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Rédigé le 30 juillet 2010 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (22) | TrackBack (0)
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Rédigé le 28 juillet 2010 dans Livres, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (75) | TrackBack (0)
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Mazarine Pingeot a souligné
à juste titre que le président de la République n’exerçait pas un métier mais
assumait une fonction et que cette différence était fondamentale
(nouvelobs.com).
Profondément, comment ne
pas constater que le président de la République, en effet, n’a pas un emploi
similaire aux autres mais qu’une fonction lui a été dévolue ? Le vote des
citoyens, qui l’a porté à la tête de la France, ne lui a pas assigné une tâche
ordinaire, un métier. Le président est seul et ses obligations, ses droits et
ses devoirs sont uniques. Honneur, charge, mission, destin, mandat, fonction :
autant de termes appropriés pour désigner l’action d’un quinquennat. Ils révèlent
ce que celle-ci a de spécifique, de noble et de gratuit. Rien ne serait plus absurde que
de l’assimiler à une « super-profession » alors que la présidence de
notre République manifeste la considération majoritaire qui a été octroyée à un
homme et appelle le service éminemment singulier qu’on attend de lui.
Ce n’est pas la première fois que Nicolas Sarkozy affirme qu’il s’adonne au dur métier de présider et qu’il y est irremplaçable. Il répète volontiers :"Si je ne fais pas le travail, qui le fera ?". Son prédécesseur a été moqué pour son immobilisme et tout est fait pour instiller dans l'esprit public qu'il n'y a pas véritablement d'alternative.
Dans cette fausse banalisation
de la charge suprême, on perçoit, en même temps qu’une volonté d’être célébré,
un désir d’être plaint. Il conviendrait presque de remercier le président pour
avoir bien voulu occuper une place à laquelle toute sa vie pourtant il a
aspiré. Alors qu’il a sollicité nos suffrages, nous devrions pourtant lui être
reconnaissants pour l’accueil qu’il leur a réservé. J’ose dire qu’un président
de la République, déplorant la « dureté » de son métier, se trompe et
sur la nature de ce pour quoi il a été investi et sur le discours qu’on espère
de lui. Ses vacances sont suspectes - le président Obama en fait les frais actuellement - et les récriminations lui sont interdites parce qu'indécentes. Un honneur, quelles que soient les immenses difficultés qu’oppose la
réalité aux projets politiques, demeure de manière indivisible un honneur. Au sein des pires épreuves
Entendre Nicolas Sarkozy
se comparer - à son avantage - aux ouvriers des chantiers navals est inadéquat parce que leurs
travaux de chaque jour n’ont rien à voir avec ceux d’un président - et guère
pertinent pour lui puisqu’il n’est pas un salarié ordinaire au service de
l’Etat. ll ne peut nourrir d'autre ambition que d'être l’incarnation exemplaire, incomparable et jamais plaintive
de la République.
Rédigé le 26 juillet 2010 | Lien permanent | Commentaires (61) | TrackBack (0)
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Une question liminaire, par pure curiosité : pour l’affaire Woerth-Bettencourt largement entendue, devant les péripéties à la fois judiciaires et mélodramatiques qui nous sont chaque jour ostensiblement offertes, un dépaysement n’aurait-il pas été immédiatement et techniquement envisagé s’il ne s’était pas agi de ce procureur à Nanterre et de ce procureur général à Versailles ?
C’est dans la foulée d’un entretien avec un journaliste de l’AFP que cette interrogation m’est venue alors que mon sujet essentiel se veut tout autre.
Le combat des mots. Des mots de combat.
L’autorité de l’Etat ne s’use pas si l’on s’en sert. L’exercice effectif d’un pouvoir au quotidien non seulement ne dévalorise pas sa qualité mais lui donne, avec la patine du temps, une légitimité et une force qui rassurent le citoyen et représentent le visage expressif d’une République sûre d’elle.
En revanche – et ce sont évidemment les suites politiques des drames de Grenoble et du Loir-et-Cher qui permettent la meilleure analyse -, l’affirmation répétitive d’exigences, l’invocation fréquente de menaces, des poses affichées autoritaires, des coups de menton résolus mais auxquels on a fini par s’habituer, l’emploi d’un certain vocabulaire guerrier, l’espoir martelé d’un avenir forcément radieux, tout l’attirail d’un volontarisme perçu comme creux puisqu’il ne peut créer à lui seul ce que la réalité défait, ne font que proclamer une apparence : celle que le langage autorise. Ils mettent en œuvre, pour la forme, un simulacre d’action et espèrent persuader les citoyens qu’en nommant ce qui manque, on le fera advenir. Ainsi de l’autorité trop souvent bafouée de l’Etat, de la restauration trop souvent remise de l’ordre public, de la lutte contre la criminalité et les violences et de la mise au pas des communautarismes agressifs.
Les politiques, les ministres, par impuissance devant les imprévisibles et redoutables aléas de la vie collective et du creuset social, ne peuvent qu’en prendre acte, tenter au coup par coup d’en limiter les effets dévastateurs avant d’apaiser l’angoisse par des mots et de fabriquer une détermination par les injonctions qu’ils adressent, au nom de tous, à personne. A cette abstraction diffuse qui a causé le mal et qui est censée trembler devant la terrible férocité du langage !
Là où l’autorité de l’Etat gagne quand elle est prise au sérieux parce qu’elle appose sa marque à chaque fois que cela est opportun, elle perd, au contraire, quand, à force d’être exploitée sans s’incarner, elle devient une sorte d’épée de Damoclès qui non seulement ne fait plus peur mais est tournée en dérision tant elle pèse peu en face de qui s’en moque vraiment.
Il y a des périodes de l’Histoire où le langage, le style, les mots de la victoire quand la réalité, pourtant, n’est que désastre, ont du sens. Quand l’expression, étant la seule arme disponible, devient tout puisque l’adversaire dispose de la puissance et qu’on ne peut rien faire d’autre contre elle que la détruire par le verbe. Chacun, sans doute, a son exemple privilégié. D’Alexandre le Grand à Charles de Gaulle, en passant par Louis XI. Il y en aurait tant d’autres.
Aujourd’hui, ce qui offre son immense champ à l’action politique appelle, plutôt que le culte du verbe et des pétitions de principe, les entreprises d’une démocratie qui saurait se défendre vigoureusement sans se renier et pacifier une société bouleversée sans se compromettre. Pourquoi pas des mots, ensuite, pour nommer la réussite et qualifier les avancées ?
Mais une autorité de l’Etat qu’on invoque sans cesse pour consoler du réel est le signe clair d’une autorité défaillante et d’un Etat à la peine.
Rédigé le 23 juillet 2010 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (16) | TrackBack (0)
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L'inconditionnalité paie.
Il suffit pour s'en convaincre de lire le Canard enchaîné. Il permet, à ceux qui auraient encore des illusions sur notre démocratie au quotidien, de se désabuser.
Michel Drucker a bénéficié d'appuis insensés pour pouvoir faire construire une nouvelle villa à Eygalières, dans un secteur protégé. Le Conseil d'Etat vient de dénoncer les modalités de ce permis de construire. Je parie que l'animateur complaisant gagnera.
François Pérol, visé depuis le 21 juin par une procédure d'instruction ouverte pour prise illégale d'intérêt, a cependant été élevé, sans attendre l'issue judiciaire, au rang de chevalier de la Légion d'honneur. Je parie que cette personnalité, qui n'avait pas jugé utile de saisir la commission de déontologie quand elle avait quitté l'Elysée, n'a pas de souci à se faire.
David Sénat, au cabinet du garde des Sceaux, est impliqué dans le traitement d'un dossier mettant en cause notamment le fils d'Albin Chalandon et la société Visionnex pour jeux illégaux. Je parie que ce conseiller sera laissé tranquille.
J'évoque ces trois exemples parce qu'au regard de chacun j'aurais pu opposer une expérience contraire révélant à quel point nous avons, pour le moins, une République en général certes mais aussi en particulier ! Si l'on me permet une référence personnelle, pour avoir seulement défendu la liberté d'expression j'ai été menacé d'une poursuite disciplinaire.
Une France à deux vitesses, à deux tolérances.
Trois poids trois mesures !
Rédigé le 22 juillet 2010 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (75) | TrackBack (0)
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J'assume cette question qui fleure le populisme. Je ne comprends pas en effet pourquoi la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a ordonné le huis clos pour ses travaux, du 20 au 23 juillet, consacrés à l'examen du projet de loi sur les retraites (lefigaro.fr, 20 minutes, jdd.fr, nouvelobs.com) alors que le vote public aura lieu au début du mois de septembre.
Pierre Méhaignerie, président de cette commission, contre l'opposition et quelques députés de la majorité dont Lionel Tardy, a décidé de ne pas rendre public un débat qui ne va pas manquer, pourtant, d'être passionnant. Pierre Méhaignerie, homme compétent, intègre et profondément démocrate, a cependant formulé cette interdiction même si, après chaque séance, une conférence de presse sera organisée qui permettra une communication équilibrée. Mais rien à voir évidemment avec l'impact qu'aurait eu sur les citoyens intéressés la diffusion en direct des échanges de la commission sur le fond du projet et la multitude des amendements présentés dont la plupart par les socialistes.
Je ne veux pas croire que ce huis clos soit motivé par la rigueur qu'on annonce dans l'acceptation de ces amendements et la volonté de toucher le moins possible au texte du gouvernement. On ne souhaiterait pas que l'opinion publique puisse être le témoin de cette raréfaction et de cette retenue.
Devant le formidable déficit démocratique dont cette discrétion durant quatre jours va être responsable, je ne parviens pas à trouver une justification pertinente. Il aurait été, au contraire, très stimulant pour le citoyen de constater la nature du dialogue entre majorité et opposition, de pouvoir se faire une idée sur la validité des argumentations, d'entrer en quelque sorte dans un univers dont l'accès en général lui est refusé et, peut-être, de percevoir les parlementaires et le ministre du Travail autrement qu'au travers des polémiques de ces dernières semaines.
Ce huis clos risque d'apparaître non pas comme un moyen de plus grande efficacité technique mais pour une manoeuvre destinée à faire échapper une commission traitant d'un sujet infiniment sensible au regard et à l'écoute de tous. On comprend bien ce que la République va y perdre, on ne voit pas ce que l'Assemblée nationale va y gagner !
Si une période rendait plus que jamais nécessaires l'ouverture et la transparence pour renouveler et restaurer des légitimités altérées, pour manifester à l'opinion qu'elle n'était pas une intruse dans le débat public mais bienvenue, c'était celle d'aujourd'hui où les miasmes et les soupçons ne cessent de porter atteinte au coeur de la démocratie.
Après tout, on nous prive d'un spectacle, d'une controverse et d'informations qui nous concernent au premier chef ! On nous expulse de chez nous. C'est d'autant plus dommageable qu'en justice comme en politique, la publicité garantit une amélioration des comportements collectifs, plus de tenue intellectuelle dans le fond et dans la forme, plus de dignité.
Qu'ont-ils donc à nous cacher ?
Rédigé le 20 juillet 2010 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (53) | TrackBack (0)
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Je n'exagère pas.
Ce qui a enflammé le quartier de La Villeneuve à Grenoble ne relève plus de l'agitation urbaine en quelque sorte classique, qui se nourrit du moindre prétexte pour des violences qui ne semblent motivées que par elles-mêmes.
Ces scènes de guérilla où une cinquantaine de jeunes gens ont affronté la police avec des jets de pierre, des barres de fer, des battes de base-ball et pire, avec des armes à feu à balles réelles, constituent un degré supplémentaire dans la transgression sociale et pénale. Deux magasins, un centre technique, un centre de contrôle technique et près de soixante voitures incendiées.
Le début de ces explosions est relié à l'attaque d'une rame de tramway, bloquée par des feux de broussaille. Des fonctionnaires de police se sont retrouvés en danger de mort (Le Parisien, Le Journal du Dimanche).
Arrivé sur place, le ministre de l'Intérieur a promis de rétablir l'autorité de l'Etat et de restaurer l'ordre public. On n'a pas à douter de sa résolution mais on a le droit de douter des effets d'une action qui se heurtera vite à cette réalité incontestable : l'emprise d'une minorité prête à tout sur une majorité terrée et silencieuse. Contre cette donnée qui fait de l'Etat à chaque fois le grand perdant, comment agir ? Brice Hortefeux a fait appel au Raid et il a raison. Mais il y a un moment où cette riposte exceptionnelle s'effacera devant la quotidienneté redevenue apparemment paisible. Et tout recommencera.
Devant ces épisodes qui créent des dévastations, les témoins n'hésitent pas à évoquer l'atmosphère de "guerre" et les habitants, à cause de leurs véhicules incendiés, déplorent de ne plus pouvoir "partir en vacances". Il n'y a pas à se moquer de ces protestations "utilitaires" qui au contraire visent juste puisqu'elles démontrent la bêtise et l'aveuglement de ces jeunes "casseurs" ruinant l'existence de ceux qui ne peuvent que constater le désastre, la tornade collective passée.
D'autres sont probablement à l'unisson de ce jeune homme du quartier de La Villeneuve qui soutient que "si on les avait intégrés socialement, il n'y aurait jamais eu ces violences". Je regrette que ce poncif qui fait peser la culpabilité sur ceux qui n'y sont pour rien continue d'être admis par certains, alors que le refus d'intégration sociale et d'adhésion républicaine est à la source même de ces mises à sac. C'est parce qu'une minorité aspire à se tenir en marge et à le démontrer sans cesse par des comportements de rupture, que le problème est quasiment insoluble.
La meilleure preuve en est le caractère scandaleux de ce qui a mis en branle le déchaînement. Karim Boudouda, âgé de 27 ans et multirécidiviste du vol à main armée, a été tué après qu'il a fait feu à plusieurs reprises, avec un pistolet mitrailleur Uzi et une kalachnikov, sur les policiers qui le poursuivaient alors qu'il venait de "braquer" (avec un complice toujours recherché) le casino d'Uriage. Pourtant c'est cette "victime" à laquelle on a choisi de rendre hommage en mettant la guerre au coeur de ce quartier (Le Post) !
Claude Askolovitch, qui pour une fois m'a convaincu, évoque dans son commentaire du JDD le "Désordre" et il n'a pas tort de mettre l'accent, par référence à Grenoble, sur le fait que "l'Etat veut se faire respecter des voyous mais il se laisse humilier de l'autre côté de la fracture sociale".
Je crains qu'il y ait d'autres contradictions plus préoccupantes pour ceux qui, avec Brice Hortefeux, souhaitent en terminer avec ces zones de non-droit et ces lamentables nuits au cours desquelles on peut légitimement questionner l'unité de notre pays. Grenoble, malheureusement, a été précédé par d'autres violences et vient d'être suivi par l'attaque en règle "à la hache" d'une gendarmerie dans le Loir-et-Cher (France 2 et 20 minutes). Des phénomènes de délinquance et de criminalité, notamment en Seine-Saint-Denis, ont par ailleurs fait craindre que l'Etat soit mis hors jeu. Le préfet Lambert a été nommé dans ce département par le président de la République et le portrait que Le Figaro a consacré à ce professionnel d'élite permet d'espérer. Il a déjà commencé à mener des offensives couronnées de succès contre le trafic de drogue et ses petits ou grands caïds qui "pourrissent" certains quartiers et plusieurs cités. Il est persuadé que cette politique touche le coeur de la cible. Sûrement.
Tout en soulignant les réussites policières, le ministre de l'Intérieur a suscité la polémique en considérant qu'elles auront peu d'effet si une chaîne pénale cohérente n'est pas organisée. Il ne faudrait pas faire succéder à l'efficacité initiale une mansuétude, voire un laxisme judiciaires. L'Union syndicale des magistrats s'est élevée contre ces propos qui me semblent pourtant de bon sens. J'ai moi-même, et depuis longtemps, attiré l'attention sur le risque d'un hiatus dangereux, pour l'ordre public et la cohérence pénale, entre la police et son efficacité d'un côté et la justice et ses possibles faiblesses de l'autre, que celles-ci résultent d'une interprétation sulpicienne des dossiers et des responsabilités ou soient inspirées par une idéologie hostile à la philosophie pénale en vigueur.
S'il n'y a pas accord profond et lucide entre les policiers et les magistrats, sans bien sûr qu'il soit porté atteinte aux pratiques libres des uns et des autres, on pourra craindre - sans rêver d'un degré zéro !- que ne soit jamais éradiqués la guerre à Grenoble, les trafics à Bobigny ou la délinquance en France.
Rédigé le 18 juillet 2010 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (124) | TrackBack (0)
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L'incendie est nourri chaque jour davantage. On se lève et on est à peu près persuadé qu'une nouvelle inconnue hier va défrayer la chronique d'aujourd'hui. Ainsi, 100 000 euros ont-ils été retirés de la banque Dexia au mois de décembre 2006, sans être mentionnés sur les carnets Bettencourt (Marianne 2, nouvelobs.com) ! On ne peut plus suivre. Ce qui est sûr, c'est que sur les plans judiciaire et politique, l'échauffement incroyable de ces dernières semaines appelle des interrogations, des craintes et des mises en garde.
D'abord la justice. Y a-t-il encore un pilote dans l'avion judiciaire ? Pour l'instant, il vole à mi-hauteur : on ne sait s'il va s'écraser ou rejoindre l'éther radieux ! Comment ne pas être frappé par cette tempête à l'infinie résonance médiatique qui met les problèmes procéduraux en première place dans le débat et fait s'affronter magistrats et anciens magistrats avec une violence jamais atteinte ?
Le procureur Philippe Courroye a ordonné trois enquêtes diligentées à bride abattue avec, il est vrai, les limites de ce type de procédure tant pour les perquisitions et d'éventuelles écoutes que pour opérer sur le plan international. A priori, "saucissonner" ainsi les vérifications peut ne pas apparaître techniquement comme la meilleure des méthodes mais Philippe Courroye nous a indiqué que pour l'instant il n'y avait aucune raison de saisir un juge d'instruction.
Je n'établis pas à son encontre une présomption d'étouffement programmé mais je ne suis pas naïf. Il me semble évident que si tout ou partie de ces enquêtes, à leur retour au bercail du parquet de Nanterre, n'aboutissait pas à l'ouverture d'une information, nous pourrions alors légitimement soupçonner Philippe Courroye de vouloir limiter, voire classer des investigations que l'instruction amplifierait dangereusement sur le plan politique. Vers Eric Woerth, voire le président de la République ? A condition qu'un juge d'instruction à la fois compétent et réellement indépendant soit désigné.
Pour l'instant, nous n'en sommes pas là. Les revendications très fortement connotées idéologiquement d'une "justice indépendante" (Mediapart) m'apparaissent actuellement trop pessimistes et partisanes. Je préfère m'en tenir à un combat solitaire qui se donne le droit d'être près du réel. Je comprends bien comment Philippe Courroye peut être tenté, entre sa relation privilégiée avec le président et sa détestation réciproque avec Isabelle Prevost-Desprez, de "garder la main" et de ne rien faire qui puisse être préjudiciable au premier. Je relève aussi que ce magistrat a protesté récemment avec hauteur contre les accusations de dépendance formulées à son encontre et je constate que son action, au vu et au su de tout le monde, ne pourrait plus se permettre d'être ostensiblement soumise.
Il est clair que l'ébullition hostile d'aujourd'hui est dangereuse pour la justice, parce qu'on peut craindre que les inimitiés personnelles fassent ou défassent les procédures plus que leur fiabilité technique et judiciaire. Les dossiers sont confisqués ou partagés selon des humeurs qui n'ont pas l'objectivité pour ressort. Quand Gérard Davet, dans Le Monde, permet à Philippe Courroye de plaider sa cause, ce dernier ne dissimule pas comme les antagonismes ont quitté le terrain judiciaire pour s'attacher aux personnes. A ce sujet - pour mettre un peu d'ironie dans ce sérieux -, je me suis amusé à voir cité le seul Yves Bot, haut magistrat et ami de Nicolas Sarkozy, comme garant de l'indépendance de Philippe Courroye !
Toujours dans Le Monde, le même Gérard Davet, dans un exercice d'équilibre, donne la parole à Eva Joly qui, libre de s'exprimer sans nuance et brutalement, traite Courroye de manière insultante, en donnant par ailleurs un point de vue technique pertinent. Présentée comme le magistrat ayant "sorti" l'affaire Elf alors que celle-ci n'a pu être terminée et jugée que grâce à l'action de Renaud Van Ruymbeke, Eva Joly met en cause l'orgueil puis la vanité de Philippe Courroye. Si notre "écologiste" est apte à débattre des modalités procédurales, je ne suis pas sûr que son comportement personnel, hier comme aujourd'hui, l'autorise à donner des leçons de morale et à critiquer des intimités. Courroye, orgueilleux de sa fonction, est-il par ailleurs vaniteux ? Je ne sais pas. De quel côté va-t-il tomber ? Du côté de ses intérêts ou de celui de nos attentes ? Attendons qu'il ait choisi sa pente avant de l'accabler. Je ne doute pas en tout cas que l'alternative soit claire dans son esprit.
Mais aussi la politique. Si on veut bien examiner la source de tout, à l'origine il y a une configuration où Eric Woerth est ministre du Budget et son épouse employée par la première contribuable de France. Cette situation en elle-même est inacceptable, que le ministre soit vertueux ou non. L'honnêteté n'oppose pas seulement le noir et le blanc, les attitudes limpides aux comportements délictuels. Elle refuse l'instauration de ces zones grises qui, même si on se croit plus fort qu'elles avec un sens moral développé, créent dans la réalité des mécanismes virtuellement menaçants et en tout cas peu compatibles avec la transparence et la rectitude de conditions professionnelles soumises à l'exemplarité. La conséquence en est que depuis des semaines, chacun y va de son couplet sur l'intégrité d'Eric Woerth, à commencer par lui-même. Il n'est pas un ministre qui ne "s'y colle"! D'abord c'est lassant. Ensuite l'affirmation tactiquement répétée d'une moralité, d'une intégrité a pour conséquence inévitable de semer le doute sur leur authenticité. A force de le défendre, ils l'enfoncent parce que, structurellement, dédaignant le poids démocratique des apparences, le ministre a manqué de prudence : ce constat, d'ailleurs, commence à être partagé par tous. Cette obligation de netteté n'est pas incompatible avec une véritable honnêteté. Elle permet seulement d'éviter que celle-ci puisse être tentée ou soupçonnée. Elle empêche la fonction politique, même confiante dans sa clarté, de sombrer dans une confusion qui en elle-même est scandaleuse. Il ne me viendrait pas à l'esprit de ne pas me déporter demain des assises, en dépit de ma certitude d'accomplir en conscience mon métier, si je connaissais si peu que ce soit l'accusé. J'entends la cohorte de ceux qui protestent contre la violation de la présomption d'innocence. Contre eux j'invoquerais d'abord, à la charge des politiques, l'obligation de respecter décence et prudence, quelle que soit la qualité de leur éthique. On ne joue pas avec la réalité. Elle vous rattrape si on la complique. Elle vous laisse sauf si on ne la trouble pas.
Mais quelle pétaudière, vraiment !
Rédigé le 16 juillet 2010 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (55) | TrackBack (0)
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Aurélie Boullet a écrit un pamphlet sur son quotidien de haut fonctionnaire dans un conseil régional. Elle a été suspendue pour deux ans, sans traitement.
C'est sous le pseudonyme de Zoé Shepard qu'elle a lancé son pavé dans la mare bureaucratique, "Absolument dé-bor-dée !"
Puisqu'en définitive on a appris que le conseil régional d'Aquitaine était le "modèle", force est de constater que sous le scalpel de l'auteur, il n'est pas sorti vivant. Son analyse est, nous dit-on, totalement fondée sur la réalité qu'elle a pu observer, nombre d'épisodes encore plus criants de médiocrité ayant été éliminés par ses soins.
Les hauts fonctionnaires et les élus de la Région Aquitaine, dénonçant une violation de l'obligation de réserve, sont incapables de démontrer que ce pamphlet fait référence à quoi que ce soit de précis qui permettrait d'identifier leur institution.
Sur les sept membres du conseil de discipline, cinq ont reconnu ne pas avoir lu l'ouvrage et pourtant le conseil n'a pas été gêné pour suspendre deux ans, sans traitement, "sa" victime (Le Figaro Magazine, Marianne).
Il faut soutenir la cause de cette jeune femme pour plusieurs raisons.
Cela commence à "bien faire" que ce retour ici ou là d'une conception très élargie de l'obligation de réserve qui interdirait, dans la Fonction publique, de penser, d'écrire et de parler dès lors qu'un discours utile mais critique sortirait de cet exercice de liberté. Il convient de récuser vigoureusement ce paradoxe qui voudrait qu'au moment où les élites politiques, administratives et gouvernementales s'affranchissent de leur réserve, celle-ci ne soit plus imposée qu'aux fantassins et soutiers de la Fonction publique. Le silence serait pour eux et l'expression pour les autres qui ont déjà, en quelque sorte, le langage que leur autorise le Pouvoir sous toutes ses formes.
Apparemment Aurélie Boullet a mis en lumière, avec ses ridicules et son incurie, le fonctionnement d'un conseil régional socialiste. Mais que la gauche se rassure, il n'est pas un des traits et des dysfonctionnements que l'auteur révèle qui ne puisse s'appliquer aux conseils régionaux de droite et plus généralement à l'ensemble de l'administration française, à nos institutions de pouvoir et d'autorité, voire à nos services publics parfois si peu "au service" qu'on s'interroge sur le droit d'être "public". L'absence d'efficacité, les heures de travail sur lesquelles peu sont effectives, le droit d'accomplir une tâche en une semaine quand elle prendrait, avec intensité, deux heures, le refus viscéral de tout ce qui pourrait donner élan, impulsion et dynamisme, le fait que la mauvaise volonté et l'impolitesse acquises ne doivent surtout pas être déstabilisées - autant de tares qui ne relèvent pas d'une quelconque idéologie mais d'un tempérament collectif qui ne s'honore pas d'être au service des autres mais préfère son petit train-train à l'enthousiasme créateur et actif.
Les Palais de justice, en tout cas celui de Paris, tribunal et cour d'appel, sont de parfaits exemples (à rebours) de cette détérioration au quotidien d'une exigence à la fois technique et humaine. Parce qu'au fond tout le monde "s'en fiche". Ce sont de trop petites choses pour qu'on s'y intéresse alors qu'elles sont à mon sens capitales et à l'origine de tout ! Les chefs ont tant de missions importantes à assumer mais l'expérience démontre qu'ils ne réussiront pas davantage dans ces domaines qu'ils acceptent que dans les activités dérisoires qu'ils méprisent. Le talent, c'est de savoir d'abord traiter celles-ci pour être dignes des autres. Mais cette terrible vanité éloigne du bon sens, du plus proche qu'on peut résoudre au bénéfice du flou lointain qui demeurera virtuel.
Enfin, et c'est l'argument central en faveur d'Aurélie Boullet, si celle-ci n'avait pas existé ni écrit ni dénoncé, qui aurait fait connaître aux responsables la réalité de leur univers jusqu'aux plus petits détails, jusqu'aux infimes imperfections ? Personne. Pour qui connaît l'administration et ses méandres, les institutions et le cloisonnement qui les sépare en tranches autonomes et autarciques, personne jamais n'alerterait les chefs sur l'état catastrophique ou au moins déficient de ce qu'ils administrent, puisqu'eux-mêmes ne cherchent pas à s'en informer, ce qui serait pourtant la moindre des choses. Ainsi, la charge de connaître mais de demeurer ignorant se délègue et personne n'est à même, jamais, de dévoiler le vrai. Le vrai des choses et des comportements professionnels ne serait-il pas d'ailleurs un impressionnant réquisitoire contre ceux qui font semblant de maîtriser les situations ?
Mais quand une Aurélie Boullet a une vision globale et le courage de mettre l'indignation, la causticité et la vérité au premier rang, cela change. C'est une bienfaitrice publique. L'avoir suspendue est une honte. C'est aggraver un état qu'elle a permis de soulager.
Plutôt que de la combattre, ce conseil régional et toutes les structures qui pâtissent des mêmes vices feraient mieux de s'attaquer aux maux qui sont les leurs et qu'elle a heureusement nommés.
Rédigé le 14 juillet 2010 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (93) | TrackBack (0)
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Avant de faire d'une personne, homme ou femme, une icône, il faudrait attendre. La regarder vivre. Attendre même longtemps. Patienter. Pour voir.
Pour Ingrid Betancourt, on aurait dû prendre son temps. Se féliciter de sa libération, de son retour. Mais on n'aurait pas dû en faire trop. Comme si c'était une sainte qui avait débarqué chez nous. C'était une prisonnière libérée par un commando colombien courageux. C'était déjà beaucoup. Même en ayant trouvé, une seconde, miraculeuse cette concorde émue, j'avais tout de même relevé qu'il y avait de quoi désespérer les autres détresses durables, les misères douloureuses et chroniques en s'attachant, avec une telle frénésie médiatique et une telle exploitation jouissive du malheur, à la destinée d'Ingrid. Il y avait de la saturation avant la libération puis après celle-ci mais personne n'osait le dire. Tous tétanisés par la crainte d'émettre la moindre critique sur un être qui semblait avoir recueilli à son seul bénéfice la compassion dont le monde était capable. Des larmes de tristesse puis de joie paraissaient couler sans cesse des yeux universels.
On a appris que deux ans après sa libération Ingrid Betancourt réclamait la bagatelle de 4,7 millions d'euros à l'Etat colombien parce qu'elle n'aurait pas été suffisamment protégée avant d'être enlevée. Exigence d'autant d'autant plus étonnante qu'elle a participé, le 2 juillet, à un hommage rendu aux soldats l'ayant sauvée le 2 juillet 2008 (Le Figaro).
Imagine-t-on "nos otages" sortis d'affaire et du risque de mort, Jean-Paul Kauffmann ou Florence Aubenas par exemple, venir, sans honte ni pudeur, quêter des sommes considérables pour que l'allégresse de leur salut soit mêlée à la gestion de leurs intérêts ? Quelle singulière image il faut avoir de soi et son importance pour oser une telle démarche ? Comment même a-t-elle pu germer dans la tête de cette femme qui lassée d'être une icône a voulu trop bien démontrer qu'elle était ordinaire, sans classe, âpre au gain même si ce dernier devait être arraché à l'intrépidité exemplaire de tous ceux qui n'ont pas compté, eux, pour venir à son secours ? Je ne parviens pas à accepter cette revendication de "fric" qui, très fâcheusement, sur le tard, dégrade une cause internationale et une victime emblématique.
Soit. On ne peut pas lui interdire l'indécence. Elle a le droit de réclamer réparation, on a le droit de la lui refuser. Mais puisqu'elle estime que l'Etat colombien lui est redevable et probablement tous ceux dont le coeur a battu pour elle non seulement parce que dans cette jungle elle souffrait mais à cause de ce qu'on lui prêtait comme aura, qu'elle nous rembourse également, et au centuple.
Qu'elle nous rembourse l'unanimisme festif, il est vrai un tantinet ridicule, du 14 juillet. Qu'elle nous rembourse les dithyrambes, le délire médiatique et le prix de nos illusions perdues. Qu'elle nous rembourse l'encens et l'adoration.
Que vaut exactement la déplorable transformation d'une icône en réalité humaine ?
Rédigé le 12 juillet 2010 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (53) | TrackBack (0)
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L'Etat irréprochable existe : je l'ai rencontré.
La Suède a depuis longtemps tenu les promesses de la France et le pouvoir, ici et là-bas, n'a pas la même saveur, la même couleur, la même odeur. Pour schématiser, chez nos amis scandinaves il est un service qu'on rend ; chez nous un privilège qu'on octroie. D'un côté une charge pour le bénéfice de tous, de l'autre un honneur pour le bénéfice de soi. On n'en finirait pas d'énumérer les différences aussi bien matérielles que psychologiques. La Suède est fière de l'absence de pompe quand la France elyséenne s'enivre d'une majesté qui coûte cher.
Le Figaro, qui publie d'excellents articles quand il parvient à échapper à Etienne Mougeotte, a récemment traité des "gouvernements européens à l'heure de l'austérité" sous la signature de Stéphane Kovacs. On apprend que nos voisins se sont déjà mis "au régime sec : voitures et logements de fonction, nombre de collaborateurs".
Sur la Suède, c'est particulièrement éclairant. Les ministres déjeunent à la cantine comme les hauts fonctionnaires et les secrétaires. D'énormes titres dans la presse si un ministre oubliait de débarrasser son plateau ! Cela n'empêche pas qu'au ministère des Affaires étrangères, les hôtes en visite soient bien accueillis et bien nourris.
"Modestie, rigueur et honnêteté", c'est le programme que les ministres suédois se doivent de respecter scrupuleusement. Les tentations sont d'ailleurs évitées. Pas de logements de fonction sauf pour le chef du gouvernement qui a droit à un appartement de 175 m2 pour lequel il paye un loyer minime. Pas de voitures avec chauffeur mais la police assure le transport des ministres si nécessaire. Les bureaux sont sobres et fonctionnels. Rien de somptueux ni d'inutile. Tout pour l'efficacité, rien pour la frime. Les frais de réception et de déplacement, les communications téléphoniques : tout est minutieusement réglementé et vérifié. Les portables personnels servent aux communications privées et les ministres voyagent en classe économique sauf sur les vols long-courriers.
Pour illustrer cette rigueur, à la fin de l'année 1995 le numéro deux du gouvernement suédois avait été obligée de démissionner pour avoir réglé avec sa carte de crédit de fonction quelques barres chocolatées.
Il serait trop facile de tourner en dérision ce puritanisme de la rectitude qui, chez nous, ne laisserait personne au pouvoir. Je constate seulement qu'un tel régime a fait ses preuves et que, si l'alternance politique modifie les projets, les réalisations et les équipes selon la ligne libérale ou sociale-démocrate promue, jamais la morale publique n'est offensée ni les citoyens dressés viscéralement contre leurs gouvernants. Parce que ceux-ci, grâce au train de l'Etat, à l'apparence modeste du Pouvoir, à la similitude des conditions entre ceux qui administrent et les administrés, sont dans tous les cas respectés. On peut déplorer le vote d'une loi mais on ne vouera pas la classe politique ni la politique elle-même aux gémonies. Parce qu'il y a une forme de vertu s'il n'y a pas consensus sur le fond, celui-ci étant bien moins important que celle-là. Cette obligation éthique, non discutée par les Suédois, vient sans doute de la lucidité du protestantisme sur la nature humaine : pour éviter à cette dernière des débordements incontrôlés, il convient d'écarter toutes les tentations sur la route et l'exercice du Pouvoir. L'exigence de simplicité strictement encadrée a ceci de bon qu'elle censure tout désir d'excès. Elle protège contre soi.
Je suis persuadé que de l'extérieur, les principaux responsables français applaudissent le modèle suédois mais se garderaient bien de le mettre en oeuvre, même dans ses grandes lignes, ses tendances essentielles. Il y aurait pourtant du pain sur la planche de l'Etat et quel bonheur ce serait de percevoir une diminution du somptuaire au profit du nécessaire. Je crains que Paul Valéry soit toujours félicité par notre classe politique pour avoir écrit que "le pouvoir sans l'abus n'offre aucun charme". Il y a dans la tradition française une incoercible envie de faire déborder la démocratie en gabegie (Le Monde).
Pourquoi la France est-elle si convaincue que le pouvoir a besoin d'apparences, de manifestations ostensibles, de la traduction concrète et quantitative de la supériorité de ceux qui dirigent sur ceux qui sont dirigés ? Si la France officielle ne s'enrobait pas de luxe et d'un appareil à la fois impressionnant et gênant pour la vie de tous, craindrait-on une méconnaissance de la légitimité du Pouvoir, une mise en cause de celui-ci, le risque que président, Premier ministre et ministres ne soient plus pris suffisamment au sérieux ? On sent bien que chez certains la profusion dont ils aiment s'entourer et profiter est l'unique moyen qu'ils ont trouvé pour démontrer qu'ils sont importants.
La modestie de l'Etat suédois, loin de le réduire, lui permet de concentrer toutes ses forces sur l'essentiel. Le corps privé de sa graisse est prêt pour tous les combats et tous les défis. Le luxe et l'apparat emprisonnent quand la simplicité, à tous points de vue, libère. J'aime qu'on ne veuille pas se distinguer, par la forme, des habitudes de la communauté nationale pour mieux gouverner sur le fond. Rien de ridicule dans cette ascèse qui n'appelle surtout pas la condescendance d'Etats trop enflés ! Là où on tente d'aller contraints et forcés, la Suède y est parvenue librement depuis longtemps.
L'Etat irréprochable existe : je l'ai rencontré en effet.
M. Gunnar Lund, ambassadeur de Suède à Paris, et son épouse Kari Lotsberg, que nous osons dire des amis, démontrent, si nous avions pu en douter, à quel point la qualité d'une personnalité intellectuelle et humaine était inversement proportionnelle à la surabondance qui l'entoure et trop souvent l'étouffe. L'exemple suédois en action et en allure.
Pourquoi pas en France ?
Rédigé le 10 juillet 2010 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (90) | TrackBack (0)
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On n'est pas obligé d'aimer Mediapart et Edwy Plenel pour avoir envie de les défendre.
Alors que l'affaire Woerth-Bettencourt est enfin entrée dans le vif judiciaire du sujet avec, notamment, les enquêtes diligentées par le procureur Courroye, les investigations en cours concernant les dires de l'ancienne caissière de Liliane Bettencourt, l'audition de Patrice de Maistre et la plainte en dénonciation calomnieuse annoncée par le ministre, on continue de s'écharper non pas "sur la lune" mais "sur le doigt" (Le Monde, Le Figaro, Le Parisien, nouvelobs.com).
Pour complaire sans doute au président de la République qui n'en demande pas tant si on considère son appel au calme lors du dernier Conseil des ministres, au moins deux de ceux-ci, précédés par Xavier Bertrand et suivis par Eric Raoult, ne se sont pas grandis en accablant Mediapart - ce serait tout à fait admissible - mais sur un mode absurde. Xavier Bertrand, à propos des écoutes clandestines dont chaque jour l'authenticité est démontrée et qui ne sont pas discutées par les protagonistes en cause, évoque des "méthodes fascistes", Nadine Morano lui emboîte le pas sur le même registre. Christian Estrosi fustige une presse qui ressemble "à celle des années 30" tandis qu'Eric Raoult pourfend une "presse collaborationniste".
Ces personnalités connaissent-elles le sens des mots, le poids des idées et les leçons de l'Histoire ? Où sont l'abjection, la destruction personnelle, l'antisémitisme, l'occupant, la haine, le rejet de la République, les écrits appelant quasiment à la mort d'autrui, où est la volonté de salir et de dégrader pour RIEN, où sont l'ignominie des insultes et l'indignité des pensées ? Le pire est de constater que la droite républicaine s'engouffre dans des dénonciations de très mauvais aloi parce qu'à tort ou à raison elle estime que dans tous les cas il vaut mieux défendre un homme que des valeurs et des principes. Ainsi, elle imite une certaine gauche intolérante et sectaire qui en son temps se servait de l'opprobre du fascisme pour l'appliquer à tout et n'importe quoi, à tous ceux, nombreux, qui ne partageaient pas ses obsessions idéologiques. Pour avoir si justement vitupéré cette banalisation de l'extrême exploitée à des fins quotidiennes et médiocres, était-il nécessaire, pour quelques-uns, de la reprendre et, à la fois, de se ridiculiser et d'outrager la réalité ? On n'a pas besoin d'un "Badinter de droite" (Marianne 2), juste d'honnêteté. Alors qu'il y a mille manières et infiniment de légitimité à engager un débat sur le rôle des médias, la perversion qu'ils sont susceptibles d'instiller dans l'espace républicain, par incompétence, légèreté ou partialité. Le "fascisme" jeté comme argument, comme prétexte n'est qu'un moyen de fuir ce qu'on voudrait étouffer, qui est nécessaire et résiste.
Ils auraient dû déjà se taire sur ce plan puisqu'une décision de justice avait rappelé, en donnant raison à Mediapart, que la légitimité du but poursuivi, l'intérêt social dominant, le service de la démocratie validaient la démarche de ce site et l'utilité des nouvelles qu'il diffusait. La jurisprudence a permis une avancée capitale il y a des années en séparant les modalités de recueil de l'information, qui peuvent être sujettes à caution, du droit de la communiquer et de l'analyser. Celui-ci, dans tous les cas, est garanti.
La réaction de ces politiques apparaît tellement outrancière qu'elle choque non seulement leurs adversaires, l'ensemble des organisations de journalistes et des rédactions mais aussi beaucoup de leurs partisans qui en ont plus qu'assez de ces affrontements qui perdent, au fil des jours, en pertinence et en lucidité ce qu'ils croient gagner en virulence et en partialité. L'Etat, l'Etat de droit sont mis à mal par ces joutes et ces accusations qui ne sont plus adaptées à l'objet central et démocratique de la controverse mais représentent un déchaînement ludique où l'invective la plus forte méritera la palme. Cet abus de langage comparant Mediapart à une officine de caractère "fasciste" est d'autant plus inconcevable que toutes les expériences étrangères, sous l'égide de la royauté ou de la République, s'accordent pour signifier qu'avec le millième de ce qui est soupçonné chez nous, des décisions drastiques auraient été prises et des démissions immédiates opérées. On ne peut pas tout vouloir en même temps : demeurer en place et faire taire.
Imaginons une France magiquement débarrassée de ces polémiques qui n'en finissent pas et qui ont commencé avant l'exploitation des écoutes clandestines. Imaginons qu'on n'ait rien su de Liliane Bettencourt, de François-Marie Banier, de Patrice de Maistre, de Patrick Ouart, d'Eric Woerth, de son épouse, de l'île d'Arros, du secret bancaire suisse, d'un possible blanchiment, des probables fraudes fiscales, de la justice privatisée, de ces relents d'argent, de pouvoir et de privilèges. De cette France devinée et soudain ostensiblement dévoilée. Ces êtres et ces comportements n'ont pas été créés par Mediapart. Ils sont là, présents, disponibles. Il aurait fallu en faire quoi ?
Si notre démocratie était vierge de ce qui l'a troublée, informée et agitée depuis ces dernières semaines, serait-elle plus riche, plus forte, plus ignorante certes mais aussi plus lucide ? Notre société serait-elle plus ou moins démocratique ? Qui de bonne foi oserait répondre par l'affirmative ?
Alors, où est véritablement la honte ?
Rédigé le 08 juillet 2010 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (126) | TrackBack (0)
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Henri Guaino, qui est conseiller spécial du président de la République, n'a évidemment ni le temps ni l'envie de lire les billets que j'écris. En revanche, j'essaie toujours de "suivre" les entretiens auxquels il consent dans la presse écrite - notamment un remarquable dialogue dans Medias-, à la radio et à la télévision. Parce que ses propos ont de l'intérêt et que je n'imagine pas qu'il soit contraint dans leur expression. Plus d'une fois, il a affirmé qu'il était libre et indépendant et quelle raison sérieuse nous conduirait à en douter ? Aussi, il est normal que nous attachions la plus grande importance aux opinions d'un homme qui n'est tenu apparemment par rien d'autre que la volonté de dire ce qu'il estime être le vrai et que nous ayons la faiblesse, parfois, d'oser lui répliquer.
Le Parisien lui a permis récemment de préciser sa pensée sur plusieurs sujets d'actualité, notamment - il ne pouvait y échapper - "l'affaire Woerth-Bettencourt".
D'abord un mot sur la forme. En dehors de la formulation d'impératifs sur lesquels l'accord est facile - mais c'est la réalité qui grince et fait problème -, je suis frappé par le nombre de réponses faites par Henri Guaino qui se résument à des questions. Je retrouve là un procédé largement utilisé avec talent par le candidat Sarkozy lors de sa campagne présidentielle. En face d'interrogations gênantes ou dangereuses parce qu'imprécises et trop générales, renvoyer comme un boomerang à son contradicteur une question comme apparence de réponse met ce dernier mal à l'aise et le conduit à subir ce qu'il devrait maîtriser et gouverner. Il me semble alors que les questions retournées par Henri Guaino mesurent sa gêne et son énervement à propos de sujets sur lesquels son honnêteté hésite.
Ce n'est pas la même chose de souligner que "tous les responsables publics doivent être exemplaires". Dominique Paillé suit le même chemin en nous annonçant "une République irréprochable". Ce ne serait pas son retour mais son arrivée car depuis 2007 on l'attend. Sur ce plan, consensus garanti !
Un point en particulier, dans cet entretien, concerne le magistrat que je suis et, à l'évidence, tous les collègues que la chose publique mobilise ou émeut. L'un des journalistes questionne Henri Guaino : "Mais est-il normal que Liliane Bettencourt bénéficie d'une information privilégiée en provenance de l'Elysée dans un dossier judiciaire la concernant" ?
Celui-ci répond ainsi : "Quelles informations privilégiées ? Quel secret a-t-il été violé ? Y a-t-il eu des pressions sur la justice ? A-t-on des traces d'une quelconque intervention de l'Elysée" ? (Mediapart)
Au lieu de poursuivre et de répondre par l'affirmative, le journaliste passe à un autre sujet et les interrogations purement dilatoires d'Henri Guaino mais qui en l'occurrence font mouche demeurent indemnes alors que lui connaît parfaitement la vérité sur le fonctionnement de l'Elysée, les principes que la justice doit respecter et l'obligation pour le conseiller judiciaire du président de la République de n'être pas au service d'une partie. On sait, par les écoutes clandestines dont l'authenticité n'a pas été démentie, que le 21 juillet Patrice de Maistre annonce à Liliane Bettencourt une "bonne nouvelle" qui lui a été transmise par le conseiller judiciaire de l'Elysée (Patrick Ouart) et qui ne doit pas être divulguée. La requête présentée par sa fille sera déclarée irrecevable le 3 septembre par "le procureur Courroye" et l'affaire "sera classée". Il est acquis que plusieurs contacts ont eu lieu entre ce conseiller et le gestionnaire de Maistre pour le compte de Liliane Bettencourt. Broutille, répliquera-t-on. Je n'en suis pas sûr. En l'occurrence, le sort de la société L'Oréal qui justifierait la curiosité inquiète de l'Etat n'est pas en cause. Il y a seulement une mise à disposition d'une information judiciaire essentielle, au bénéfice d'un intérêt privé, de la part de l'autorité publique. Il y a une violation de la règle d'égalité des citoyens devant le service public. Je continue à soutenir que la "République irréprochable" espérée se niche, aussi, dans ces détails qui façonnent ou défigurent un quotidien démocratique respectueux et respectable.
L'étonnant est que Patrick Ouart n'a pas voulu s'expliquer, s'abritant derrière le silence que lui imposerait sa présence alors au cabinet du Président. On sait que son départ ne l'a pas empêché de se mêler d'affaires qui, on le constate, le regardent toujours. Le paradoxe, c'est de l'entendre invoquer un secret que, dans son activité de conseiller, il n'a pas hésité à transgresser en diffusant à Liliane Bettencourt ce qu'il avait l'obligation de taire. Muet sur l'Elysée, il s'est servi de son honorable fonction pour "privatiser" une parole qui se devait de demeurer dans la sphère étatique de la Justice.
Le procureur Courroye l'a bien compris qui a indiqué avoir transmis un rapport à la Chancellerie sur son intention de requérir l'irrecevabilité le 3 septembre selon une démarche habituelle pour les affaires "signalées". Ce rapport, à supposer qu'Ouart n'en ait pas été dans la foulée un destinataire direct, a été communiqué à l'Elysée par le ministère de la Justice. Tout, dans une démocratie acceptable, aurait dû s'arrêter là. Ce qui s'est passé ensuite n'est pas normal. "Une information privilégiée" a été livrée à Liliane Bettencourt.
Philippe Courroye a ordonné une enquête pour vérifier l'authenticité ou non des écoutes clandestines puis sur l'éventuel blanchiment et les présomptions de prise illégale d'intérêt qui affleurent. La garde des Sceaux, qui avait affirmé qu'il n'y avait rien de "judiciaire" là-dedans !, souligne qu'elle ne s'est pas opposée à la seconde enquête. Elle ne l'aurait pas pu sauf à se carboniser à son tour. J'espère que Courroye qui est redevenu le procureur compétent et déterminé que "l'amitié" affichée du président avait semblé estomper et qui n'a fait techniquement "qu'une bouchée" d'Isabelle Prevost-Desprez (nouvelobs.com), n'a pas "pris la main" seulement, comme certains le craignent, pour limiter les effets éventuellement dévastateurs de ces nouvelles investigations mais tout simplement parce qu'il a été lassé, voire meurtri de voir contestées sans cesse son indépendance, ses actions et ses abstentions. Il y a dans les caractères forts une résistance, tôt ou tard, à la soumission même la plus rentable (Le Monde, Le Figaro, Marianne 2, Le Journal du Dimanche). Elle ne lui nuira pas, bien au contraire.
Puisqu'Henri Guaino a répondu par des questions à une question embarrassante, je me permets à mon tour de poser une question à l'homme de bonne foi et au démocrate qu'il est.
Ce qui s'est chuchoté entre Patrice de Maistre, Liliane Bettencourt et Patrick Ouart relève-t-il ou non d'une justice républicaine ?
Rédigé le 06 juillet 2010 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (69) | TrackBack (0)
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Laurent Terzieff, avec l'éclat médiatisé de sa mort, devient une "vedette" (Le Monde, Le Parisien, Le Figaro, nouvelobs.com, Marianne 2, Le Journal du Dimanche) alors qu'il aura su, de son vivant, résister à tout.
Contre l'éparpillement mondain de l'amour, une passion sans ostentation pour une femme morte avant lui et compagne de toutes ses aventures de scène.
Contre les afféteries de l'âge tentant de se masquer, la passion de s'en tenir à un visage traversé, labouré, éprouvé et exalté.
Contre les impudeurs de l'exhibition, la vanité des lumières faciles, la passion pour le silence et la discrétion seulement quittés pour les hommages publics au théâtre et à la vraie vie.
Contre le débraillé et la dégradation du langage, une passion pour la beauté et la précision des mots, une volonté d'aller au plus juste, au plus près, au plus profond.
Contre le culte de la dérision et de l'humour qui n'est qu'une déchéance commode du véritable esprit, une passion pour la gravité et le sérieux seulement illuminés par un splendide sourire intérieur.
Contre la course professionnelle éperdue dans tous les sens, une passion vive, nue, pure et intense pour l'essentiel qui était d'offrir à l'humanité, grâce aux grandes oeuvres et aux textes universels, une meilleure compréhension d'elle-même.
Contre la frénésie de l'argent et du gain, une passion pour l'austérité et la simplicité qui n'auraient toléré la richesse que partagée par tous dans l'immense lieu commun du théâtre.
Contre l'égarement de la "foule solitaire" et l'illisibilité d'un monde de plus en plus erratique, la passion pour ce qui unit, rassemble et révèle la fragilité et la splendeur de ce que nous sommes, aussi ballottés et imparfaits que nous nous découvrions à chaque seconde de notre existence.
Contre la surface des choses et des êtres, la passion pour la vérité.
Contre les regards distraits et négligents, la passion d'un regard brûlant affamé d'autrui.
Contre les simulacres et la tricherie, la passion pour une sincérité prête à payer toutes les rançons.
Contre les miasmes d'un univers où l'éthique fuit par le haut, qui ne sait plus donner de réponse claire et lucide à l'interrogation angoissée des citoyens, qui désespère parce que la saveur des festins a remplacé la recherche d'un destin, un seul remède, un désodorisant suprême et raffiné : une bouffée d'air Terzieff.
Rédigé le 04 juillet 2010 dans Actualité, Cinéma, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (26) | TrackBack (0)
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Autant j'ai toujours approuvé la volonté du candidat puis du président Sarkozy de renforcer un droit des mineurs qui, entre compréhension et impuissance, était dépassé par une réalité envahissante, autant je suis réticent devant une politique qui déciderait de rendre les parents pénalement responsables de leurs enfants mineurs délinquants.
Le député Eric Ciotti, présent lors de l'annonce faite par le président de la République, considère que "sanctionner les parents démissionnaires au portefeuille permettrait de réhabiliter leur responsabilité". Il se propose d'introduire cette disposition dans le projet de Loppsi 2, qui sera examiné au Sénat à l'automne (Le Figaro, sous la signature de Delphine Chayet).
Il me semble que derrière son apparence de rigueur et de bon sens, une telle démarche risque plus de constituer "une fuite en avant" qui, mêlant les parents au processus, croira ainsi faire oublier l'échec social et judiciaire à l'égard des enfants mineurs, délinquants de plus en plus précoces et pour des transgressions de plus en plus graves. Cette dernière constatation, qui a suscité le débat pour une justice des mineurs plus efficace, moins angélique, rend encore plus sujet à caution le transfert de cette problématique spécifique sur les adultes parce qu'ayant une influence directe sur leurs enfants, ils devraient pouvoir les dissuader du pire. Ce qui est clairement un voeu pieux et une méconnaissance de la vie familiale, qu'elle soit aisée ou défavorisée.
Il n'empêche qu'en général, la délinquance des mineurs, dans sa répétitivité et son caractère parfois presque inéluctable, si elle implique qu'on n'occulte pas les responsabilités individuelles, ne sort pas d'un terreau social et économique privilégié. Pénaliser financièrement les familles concernées serait aggraver des conditions déjà affaiblies et, surtout, remplacerait abusivement l'assistance sociale par un coup de force pénal. Rien n'empêche que le débat judiciaire ajoute à la mise en évidence de la responsabilité personnelle, la prise en compte de l'humus social. C'est la force de la justice que d'être contrainte à se soucier du singulier et du pluriel. En revanche, hors du judiciaire, il serait malvenu de pénaliser ce qui n'appelle qu'un regard politique au sens large.
Même si les principes généraux du droit s'opposent à la responsabilité du fait d'autrui, je ne pense pas que cet argument soit décisif. La représentation nationale peut tout se permettre dès lors qu'elle précise bien la nature et les limites de cette responsabilité parentale. Mais, outre qu'il y a déjà des délits qui répriment le comportement coupable des parents à l'égard de leurs enfants, le projet d'une responsabilité pénale des parents à cause de leurs enfants me semble discutable parce qu'il serait fondé sur l'idée fausse que des parents, s'ils le désiraient, pourraient mettre un terme à la délinquance de leurs enfants mineurs et que donc on aurait le droit de les incriminer pour le compte d'autrui. Tout démontre au contraire que les parents sont "les aventuriers du monde moderne" et que c'est leur prêter un pouvoir démenti quotidiennement, ici ou là, dans la soie ou la dureté, que de les croire inéluctablement et nécessairement gardiens, à leur gré, de la moralité de leurs enfants même mineurs. Une responsabilité pénale du fait d'autrui n'a de sens, en l'occurrence, que si l'impuissance des uns, inattentifs ou désinvoltes, est obligatoirement compensée par la réussite des autres, exemplaires et vigilants. Or on sait que la déviation peut frapper partout et comme le souligne l'avocat Jean-Yves Liénard, "on peut être un parent tout à fait admirable et avoir perdu le contrôle de son enfant".
En définitive, faire assumer pénalement aux parents les comportements répréhensibles de leurs enfants constituera une initiative démagogique, injuste et, dans tous les cas, superficielle. Cela n'aidera pas à réduire la délinquance mais en donnera seulement l'impression. Décidément, comme l'essentiel n'est pas réformable ou à manier avec précaution, on s'occupe avec le reste : les parents seront à la peine.
Rédigé le 02 juillet 2010 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (52) | TrackBack (0)
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