La cour d'assises du Pas-de-Calais, à Saint-Omer, vient encore de se distinguer. C'était la dernière session de son président Dominique Schaffhauser, du Syndicat de la magistrature, que j'ai connu il y a longtemps et qui, à l'évidence, pour son départ, a trouvé le coup d'éclat qui convenait (Le Parisien, Le Monde, nouvelobs.com, jdd.fr, Le Figaro).
Car je suis persuadé - et les premières réactions le démontrent - qu'on va applaudir quasiment de toutes parts cette formidable audace d'avoir non pas motivé un arrêt d'acquittement mais fait répondre les assesseurs magistrats et les jurés à seize questions préparées conjointement, après les débats, avec l'avocat de la défense, les avocates des parties civiles et le parquet.
Agissant de la sorte, ce président militant s'est, paraît-il, abrité derrière une jurisprudence de la CEDH qui pourtant ne lui avait rien demandé. Si celle-ci avait récemment condamné la Belgique parce qu'elle estimait que ce pays manquait en matière criminelle à son devoir de clarté et d'équité, elle avait en revanche validé la position française de sorte qu'il est abusif de se servir de cet exemple étranger pour justifier une violation de la loi qualifiée trop rapidement d'avancée fondamentale par mon ami Me Eric Dupond-Moretti, approuvée par les avocates des parties civiles et sans doute cautionnée par le parquet puisqu'il a consenti à discuter de la teneur des seize questions avec le président. On voit mal comment ensuite le parquet général pourrait interjeter appel, s'il l'estime nécessaire, d'un arrêt dans l'élaboration technique duquel le ministère public qui lui est subordonné a mis la main. Pour le moins, il y aurait comme un malaise, une inconséquence. Cependant, il y aurait appel !
Il ne faut pas négliger l'attrait d'une forme de "snobisme", même pour les esprits les plus sérieux, qui peut conduire à des incongruités prétendues progressistes et offre le plaisir, au bon moment il est vrai et dans des conditions confortables, à une personnalité de se croire un professionnel de rupture. Cette touche sulfureuse séduit ceux qui connaissent la chose criminelle et sauront l'exploiter, ravit les ignorants appâtés par tout ce qui trouble et perturbe l'univers classique.
Ces seize questions élaborées en commun ont pour objectif de placer les débats et leur oralité sous l'égide d'une rationalité qui battrait en brèche ce qu'il y aurait parfois d'intime et de subjectif dans les verdicts d'aujourd'hui. On saurait enfin pourquoi on est acquitté ou condamné ! Comme si les parties au procès de Saint-Omer, sans cette fausse motivation et ces réponses explicites, n'auraient pu pressentir et percevoir la nature de ce qui avait convaincu ou non les jurés. Elles l'auraient d'autant moins ignoré que dans les quatre discours - plaidoiries et réquisitoire - l'ensemble de ce qui allait être débattu lors du délibéré avait été proposé et synthétisé par elles.
En réalité, ce que la défense recherche surtout dans la motivation, c'est le coup de grâce donné aux décrets impérieux des cours d'assises. Il est vrai que l'appel - voulu absolument par le barreau - les a déjà fortement relativisés. L'offensive continue avec la diffusion de cette idée que seul ce qui est rationnel aurait droit de cité dans une conviction collective. Alors qu'une audience, pour tous, est riche d'enseignements humains et psychologiques, d'attitudes et d'apparences qui ont aussi leur sens. Le clair et l'obscur se cumulent et il n'est pas honteux d'ajouter à la lucidité des preuves les intuitions de la sensibilité, les clairvoyances de l'âme et l'analyse des rapports de force. Il est manifeste que dans les seize questions on ne trouvera pas trace de ces dernières mais seulement des conclusions univoques d'une oralité réduite à sa plus simple expression.
Le point essentiel qui me fait considérer que cette innovation présidentielle est sujette à caution réside dans le fait qu'elle résulte d'une violation de la loi. Ce qui m'importe ce n'est pas, comme on le prétend sans certitude, qu'elle anticipe mais qu'elle transgresse la loi d'aujourd'hui. Pour un magistrat qui doit être d'autant plus exemplaire qu'aux assises il juge de concert avec des citoyens, la règle ne peut pas être mise à sa disposition mais il est à son service. Sans cette belle inféodation, autrui ne serait qu'assujetti à des humeurs, des caprices ou des dominations. La loi nous gouverne, nous ne la gouvernons pas. Je sais bien, et la modernité y pourvoira aisément, que les transgressions révolutionnaires, désordonnées seront célébrées mais que conservatrices, on les décriera. Il n'empêche qu'il ne faudra plus s'étonner de l'irrespect croissant à l'égard de ce qui structure et régule notre vie collective, des failles et négligences de la morale publique, de ces multiples défaillances anodines ou sérieuses par rapport à la norme. Tombant dans ce travers, un magistrat, même abrité sous un pavillon dont on comprend qu'il plaise à certains n'aura plus aucun titre à faire la leçon à qui que ce soit. La violation de la loi est en elle-même une blessure causée à la démocratie et à la cause qu'on représente.
Je ne me fais aucune illusion. On va continuer d'encenser ce qu'on estime, au sens propre, irrésistible. Je suis frappé de constater qu'il y a pour certains avocats la tentation de mettre le champ criminel à feu et à sang de telle sorte que le vrai débat, qui est naturellement un affrontement et un combat civilisés, devient impossible. Il y a le risque inverse qui est de laisser croire à des cours d'assises consensuelles où toutes les parties penchées sur le même grimoire sous la bienveillante démagogie d'un président désirant être aimé s'accorderaient pour aller au plus gratifiant : l'acquittement. Je n'ai pas plus envie de la guerre que de la concorde artificielle. J'aspire à une lutte vigoureuse mais loyale.
Il faudrait que Saint-Omer se fasse un peu oublier sur le plan judiciaire !
Bonjour,
Ayant été moi-même jurée sous la présidence de Dominique Schaffhauser, je peux vous dire avec mon âme de citoyenne à part entière que cela fut un grand moment ou plusieurs grands moments, car tirée au sort plusieurs fois.
Ce grand Monsieur nous a appris beaucoup de choses
et aucune de mes décisions n'est venue hanter mes nuits car il m'a bien appris ce qu’était pour un moment mon métier de juré.
Aujourd'hui je suis présélectionnée pour être jurée à nouveau et mon plus grand regret sera de ne pas être présidée par Dominique Schaffhauser. J'ai passé trois semaines extraordinairement enrichissantes et bouleversantes à tous points de vues.Cela remet les pieds sur terre de rencontrer un jour dans sa vie un homme tel que Dominique Schaffhauser. J’espère honnêtement pouvoir un jour le rencontrer à nouveau en dehors d'un tribunal car j'ai plein de questions à lui poser... Mais surtout lui dire toute ma reconnaissance.
LB
Rédigé par : Laure | 05 juillet 2011 à 01:55
Sévère condamnation des policiers ??? Je rêve... Une petite année pour avoir bidonné des rapports contre un malheureux qui risquait des année de violon ? Comment osez-vous écrire une chose pareille ? Ces policiers méritent 10 ans minimum, la révocation, et l'opprobre de la Nation toute entière. J'espère que la condamnation en appel sera un peu plus salée, 5 ans ferme, ça me semble vraiment une peine plancher.
Rédigé par : naolin | 15 décembre 2010 à 09:55
Je m'étonne qu'un magistrat, chargé d'appliquer la loi, prenne sur lui de se substituer aux parlementaires pour compléter le Code de procédure pénale. Mais bon... Par ailleurs, je ne suis pas sûr que la défense et la présomption d'innocence gagnent à la formulation de questions dont on pourrait au final tirer la conclusion que tel accusé a été acquitté au bénéfice du doute, alors que jusqu'à présent, un acquittement est un acquittement. Mais ce pourrait être également très dur pour la partie civile à qui une cour d'assises pourrait dire officiellement qu'elle n'est pas une victime. Je n'ai pas d'avis tranché sur ce que le législateur doit faire, mais je pense que le problème mérite réflexion, et ne doit pas donner lieu à des improvisations de prétoire.
Rédigé par : PhD | 10 décembre 2010 à 19:31
...se faire une intime conviction concernant un livre, un éclair au chocolat, un repas... bref sur toutes choses qui ne décident pas de la vie d'une personne... Mais que l'on se serve de l'intime conviction pour tuer, interner, détruire des familles... là non.
Que l'on se serve de la notoriété publique pour affirmer... N'est-il pas de notoriété publique que l'herbe est toujours plus verte chez le voisin ?
Mais que l'on se serve de la notoriété publique pour tuer une personne en l'internant à vie... là non.
Je comprends encore moins que des humains, qui disent avoir fait du droit, qui disent qu'ils font preuve de bon sens…etc. etc. puissent détruire des vies par l'application de deux choses irréelles.
-- Que des pauvres d'esprits se reposent sur l'intime conviction ou sur la notoriété publique, pour placer sur un bûcher… une sorcière… un sorcier
-- Que des manipulateurs entraînent des pauvres d'esprits à commettre l'irréparable au nom de l'intime conviction ou de la notoriété publique…
-- Que les dictateurs, les despotes et autres tyrans se servent de l'intime conviction et de la notoriété publique pour assouvir leurs soifs de sang…
Mais que des humains se disant instruits, disant avoir du bon sens, disant avoir fait du droit, disant rendre justice… ne se reposent que sur la notoriété publique ou l'intime conviction et non sur des preuves concrètes pour tuer, briser une vie… me dégoûte à un point tel que personne ne peut imaginer.
Un avocat | 26 novembre 2010 à 13:16
et plus clairement Christian C | 26 novembre 2010 à 09:43
Pour ma part, si je devais comparaître un jour devant un jury populaire en accusé, je verrais d’un œil favorable toute initiative visant à placer mes « juges » en situation de structurer la formation de leur verdict plutôt que de l’asseoir sur leur seule intime conviction, dont j’ignorerais à jamais si elle s’est forgée dans le cerveau reptilien, le limbique ou le néocortex. Rédigé par : Christian C
2 sur 15… qui se posent des questions sur l'intime conviction.
Je pense que l'avocat et Christian se poseront les mêmes questions sur la "notoriété publique" (art. L-3213-2 (1) du code de la santé), qui sert de preuve tout comme l'intime conviction.
Combien de milliers de personnes innocentes ont-elles été victimes de la notoriété publique ?... dont les préfets sont de grands utilisateurs, en dehors de tout contrôle… Rien que selon leur bon vouloir.
L'intime conviction qui se repose sur la notoriété publique... ce qui fait deux preuves irréfutables et non discutables que non seulement la justice, la police/gendarmerie, etc., sont pourries, mais que ceux qui la rendent, l'appliquent au nom de ses deux principes... le sont de même... non ?
(1) cet article date de Napoléon 1er
Rédigé par : votre conscience | 30 novembre 2010 à 17:08
Bonjour M. Bilger,
J'attendais pour réagir une intervention de Dominique Schaffhauser sur ce blog, comme c'est parfois le cas pour d'autres magistrats que vous épinglez, elle n'est pas venue.
J'ai lu la presse, enthousiaste devant cette initiative audacieuse pour ne pas dire révolutionnaire de la cour d'assises de Saint-Omer comme j'ai lu les commentaires souvent très judicieux qui m'ont précédé.
Malgré tout je ne parviens pas à me forger une opinion, oserais-je écrire une intime conviction, sur le bien-fondé ou la légalité de cette initiative.
Je crois cependant qu'une évolution vers la motivation de verdicts des jurys populaires en matière criminelle est inéluctable même si elle est nécessairement complexe car l'intime conviction relève par trop de la subjectivité des jurés et il est tout de même hasardeux de faire reposer une condamnation ou un acquittement sur la seule conscience de ces derniers.
Quant à la démarche usitée par le président Schaffhauser, je me garderai bien de la juger même si je doute fort qu'elle ne repose que sur ses convictions syndicales ou sur la volonté de partir à la retraite sur un coup d'éclat.
L'avenir m'éclairera peut-être mais je vous trouve bien sévère.
Rédigé par : Ludovic | 28 novembre 2010 à 12:30
Il y a un aspect qui me paraît tout autant important et que vous ne traitez pas dans votre billet.
Un verdict d'assises se décompose pour moi en deux éléments:
1 - la question de la culpabilité du prévenu
2 - La peine
Imaginons que la personne prévenue à Saint-Omer ait été déclarée coupable par le jury et imaginons que le jury d'assises ait "motivé" sa décision par des réponses contraires à celles apportées aux seize questions posées au jury.
(je pose des guillemets au participe passé "motivé" non pas pour disqualifier le terme, mais je pense que le débat reste tout de même ouvert quant à l'emploi du terme motiver pour caractériser le plus justement possible l'initiative de Saint-Omer)
Dans l'hypothèse de la culpabilité, il resterait alors pour le jury à débattre de la peine.
Il me semble que là pour le coup une motivation m'apparaîtrait tout autant digne d'intérêt.
Si nous envisageons l'hypothèse d'un jury qui a condamné, mettons à 8 ans de réclusion criminelle, la doctrine (celle défendue par exemple par la majorité écrasante des commentateurs du blog d'Eolas), cette doctrine dit en gros qu’en condamnant à 8 ans le jury décide IMPLICITEMENT de déléguer la question de la libération conditionnelle à mi-peine au Juge d’Application des Peines.
Je pense alors qu’une initiative du président pour motiver la peine serait tout autant bienvenue.
Non seulement le prévenu saurait sur quels éléments factuels le jury a posé son verdict de culpabilité, mais il saurait de surcroît, de façon formelle, comment le jury a débattu et a résolu la question de la peine et celle de son avenir pénitentiaire, celle de son avenir tout court.
"Il s'agit d'un verdict historique. C'est une révolution dans la façon dont sont rendus les verdicts en France. Pour la première fois, on sait ce qui a amené les juges à prendre leur décision », a estimé Me Eric Dupond-Moretti, avocat de la défense dans cette affaire. « Il s'agit d'une avancée notable dans la motivation des arrêts de cours d'assises. Cela permet de comprendre le raisonnement qui a été suivi par les jurés », s'est réjouie également Me Caroline Matrat, avocate des parties civiles." (Nord Eclair)
"Peut-on parler d'un coup d'éclat juste avant votre départ à la retraite ? (Nord Eclair)
C'est insultant de penser ça. Je n'ai pas attendu la retraite pour juger comme je le pense. J'ai juste l'impression d'avoir fait mon métier, d'être un juge ordinaire qui n'a fait qu'appliquer la loi. Je suis sensible à ce que la justice soit plus accessible et mieux comprise par les justiciables et le peuple français. L'acte de juger, c'est aussi d'amener la paix sociale (Dominique Schaffhauser, président des assises de Saint-Omer)."
Eh bien, si je m’appuie sur la doctrine Dupond-Moretti – Caroline Matrat – Dominique Schaffhauser: savoir pourquoi des juges ont été conduits à prendre une décision - la justice rendue ainsi plus accessible et mieux comprise par les justiciables et le peuple français, il me semblerait tout autant important et innovant de motiver formellement la peine quand le prévenu est déclaré coupable.
Je sais, on me répondra que la motivation façon Saint-Omer ne prend en compte que la question de l'intime conviction au sujet de la culpabilité ou pas de tel ou tel accusé.
Néanmoins, je pense que dans cette logique, la décision de la peine mérite tout autant d'être formalisée et expliquée clairement au condamné, aux justiciables et au peuple français.
Non ?
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 28 novembre 2010 à 07:07
@Alex paulista
L'histoire fictive du pompier dissimulé dans un placard rappelle une anecdote, elle tout à fait authentique, survenue au milieu des années soixante.
La scène se passe dans une chambre d'internat d'un CHR de la région du Centre, occupée par une stagiaire internée, blonde parisienne du XVIème, fille de patron, ex-coqueluche de la nouvelle fac de la rue des Saints-Pères. Le doyen de l'internat frappe à la porte. La stagiaire ouvre et le fait entrer, parce qu'il lui amène les résultats d'examens complémentaires d'un important patient du service. La conversation se prolonge pendant plusieurs minutes. Soudain un bruit se fait entendre dans l'armoire-penderie, dont la porte s'ouvre sur le médecin-assistant du service, bataillant pour s'extraire des tailleurs griffés Saint-Laurent.
Rédigé par : Djinn | 28 novembre 2010 à 05:08
"Il faudrait que Saint-Omer se fasse un peu oublier sur le plan judiciaire ! "
D'un autre côté, on peut comprendre que ce palais de Justice veuille montrer qu'il essaie de tirer des leçons du fiasco judiciaire que tout le monde appelle simplement 'l'affaire d'Outreau' du nom de la commune où étaient réputés s'être déroulés les faits, et non 'l'affaire de Saint-Omer' du nom de la circonscription judiciaire de rattachement des magistrats ayant officié en première instance.
Rédigé par : Catherine JACOB | 27 novembre 2010 à 15:08
@Frank THOMAS | 27 novembre 2010 à 09:29
« De même - et ceci se rapproche davantage du jury dont il est question dans votre article, Monsieur Bilger -, plus on demande au jury d'examen (je pense au baccalauréat, notamment) de motiver chacune de ses décisions point par point, et plus il devient exceptionnel que le candidat échoue. »
Cela n'a rien à voir. Si d'une part le Jury est souverain dans sa notation, il existe d'autre part une circulaire parue au BO de l'Éducation Nationale et par laquelle l'auteur de la note se voit contraint de justifier cette dernière sur demande expresse du candidat (ou de sa famille). Justifier ne revient cependant pas à plaquer une appréciation au hasard censée faire office de justification et pas non plus à opérer une véritable correction de la copie comme s'il s'agissait d'un devoir.
Il en va de même par ex. aux concours.
Ayant demandé en leur temps, la justification de mes notes d'écrit qui m'avaient amenée à 0,0 et quelques points de moyenne de différence avec le dernier admissible à l'agrégation de philosophie, il m'a été très correctement et très gentiment (= sans mépris etc.) répondu par écrit sur un document que je dois pouvoir retrouver au besoin, que j'avais traité l'un des sujets, notamment celui qui m'avait valu de ne pas être dans le lot des admissibles de l'année de référence, dans une optique qui n'était pas celle dans laquelle ce sujet avait été conçu et été donné et qui donc était celle attendue par le jury. Nonobstant j'avais telle et telle et telle qualité qui autorisaient à me pousser à me représenter.
En revanche, ayant cherché à connaître le pourquoi du comment s'agissant de l'agrégation de japonais également présentée. Il ne m'a jamais été répondu, pas même par la communication des notes en référence avec leurs coefficients. De plus, l'année suivante, seule candidate inscrite pour un unique poste ou deux postes je ne sais plus exactement, j'ai appris l'annulation du concours le jour de la 1ère épreuve au motif qu'il n'y avait pas suffisamment de candidats inscrits pour que l'admission d'un candidat, en l'espèce une candidate, n'entache pas la crédibilité dudit concours. Raison non nécessaire et non suffisante et qui plus est pur prétexte. En tout état de cause, objet d'une enquête administrative aussitôt ouverte, aussitôt enterrée. Cerise sur le gâteau, l'un de mes cours s'est vu édité dans ce qu'il avait de tout à fait particulier, sous le nom d'une candidate ultérieurement admise, en étant présenté comme pédagogiquement tout à fait innovant, l'innovation étant en effet représentée par la particularité en question. Si avec cela je n'ai toujours pas compris que ma candidature eût été beaucoup mieux accueillie comme bénévole des Resto du Cœur...! Quoique...!
Autrement dit, il y a des jurys qui respectent et leur fonction et les candidats et l'administration et leurs obligations légales, et des jurys qui font ce qu'ils veulent se sachant accessoirement suffisamment bien en cour pour ne pas avoir à rendre de comptes. Ce dernier état de la situation étant aussi celui de la majorité des jurys de l'option de japonais ayant siégé ou officié au bac sur la région.
Qui plus est quand un enseignant se plaint, en particulier au service des examens et concours de l'administration rectorale, par ex. à propos de la façon non orthodoxe dont s'était déroulé l'oral de japonais de l'une de ses élèves qui a cependant ensuite poursuivi, et avec succès, des études de japonais à Paris aux L.O, il voit par hasard ses heures en université objet d'une suppression le jour même de la rentrée suivante. (Tous documents en rapport également susceptibles d'être fournis en cas de contradiction)!
J'imagine donc, qu'il y a autant de personnels qui se respectent, respectent la loi, leur fonction, leurs obligations et accomplissent leur devoir dans l'honneur avec une grande conscience professionnelle et un grand talent - je ne nommerai évidemment personne mais tout le monde en connaît au moins un -, à la Justice qu'à l'Éducation nationale ou quelque soit l'Institution en cause, et autant qui font strictement ce qu'ils veulent et la plupart du temps sans être inquiétés. Lorsque ce dernier lot sévit dans la Justice, laquelle peut être à l'origine de vies dès lors injustement brisées, il est certain que cela pose un problème qui interpelle en revanche toute catégorie de citoyens.
Rédigé par : Catherine JACOB@Frank THOMAS | 27 novembre 2010 à 14:35
@ Christian C
L'extrait du livre de PB que vous citez est conforme à mon idée de la décision. Penser c'est dire non à soi-même. Cela n'interdit pas de trancher à la fin; au contraire, c'est la seule façon.
Quand vous introduisez des questions, elles orientent - bien ou mal - le débat. De plus, et surtout, les réponses orientent les débats. Votre exemple est excellent: si je pense qu'avoir été griffée par la victime le jour du meurtre est un indice fort de culpabilité, la réponse majoritairement négative à la question de savoir si c'est une preuve absolue a tendance à m'influencer dans le sens de donner un poids nul à cet élément.
Si vous avez trois éléments concordants du même genre et que vous les ignorez un à un, vous allez bientôt trouver des explications si un pompier tout nu se cache dans votre placard et que votre épouse nue sur le lit a tout fait pour vous dissuader d'ouvrir ledit placard.
Rédigé par : Alex paulista | 27 novembre 2010 à 11:51
Votre opinion est intenable : la France a un système juridique comportant des horreurs d'un autre temps, et la CEDH démantèle à juste titre ce système moyenâgeux : garde à vue sans garantie, absence de motivation, commissaire du gouvernement, inutilité du recours pour excès de pouvoir, état des prisons, emprisonnements préventifs abusifs, placement d'office en psy, la liste est longue des aberrations de notre système, condamnées par la Haute Cour. A 51 ans, je découvre le délabrement judiciaire de mon pays et j'ai l'impression d'avoir été floué quand j'ai cru étant jeune vivre dans le plus beau pays du monde... Avec le progrès de la diffusion de l'information, la France ne peut plus cacher ses miasmes sous le tapis des juridictions. Et je passe sous silence la cascade d'erreurs judiciaires depuis des décennies, celles qu'on connaît (Outreau, Dils etc. ; celles qu'on soupçonne : Omar Raddad, Colonna, etc. ; et celles des milliers de malheureux d'innocents qui croupissent dans les geôles du pouvoir). Vous êtes donc dans le camp des passéistes ; moi, dans celui de la Révolution européenne qui commence. Moi, je veux que le Conseil d'Etat et la Cour de cassation soient subordonnées à la CEDH et à la CJUE, car seuls les naïfs peuvent avoir confiance en la justice française et en son peuple. Ils doivent être sous tutelle, dans ce domaine, on découvre que la France n'a jamais mérité sa souveraineté.
Rédigé par : naolin | 27 novembre 2010 à 11:37
@Alex Paulista,
« une magistrature qui ne ferait que douter serait aux antipodes de ce qu'une bonne justice exige. Si l'intelligence exige qu'un dialogue intime oppose sans cesse certitudes et incertitudes, la conviction et son contraire, rien, en revanche, ne serait plus éloigné de cette heureuse délibération que l'envahissement de l'esprit par un atermoiement dévastateur qui ferait perdre aux juges le sens de leur mission et l'efficacité de leur action. Un magistrat, après avoir pesé les scrupules et évalué les interrogations, a pour rôle de trancher, de décider et de statuer. Je devine bien que la défense souhaiterait le voir s'orienter presque à tout coup sur le chemin de l'irrésolution et donc de l'exonération . Cette culture du doute, qui, au vrai, habite l'avocat auquel on pourrait souhaiter sans malice de s'abandonner plutôt à la culture de la vérité, a pour fonction, si on n'y prend garde, de déstabiliser et d'affaiblir grâce à l'apparente évidence du slogan. »
La citation est celle d’un certain Philippe Bilger (Le magistrat rêvé pour l’avocat, 26 février 2006) sur ce blog.
Si une liste de questions préalables, fussent-elles binaires, est utile à la levée du doute, la justice n’en sort-elle pas gagnante ?
Dans le cas d’espèce, je cite la dépêche AFP : « L'une des questions demandait si l'ADN de l'accusée, retrouvé sous les ongles de la victime, provenait obligatoirement d'un corps à corps au moment du meurtre. Les jurés ont répondu non, emportant l'acquittement de Béatrice M.
Celle-ci avait expliqué avoir été griffée involontairement par la victime, Monique L, épouse de son ex-mari, quelques heures avant sa mort. »
La méthode imposée aux jurés par le président de la cour d’assises de Saint-Omer me choque dans la mesure où elle a transgressé la loi.
La conduite d’une réflexion sur cette méthode ne me semblerait pas pour autant à exclure d’emblée.
Rédigé par : Christian C | 27 novembre 2010 à 09:32
Ces 16 questions auxquelles il faut apporter des réponses motivées et rationnelles ont apparemment de quoi rassurer les accusés et le peuple au nom duquel la justice est rendue en France.
Je n'ai aucune expertise en matière de justice, mais je me risque à une transposition dans le domaine que je connais : celui de l'Education.
Par expérience, j'affirme qu'à chaque fois que le Ministère, relayé par le Rectorat et l'Inspection, a modifié les obligations du professeur en matière de notation en l'obligeant à subdiviser la note et à motiver chacune des fractions de celle-ci, le résultat a immanquablement été une plus grande tolérance, et, pour faire simple, une amélioration des notes.
C'est mécanique : une note globale évaluant un devoir en 3 ou 4 parties, et obtenue en tenant compte à la fois des données objectives de tel ou tel exercice et de la valeur globale du devoir, jaugée de façon plus subjective, est automatiquement plus basse que si elle est obtenue par l'addition de 3 ou 4 notes séparées.
De même - et ceci se rapproche davantage du jury dont il est question dans votre article, Monsieur Bilger -, plus on demande au jury d'examen (je pense au baccalauréat, notamment) de motiver chacune de ses décisions point par point, et plus il devient exceptionnel que le candidat échoue.
Je suis conscient que dans les exemples que je viens de donner, ce sont des professionnels qui agissent, ce qui n'est pas le cas du jury populaire.
Mais il me semble précisément que l'écart risque d'être encore plus grand avec des "amateurs" qui ne peuvent que se laisser influencer pour chacune des décisions à prendre, lesquelles, in fine, constitueront l'arrêt de la cour, comme l'addition des évaluations fractionnées constitue la note globale ou la décision de faire réussir l'examen.
Ceci dit, est-ce un bien ? est-ce un mal ? Je m'en remets aux professionnels et à leur éthique pour en juger.
Rédigé par : Frank THOMAS | 27 novembre 2010 à 09:29
C'est vrai, l'initiative de Saint-Omer présente un aspect, disons aventureux et passablement bricolé.
Néanmoins, au moment du délibéré, les débats ne se structurent-ils pas en réalité autour de réponses claires à apporter à des questions précises et rationnelles comme celles qui ont été posées aux jurés de Saint-Omer ?
Je suis la première à vous suivre sur l'aspect plutôt sensible, au sens haut du terme, qui fonde une intime conviction. En même temps je pense, peut-être à tort, qu'un délibéré est un débat dont la fonction est également celle de rationaliser au mieux la conviction des jurés. Sans pour autant la dénaturer, voire même au contraire la renforcer.
Aussi, ce président n'a-t-il pas finalement fait que formaliser l’informel d'un délibéré ?
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 27 novembre 2010 à 08:41
Allez, ne soyons pas radine ; je repose ma
question : à qui appartient la justice ?
Un membre de la famille a refusé d'être
juré parce que, alors que ces préoccupations
sont pour le commun cad celui et/ou celle
qui n'est pas à proximité des affaires
juridiques quelle que soit la spécialité,
on lui demanderait d'avoir la concentration
et la connaissance des procédures de ceux
et celles pour lesquels-elles- c'est une
routine !
Ceux et celles qui sont proches du milieu
juridique préféreront toujours se taire...
non par crainte mais plutôt par une sorte
de consensus proche de celui des scientifiques : plus on en sait moins on en sait.
Rédigé par : calamity jane | 26 novembre 2010 à 20:28
La justice française doit apprendre à manger son chapeau.
Il y a trop longtemps qu'elle se moque des droits des justiciables.
L'intelligence c'est appliquer la jurisprudence des arrêts de la CEDH, même s'ils concernent un autre pays.
A quoi sert d'attendre pour être ensuite condamné sans coup férir (cf GAV puis le procureur...).
Rédigé par : Patrick Handicap expatrié | 26 novembre 2010 à 18:54
Après l'ami Thierry Lévy, l'ami Dupond-Moretti...
"Mon Dieu, gardez-moi de mes amis. Quant à mes ennemis, je m'en charge ! "
Un exemple de motivation d'arrêt de cour d'assises :
"L'accusation reposait uniquement sur 3 indices A, B et C.
Des délibérations, nous retenons les points suivants :
- Il est apparu que 4 personnes ont jugé les indices A et B très peu probants mais l'indice C suffisant pour entraîner la culpabilité.
- Il est apparu que 4 personnes ont jugé les indices B et C très peu probants mais l'indice B suffisant pour entraîner la culpabilité.
- Il est apparu que 4 personnes ont jugé les indices A et C très peu probants mais l'indice A suffisant pour entraîner la culpabilité.
En conclusion, à une large majorité (8 voix sur 12) tous les indices A, B et C sont apparus très peu probants et l'accusé est reconnu coupable à l'unanimité."
Comment parler sérieusement de motivation dans un système qui n'est même pas logiquement cohérent ?
Rédigé par : Francois F. | 26 novembre 2010 à 17:29
Notre hôte écrit
"Ces seize questions élaborées en commun ont pour objectif de placer les débats et leur oralité sous l'égide d'une rationalité qui battrait en brèche ce qu'il y aurait parfois d'intime et de subjectif dans les verdicts d'aujourd'hui."
Je crois que là est le coeur du problème. Comme Philippe Bilger, je me méfie de cette réduction à une liste de questions binaires. Encore plus si on oriente et filtre les débats pour ne répondre qu'à cela.
Juste un exemple: plusieurs fois il m'est arrivé de reconnaître de dos, au milieu d'une foule, une personne que je n'avais pas vue depuis plus de dix ans, parfois à l'autre bout du monde. Rien qu'à la démarche. Tout d'abord vous tournez la tête sans raison, comme attiré. Puis en quelques secondes votre sentiment passe d'une vague impression à une forte présomption, puis à une quasi certitude.
Une fois, quand la personne s'est retournée, j'ai constaté avec étonnement une tête totalement différente de celle que j'avais connue. Mais là, c'est elle qui m'a reconnu...
Essayez d'expliquer cela en seize réponses par oui ou par non. Alain disait que penser, ça passe par le corps et les épaules. C´est d'abord dire non.
Enfin, je suis persuadé qu'on ne pense pas en groupe.
Rédigé par : Alex paulista | 26 novembre 2010 à 14:16
Monsieur Bilger,
La motivation des arrêts est une question de temps mais elle finira pas s'imposer. Un accusé doit savoir pourquoi il a été condamné, ce qui passe par la motivation des arrêts, sans quoi il n'y a aucune garantie contre l'arbitraire.
Vous parlez de mettre à feu et à sang la procédure. Vous avez raison et les avocats devraient monter au créneau sur d'autres sujets.
- Un procureur ne devrait pas pouvoir participer à plus d'un procès avec les mêmes jurés populaires dans une même session d'assises en raison du fait qu'il finit par avoir une influence sur les jurés s'ils le côtoient plusieurs semaines.
- le parquet ne devrait avoir aucun rôle sur l'audiencement. Il est toujours assez scandaleux de constater que lorsqu'on veut que l'accusé soit acquitté on se retrouve audiencé devant un président répressif.
- les avocats devraient pouvoir auditionner les jurés avant de les choisir.
- les magistrats professionnels ne devraient pas voter lors de la délibération. Cela éviterait qu'on audience devant des présidents connus pour être répressifs.
- On ne devrait pas être président de cours d'assises aussi longtemps qu'on a pu le voir à Paris. Ainsi, les présidents carriéristes n'auraient plus à s'inquiéter de s'attirer l'antipathie des parquets.
- L'intégralité des débats devrait être filmée pour qu'en cas d'appel on puisse faire état de ce qui a été dit à l'audience précédente.
- Les magistrats du parquet devraient être à égalité des avocats dans l'agencement des cours d'assises. L'avocat général est souvent bien mieux placé pour interroger ou requérir. Idem pour la robe.
- L'organisation des débats devrait être réglementée. Ce n'est pas la même chose d'entendre les victimes au début du procès et à la fin du procès où l'impression donnée par les victimes est plus forte.
- On devrait pouvoir évoquer devant une cour d'assises d'appel ce qui a été dit lors de la première cour d'assises.
- Les avocats devraient pouvoir avoir un droit d'obstruction. Exemple : une personne jugée pour viol est mise en examen pour une autre affaire de viol. Si le parquet ou la partie civile invoque ce fait, malgré la présomption d'innocence, trop tard.
- Le parquet après clôture des débats devrait fournir aux avocats les peines requises afin qu'ils puissent préparer leur défense.
Et bien d'autres sujets.
Rédigé par : Un avocat | 26 novembre 2010 à 13:16
L'analyse la plus claire que j'ai trouvée est celle de Nord Eclair qui telle que la suivante: « JUSTICE
Saint-Omer : un pas vers la motivation des verdicts
Publié le jeudi 25 novembre 2010 à 15h42 - AFP
Pour l'avocat Patrice Spinosi, en pointe dans le combat pour une motivation des arrêts d'assises, « Saint-Omer a donné un coup d'aiguillon aux pouvoirs législatif et judiciaire ». Mais « l'appel met à néant la solution rendue ». « Pour déverrouiller la situation, il faut une décision de la Cour de cassation ou une évolution législative », a-t-il souligné. Saisie de cette question après le premier arrêt de la CEDH dans l'affaire Taxquet, la Cour de cassation avait décidé le 14 octobre 2009 que les cours d'assises pouvaient continuer à ne pas motiver leurs arrêts.Le parquet général avait fait valoir à l'audience que les cas belge et français n'étaient « qu'apparemment semblables », notamment parce qu'en France, « il y a une procédure d'appel ».
On trouve encore assez claire également celle du Monde :
« A Saint-Omer mercredi, ces questions portaient sur des éléments à charge contre l'accusée.
Il était par exemple demandé aux jurés si la présence de son ADN sous les ongles de la victime était une preuve suffisante pour condamner l'accusée.
Pierre Savary - Reuters | 25.11.10 | 17h38 - Le Monde
« Mercredi, le président d'assises du tribunal de Saint-Omer, Dominique Schaffhauser, qui prendra prochainement sa retraite, a trouvé une parade. Il a élaboré, en concertation avec les parties civiles, le parquet et la défense, une série de 16 questions, portant sur des éléments précis de l'enquête et des points soulevés pendant le procès d'une femme accusée de meurtre.
L'une des questions demandait si l'ADN de l'accusée, retrouvé sous les ongles de la victime, provenait obligatoirement d'un corps à corps au moment du meurtre. Les jurés ont répondu non, emportant l'acquittement de Béatrice Matis. Celle-ci avait expliqué avoir été griffée involontairement par la victime, Monique Lejeune, épouse de son ex-mari, quelques heures avant sa mort. »
Mais, impossible de découvrir la liste exhaustive de ces questions. Est-ce que quelqu'un saurait où elle a pu être publiée?
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Ceci dit:
Code de procédure pénale
Partie législative
Livre II : Des juridictions de jugement
Titre Ier : De la cour d'assises
Chapitre VI : Des débats
Section 4 : De la clôture des débats et de la lecture des questions
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Article 353
Avant que la cour d'assises se retire, le président donne lecture de l'instruction suivante, qui est, en outre, affichée en gros caractères, dans le lieu le plus apparent de la chambre des délibérations :
"La loi ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : " Avez-vous une intime conviction ? "."
Cet article fait suite aux art. Cités ci-après:
Article 348 Le président donne lecture des questions auxquelles la cour et le jury ont à répondre. Cette lecture n'est pas obligatoire quand les questions sont posées dans les termes de la décision de mise en accusation ou si l'accusé ou son défenseur y renonce.
Article 349 Chaque question principale est posée ainsi qu'il suit : "L'accusé est-il coupable d'avoir commis tel fait ?"
Une question est posée sur chaque fait spécifié dans le dispositif de la décision de mise en accusation.
Chaque circonstance aggravante fait l'objet d'une question distincte.
Il en est de même, lorsqu'elle est invoquée, de chaque cause légale d'exemption ou de diminution de la peine.
D'où je comprends mieux l'ire de PB car la loi ne demande pas aux jurés comme le fait la question 7/16 unanimement reprise par la presse - ce qui traduit quelque part un malaise général vis-à-vis du poids d'une expertise scientifique en tant que donnée brute dans un verdict, alors que tout bon scientifique ne saurait ignorer l'affirmation de Nietzsche dans La Volonté de puissance qu'on doit retrouver quelque part chez Bachelard(?)-, qu'il n'y a jamais vraiment de faits mais seulement leurs interprétations, de répondre à des questions d'ordre général autrement dit en somme de légiférer. Mais pour pouvoir affirmer ceci, et participer au débat ouvert ici par PB sur ce sujet, il faudrait disposer d'une liste exhaustive afin de savoir si en effet, se rapportant dans l'absolu seulement à l'accusé, elle pourrait faire l'objet d'une circulaire distribuée aux jurés d'un prochain procès aux fins d'affiner leur intime conviction puisque la réponse aux questions suivantes encore, n'est plus apparue suffisante au président de la cour d'assises de Saint-Omer.
Article 349-1 Lorsque est invoquée comme moyen de défense l'existence de l'une des causes d'irresponsabilité pénale prévue par les articles 122-1 (premier alinéa), 122-2, 122-3, 122-4 (premier et second alinéas), 122-5 (premier et second alinéas) et 122-7 du code pénal, chaque fait spécifié dans le dispositif de la décision de mise en accusation fait l'objet de deux questions posées ainsi qu'il suit :
"1° L'accusé a-t-il commis tel fait ? ;
"2° L'accusé bénéficie-t-il pour ce fait de la cause d'irresponsabilité pénale prévue par l'article ... du code pénal selon lequel n'est pas pénalement responsable la personne qui ... ?"
Le président peut, avec l'accord des parties, ne poser qu'une seule question concernant la cause d'irresponsabilité pour l'ensemble des faits reprochés à l'accusé.
Sauf si l'accusé ou son défenseur y renonce, il est donné lecture des questions posées en application du présent article.
Article 350 S'il résulte des débats une ou plusieurs circonstances aggravantes, non mentionnées dans l'arrêt de renvoi, le président pose une ou plusieurs questions spéciales.
< B>Article 351 S'il résulte des débats que le fait comporte une qualification légale autre que celle donnée par la décision de mise en accusation, le président doit poser une ou plusieurs questions subsidiaires.
Article 352 S'il s'élève un incident contentieux au sujet des questions, la cour statue dans les conditions prévues à l'article 316.
Autrement dit, celui-ci:
Article 316 Tous incidents contentieux sont réglés par la cour, le ministère public, les parties ou leurs avocats entendus.
Ces arrêts ne peuvent préjuger du fond.
Lorsque la cour d'assises examine l'affaire en appel, ces arrêts ne peuvent être attaqués que par la voie du recours en cassation, en même temps que l'arrêt sur le fond. Lorsque la cour d'assises examine l'affaire en premier ressort, ces arrêts ne peuvent faire l'objet d'un recours, mais, en cas d'appel de l'arrêt sur le fond et de réexamen de l'affaire devant une autre cour d'assises, ils n'ont pas autorité de la chose jugée devant cette cour.
Qui donc pourrait permettre en effet, à première vue, à la béotienne du droit que je suis, d'interjeter appel puisque le §1 qui évoque une concertation telle celle qui paraît avoir eu lieu à Saint-Omer se rapporte à un contentieux et non pas au cours ordinaire du procès, de plus n'emporte pas de décision au fond.
Néanmoins, la démarche de ce président est tout à fait intéressante. Reste à savoir dans quelle mesure elle ne se résume pas à un sondage sur un produit (ici un produit immatériel tel celui-ci: 'un verdict qui se respecte doit-il se préoccuper noir sur blanc de telle et telle telle circonstance d'ordre général rapportée à ce cas particulier qui nous occupe comme « l'ADN de l'accusée Mme Béatrice Matis, retrouvé sous les ongles de la victime Mme Untel, provenait obligatoirement d'un corps-à-corps au moment du meurtre. »') comme en font certains instituts de sondage et qui peuvent peut-être conditionner ou circonscrire dans leurs limites, l'intime conviction, laquelle cependant ne saurait pas non plus être arbitraire sans avoir pour conséquence une injustice. C'est pas évident.
Rédigé par : Catherine JACOB | 26 novembre 2010 à 11:25
Est-ce illégal ?
Le président d'une cour d'assises a le droit d'ajouter de nouvelles questions à celles qui découlent de l'acte d'accusation.
A toutes ces questions, il est demandé aux jurés de se prononcer selon leur intime conviction par oui ou par non.
J'ignore si cette procédure a été suivie ou pas.
Il me semble très difficile de poser à un jury des questions ouvertes du genre "Quelles preuves ont été produites ?" Mais si la question est du genre "Le fait que M. X ait été en possession de la hache constitue-t-il une preuve de sa culpabilité ?", elle n'est pas illégale.
Je suis donc dans l'incapacité de me prononcer sur ce sujet et je ne m'emballe pas.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 26 novembre 2010 à 11:25
Le Président de la cour d'assises de Saint-Omer s'explique dans Nord Eclair :
http://www.nordeclair.fr/Actualite/2010/11/26/je-souhaite-que-les-decisions-de-justic.shtml
Il justifie cette motivation de l'arrêt par une volonté de mieux expliquer les décisions de justice au peuple français mais aussi à l'accusé. Il pense ainsi apaiser les tensions et oeuvrer dans le sens de la paix sociale.
Par ailleurs, il trouve insultant que l'on puisse penser qu'il ait voulu faire un coup d'éclat avant de prendre sa retraite...
Rédigé par : Mussipont | 26 novembre 2010 à 10:57
"Dominique Schaffhauser a souhaité changer sa façon de délibérer pour, dit-il, mieux faire comprendre le verdict à l'accusée."
http://www.nordeclair.fr/Actualite/2010/11/26/je-souhaite-que-les-decisions-de-justic.shtml
Rédigé par : Choubidou | 26 novembre 2010 à 10:31
"Il ne faut pas négliger l'attrait d'une forme de "snobisme", même pour les esprits les plus sérieux, qui peut conduire à des incongruités prétendues progressistes et offre le plaisir, au bon moment il est vrai et dans des conditions confortables, à une personnalité de se croire un professionnel de rupture."
"Ah, cruel ! Ah, perfide !" (pour les amateurs d'opéra)
Il y a plus de trente ans j'affrontais - et me prenais de bec avec lui - Dominique Schauffhauser comme juge départiteur au TI de Rambouillet... Pour un simple licenciement, il avait décidé un transport de justice au siège de la société défenderesse aux fins... d'entendre son président et enquêter sur les conditions de travail dans l'entreprise. Patelin, doucereux, avec un sourire jocondesque flottant en permanence propre à déstabiliser les jeunes stagiaires qui se présentaient devant lui, il ne laissait pas indifférent et l'on sentait chez lui la volonté de "bouger les murs".
J'ai regardé l'émission diffusé sur FR 3 il y a quelques mois, "Session d'Assises dans la cité", où il est en première ligne, je l'ai écouté et lu dans les divers médias expliquer avec modération mais talent de persuasion ce qui me paraît être, à mes yeux de non pénaliste, une initiative assez heureuse, propre à satisfaire le juriste civiliste, donc rationnel, que je suis.
C'est pourquoi je trouve sévère, injuste et, allez, osons l'écrire, quelque peu "archaïque" votre critique ad hominem.
J'aurais d'ailleurs souhaité que vous nous expliquiez en quoi il est sorti par cette initiative du cadre légal, alors même qu'il s'évertuait à répondre que sa "méthodologie" n'étant pas explicitement interdite par le CPP, s'alignant au surplus sur la jurisprudence de la CEDH, supérieure à notre loi interne, était de nature à répondre aux attentes des justiciables, sans que ladite "méthodologie" ne soit pour autant révolutionnaire voire non légaliste.
Allez, cher PB, je vais vous faire une confidence : on sent trop dans ce post l'irritation qui est la vôtre devant le coup assez réussi de DS et la résonance médiatique qui en résulte...
Avec de l'ancien, il fait du neuf et les gogos médiatiques de s'esbaudir : c'est en réalité ce qui vous agace !
...confraternité, haine vigilante, comme on dit chez nous...
Qu'en pense le vice-bâtonnier chargé des questions pénales et dont mon petit doigt me dit (comme disait Moati) qu'il est de vos proches ?...
Rédigé par : sbriglia | 26 novembre 2010 à 10:19
De l'obsolescence du jury d'assises que l'institution judiciaire traîne depuis la Révolution. Il était question alors pour les Révolutionnaires de contrebalancer le pouvoir des juges de l'Ancien Régime. Depuis, plus de deux siècles ont passé mais visiblement dans certains domaines personne ne semble s'en être aperçu.
Plutôt que de ces grignotages successifs du pouvoir du jury mieux vaudrait peut-être avoir enfin le courage de s'en débarrasser. La démocratie n'en souffrirait pas.
Rédigé par : catherine A encore une illustration par l'absurde | 26 novembre 2010 à 10:18
Monsieur l’avocat général,
Après la lecture de votre réquisitoire, je ne parviens pas à me forger une intime conviction.
Je suis choqué que l’on puisse instrumentaliser une cour d’assises et en transformer les acteurs en apprentis-sorciers, parce que les vies de l’accusé et des parties civiles en dépendent.
Par contre, l’articulation de votre argumentation me semble peu convaincante.
La dépêche AFP du 25 novembre 2010 indiquait en effet : « Saisie de cette question après le premier arrêt de la CEDH dans l'affaire Taxquet, la Cour de cassation avait décidé le 14 octobre 2009 que les cours d'assises pouvaient continuer à ne pas motiver leurs arrêts.
Le parquet général avait fait valoir à l'audience que les cas belge et français n'étaient "qu'apparemment semblables", notamment parce qu'en France, "il y a une procédure d'appel". »
La Cour de cassation n’a donc pas indiqué que les cours d’assises devaient continuer à ne pas motiver leurs arrêts, mais simplement qu’elles le pouvaient. Or, vous articulez votre propos sur l’analyse suivante : « Le point essentiel qui me fait considérer que cette innovation présidentielle est sujette à caution réside dans le fait qu'elle résulte d'une violation de la loi. » Si la loi a été violée, comment la décision de la cour d’assises ne serait-elle pas cassée ? La décision de la cour d’assises est-elle réellement illégale ?
Mais sur le fond, surtout, vous indiquez : « En réalité, ce que la défense recherche surtout dans la motivation, c'est le coup de grâce donné aux décrets impérieux des cours d'assises ». Considéreriez-vous comme une régression le fait, pour la cour, de chercher à sa décision un fondement plus argumenté, plus étayé qu’il ne l’était par le passé ?
Pour ma part, si je devais comparaître un jour devant un jury populaire en accusé, je verrais d’un œil favorable toute initiative visant à placer mes « juges » en situation de structurer la formation de leur verdict plutôt que de l’asseoir sur leur seule intime conviction, dont j’ignorerais à jamais si elle s’est forgée dans le cerveau reptilien, le limbique ou le néocortex.
Rédigé par : Christian C | 26 novembre 2010 à 09:43
@PB
"(...)ravit les ignorants appâtés par tout ce qui trouble et perturbe l'univers classique."
N'oubliez pas que les ignorants sont ceux qui sont appelés à bien connaître les souffrances imposées par les abus de l'univers classique ! Souffrance que semble ignorer ceux qui sont chargés de bien connaître les lois.
@Denis Monod-Broca
"Quand le mauvais exemple vient d'en haut...
L'homme est-il fait pour la loi ou la loi pour l'homme ?
Quand le bon exemple vient d'en haut, l'ignorant sent comme un souffle d'espoir descendre sur ses souffrances.
@à ceux qui sont en haut
N'oubliez pas que le doute doit bénéficier à l'accusé... ça c'est un fondement de la Justice !
A trop vouloir que ceux d'en bas ne servent qu'à cirer le parquet, attention qu'ils ne le rendent pas trop glissant !
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 26 novembre 2010 à 09:08
Je suis d'accord avec vous, Monsieur Bilger, la loi est faite pour être respectée, même et d'abord par les magistrats, faite pour être respectée dans l'état où elle est ici et maintenant.
Quand le mauvais exemple vient d'en haut...
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 26 novembre 2010 à 08:42
Donc selon vous, appliquer les règles découlant de la jurisprudence CEDH, c'est violer la loi?
Je partage votre point de vue dans la mesure où la loi est une protection offerte au citoyen contre l'arbitraire du juge.
Mais quand c'est la loi qui est injuste (et mal faite et tardive et qui nous coûte cher en condamnation devant les juridictions internationales, CEDH et CJCE confondues, mais cela on n'en parle pas), le juge doit-il l'appliquer à toute force? Et faut-il attendre une QPC pour écarter une loi non conforme aux normes supérieures?
Rédigé par : evematringe | 26 novembre 2010 à 07:32
Monsieur l'avocat général, cher Philippe Bilger,
Je comprends que l'illégalité de l'innovation de la Cour d'assises de Saint-Omer vous choque.
Mais pour un profane en procédure criminelle, il est difficile d'apprécier son utilité éventuelle sans connaître la teneur des seize questions posées à la Cour et au jury.
Rédigé par : Gérard DELALOYE | 26 novembre 2010 à 00:50