Avant de faire d'une personne, homme ou femme, une icône, il faudrait attendre. La regarder vivre. Attendre même longtemps. Patienter. Pour voir.
Pour Ingrid Betancourt, on aurait dû prendre son temps. Se féliciter de sa libération, de son retour. Mais on n'aurait pas dû en faire trop. Comme si c'était une sainte qui avait débarqué chez nous. C'était une prisonnière libérée par un commando colombien courageux. C'était déjà beaucoup. Même en ayant trouvé, une seconde, miraculeuse cette concorde émue, j'avais tout de même relevé qu'il y avait de quoi désespérer les autres détresses durables, les misères douloureuses et chroniques en s'attachant, avec une telle frénésie médiatique et une telle exploitation jouissive du malheur, à la destinée d'Ingrid. Il y avait de la saturation avant la libération puis après celle-ci mais personne n'osait le dire. Tous tétanisés par la crainte d'émettre la moindre critique sur un être qui semblait avoir recueilli à son seul bénéfice la compassion dont le monde était capable. Des larmes de tristesse puis de joie paraissaient couler sans cesse des yeux universels.
On a appris que deux ans après sa libération Ingrid Betancourt réclamait la bagatelle de 4,7 millions d'euros à l'Etat colombien parce qu'elle n'aurait pas été suffisamment protégée avant d'être enlevée. Exigence d'autant d'autant plus étonnante qu'elle a participé, le 2 juillet, à un hommage rendu aux soldats l'ayant sauvée le 2 juillet 2008 (Le Figaro).
Imagine-t-on "nos otages" sortis d'affaire et du risque de mort, Jean-Paul Kauffmann ou Florence Aubenas par exemple, venir, sans honte ni pudeur, quêter des sommes considérables pour que l'allégresse de leur salut soit mêlée à la gestion de leurs intérêts ? Quelle singulière image il faut avoir de soi et son importance pour oser une telle démarche ? Comment même a-t-elle pu germer dans la tête de cette femme qui lassée d'être une icône a voulu trop bien démontrer qu'elle était ordinaire, sans classe, âpre au gain même si ce dernier devait être arraché à l'intrépidité exemplaire de tous ceux qui n'ont pas compté, eux, pour venir à son secours ? Je ne parviens pas à accepter cette revendication de "fric" qui, très fâcheusement, sur le tard, dégrade une cause internationale et une victime emblématique.
Soit. On ne peut pas lui interdire l'indécence. Elle a le droit de réclamer réparation, on a le droit de la lui refuser. Mais puisqu'elle estime que l'Etat colombien lui est redevable et probablement tous ceux dont le coeur a battu pour elle non seulement parce que dans cette jungle elle souffrait mais à cause de ce qu'on lui prêtait comme aura, qu'elle nous rembourse également, et au centuple.
Qu'elle nous rembourse l'unanimisme festif, il est vrai un tantinet ridicule, du 14 juillet. Qu'elle nous rembourse les dithyrambes, le délire médiatique et le prix de nos illusions perdues. Qu'elle nous rembourse l'encens et l'adoration.
Que vaut exactement la déplorable transformation d'une icône en réalité humaine ?
Cher Thierry Bruno
Vous m'accusez de sophisme... pour finalement dire la même chose que moi:
le terme "sans papiers" regroupe beaucoup de personnes pour qui l'application loyale des textes existants dans des délais non abusifs (non ce n'est pas de l'angélisme, c'est la loi) fournirait des papiers.
Il ne faut pas faire l'amalgame avec les clandestins qui s'assoient totalement sur les lois et leur esprit.
Mon allusion au problème des passeports était un exemple de comment, même avec la meilleure foi du monde et un historique de 40 dans votre pays, ce gouvernement peut vous demander des choses impossibles. Imaginez un étranger naïf et sans beaucoup de ressources face à un tel mur de mauvaise foi et des quotas à remplir. C'est lui qui se retrouve dans l'avion pour avoir voulu faire valoir ses droits à la Préfecture ou simplement se marier. Pas le gars du Sentier.
Sur l'erreur d'avoir eu recours à l'immigration, je souris à penser que les mêmes qui maudissent cette immigration se battaient pour l'Algérie Française. Quel manque de suite dans les idées.
Je prie notre hôte de m'excuser pour cette digression qui n'a rien à voir avec le billet. Ce serait plus en rapport avec le titre "où est la honte ?": c'est la même façon de s'asseoir sur les principes et les lois pour faire du chiffre.
Rédigé par : Alex paulista | 18 juillet 2010 à 16:54
Bel exemple de sophisme, alex paulista, à comparer les immigrés clandestins et les gens qui se trouveraient en défaut de papiers pour des problèmes de lenteurs administratives lors d'un renouvellement - lenteurs peut-être volontaires de la part de fonctionnaires qui comme vous considèrent que le 22 avril 2007 est une erreur et qu'il convient de sa place de la réparer. Mais désolé, quand quelqu'un s'introduit illégalement dans un pays, il n'est pas "sans-papiers", il est un immigré clandestin qu'il convient de reconduire à la frontière. L'erreur n'est pas de 2007, mais d'avoir laissé cette situation perdurer et même l'avoir encouragée en régularisant massivement.
Rédigé par : thierry bruno | 17 juillet 2010 à 18:57
Alex,
«Votre comparaison avec Hitler et sa propagande est de mauvais goût.»
Je sais bien que les goûts ne se discutent pas.
Mais je pense que ma comparaison est d'autant plus appropriée qu'Obama a très habilement joué sur sa race pour se faire élire. Ne faites pas un amalgame que je ne fais pas : je n'ai pas écrit qu'Obama était un nazi, mais qu'il a utilisé des techniques de propagande proches pour se faire élire (la violence en moins, il est vrai. C'est un point important).
Vous devriez lire Propagandes, de Jacques Ellul. Il y explique excellemment que les techniques de propagande sont liées à la manipulation des masses, pas au caractère démocratique ou autoritaire d'un régime. Un régime démocratique a autant besoin, peut-être plus même, de manipuler les masses qu'un régime autoritaire.
Pour le reste, bien évidemment, je maintiens mes propos. Je suis d'ailleurs d'un pessimisme assez noir : je pense que la propagande peut déformer irrémédiablement la réalité dans les esprits et je ne suis pas sûr qu'à la fin, ça soit la réalité qui gagne.
Rédigé par : Franck Boizard | 16 juillet 2010 à 08:50
Décidément, le nom Betancourt ou Bettencourt est maudit pour la France ! Il y a un lien entre ces deux affaires aux orthographes différentes. Il s'appelle le fric.
L'argent est un roi absolu à côté duquel Louis XIV apparaît comme un révolutionnaire de salon. Bettencourt, ce n'est pas nouveau. La belle (?) Ingrid non plus, mais elle n'en faisait pas étalage. Elle s'est rattrapée aujourd'hui. Elle a été prise en otage de trop nombreuses années, donc, à l'Etat colombien, donc à la collectivité, à payer son évidente imprudence ! Et de l'imprudence à l'impudence, le pas fut très vite franchi par l'ex-icône de la jungle amazonienne. Devant le tollé, elle dut, à son corps défendant, se rétracter. Le mal est fait.
Quel mal, après tout ? Au moins, Ingrid qui faisait l'unanimité de l'opinion manipulée, a montré sa véritable nature : un être animé par l'orgueil et la cupidité. Nous n'avons qu'à nous en prendre à notre imbécillité. Se rappelle-t-on sa très médiatisée libération ? A sa descente d'hélicoptère, elle est restée debout pendant une heure et demie
à parader, à prier, à donner des accolades dont le niveau de tendresse était proportionnel à ce qu'elle pensait être son intérêt. Son mari de l'époque qui s'était pourtant battu pour sa libération, n'eut droit qu'à un minuscule bisou ! Pour une personne épuisée par autant d'années de captivité, ce fut une performance digne des gloires olympiques.
Assez causé, Monsieur l'Avocat général, quant à moi, je préfère la fréquentation des "prolos" à ces marchands de vent.
Merci pour votre courageux billet.
Rédigé par : Pierre Verhas | 15 juillet 2010 à 11:55
Durant 13 ans de vie sur les routes, j'ai fait la queue plus qu'á mon tour, comme le veut la coutume, pour toucher en liquide mon salaire de dix jours.
Je n’étais pas peu fier d'encaisser ainsi, en mains propres, de la part de mon directeur, le dû de mon travail.
Ne vous moquez pas de ces valeurs SR.
Elles seraient bien utiles á beaucoup de nos compatriotes.
Rédigé par : jpledun@SR toujours anonyme | 15 juillet 2010 à 01:13
Franck Boizard
L'appellation «sans papiers», comme vous dites (est-ce une AOC ?), englobe beaucoup de gens qui seraient en règle si la loi était appliquée loyalement.
Jusqu'à des conjoints de Français. Même des Français ont pu se retrouver sans papiers à l'occasion d'un renouvellement de passeport !
Vous qui voyez une opposition entre famille et monoparentalité, vous devriez comprendre l'atteinte faite au droit de pouvoir vivre normalement en famille dans son pays.
Certains couples sont séparés depuis des années par la fine équipe Sarkozy-Hortefeux, par des combines pour empêcher la célébration des mariages ou retarder leur reconnaissance en France pendant plusieurs années.
Les mêmes qui magouillent avec Eric Woerth pour se financer à base de micro-partis fictifs.
Eric Woerth, après l'histoire de l'ADO, est un récidiviste. Vous êtes clément avec les récidivistes, c'est bien.
"Tout est possible" et "Yes we can", c'est bonnet blanc et blanc bonnet. Sauf que Obama a une autre classe, quand même. Votre comparaison avec Hitler et sa propagande est de mauvais goût.
Le sujet est donc un peu plus compliqué que les généralités de tout temps que vous mentionnez.
"Cherchez l'erreur"... J'ai trouvé: elle a eu lieu en 2007, vraisemblablement le 22 avril.
J'ai bon ?
Rédigé par : Alex paulista | 14 juillet 2010 à 23:18
Les personnes qui avaient émis des réserves
lors de sa libération s'étaient faites
incendier parce qu'à ce moment là "elles
manquaient de corazon"...
Juste retour des choses pour les lucides
de la première heure.
Rédigé par : calamity jane | 14 juillet 2010 à 22:50
Comment peut-on "juger" Ingrid Betancourt ? Nous ne savons rien ou presque !
Une fois encore...
« Il n'y a pas loin du Capitole à la Roche Tarpéïenne »
Rédigé par : Eugénie | 14 juillet 2010 à 19:49
Plus globalement, notre monde occidental est caractérisé par un fort découplage entre les choses telles qu'elles sont et les choses telles que nous les voyons.
On appelle cela la bêtise, mais c'est un type de bêtise très particulier, créé et diffusé par tout un appareil de propagande.
Ainsi, l'appellation «sans papiers», qui laisse supposer qu'on parle de gens qui sont légitimes à avoir des papiers alors qu'il s'agit en réalité d'immigrés illégaux qui ont vocation à être renvoyés dans leur pays d'origine.
Ou à un collègue qui parlait de «redistribution des revenus», je fis remarquer que les revenus ne sont pas distribués mais gagnés (à la sueur de ton front, d'après la Bible).
On pourrait multiplier à l'infini ces exemples (j'ai surpris en expliquant qu'à mes yeux une «famille monoparentale» était un oxymore).
A cet égard, les médias de masse, dont la télévision est le principal, sont de prolifiques usines à irréalité.
Mais, quand on est attentif, il y a moyen de ne pas se laisser prendre à ce piège.
Bien avant la libération d'Ingrid Betancourt, on en savait assez des circonstances de sa capture pour suspendre son jugement sur les extraordinaires qualités de cette dame que prétendaient nous vendre les médias.
En fait, il y a un sain principe qui permet de détecter de manière infaillible l'escroquerie médiatique : l'unanimité.
Vous connaissez la phrase «quand on pense tous la même chose, c'est qu'on ne pense plus». Ce n'est pas une phrase en l'air, elle repose sur un mécanisme assez simple mais puissant.
L'unanimité médiatique n'est possible que dans la fusion émotionnelle, il faut éteindre sa capacité d'analyse pour communier dans la passion collective.
Ceux qui sont talentueux à contrôler ce jeu peuvent alors faire avaler n'importe quoi à une foule. Hitler était très fort, mais, plus près de nous, Obama a été remarquable aussi : voilà un homme sans expérience, ni compétence, qui se garde bien d'exprimer trop nettement ses idées. Il réussit à se faire élire parce qu'il est parvenu à porter les foules à ce degré de fusion sentimentale où le cerveau se déconnecte (songez au slogan «yes we can !», y a-t-il plus creux et plus insignifiant ? C'est un slogan bien proche du ridicule. Pourtant, il était hurlé par des foules extatiques - comme «Sieg heil !» - j'avais été frappé par la ressemblance des sonorités. Peut-être est-ce un hasard, peut-être est-ce que cela correspond à un mécanisme mystérieux du cerveau).
Mieux vaut tard que jamais, cher Philippe, mais la réalité d'Ingrid Betancourt, une mortelle comme vous et moi, assez égocentrique par ailleurs, a fini par vous rattraper.
Vous pouvez faire quelques exercices pratiques : en ce moment, Eric Woerth fait l'unanimité médiatique contre lui. Cherchez l'erreur.
Rédigé par : Franck Boizard | 14 juillet 2010 à 14:26
Devançons le prochain billet de Philippe Bilger sonné par la prestation de son héros Nicolas Sarkozy sur France 2. Alors, un Président de la République française qui n'a pas touché terre (ses pieds chaussés de Weston survolaient le sol du jardin de l'Elysée) a brandi un maître d'hôtel pour défendre son honneur. Ce même maître d'hôtel qui était rétribué en espèces chaque semaine par sa maîtresse Liliane Bettencourt. Il faut imaginer la scène hebdomadaire où les gens de la milliardaire font la queue dans le vestibule pour toucher leur obole. Alors après, le souvenir de tous ces gens sera proportionnel aux liasses de billets que Nicolas Sarkozy s'était défendu lui-même de percevoir "M'sieur Pujadas p'sque j'vous dis que ch'y suis allé deux fois chez M'dame Bet'ancourt, faut croire son maît'hôtel, c'est lui qui le dit, c'est un homme honnête". Ah l'honnêteté chère au président. (le petit Céline du blog )
Rédigé par : SR | 14 juillet 2010 à 13:14
Soyons sérieux un peu … Ce monde -et notre pays n'y fait pas exception- nous apprend chaque seconde de notre vie que la seule valeur qui compte est l'argent; tout le reste n'étant que succédané peu ou prou heureux. Ingrid Betancourt s'inscrit avec pertinence dans cette logique et c'est lui faire un procès faux que de l'en accabler … Elle s'est montrée faible en retirant sa plainte et de cela, on ne lui pardonnera. C'est ainsi, c'est notre culture, c'est notre mentalité, notre normalité; la société ne hait rien tant que qui refuse l'argent … Au coeur des indignations, il y a en secret ce reproche et cette incompréhension. Prenez Bernard Tapie: quel stupide croira une minute que ces millions (autre chose que les 6, 7 millions qu'a réclamés Ingrid Betancourt avant de plier et renoncer) que Nicolas Sarkozy et cet Etat viennent de lui donner sur les fonds publics soient en vérité les siens? qu'il les a mérités par un réel travail, de vraies créations et que ce n'était qu'un juste retour en contribution de ces nobles choses? C'est de cette logique culturelle et civilisationnelle dont il s'agit ici et les deux situations Betancourt-Tapie ne sont pas si éloignées l'une de l'autre qu'on prétendra le faire croire ... La question qui me vient cependant est celle-ci: étant également française, pourquoi n'a-t-elle pas de même attaqué l'Etat français de ce chef? Après tout, ce dernier ne s'est pas tant assuré d'assurer sa sécurité ni pressé ensuite durant ces années pour la faire libérer et n'eussent été les manifestations de soutien et de protestation nombreuses, quotidiennes et populaires ainsi que des médias, elle y serait encore dans cette jungle, n'en doutons pas … Pourquoi Uribe seul plutôt qu'Uribe et Sarko.?
Sans transition … Rapidement …
1 point partout, mon cher PB, entre Courroye et Isabelle Prevost-Déprez! Maintenant, il serait temps de s'interroger gravement et demander aux institutions républicaines de répondre vite à cela: pour qui se prend-t-il ce procureur Courroye? Est-il persuadé à ce point que l'institution judiciaire est sa propriété, qu'il y fait ce qu'il veut, comme il veut, sans rendre de compte aucun au peuple? C'est fatigant et répugnant qu'une telle attitude de sa part; il est d'une manière incontestable partie car cité dans les écoutes dans cette affaire et il s'accroche encore on ne sait au nom de quel droit et quelle légitimité à ce dossier … C'est d'un ridicule et d'une honte pour l'institution judiciaire que vous vous acharnez à livrer sous de meilleurs attitudes. Qu'il déguerpisse de cette affaire, qu'on le dessaisisse! La suspicion légitime à son égard est tant légitime et flagrante qu'elle en devient une indécence, une impudeur, une insulte au justiciable qui y croirait encore … Qu'un collège de juges d'instruction (dans ces affaires lourdes et complexes, le collège s'impose et s'il a toute sa raison judiciaire d'être, c'est précisément à ces endroits) et … RAUS Courroye! va faire le pitre ailleurs et cesse d'humilier tous les Parquets dignes de ce nom qui n'en peuvent de tes simagrées qui confortent la République en bananeraie!...
Sans transition … Très rapidement …
Encore une bourde de Sarko; enfin, de ses conseillers, condensés incroyable d'ineptie crasse … Pauvre Sarko.! Jusqu'où le traîneront-ils dans le ridicule politique ... Les armées des dictatures sanguinaires africaines au pas en grande tenue sur nos Champs-Elysées avec nos armées républicaines … Docteur Tirelire du Quai d'Orsay n'en peut plus d'indigestion de bouffer des couleuvres et des chapeaux … Mais pour lui, c'est bien fait!
Aïssa.
Rédigé par : Aïssa Lacheb-Boukachache | 14 juillet 2010 à 11:56
Je suis tout à fait d'accord avec vous, Véronique. Il n'empêche que tout le tapage qui avait accompagné la captivité puis la libération d'Ingrid Betancourt m'avait paru excessif, voire même délirant. J'aurais voulu que l'on parlât davantage d'affaires plus "gênantes", comme l'assassinat du juge Bernard Borrel à Djibouti, dont les assassins courent toujours (raison d'Etat oblige), de celui des journalistes Guy-André Kieffer ou Jean-Pascal Couraud, tous deux liés à des affaires politiques. Mais il en va du journalisme et de la politique comme de la haute couture, c'est une question de saison et de mode. La kermesse endiablée, l'espèce de grâce religieuse qui s'est emparée du public, a dévoré l'espace médiatique, comme toujours...
Mon cher Sbriglia, je sais que vous n'appréciez pas le "fiel" de SR. Mais, si je comprends votre agacement, je crois ses interventions nécessaires, dans la mesure où elles viennent rompre la belle unanimité dans laquelle je ne suis pas le dernier à m'engouffrer. Voyez comme elle a toujours dénigré le président de la République que, pour ma part, j'ai très souvent soutenu. Eh bien, cela ne m'empêche pas de penser que nous avons besoin aussi de cette voix-là, même avec ses excès que nous sommes libres de dénoncer. Voyez-vous, elle fait un peu office ici d'un bouffon du roi, mais un bouffon teigneux, sans concession aucune, une sorte de petit Céline pour blog (sans le talent littéraire). Je maintiens que ses outrances elles-mêmes, sans pourtant leur accorder une importance démesurée, viennent un peu bousculer notre confort et me font quant à moi, souvent sourire. Elle me permet de me moquer de moi-même. Je ne crois pas que Philippe Bilger, qui est si attaché à la liberté d'expression, me désavouerait. Non, en fait, j'en suis sûr.
Rédigé par : Laurent Dingli | 14 juillet 2010 à 10:54
Mon post est hors sujet mais je profite d'une homonymie.
Les icônes qui assortissent chaque intervention sont-elles affectées à une adresse URL ou bien sont-elles distribuées de manière aléatoire ?
Rédigé par : Judith | 14 juillet 2010 à 10:48
Les mêmes qui ont acclamé Ingrid Betancourt l'accusent aujourd'hui d'immoralité. Sa démarche me paraît cohérente au regard de son parcours, depuis deux ans elle sillonne le monde entourée de son attaché de presse, son garde du corps, son agent littéraire, son masseur, pour répandre la bonne parole. Si elle estime avoir subi un préjudice il lui appartient de réclamer auprès des autorités colombiennes une compensation pour le temps passé dans la jungle loin des projecteurs et de ses proches. Dès lors où le monde avait officiellement admis son épreuve en lui reconnaissant un statut de victime des Farcs, une demande de d-i devait recevoir l'approbation de Philippe Bilger and Co. Bizarrement ce dernier nous fait la morale, la démarche de Madame Betancourt serait insolente et déplacée. Pour être cohérent dans la critique il eut fallu dénoncer les excès qui avaient entouré sa libération en juillet 2008.
Rédigé par : SR | 14 juillet 2010 à 08:42
"Vanitas vanitatis"
A propos de la honte que vous cherchiez récemment : nous sommes tous trop fiers pour reconnaître qu'elle est en chacun de nous. Successivement, nous encensons puis vouons aux gémonies, élevons avant d'abaisser, honorons puis salissons, créons puis tuons avec des mots. Quel acharnement !
Rédigé par : mike | 14 juillet 2010 à 08:04
Comment une icône peut-elle se dégonfler ? N'est-elle pas seulement tombée de son cadre ? Ou de son écran ? Querelle byzantine je vous l'accorde puisque vous avez raison sur le fond.
Rédigé par : Charles Henri Vienne | 14 juillet 2010 à 07:38
"Alors là je me régale, voilà ce que j'avais écrit à l'époque" a écrit SR, qui pariant comme d'habitude sur la bassesse et la vilenie trouve aujourd'hui les trente deniers de son augure et ne craint pas d'exhiber son fiel d'hier comme l'eau pure d'aujourd'hui...
Oui, mille fois mieux l'enthousiasme de PB, son pari sur l'homme, sa croyance naïve en sa vertu que ces aigris permanents : le premier nous fait progresser, les seconds nous désespèrent.
On peut se faire rembourser les dithyrambes, on peut aussi être créditeur de ses aigreurs.
Rédigé par : sbriglia | 14 juillet 2010 à 06:46
Elle n'a qu'à faire La Ferme Célébrités 4 ...
Rédigé par : Alex paulista | 14 juillet 2010 à 06:34
Et puis dites merci á vos super médias qui sont toujours les premiers á en faire des tonnes. Sur tout et sur n'importe quoi, du moment que cela reste en superficie.
Le français moyen est trop bête pour comprendre le fond des choses ?
Cette femme n'est pas une icône. C'est une femme. Et là tout devient possible.
Rédigé par : jpledun | 14 juillet 2010 à 02:19
A l'époque de sa libération, "ON" (vous vous reconnaîtrez) ne vous a pas entendu gémir.
Il faut que M. Bilger fasse un billet sur le sujet pour vous faire sortir du bois ?
Et vas-y que je vomis ma haine. Arrêtez, il y en a partout. Et patati et patata...
Vous êtes d'insupportables opportunistes.
Vous m'écœurez franchement á sans cesse salir les choses, les gens. Vraiment.
Sans arrière-pensée moi j'ai observé ce moment unique, les émotions qu'il a engendrées, je me suis laissé envahir, je n'ai pas réfléchi de qui, de quoi, de où. Bref je n'ai pas automatisé mes sentiments : droite ? gauche ? Neuilly-sur-Seine ? Quesnoy-sur-Deûle ? Qu'importe !
UNE FEMME, UNE LIBERATION, UNE JOIE. Et puis c'est marre.
Je ne regrette pas d'avoir versé ma larme quand cette femme est arrivée sur le tarmac. Ni cela, ni le reste.
Pour répondre á Philippe, je pense qu’á sa place je réclamerais moi aussi un dédommagement á M. Uribe (qui jouit ici d’une soudaine popularité…)
Il lui a pourri six ans de sa vie !
Une VIE vaut mieux que nos humeurs politiques du moment.
Non ?
Rédigé par : jpledun | 14 juillet 2010 à 02:10
Ne pas juger, de peur d'être jugé à notre tour.
C'est moche quand même mais ça vient d'une femme brisée et très certainement paumée. Hier idolâtrée, aujourd'hui dénigrée et peut-être demain encensée si elle se suicidait. Fichons-lui la paix, elle a probablement une famille, des amis pour lui dire qu'elle fait fausse route. Après tout, elle ne fait de mal à personne sinon à l'idéal que d'aucuns lui ont mis sur le dos.
Rédigé par : David | 13 juillet 2010 à 23:13
Il faut comprendre le contexte. D'après ce que j'en ai entendu dire, avant d'avoir été enlevée, Ingrid Betancourt devait participer à un meeting dans un village très près des FARC. Pour ce faire elle devait rejoindre un appareil pour finir le trajet (avion ou hélicoptère, je ne me souviens plus).
Sauf que "l'administration" a fait partir l'appareil en question, ce qui a obligé Ingrid Betancourt, soit à rentrer chez elle, soit à finir le trajet sur les routes, particulièrement dangereuses.
Et on sait ce qui s'est passé ensuite.
Bref, si cette histoire est vraie, je comprends parfaitement qu'elle demande une indemnisation.
Imaginez que l'Etat oblige des gens à aller se jeter dans les bras de terroristes, ce serait normal qu'il demandent une indemnisation, non ?
Et c'est aussi "in" de démolir des héros quelque temps après les avoir encensés...
Rédigé par : Baal | 13 juillet 2010 à 23:06
Bonjour M. Bilger,
A l'époque, je reconnaissais sa valeur : avoir survécu à autant d'années de captivité, mais j'estimais que l'affaire ne méritait pas autant de bruit. Sa photo à l'entrée du Jardin de Luxembourg me gênait. Pas trop loin, je vois un sans-abri en train de donner du pain aux pigeons et de discuter avec eux. Ca fait plus de dix ans qu'il est là, au Jardin de Luxembourg, toujours en train de donner du pain aux pigeons... Je ne sais pas comment il fait pour survivre dans cette jungle parisienne. Et il ne demande rien à l'Etat. Il ne fait même pas la manche.
Rédigé par : jmarcio | 13 juillet 2010 à 21:07
En ce qui me concerne, je n'ai jamais apprécié cette fiesta médiatique autour d'Ingrid. Une amie m'a urgée, des trémolos dans la voix, de lire la lettre qu'elle a écrite à ses enfants en captivité : je n'y ai rien trouvé.
Je n'ai jamais compris pourquoi la France se pâmait devant elle. J'ai de la famille en Colombie : elle n'a jamais compris non plus !...
Sans doute avons-nous besoin de nous inventer des héros. Il faudrait mieux les choisir.
Rédigé par : Sandrine | 13 juillet 2010 à 21:00
Laurent,
Le 02 juillet 2008, dans son billet "Libertégénique" Philippe concluait :
"Ingrid Betancourt, depuis qu'elle est revenue parmi nous, étonne. Je ne sais ce qu'elle deviendra par la suite. Il est probable que la quotidienneté jouera contre elle et son image mais, en attendant, il y a là quelqu'un !"
Il fut prémonitoire, car la quotidienneté qui aurait dû lui servir de refuge a effectivement joué contre elle et l'icône est tombée.
Dans cette quotidienneté elle a usé de sa liberté de dire et faire des bêtises. Liberté qui lui fut refusée pendant six longues années qui ont dû compter beaucoup plus que double.
Peut-être doit-on en tenir compte avant d'oublier que derrière l'icône il y a une femme, une épouse, une mère.
Rien que cela me met en sympathie avec elle.
Je lui reconnais donc le droit d'avoir dit ce qu'elle a dit. Et lui accorde également le droit de le regretter.
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 13 juillet 2010 à 17:14
"...Qu'elle nous rembourse l'unanimisme festif, il est vrai un tantinet ridicule, du 14 juillet. Qu'elle nous rembourse les dithyrambes, le délire médiatique et le prix de nos illusions perdues. Qu'elle nous rembourse l'encens et l'adoration..."
La sagesse populaire dit, a tres juste titre, que "donner c'est donner, reprendre c'est voler".
Je ne comprends pas tres bien pourquoi nous devrions etre crediteurs aupres d'une femme qui n'en a peut-etre pas demande autant !
La communion resultant de son effroyable sort a ete d'un grand benefice emotionnel a ceux/celles qui s'y sont joint(e)s.
"...Avant de faire d'une personne, homme ou femme, une icône, il faudrait attendre. La regarder vivre. Attendre même longtemps. Patienter. Pour voir..."
Certainement, mais je doute qu'il en resterait beaucoup. Qui aurait envie, qui serait en mesure d'etre, une vie entiere, irreprochable ?
Non, cela n'existe pas mais c'est une jolie illusion d'optique dont on a besoin pour vivre. En l'occurrence, remercions Madame Betancourt qui, avec son joli visage de Madone nous a permis cela.
Quant a la demande d'indemnites, on peut supposer que cette somme (qui me semble exorbitante) lui ait ete suggeree par des conseils apres evaluation des annees passees en captivite, du prejudice subi ; problemes de sante, psychologiques, vieillissement premature, famille esquintee, carriere fichue, etc...
Quant a son installation sur un piedestal d'une telle hauteur, elle ne pouvait que se terminer sur une chute ; non pas en raison de sa personnalite mais de la superficialite mediatique de notre epoque ; c'est ainsi et que peut-on y faire ?!
Rédigé par : Valerie | 13 juillet 2010 à 15:29
"Qu'elle nous rembourse les dithyrambes" a écrit PB...
Si Laurent Dingli a bien fait son travail d'archives, ce dont je n'ai aucune raison de douter, je suggère donc qu'Ingrid Betancourt adresse un exemplaire dédicacé de son prochain ouvrage :
-Broché pour Philippe
-Relié maroquin pour JDR
-Relié et numéroté pour Mary
-Relié veau pleine fleur sur tirage d'artiste pur velin pour Florence
Rédigé par : sbriglia@Laurent Dingli | 13 juillet 2010 à 15:03
Que vaut exactement la déplorable transformation d'une icône en réalité humaine ? P. Bilger
En excès spéculatif de louanges - ou de blâmes -, le montant en déficit d’une prudente sympathie de principe.
C’est c’la oui !
Rédigé par : MS | 13 juillet 2010 à 13:38
@ Laurent
C'est aussi le charme incomparable de ce blog :
un grand magistrat capable d'enthousiasmes et de détestations, mais aussi capable de remettre en question ses enthousiasmes et ses détestations.
Je pense que c'est en raison de cette sincérité intellectuelle, une rareté, que Philippe réunit dans son blog des commentateurs qui éprouvent de l'affection pour lui. Coeur et esprit mélangés.
L'idée que comme lecteurs réguliers nous ne serons pas trompés, et celle de trouver ici un miroir de nos propres interrogations, ambiguïtés et contradictions.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 13 juillet 2010 à 12:52
Alors tant mieux pour moi. Je n’en ai jamais fait une idole. Je n’ai d’ailleurs jamais considéré comme des idoles des gens que pourtant j’aime ou j’aimais bien. Je suis un grand amateur de Frédéric Dard en littérature, je suis un grand amateur de Gene Vincent dans le rock. Je ne les ai jamais idolâtrés pour autant et malgré l’admiration que j’avais pour eux. J’ai côtoyé à deux reprises Jeannie Longo, une sportive que je trouve admirable, il ne m’est même pas venu à l’idée de lui demander un autographe. Question de tempérament sans doute…
L’homme se sent toujours faible quelque part et a besoin sans cesse de référents. Ce n’est pas une raison pour tomber dans une sorte d’esclavagisme volontaire et intellectuel.
Pour en revenir à Ingrid Betancourt, je l’ai d’abord trouvée franchement idiote de s’être laissé embastiller de cette façon. Tant de gens l’avait prévenue de ne pas s’aventurer dans la contrée dangereuse des Farcs. Mais non, il fallait qu’elle y aille, pour que l’on parle d’elle sans doute.
Ensuite je l’ai plaint, mais pas plus que les deux mille prisonniers, comme elle, et qui eux, y sont toujours et que, bien sûr, on oublie. Ne nous encombrons pas la conscience surtout.
Par la suite, on a appris sa conduite vis-à-vis de son assistante et amie.
Puis il y a eu le déchaînement pour sa libération, le chanteur Renaud, sans doute pour la faire libérer plus vite, traitant le président colombien de nazi, lui qui a eu son père tué par les Farcs.
A sa libération médiatique, ce fut le trop-plein. Bien sûr, on était content pour elle, la liberté n’a pas de prix. Mais avait-on une pensée pour les deux mille autres restés là-bas ?
Après un peu de cinéma médiatique, le temps de la réprobation est venu ; le traitement infligé à son mari, qui pourtant s’est battu bec et ongles pendant des années pour sa libération. Le témoignage des deux militaires américains, sur son comportement plus que sujet à caution.
Maintenant cette demande de dédommagement en totale contradiction avec son agissement qui en a fait une prisonnière quelque peu « consentante ».
Aujourd’hui, il est plus que temps de ne plus parler d’elle. Et pour ne pas retomber dans ce travers, que diriez-vous, Monsieur Bilger, si vous nous parliez de l’affaire Yvan Colonna (une affaire dans laquelle la justice ne croit pas celui qui se dit coupable et ne croit pas celui qui se dit innocent). La cour de Cassation a cassé le dernier jugement, car l’affaire a été entièrement jugée à charge et que l’on a délibérément écarté le témoignage des gens qui ont vu de près le véritable assassin. Cela, pour l’instant est plus important que Madame Betancourt.
Et si nous parlions de nos 44 soldats français, tués en Afghanistan et sur la conduite de cette guerre ? Sur son utilité, en ce cas mal conduite, ou son inutilité, en ce cas non indispensable.
La voilà la véritable actualité de nos jours, qui touche à la liberté et à la vie de nos concitoyens.
Bon vent Madame Betencourt !
Rédigé par : Michel PETROCCHI | 13 juillet 2010 à 12:51
@ Franck Boizard : Vous écrivez "Elle ressemble beaucoup à Ségolène Royal. C'est une gauchiste, elle se considère donc comme moralement supérieure, elle est une prêtresse du Bien." C'est juste la tournure, ou vous voulez dire que Ségolène Royal est une gauchiste ? Parce que dans ce cas-là, il faudrait s'entendre sur les termes et relire "La maladie infantile du communisme" de Vladimir Illitch... Non, vous avez dû taper vite... Un gauchiste vous a déculotté en 68, vous aussi ? :-) Rassurez-vous, Ségolène n'est ni à gauche, ni à droite, elle est là ou il y a des voix et des caméras...
Rédigé par : Jean-Yves Bouchicot | 13 juillet 2010 à 11:12
Il faudrait présenter Betancourt à Bettencourt, Ingrid à Liliane, pour lui faire un dessin des Farcs dans la Jungle...
Rédigé par : Catherine JACOB | 13 juillet 2010 à 10:30
Laurent vous êtes féroce (mais c'est de bonne guerre !) : l'historien nous tend souvent le miroir de nos emballements de jeunesse... Je préfère que notre hôte se soit fourvoyé pour IB que pour les khmers rouges !
Rédigé par : sbriglia@Laurent Dingli | 13 juillet 2010 à 08:54
Franck Boizard est un droitiste, il se considère donc comme moralement inférieur, il est un adorateur du mal.
En conséquence, il a une basse idée de sa propre personne et de sa faillibilité.
Rédigé par : Herman | 13 juillet 2010 à 08:18
Certes ce n'est pas en France que d'anciens otages réclameraient de l'argent à l'Etat, l'humeur est plutôt inverse et j'entends dire que c'est l'Etat qui se propose de faire les poches des anciens otages.
Cela dit, non.
Je ne regrette pas mon émotion instantanée au moment de la libération d'Ingrid Betancourt. Rappelez-vous qu'alors elle avait eu des mots, un visage, une lumière que nous avions trouvé magnifiques, qui l'étaient sans conteste.
Je le regrette d'autant moins que je ne me suis jamais proposé, y compris à ce moment, de dresser dans ma chambre une chapelle votive éternelle à Ingrid Betancourt. L'icône de cet instant demeure inchangée, telle une émotion photographiée, un arrêt sur image. Le temps s'interrompt, c'est beau, je le garde dans mon panthéon et passe ensuite le temps qui transforme en vilains vieillards les amants de Doisneau.
La roche tarpéïenne est parfois vraiment trop proche du Capitole, j'ignore les vraies raisons de cette demande d'Ingrid Betancourt mais il n'est pas anodin que cela se situe au moment du deuxième anniversaire de sa libération, comme s'il s'agissait d'attirer l'attention sur des situations qui ne bougent plus. La situation d'Ingrid Betancourt n'était pas comparable à celle d'otages retenus dans un pays lointain : elle était candidate à l'élection présidentielle et c'est dans le cadre de sa campagne, dans son pays et pas ailleurs, que cet enlèvement a eu lieu. Que dirait-on de la responsabilité de l'Etat si, en 2012, un candidat de l'opposition se faisait enlever dans un coin de banlieue où il fait campagne ? Si comparaison n'est pas raison, il demeure que Mme Betancourt a été enlevée dans son propre pays, pas à des milliers de kilomètres de celui-ci, et dans le cadre d'un processus démocratique entravé par, à l'époque, la sourde intransigeance du président Uribe. Si, au moment de sa libération, la madone n'a pas failli à l'unanimisme de rigueur, elle n'est pas illégitime, deux ans plus tard, à soulever la question du bien-fondé d'une politique qui conduit à l'enlèvement de responsables politiques.
Avec le temps, les icônes jaunissent. Ce n'est pas la faute des icônes, c'est la faute du temps.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 13 juillet 2010 à 01:22
Je n'étais déjà pas d'accord avec vous sur votre premier avis, elle n'était pas brillante en étant victime.
Aujourd'hui vous la dite ordinaire comme si on est ordinaire en étant "sans classe" et "âpre au gain" (peut être suis-je naïf), et vous parlez de "réalité humaine".
Mais comme vous le soulignez toutes les victimes n'ont pas l'arrogance de son comportement, très peu j'imagine.
Je suis encore en désaccord, elle n'est pas simplement moins brillante que nos amis du 16ème ont voulu nous le faire croire.
Non, elle entache la dignité humaine, bien qu'elle ait défendu de grandes valeurs.
Je n'ai pas à demander réparation pour le temps perdu à me renseigner sur elle et sa triste captivité, on n'a pas à demander réparation pour ne pas avoir eu le monopole de la sécurité en Colombie ou parce qu'on nous a laissé prendre des risques (elle a décidé de se rendre dans la jungle).
Nous serions des scélérats, pas des personnes ordinaires.
Rédigé par : Cyril | 13 juillet 2010 à 01:06
Alors là je me régale, voilà ce que j'avais écrit à l'époque :
Cette affaire Betancourt est la quintessence de la culture de l'entre soi, où des Neuilliens aident d'autres Neulliens dans la difficulté. Une famille bien née avec des connexions politiques, médiatiques, financières et diplomatiques a tenu les médias en alerte pendant six années. On peut légitimement s'interroger sur cette énergie excessive et cette soif de soumettre sa parole à tous les micros et exhiber son visage sur tous les plateaux télévisés. Y a-t-il urgence ou péril pour circuler en voiture avec chauffeurs de la République et tout le vacarme et aller de télé en télé, de réception en intronisation ? Sa famille véritable est-elle composée de journalistes ? Et la jungle décrite comme inhumaine a préservé Ingrid Betancourt des ravages du temps : pas de cheveux blancs, des mains impeccables, des jambes de gazelle qui lui font gravir quatre à quatre les marches d'escalier, un sourire éclatant. Alors qu'à l'entendre, le confort était spartiate, les mains entravées par des liens, pieds nus, peu d'eau. Bref, en trois jours une nouvelle téléréalité s'est inscrite dans les médias, avec Dieu comme chef spirituel et Nicolas Sarkozy comme parrain de cette mascarade.
Rédigé par : SR | 05 juillet 2008 à 22:49
+
Après les supplices voilà le temps de Saint-Sulpice. Je ne participerai jamais à une entreprise de crétinisation des esprits. En trois jours la France est sommée de s'engager dans une liesse populaire dont l'origine est habilement orchestrée par une femme qui n'a pas perdu le nord chapelet vissé au poignet.
Je m'interroge si cette même femme était revenue musulmane : les propos auraient été autres, les commentateurs auraient consacré des analyses sur la folie des Farc, sur les errements mentaux des captifs, sur la nécessité de combattre le fléau intégriste religieux. Saint-Anne aurait été évoqué sans détour par les psychiatres bizarrement absents des débats télévisés. Et le Président de la république aurait tenu une conférence de presse pour rappeler la nationalité colombienne d'Ingrid Betancourt, et que les efforts déployés par la France étaient arrivés à leur terme.
Au lieu de cela, on entend des louanges parlant de canonisation, de prix Nobel de la Paix (pour quel motif ?), de Légion d'honneur (art 1er: services rendus à la Nation et vertus civiles), de ministère, de 14 juillet, de livres, de pièces de théâtre, de conquête de la présidence colombienne.
Evidemment, depuis quelques jours il est demandé aux cerveaux disponibles de taire leurs critiques et d'approuver des choix douteux, des comportements surréalistes. Assister le regard tourné vers Dieu au défilé militaire du 14 juillet va devenir un moment dans l'histoire de France.
Rédigé par : SR | 07 juillet 2008 à 11:19
Rédigé par : SR | 12 juillet 2010 à 23:52
PS : avec le recul, le commentaire de SR était vraiment le plus intéressant :
"Après les supplices voilà le temps de Saint-Sulpice. Je ne participerai jamais à une entreprise de crétinisation des esprits. En trois jours la France est sommée de s'engager dans une liesse populaire dont l'origine est habilement orchestrée par une femme qui n'a pas perdu le nord chapelet vissé au poignet.
(...) on entend des louanges parlant de canonisation, de prix Nobel de la Paix (pour quel motif ?), de Légion d'honneur (art 1er: services rendus à la Nation et vertus civiles), de ministère, de 14 juillet, de livres, de pièces de théâtre, de conquête de la présidence colombienne.
Evidemment, depuis quelques jours il est demandé aux cerveaux disponibles de taire leurs critiques et d'approuver des choix douteux, des comportements surréalistes. Assister le regard tourné vers Dieu au défilé militaire du 14 juillet va devenir un moment dans l'histoire de France"
Rédigé par : Laurent Dingli | 12 juillet 2010 à 23:43
Oui, amusant de relire ce que vous écriviez au moment de sa libération, entre autres :
"Ingrid Betancourt est exceptionnelle parce qu'elle réussit ce tour de force. Pas une seconde, elle n'a permis au doute, à l'aigreur, à la déception d'autrui de venir altérer la pureté idéale de ses propos et de ses remerciements. Non seulement sa parfaite langue a flatté nos oreilles mais la profondeur psychologique de ses analyses et de sa reconnaissance a rassemblé bien au-delà du cercle déjà étendu de ses inconditionnels".
Et Jean-Dominique Reffait de s'extasier :
"J'étais scotché devant mon écran, qu'est-ce qu'elle était belle ! Une intelligence, une acuité, une élégance pour enlever ou remettre son chapeau militaire. Une renaissance avec la certitude que cette femme va compter demain dans le monde".
Et Mary Preud'homme :
"Merci pour votre si beau et si juste hommage à cette femme solaire, remarquable de courage et de foi en la vie malgré l'enfer qu'elle a traversé. Et pardonnons à ceux dont les commentaires odieusement tendancieux, sceptiques, voire insultants n'attestent que de leur étroitesse d'esprit et de leur incapacité à reconnaître l'excellence, la sincérité et le charisme d'un être d'exception...", etc, etc.
Et Florence :
"Merci de votre hommage !
La libération d'Ingrid a été pour moi et de façon un peu inattendue, une joie immense. La voir maintenant éblouissante de courage et de foi est un véritable cadeau. Pour une fois que les médias nous montrent le genre humain dans ce qu'il a de meilleur, c'est le bonheur !"
Amen !
Rédigé par : Laurent Dingli | 12 juillet 2010 à 23:33
Plus que l'idolâtrie (qui suppose un minimum de projection voire d'identification), je pense que le culte voué à Madame Betancourt est dû au puissant pouvoir mobilisateur du sentiment de culpabilité.
Demandez à un être humain d'accepter ses accès de colère ou de tristesse, il l'acceptera volontiers, voire s'en flattera (c'est du reste la grande tendance du XXIe siècle).
En revanche, demandez à un être humain de se sentir coupable ou honteux et vous vous heurterez à une résistance active.
Un homme est parfois prêt à s'ôter la vie plutôt que d'affronter un sentiment tel que la honte ou la culpabilité.
La captivité de madame Betancourt a été présentée comme une injustice à laquelle il était possible de mettre un terme et contre laquelle il fallait se mobiliser d'urgence.
On se souvient tous du regard hagard et de la faiblesse de cette femme quasi mourante sur la bande vidéo largement diffusée.
À cela se sont ajoutées les "bouteilles à la mer" qu'elle adressait régulièrement, telles que les lettres à ses enfants (sa raison de vivre), le dictionnaire dont elle se servait pour se distraire (sa raison de survivre) ou le privilège que lui avaient accordé ses ravisseurs en l'autorisant à écouter la radio et qui la confortait dans l'idée qu'on ne l'oubliait pas (sa raison d'espérer)...
Comment pouvait-on accepter de la laisser mourir sans au moins avoir tout tenté pour la sauver ?
Toutes les conditions étaient réunies pour créer un sentiment général de culpabilité et, par là même, une volonté farouche de s'en libérer.
Libérez-la d'urgence, vous me délivrerez de cet affreux malaise...
Aujourd'hui, Madame Betancourt risque de décevoir.
On ne culpabilise qu'à l'égard des gens qu'ont estime méritants.
Je gage que les souffrances qu'elle a endurées suffiront à l'absoudre aux yeux de certains tandis que d'autres s'en voudront de s'être tant souciés.
Je me rappelle de cette époque où l'affaire battait son plein.
Je ne culpabilisais pas le moins du monde.
Bé non, j'étais persuadée qu'elle était déjà morte, son cadavre en bonne voie de putréfaction.
Ces informations incessantes m'exaspéraient.
Je me rappelle également l'annonce de sa libération.
Et devinez quoi ?
J'ai culpabilisé !
Rien que pour cela, je lui en veux.
Rédigé par : Judith | 12 juillet 2010 à 22:50
M. Bilger,
Je crois savoir qu'elle a reconnu elle-même son erreur.
Ceci dit, elle peut certainement considérer que l'état colombien n'a pas protégé la candidate à l'élection présidentielle qu'elle était, alors que le candidat officiel, lui, l'était. Les moeurs colombiennes sont quand même fortement différentes des nôtres.
On ne peut pas par contre comparer sa situation avec celle de "nos otages"; ce n'est comparable ni en intensité, ni en durée et le contexte est différent car la France a payé ce qu'il fallait.
Chaque fois que je suis tenté d'être déçu par Ingrid (voir le livre de Clara Rojas par exemple), je me dis que ces 6 années passées dans la jungle la plus inhospitalière qui soit, ont laissé des traces et qu'elle a changé. Son mérite et celui de beaucoup d'autres otages : avoir tenu le coup. Cela, on ne peut pas le lui enlever.
Rédigé par : Polochon | 12 juillet 2010 à 22:00
Elle ressemble beaucoup à Ségolène Royal. C'est une gauchiste, elle se considère donc comme moralement supérieure, elle est une prêtresse du Bien.
En conséquence, elle a une haute idée de sa propre personne et de son infaillibilité.
Rédigé par : Franck Boizard | 12 juillet 2010 à 20:36
Il suffit de lire le livre que son ex-mari a écrit pour voir sans doute son vrai visage.
La France a beaucoup payé pour elle, trop à mon avis.
Rédigé par : moi | 12 juillet 2010 à 19:39
Je trouve aussi que vous y allez un peu fort.
Déjà je ne vois pas d'incohérence à honorer ceux qui l'ont libérée tout en reprochant une protection insuffisante en premier lieu.
Le fait qu'on ait mis fin à ses malheurs (le statut d'otage) rendrait inexistants lesdits malheurs passés ? avec une telle logique les tribunaux seraient vite désengorgés.
Tout en voyant bien que cette demande ne peut que provoquer le rejet, comme si la requête était le symptôme d'une sombre ingratitude :
Plusieurs années sans liberté, dans des conditions très limite, est certainement un dommage réel et important - bien plus important et concret même que probablement la plupart des requêtes en dédommagement qu'on voit dans les tribunaux.
Je n'ai aucun élément me permettant de savoir s'il y a eu faute ou pas de l'Etat, si cette faute est, ou pas, partiellement responsable de la réussite de la prise d'otage. Mais, de mon esprit naïf, je peux au moins considérer que ce n'est pas totalement délirant qu'il ait pu y avoir faute et donc qu'on demande une réparation de ce qui en a suivi.
Charge après à la justice de faire le tri, de savoir s'il y a effectivement eu faute ou pas. C'est bien comme ça que devrait fonctionner un bon état de droit non ?
Vouloir lui dénier ce droit sous prétexte que maintenant elle est libre (alors que c'est le statut auquel tout le monde a droit) c'est assez étrange je trouve.
Rédigé par : Eric | 12 juillet 2010 à 19:00
"Qu'elle nous rembourse les dithyrambes, le délire médiatique et le prix de nos illusions perdues. Qu'elle nous rembourse l'encens et l'adoration."
En ce qui me concerne elle ne me doit rien.
Mon coeur de battre s'est arrêté depuis fort longtemps.
Toute cette agitation faisait partie du plan de sa libération. Il fallait faire croire que l'on négociait sa libération, etc.
Cela étant je trouve en effet inimaginable sa demande.
Elle considère peut-être que la jubilation autour de sa libération a fait oublier sa souffrance, qu'elle cherche à faire reconnaître.
Duval Uzan
Rédigé par : Duval Uzan | 12 juillet 2010 à 18:56
Ingrid n'aime pas rester dans l'ombre... Elle se manifeste. Cela étant, c'est au juge de se prononcer sur le bien-fondé de ses demandes. Il serait aussi intéressant de savoir quel usage elle compte faire de la somme qu'elle convoite. Si c'est pour une oeuvre caritative, la vilenie en serait fortement atténuée !
Rédigé par : jack | 12 juillet 2010 à 18:45
Une Bettencourt chasse l'autre, celle qui réclame des sous et celle qui en donne...
Rédigé par : Patrick Handicap expatrié | 12 juillet 2010 à 18:09
Vous y allez un peu fort, Monsieur Bilger. Nous avons eu tort de faire d'Ingrid Betancourt une idole. Nous aurions tort de faire d'elle un repoussoir.
Vous vous demandez comment l'idée de demander tous ces millions à l'Etat colombien a pu germer dans son esprit. C'est en effet là une bonne question. Elle seule peut y répondre. Mais ne serait-ce pas l'effet d'une sorte d'exacerbation de ce qu'il est convenu d'appeler le syndrome de Stockholm ?
Ex-otage elle demande les millions que les preneurs d'otages habituellement demandent, non ? Elle prend donc d'une certaine façon leur parti. Comme si, ex-victime, consciente de la souffrance que procure l'état de victime, elle se mettait dans la peau de ces victimes potentielles que sont les preneurs d'otage, pourchassés qu'ils sont par toutes les forces armées du pays, otages de leur propre violence, prisonniers sans espoir de libération...
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 12 juillet 2010 à 18:07
@PB
Voilà une bête affaire en cours en train de faire écran de fumée à une autre affaire bête en cours.
Et il est aussi question de millions.
Décidément, l'argent rendrait-il bête en cours de route ?
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 12 juillet 2010 à 18:03
Bonjour Philippe Bilger
Et voilà comment une affaire Bettencourt cache une affaire Betancourt.
La première est généreuse vis-à-vis du pouvoir en place puisqu’elle participe à alimenter les caisses du parti au pouvoir. Caisses qui, comme nous le savons tous, maintenant, sont tenues à jour par un trésorier hors pair.
La seconde aurait plutôt tendance à taper dans les caisses de l’Etat colombien qui doivent d’ailleurs être à peu près aussi vides que celles de l’Etat français.
Alors gardons bien notre Liliane et surtout ne l’échangeons pas contre la dispendieuse Ingrid.
Quand on pense que l’icône en question avec son visage de madone a reçu la Légion d’honneur des mains du Président Sarkozy et qu’elle a failli avoir le prix Nobel de la Paix...
Rédigé par : Achille | 12 juillet 2010 à 17:34