkelkraut a priori, mais sans doute et à mon sens, ils le sont moins !


"Extime", ce mot n'existe pas, alors tout les combats en intellectualités se mènent, plutôt devraient se mener comme cela s'entend avec le constat que de tels prêcheurs se survivent l'un l'autre, et c'est heureux, dans une visée intellectuelle.

Seraient-ils tabou, les attachements, et ce tabou doit-il tomber?
Je le pense, sans croire que les tabous qui s'effondrent à temps ne le font pas, en advenue et par l'histoire, en réaliste maturité, en sorte de provoquer perversion par la violence depuis la simple subversion, et, pour moi, le débat présenté ici en fait encore preuve.

Véronique Raffeneau

@ Mary

" Exaspérant !",

écrivez-vous à la suite de la conversation Badiou / Finkielkraut.

Je viens d'écouter leur dialogue - au passage, merci à Denis pour le lien.

Je ne suis pas du tout d'accord avec votre appréciation.

Ce dialogue est la traduction d’un grand talent pédagogique de la part de ces deux intellectuels, respectueux pour ceux qui le écoutent.

Nous avons comme l'a décrit Jean-Dominique une sorte de synthèse dialoguée entre les deux grands courants qui travaillent notre société: la modernité et le classicisme.

Contrairement à vous je pense que beaucoup de téléspectateurs ont dû être heureux d'être conviés à entendre et à voir une conversation de cette tenue.

Je pense que ceux qui ont regardé étaient heureux car ces deux philosophes ont mis des mots, du sens, de la culture, de l'ordre et de la clarté sur ce que chacun de nous sait, ressent et voudrait défendre, mais de façon très confuse et contradictoire concernant les sujets d’actualité discutés.

Christian Paillotin

A propos du débat Finkielkraut-Badiou... Extrait d'une lettre envoyée par moi-même à un correspondant.

"Vous parlez de Badiou et de Finkielkraut. Je n’ai pas lu le livre auquel vous faites allusion, mais j’ai écouté leur débat sur France 3 (jeudi 20 mai 2010, 23 heures, émission « Ce soir (ou jamais) » de Frédéric Taddeï)).
Ce qui m’a étonné c’est effectivement leur proximité et leur souci de faire partie de la même famille.[Ceux qui tiennent aux idées]. Et de procéder par exclusion. Les jeunes qui se réunissent autour d’apéros géants, pensée nulle ou inefficace, les Grecs qui manifestent, pensée nulle ou inefficace, humoristes politiques « incorrects », pensée nulle ou inefficace (nulle pour Finkielkraut, inefficace pour Badiou), etc.
Pourtant il me semble qu’il y a une différence de taille entre Badiou et Finkielkraut. Je ne parle pas de la différence d’approche intellectuelle, l’un vise l’universel, l’internationalisme, cultive le culte de la révolution, quand l’autre défend l’identité, la galanterie, le respect des convenances et celui de l’autorité. Ils sont certes aux antipodes mais toujours dans la même famille.
Ce qui les rend en revanche différents dans le temps, dans le développement potentiel de l’ACTION de leurs émules ou de leurs disciples, c’est que Badiou dit, avec modestie, reconnaissant par là l’impuissance ou l’échec de toute une vie, qu’il faudrait trouver « une idée ». C’est dit rapidement, comme dans un souffle. Quelle idée ? Une idée qui permette aux hommes de vivre autrement, à TOUS les hommes de vivre autrement. Là, Badiou sort de la famille. Finkielkraut ne relève même pas, il n’entend même pas ce souffle de Badiou « trouver une idée ». Pour lui, les hommes perçus comme un même peuple, ne l’intéressent pas, il n’y a pas de devenir commun. Il suffit que sa famille d’appartenance vive, et bien. C’est tout."

Alex paulista

Frédéric Taddéï était vraiment excellent. J'ai repensé à tous les 7/7 de mon enfance où Anne Sinclair ratait systématiquement cet exercice consistant à intercaler des images d'actualité au milieu d'un débat d'idées.
C'est que, pour une fois, le présentateur est aussi bon journaliste.

Une autre chose que j'ai ressentie, et en cela je vous rejoins cher Jean-Dominique: les discours de la gauche, de la droite comme des écolos sont tous déclinistes. Au contraire Alain Baldiou relativise tout cela, nous rappelle que l'avenir est toujours entre nos mains. Il continue à avoir foi en l'homme et ce discours, au fond, tout le monde a envie de l'entendre, même Finkielkraut.
Et cette foi en l'homme n'est pas tant irrationnelle: je laisse la place à Alain (le vrai), qui l'explique mieux que je ne le pourrai dans son propos Dieux déguisés:

"La misanthropie ne mène à rien. Si vous vous défiez, vous serez volé. Si vous méprisez, vous serez haï. Les hommes se hâtent de ressembler au portrait que vous vous faites d'eux. Au reste essayez d'élever un enfant d'après l'idée, mille fois répétée à lui, qu'il est stupide et méchant ; il sera tel. (...)
Quand le petit esclave, interrogé par Socrate sur la géométrie, commençait par répondre précipitamment et sottement, Socrate secouait les oreilles, disant : « Tu ne penses point cela ; ce n'est pas ta pensée. » C'est qu'il prêtait à l'autre son propre esprit. Et que veut-on dire quand on reconnaît un homme, sinon que l'on reconnaît un esprit ? Je parle à l'esprit ; je lui parle plus d'une fois, comme à quelqu'un qui a le sommeil dur. Il me répond en rêve ; il me répond à côté. Si vous ne cherchez que le faible plaisir de la conversation, cette épreuve suffit pour vous donner l'idée de votre supériorité. Mais cette idée est incertaine tant que vous ne secouez pas le dormeur. Cela pourrait bien être, penserez-vous, un dieu qui se moque de moi."

Plus de détails à
http://classiques.uqac.ca/classiques/Alain/esquisses_de_lhomme/esquisses_de_lhomme.pdf
p158

semtob

Cher Philippe,

De la prise de la Bastille,
Au bistro du crépuscule,
Les rires des groupuscules
Se brisent, se recroquevillent.

L'évidente impuissance du sarcasme,
C'est la déferlante du néant,
L'alternative sauvage d'un fantasme.

Le sens entre en décadence,
Abandon de la tendresse,
Frappe et frappe l'ivresse.

Démocratie d'acceptation,
Reprends conscience de ta Déclaration,
Réagit sans violence.

Démocratie d'exception,
Accueille avec raison,
Et revit.

françoise et karell Semtob

Jean-Dominique Reffait@Alex

Alex Paulista,
Tout d'abord coquille de ma part : c'est "quoi qu'ils en aient" qu'il faut lire. Ah, je l'utilise souvent ? Pas pour faire classe, j'ai passé l'âge, je tâche seulement d'être précis, parfois de rendre mon humeur du moment, et d'être compris. Sur ce dernier point, c'est pas gagné ! Cette expression, discutée d'ailleurs par les puristes, est une élipse de "quelque réserve qu'ils en aient". Dans le contexte, cela signifie donc : malgré la réticence de Badiou et Finkielkraut à l'admettre..."

Sur le fond, je ne nie pas que Badiou et Finkielkraut s'opposent factuellement. Mais à les entendre tous deux, sur l'identité française par exemple, je les sens attachés l'un comme l'autre à une spécificité française, un "charme" français. Badiou est un "Moderne" au sens classique du terme : du passé faisons table rase, il est encore possible d'inventer, seul l'aventure de l'avenir est intéressante. Finkielkraut est un "Ancien", toujours au sens classique : l'avenir se construit sur un socle qui doit être respecté et capable de supporter les nouveautés. Mais la France nouvelle de Badiou ressemble étrangement à la nostalgie idéale de Finkielkraut comme si Badiou voulait restaurer la France de Finkielkraut, débarrassée de ses tares.

Je ne sens parfaitement à l'aise dans l'une et l'autre conception simultanément. Tous les deux sont intégralement dans le vrai, ils sont les deux visages du même Janus.

Catherine JACOB

« Une réunion au sommet éblouissante, époustouflante, profonde, respectueuse entre Alain Badiou et Alain Finkielkraut avec un arbitre attentif, discret, laissant penser et parler, un animateur sûr de lui et de son rôle au point de savoir s'effacer : Frédéric Taddéï. »

J'ai manqué quelque chose alors. Mais bon, je ne crois pas vu que j'ai, pour ma part regardé  Le vent se lève, « un film de Ken Loach Palme d'or 2006 qui a pour thème la guerre d'indépendance irlandaise (1919-1921) ainsi que la guerre civile qui la suivit (1922-1923). Le titre original, The Wind That Shakes the Barley (=Le vent qui agite l'orge), fait référence à un poème de Robert Dwyer Joyce, un auteur irlandais du XIXe siècle, qui évoque le soulèvement irlandais de 1798 ». Le récit se déroule de 1920 aux années de la guerre civile irlandaise et m'a fourni de quoi nourrir ma propre réflexion pendant un bon moment non pas tant comme 'philosophe' au petit pied, que comme enfant élevée dans une famille dont les générations successives ont chacune connue leur guerre qu'elles ont transmise dans et hors langage, ainsi qu'en tant que petite lorraine nourrie de récits historiques, réalité et fiction et qui s'attend quelque part à ce que ça finisse par tomber aussi sur elle, un jour ou l'autre, bien qu'espérant de toute son âme que ne pas...!

jpledun

"Il faut donc licencier tous les animateurs de "caquetoirs" médiatiques..."

Exactement. Encore un exemple hier soir dans "Vous aurez le dernier mot". Fog reçoit Finki.
Et qui se met en scène, et qui interrompt son invité ?
Même chose dans le deuxième débat où j'ai l'impression que FOG pose des questions auxquelles il s'empresse de répondre lui-même pour étaler sa grande culture.... Pendant ce temps-là je n'entends pas la réponse de "l'invité"...

Mary Preud'homme

J’avoue que ce genre de rencontre, où chaque adversaire rivalise de petites phrases alambiquées, citations et autres raisonnements tirés par les cheveux n’est pas ma tasse de thé et que je lui préfère de beaucoup un bon match de tennis, rugby, voire même football, où les adversaires vont en découdre sur le terrain en mouillant le maillot au lieu de leur langue, à l'inverse de ces blablateurs intarissables manifestement très éloignés des réalités et de ce que vivent nos compatriotes au quotidien.
Et je déplore que la télévision qui devrait être un outil de culture et d'information du plus grand nombre et par conséquent ouverte à tous les courants, sensibilités, métiers, etc. d'autant plus s'agissant de problèmes de société, soit systématiquement réservée dans ce genre d'émission "au sommet" à la promotion des "oeuvres" ou des "idées" d'une poignée d'auto proclamés qui se la jouent grands prophètes et ne supporteraient pas la moindre critique, contradiction ou remise en question venant d'autres que de "spécialistes" censés appartenir comme eux à l'élite.
Exaspérant !

Savonarole

Le Coquillard : "Il faut donc licencier tous les animateurs de "caquetoirs" médiatiques qui ne sont que des nains (et des rats) à côté de F.Taddeï."
Rédigé par : Le coquillard | 21 mai 2010 à 23:57
_________________________________________
Ah enfin ! un vertébré sur ce blog !

Très juste.

bernard

Eureka, j'ai trouvé l'idée qui solutionnera tout, qui fera la vie heureuse à tous, éternellement. Je vous propose de l'appeler communisme.
Finkelkraut a dit hier soir sans Badiou, que le communisme portait le crime en lui. Il aurait dû le dire à Badiou avant-hier.
Badiou, Ramadan et quelques autres fascinent car ils défendent savamment et poliment leur IDEE qui solutionnera tout.
A quand un débat scotchant où Finkelkraut portera la contradiction polie à un philosophe qui dira, il manque aux gens révoltés une idée alternative : moi je l'ai, on l'appellera le nazisme.
Le nazisme n'est qu'un mot comme le communisme, ben voyons.
Et l'islamisme n'existe que parce que le capitalisme a ôté aux gens en la détruisant la solution communiste, a dit le docte philosophe. Si savant pour dire une telle ânerie, Finkielkraut en a souri, toujours poliment coincé.
Le communisme est en promotion médiatique, espérons que cette idée ne se réemparera pas des masses.
Les idées une fois émises ne meurent jamais ?
Badiou, l'hyperintelligent utile.

zenblabla

Les deux personnalités sont bien moins insensées qu'on ne soupçonnerait.

J'ai l'éternelle "gratture", celle qui empêche parfois de dormir, que ce sont des monstres parmi d'autres, qu'ils n'ont pas mes défauts et que bien d'autres ils ont.
Mais, je ne les connais pas!

Cela reste aussi distant qu'entier, heureux alors qu'ils se démontrent.
Ce qui me fascine, c'est leurs manières de dévotion, car elle est, véritablement comme ils s'y collent en déclarations et affleurements de la pensée.
Bien d'autres sont du même bois, cela joue, il faut en tout cas l'espérer tandis que l'espoir s'amenuise, il paraît, autant qu'il se confirait, ce qui reste absurde à force d'attachements.

Je voudrais que l'iceberg ne fonde pas comme avec eux il l'intiment, ici aussi, par exemple.
"Flagorner", perversion devenue insensée du jugement, est un futur mot valise.

Je pense que c'est heureux qui s'y retrouve.
Cela renvoit à soi..., alors c'est heureux.
Cela ne guérit pas, mais cela propose, cela est au chevet.
Même, cela prouve bonne santé!


Le coquillard

M. Philippe Bilger dit avant moi tout le bien que je pense de de cette émission qui doit figurer au programme des écoles de journalisme pour la qualité de sa conduite, la profondeur des intervenants et leur clarté.
Il demeure sur le fond que si Alain Finkielkraut traduit l'embarras et l'angoisse humaine face aux évolutions du monde, c'est à la montée de la violence qu'il faut si j'ose dire, s'attaquer. C'est-à-dire à cette pulsion que notre immense orgueil rend encore plus affrayante qu'auparavant, malgré Hitler, Staline et autres monstres.
Il faut lire René Girard et bien se pénétrer de sa thèse sur la violence mimétique pour comprendre la situation présente.
Or M. Alain Badiou me fait peur car c'est l'orgueil, me semble-t-il, qui lui fait placer l'Idée (à la place de Dieu) comme guide transcendant des conduites.
La dictature de l'idée mène aux pires errements et horreurs. Chacun le sait.

Mais quel moment de télévision !

Il faut donc licencier tous les animateurs de "caquetoirs" médiatiques qui ne sont que des nains (et des rats) à côté de F.Taddeï.

MS

Alain Badiou est manifestement une intelligence. Sincèrement, sans provocation, il me semblait flotter hier dans l’éther du grand soir avec la hauteur de vue d’une révolution de Spoutnik.
Des interventions pleines de bons sentiments, d’abstractions gentillettes, de concepts chèvres et choux, quand Finkielkraut essayait, mises en perspective à l’appui, de se coltiner le réel au risque d’un peu de cambouis sur les manches.

Le péché originel de Badiou, implicite en permanence, est de sembler croire avec Rousseau que l’homme est bon par nature, que seul le système est corrompu et corrupteur, que tout est conséquemment politique et qu’une ingénierie sociale optimisée, jouant à rebours sur une plasticité de la nature humaine, pourrait modeler l’universel homme nouveau.

On est en plein rêve de retour au jardin d’Eden, une mystique à l’envers.

Le problème est que derrière le système, soi-disant seul corrupteur, il n’y a jamais que des hommes, dont les "incorruptibles" de tous bords ont toujours fait des boucs émissaires (aristocrates, juifs, bourgeois...) pour tôt ou tard tenter de les extirper du corps social à grands coups de purges, Terreur et Goulag. Et Shoah.

Une mystique à l’envers, parce que l’idéal de fraternité semble chez Badiou s’incarner in fine dans l’égalité, d’où son internationalisme obsessionnel.

La fraternité ne saurait en aucune manière s’accommoder de l’injustice, mais nous n’avons pas besoin d’être égaux pour être frères, nous le sommes. Ça ne procède pas de la Révolution mais de la Révélation.
Au demeurant, sa citation des Constituants de 1793, "Partout dans le monde, prendre souci d’un orphelin, c’est être français", n’est que la parabole étroitement laïcisée du bon Samaritain.

Alex paulista

Cher JDR

Ça veut dire quoi, "quoiqu'ils en aient" ?
Vous l'écrivez souvent, j'ai l'impression que ça fait classe, mais je ne comprends pas bien...

Et je ne suis pas d'accord avec vous, leurs deux visions de la France s'opposent sur l'essentiel. Au sens littéral: pour eux, ce qui fait l'essence de la France est différent.

Si vous écoutez bien AB il dit à un moment qu'on "pourrait" prendre les avancées sociales de l'après guerre comme faisant partie de l'identité. Ce conditionnel indique bien qu'au fond il récuse le concept de tradition même dans ce qu'elle a de socialiste.
C'est assez rafraîchissant de voir cela d'un homme de gauche. Je crois que c'est la définition même du progressisme.

Au lieu de cela la gauche française se replie sur le concept d'"acquis", oppose nos travailleurs aux travailleurs étrangers.
Position intenable que cette réaction de gauche.

La gauche a été vidée de tout ce qui faisait sa différence (les idées). Ne reste que la base syndicale, qui n'a jamais su proposer quoi que ce soit, et des centristes.

En ces temps de tristesse, je donnerais beaucoup pour entendre la gauche annoncer les fondamentaux:
- à l'instar des Américains, ce qui fait la richesse de la France, c'est son peuple, sa culture, son dynamisme. L'après-guerre nous l'a montré. Il faut cultiver ce dynamisme.
- il faut investir pour cette richesse: l'éducation, la recherche
- il faut garder une tradition d'universalisme: mettons-nous par exemple des contraintes environnementales drastiques et montrons au reste du monde la voie à prendre. C'est notre seule façon de redevenir un grand pays. Cela résoudra au passage les problèmes d'identité.

Bref, regarder devant et pas derrière, comme une famille qui a une mauvaise passe financière se prive de vacances et d'écran plat, mais investit sur les fondamentaux.

jpledun@  LABOCA

"On pourrait trouver au sein du PS des gens relativement puissants intellectuellement, mais pas à l'UMP"

Sectarisme quand tu nous tiens...

jpledun

C'est le genre d'émission qui "scotche".

Bravo aux deux protagonistes et au vrai journaliste, qui ne se pose pas en vedette et fait vivre le débat.

Entre Hamon et Woerth sur la 2 et Taddéï devinez ce que j'ai choisi ?

Quand Hamon a commencé á faire son politicard nullos, (comme prévu) je me suis bloqué sur France3 !
Il n'y a vraiment pas photo !

Jean-Dominique Reffait

Il ne pouvait en être autrement. Il s'agit de deux personnes qui ne sont pas en représentation et qui ne rechignent pas à la critique de leur propre pensée par la confrontation avec celle d'autrui.

Ce qui m'étonne, c'est qu'on s'attache à dénicher les oppositions alors que ces deux hommes reflètent et l'un et l'autre ce que je pense sur les sujets qu'ils ont abordés. Je ne me situe pas à mi-chemin, prenant chez l'un ou l'autre ce qui me convient, non, je prends tout chez l'un et chez l'autre ! Ils m'apparaissent intellectuellement très cohérents l'un par rapport à l'autre. Je ne suis pas en mesure de développer, ce serait bien trop long d'autant plus que le coeur de leur échange correspond à un travail que j'effectue et qui m'amène à constater que d'apparentes divergences convergent en vérité de façon éclatante.

La France de Badiou n'est, par exemple, aucunement opposée à celle de Finkielkraut quoiqu'ils en aient. C'est la même France que l'un regarde de face tandis que l'autre la décrit de profil, ce sont les mêmes exigences intellectuelles, la même tristesse devant l'atonie de jeunes facebookiens qui vont se saouler dans des fêtes épouvantablement ratées.

Ils en viennent alors à se compléter l'un l'autre plutôt qu'à se contredire. Cela ne signifie pas une connivence secrète et sans doute chacun est heurté par les prises de positions de l'autre de façon factuelle, mais qu'eux-mêmes se considèrent comme opposés ne me contraint pas à accepter cette dichotomie. Je prends tout et préfère me goinfrer d'intelligence qu'en picorer les miettes des misérables débats qualifiés de citoyens, autre expression pour exprimer la pauvreté abyssale de la pensée collective.

LABOCA

Débat assez intéressant, consacrant une nette supériorité intellectuelle de Badiou, plus fort que Finkielkraut aussi bien dans la maîtrise de la langue française que dans la précision des idées. Finkielkraut s'est assez bien défendu, même si on peut regretter qu'il ait parfois développé une pensée moins personnelle qu'empruntée.
Badiou est sûrement un penseur de haute volée, capable de supporter la comparaison avec un philosophe de la puissance de Jean-Luc Marion. C'est son engagement politique marqué qui lui a fait perdre des lecteurs de son oeuvre proprement philosophique.
Les théologiens spécialistes de saint Paul lui doivent une grande étude sur l'apôtre, où il a montré le caractère universel du message paulinien tel que porté par la lettre aux Romains.
Hier, j'ai trouvé Finkielkraut moins catégorique, plus mesuré, c'est-à-dire plus sage. Je mets cette attitude inattendue au compte de la puissance des idées exposées par Badiou.
Badiou a réussi à faire comprendre à Finkielkraut qu'il avait tort de soutenir par son autorité intellectuelle le climat de xénophobie que certains politiciens ont réussi à créer en France.
Il n'est pas possible d'obtenir entre les politiciens un débat politique aussi profond que celui tenu hier par Badiou et Finkielkraut. On pourrait trouver au sein du PS des gens relativement puissants intellectuellement, mais pas à l'UMP.

Pierre

Effectivement, un débat de haute volée au cours duquel les deux personnages ont su échanger avec respect sans s'engager dans un pugilat verbal rendant l'échange inaudible : les exemples fourmillent dans le domaine. Frédéric Taddéï était à l'unisson et son art de la synthèse a permis le passage d'un sujet de débat à un autre avec maîtrise et souplesse.
Existe-t-il des podcasts nous permettant de revoir Voltaire et Rousseau débattre de la sorte quelques années plus tôt !

Aïssa Lacheb-Boukachache

Ah, si Finkielkraut daignait enfin sortir de cet étrange salon de madame Récamier qu'il s'est créé et d'où il cause de toutes les choses comme si l'Histoire n'avait pas passé depuis ce temps... C'est ce que j'ai simplement pensé en éteignant ma télé.


Aïssa.

sam

Badiou n'a pas attendu notre temps pour dire son amour de la France !

Enfin... une certaine France contre une autre mais une France tout de même.

Lisez le début de "Théorie du sujet" vers 1980.

Pierre-Antoine

@PB,

Je rapprocherai les propos de Badiou de votre commentaire sur Cannes.

Le rire comme les paillettes à force d'outrance finit par tracer un chemin de Damas.

Et pour la suite du dialogue, le "mal identitaire" commun à tous les pays européens comme l'errance d'un peuple qui se cherche une terre reconnue aux frontières solides face à un ennemi mal défini qui est si ressemblant.

Ce mal que l'on veut collectif, n'est-il pas aussi un mal individuel que l'on peut discerner dans ce qui anime celui/celle qui se singularise par une attitude qu'elle soit vestimentaire ou action violente mais à contre-courant d'un "habituel sclérosant".

Cordialement

Pierre-Antoine

Pierre-Antoine

@PB
"On éteint la télévision mais la lumière demeure.

Peut-être aviez-vous encore un peu de mélange lumineux des paillettes de Cannes et de votre chemin de Damas personnel qui subsistait comme une traînée de mousseline blanche sur des marches rouges :-)

Cordialement

Pierre-Antoine

Denis75

http://ce-soir-ou-jamais.france3.fr/?page=emission&id_rubrique=1067

Voici l'émission pour les couche-tôt.

Achille

Bonjour Philippe Bilger

J’ai trouvé moi aussi très intéressant le débat d’hier soir dans l’émission "Ce soir ou jamais" de Frédéric Taddéï.

Alain Finkielkraut et Alain Badiou nous ont offert des échanges de haute tenue. Ces deux intellectuels que tout oppose tant par leur conception de la société, des valeurs fondamentales de l’humanité ont su exposer leurs idées sans qu’à aucun moment l'un n’interrompe l’autre. Aucune animosité malgré leurs désaccords profonds.

Le traditionalisme et la référence à l'identité nationale de Finkielkraut s'opposant à l'universalisme et à l'appel au savoir multiculturel de Badiou. Contradiction antagonique qui laisse une vaste place pour la réflexion intellectuelle. Bravo à tous les deux !

On aimerait que ce genre de débat soit possible avec des politiciens de bords différents.

Une chose est sûre, l’ouvrage commun qu’ils ont écrit et qui s’intitule « L’explication » doit être très intéressant et je ne manquerai pas de le lire...

didier specq

Avez vous remarqué que, chez les deux philosophes discutant courtoisement sur France 3, l'amour de la France est apparu mystérieusement ? Avouons que l'idée d'une nation française qu'on pourrait aimer est assez rare dans un débat télévisé et, chez Badiou, ce fut une surprise. Signe des temps ?

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  • L'Institut de la Parole propose des formations dans tous les domaines de l'expression et pour tous, au profane comme au professionnel de la parole publique. L'apprentissage et le perfectionnement s'attachent à l'appréhension psychologique de la personnalité et aux aptitudes techniques à développer. L’Institut de la Parole dispense des formations sur mesure et aussi, dans l’urgence, des formations liées à des interventions ponctuelles, notamment médiatiques. Magistrat honoraire, Philippe Bilger propose également des consultations judiciaires : conseils en stratégie et psychologie judiciaires.

MENTIONS LEGALES

  • Directeur de la publication : Philippe Bilger
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