On veut faire mourir Céline une seconde fois.
Serge Klarsfeld, président de l'Association des fils et filles de déportés juifs de France (FFDJF), s'est indigné dans une lettre publique du fait que les Archives de France aient décidé de célébrer le cinquantenaire de la mort de l'écrivain disparu en 1961. Cette association ne demande rien moins que "le retrait immédiat de ce recueil et la suppression dans celui qui le remplacera des pages consacrées à Céline".
Cette exigence, aussi respectable et respecté que soit Serge Klarsfeld, fait frémir.
L'initiative du ministère de la Culture vise seulement à constituer "une éphéméride où sont recensés les grands anniversaires, de 511 (mort de Clovis) à 1961. 2011 n'est pas "l'année Céline" mais "l'année Liszt", selon la rue de Valois (Le Monde). Henri Godard, signataire de la préface, éminent spécialiste de Céline et qui a édité ses oeuvres dans La Pléiade, s'est lui-même interrogé sur cette démarche et a conclu qu'elle était sans reproche. Frédéric Vitoux, biographe de Céline, ne comprend pas non plus cette polémique même s'il prend la peine de préciser que le terme " célébrations" est ambigu car il ne s'agit évidemment pas de glorifier l'homme Céline mais de "s'intéresser à son oeuvre ainsi qu'aux zones d'ombre" du personnage (Le Figaro, 20 Minutes).
A l'évidence Serge Klarsfeld n'a pas été convaincu par la réplique de ces contradicteurs puisqu'il n'hésite pas à répondre "à ceux qui s'offusqueraient de cette exigence, qu'il faut attendre des siècles pour que l'on célèbre en même temps les victimes et les bourreaux". Il n'est pas seul de son avis puisque Bertrand Delanoë, sur Europe 1, l'a approuvé en définissant Céline comme "un excellent écrivain mais un parfait salaud".
Céline est un écrivain génial mais n'est pas un "parfait" salaud, au sens où je l'entends, parce que d'une part il y a eu déjà de pires "salauds" que lui et que d'autre part l'idée qu'il y ait une perfection de la "saloperie" est absurde dans la mesure où heureusement il est même difficile, dans le registre de l'odieux, d'atteindre le comble. Essentialiser ainsi un être humain, même rentré dans la mémoire publique, me paraît discutable.
A supposer que Bertrand Delanoë ait raison avec son clivage déjà trop souvent exploité, cela signifierait-il qu'une interdiction serait légitime et que l'écrivain génial devrait passer à la trappe au bénéfice de l'antisémite délirant à maudire pour l'éternité ?
Où est-il écrit que l'antisémitisme, même poussé au paroxysme par un Céline durant les années d'occupation, doive être le seul critère pour disqualifier à vie un écrivain, une personnalité ? D'autres, qui ont honteusement justifié le communisme et ses millions de morts - je ne dis pas que nazisme et communisme sont exactement comparables - et qui ont tressé des couronnes et écrit des vers en faveur par exemple de Staline n'ont jamais connu ce type de discrédit qui fait de l'ignominie d'un comportement intellectuel et politique l'alpha et l'oméga de tout, contre le talent et le génie littéraires. Pour ma part, je n'aurais jamais eu l'idée saugrenue de me plaindre d'une "célébration" d'Aragon ou de Sartre, quelles qu'aient été leurs graves fautes morales dans l'éloge du totalitarisme rouge.
Est-il par ailleurs absolument nécessaire pour la FFDJH, non seulement de cultiver le souvenir des déportés juifs, d'honorer leur mémoire mais aussi d'imposer à l'ensemble d'une société, par le biais d'une demande d'interdiction dangereuse, les modalités et les chemins obligatoires de la conscience, de la réprobation et de la pensée par rapport à Céline, à son antisémitisme et à son génie même si - on l'oublie trop souvent - ses romans uniques, ayant bouleversé le 20ème siècle, étaient déjà gros d'une violence, d'une tension, d'une haine anti-sociale développées au-delà de tout dans les pamphlets contre les juifs.
La dénonciation publique de cette éphéméride par Serge Klarsfeld, certes, n'empêchera pas les citoyens de continuer à s'enthousiasmer pour l'écrivain Céline et à lire ou non les libelles antisémites du même, qu'on ne trouve pratiquement plus d'ailleurs. Nous demeurerons libres de faire ce que nous désirons mais il n'est pas neutre qu'on enjoigne au ministère de la Culture - qui est dans sa vocation en diffusant un inventaire, noble ou sordide mais français, de notre histoire - de sacrifier son travail sur Céline parce que nous serions des enfants et que nous n'aurions pas le droit, dans nos têtes et dans nos vies, de traiter ensemble le Céline admirable et l'autre détesté. Il nous faudrait aussi, de génération en génération, le maudire à perpétuité. Nous sommes assez grands pour faire ce que bon nous semble de cette "célébration" de Céline.
Ce serait une seconde mort de Louis-Ferdinand Céline. A entendre Serge Klarsfeld, il ne serait que temps de laisser Céline dans l'anonymat indigne où il aurait mérité de rester. On en est à oublier que s'il est mort en 1961, il n'en a pas moins connu avant des épreuves et des souffrances, une traversée du désert où il était honni, pour arriver au terme de sa vie, seulement soutenu par quelques amis et admirateurs fidèles. On veut recommencer à lui faire payer ses abjections écrites parce qu'on ne lui pardonnerait pas de les avoir juxtaposées à son génie sans que celui-ci en soit atteint ? L'humanité dans sa totalité serait privée de lumières décisives sur elle-même si un ressentiment collectif, plus d'un siècle après sa naissance, parvenait à nous persuader que la morale du grand écrivain est plus importante que son oeuvre.
Pour ma part je continuerai à lire avec passion Céline et même s'il avait été aussi un "parfait salaud", ce ne serait pas à d'autres qu'à moi d'en décider et d'en tirer les conséquences.
Venant d'apprendre ce que j'ai appris ce vendredi soir, je ne peux pas ne pas ajouter une conclusion furieuse et amère à ce billet. Une honte de plus à imputer à Frédéric Mitterrand, le ministre de la Culture. Il s'est soumis et Serge Klarsfeld a gagné. Pour quand le prochain ostracisme ? A qui le tour ? Il n'a pas fallu longtemps pour que la peur, la lâcheté et la bêtise l'emportent en se donnant une apparence morale (nouvelobs.com, jdd.fr, France 2).
@Madame Catherine Jacob!
Plaidoirie pour un gobie.
Errare une bonne prise de bec.
C'est troublant, si j'en crois l'image que vous mettez en lien pour "the Ice Goby", la ressemblance qu'il y a entre ce poisson et notre bien à nous "gobie" de Marseille, autrement dit le gOaÂbi.
J'en veux donc, suite à votre information, aux Roast-beef d'avoir frigorifier le nom du cousin de cet attachant poisson , alors que nous sommes, nous les Froggy's, ceux qui ont inventé la congélation même si c'est un Danois qui en a tiré le brevet.
Note: Que leurs panses et le reste soient des holothuries, en compensation de leur méchanceté, car il faut pour ce cas préoccupant dénoncer, dénoncer toujours!
J'ai peut-être une interprétation nouvelle qui expliquerait pourquoi nous n'ingérons pas le gOaÂbi en lamelles vivantes:
serait-il occis, nous rechignons manger la bête.
-Nous le pêchions enfant, avec nos épuisette en raclant les rochers, le libérions presque systématiquement puisqu'un gOaÂbi mort est tout replié des nageoires, n'a pas d'allure. En plus, capturé, il parle mieux et plus fort que sa petite taille pourrait faire soupçonner, et même comme si poliment il s'offusquait avant l'issue fatale.
-Ensuite, les anciens, un jour ou l'autre, finissent par nous en monter un, puis un autre et à la fin nous en voyons plusieurs à certaines périodes qui regardent vers la terre, dressés sur leurs nageoires comme s'ils étaient des clowns champignons , non pas dans l'eau mais délicatement posés sur les végétations marines découvertes puis recouvertes par la vague: à la pêche, il perd de son intérêt, surtout s'il s'accommode à sa guise de moins frétiller qu'une crevette!
--Mais! D'autres plus anciens encore, nous montrent entretemps comment manger directement la crevette ou la patelle, le violet et si on est équipé l'oursin, et reconnaître le merveilleux goût iodé de la mer. La question du gOaÂbi devient alors pendante...
-Là, impossible de montrer aux filles à quel point nous ne reculons devant rien: intuitivement, nous le sentons bien, ça doit être culturel, elles nous fuiraient à jamais...,si nous gobions le gOaÂbi, déjà qu'elle nous le compare...,et la pêche s'éloigne une fois de plus, méthodiquement.
-Interviennent alors, d'autres encore plus anciens qui nous expliquent que ce poisson, qui s'essaie à sortir de l'eau, est peut-être notre très vieil ancêtre...
Alors, à chaque bouillabaisse, on demande rituellement au cuisinier: "T'as pas mis de gOaÂbi là dedans?"
Et rituellement la réponse vient: "Oh!,...! mais tu me prends pour qui?"
Il reste vrai que tous ne font pas la bouillabaisse qui va de soi, celle sans gOaÂbi, car l'erreur est humaine.
Rédigé par : zenblabla | 01 février 2011 à 14:27
M. Bilger, un grand bravo pour ce billet sur Louis-Ferdinand Céline.
C'est le talent que l'on pardonne le plus mal en France... et toujours cette impérieuse nécessité de "rabaisser le caquet français", comme l'a curieusement conseillé récemment BHL.
Les pamphlets de Céline seraient depuis longtemps relégués aux recherches universitaires s'il n'avait pas écrit ce sacré "Voyage".
C'est ça qu'on ne lui pardonne pas... Aux médiocres le Paradis est toujours ouvert.
Prenez Lucien Rebatet, avec "Les Décombres", il a signé un livre tout aussi antisémite que les pamphlets de Ferdine.
Après guerre, il deviendra un critique admiré et respecté sous le pseudonyme de François Vinneuil aux "Cahiers du Cinéma" avec François Truffaut qui l'admirait (voir blog de Pierre Assouline sur Rebatet).
En son temps Jack Lang, ministre de la Culture, avait donné son accord pour que la baraque rococo de Meudon où avait vécu Céline soit classée. Le préfet socialiste Christian Sautter, futur ministre socialiste, s'y opposa, oubliant sans doute que Lucien Rebatet, lui, avait soutenu François Mitterrand depuis toujours...
Rédigé par : Savonarole | 01 février 2011 à 09:04
Rectification:
J'ai dit précédemment (Cf. Catherine JACOB@Christelle Andrieu | 30 janvier 2011 à 11:38 §6 du post) que les japonais consommaient les holothuries vivantes. De fait j'ai confondu avec le genre Haliotis qui inclut les ormeaux.
L'holothurie ou « concombre de mer » est consommée crue certes, mais on l'occit d'abord.
En revanche les ormeaux (et en particulier la variété Sulculus diversicolor supertexta), les seiches ( et en particulier la variété Sparkling Enope Squid , les pieuvres, les crevettes, une variété de menu fretin que les anglais nomment ice goby (Leucopsarion petersii) , et les Gymnogobius isaza sont bien consommés vivants, en ce qui concerne les premiers, par petits morceaux au fur et à mesure. Cela s'appelle 踊り食い : ODORI(danse)KUI(repas), donc littéralement « repas dansant ou sautillant ». Je vous laisse imaginer. Personnellement j'ai également l'expérience de la dorade mais elle ne dansait plus trop, elle a juste mordu l'index de mon mari que ne voulait pas croire qu'on nous l'avait vraiment servie (et donc préalablement découpée en sashimi) vivante et le lui avait, pour voir, mis dans la bouche...!!
Les japonais précisent relativement à ce Odori_Kui, que seules les religions juives et musulmanes le proscrivent formellement. Noé et ses lois ne leur posent donc aucun problème. Leur Grand-ancêtre est le couple Izanagi et Izanami, un couple dont il faudrait chercher le pendant occidental plutôt dans Orphée et Eurydice, aussi bizarre que cela paraisse.
Rédigé par : Catherine JACOB(Erratum) | 31 janvier 2011 à 18:08
Vous vous doutez bien, Mary, que mon intention n'était et n’est pas d'engager une analyse juridique à coups d'articles du code de la propriété intellectuelle et/ou de celui du code pénal au sujet de la publication des écrits de Céline.
Evidemment pas.
Je pense encore savoir faire la différence entre les domaines que je maîtrise à peu près très moyennement, et ceux que je ne maîtrise pas.
Mon intention était seulement de tempérer votre affirmation selon laquelle:
"...dois-je vous le rappeler en raison d'une loi toujours en vigueur (incitation à la haine raciale, etc.)..."
en rapportant telle que je l'ai lue une précision qui émane de l'avocat François Gibault, conseil de Mme Destouches, en charge de défendre les intérêts et la volonté de cette dernière.
Son expertise juridique au sujet de la loi relative à l'incitation à la haine raciale m'a semblé être tout autant fiable, crédible et autorisée que peut l'être la vôtre...
Voilà tout.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 31 janvier 2011 à 09:56
@ Véronique R.
D'après l'article L123-1 du Code de la propriété intellectuelle,
« L'auteur jouit, sa vie durant, du droit exclusif d'exploiter son œuvre sous quelque forme que ce soit et d'en tirer un profit pécuniaire. Au décès de l'auteur, ce droit persiste au bénéfice de ses ayants droit pendant l'année civile en cours et les soixante-dix années qui suivent. »
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Ce n’est donc qu’à ce moment là que la loi contre l’incitation à la haine raciale pourra être invoquée, le cas échéant, pour s’opposer à une réédition des pamphlets dont Céline lui-même et après lui sa veuve avaient interdit la republication.
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Sujet clos en ce qui me concerne.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 30 janvier 2011 à 21:26
@Christelle Andrieu | 29 janvier 2011 à 19:06
« Chaque polémique autour de l'antisémitisme de Céline repose la même question posée par Bernard-Henri Lévy : peut-on être un grand écrivain et un parfait salaud? »
Si l'on admet que la qualité littéraire se mesure à l'aune de la couleur de la carte d'adhésion à un ou d'absence d'adhésion à un ou ou de contestation de principe de tout parti politique, ou encore que la littérature ne saurait échapper au politique et que ce dernier en serait le criterium suprême, on s'aventure sur une pente dangereusement savonnée. Cette pente est celle de l'Art académique, celui de l'ex Union Soviétique, celui du National Socialisme qui promenait des expositions d'un « Art dit juif » à titre d' exemple d'un « art dégénéré » et d'un « contre-exemple de l'Art ». Est-il besoin d'en dire davantage?
On peut néanmoins ajouter à l'exemple d'Apollinaire qui ouvrant dans ses calligrammes la voie d'une langue proprement visuelle et proclamant « Moi aussi je suis peintre », disait encore « Prenez garde à la peinture » qui donc est également à entendre comme « Prenez garde à la littérature », autrement dit à la fois « Donnez votre attention à » et « Gardez-vous de » toutes ces manifestations de l'invisible, de tous ces « Christ inférieurs des obscures croyances. » et des peurs informes surgies des profondes abysses d'un inconscient qui par définition s'ignore mais qui étrangement s'y reconnaît.
Par ex. si l'on considère le n°7 des sept interdits donnés à Noé, postulé comme seul survivant du Déluge et donc nécessairement comme grand-ancêtre de toute forme d'humanité actuellement existante, interdit qui est de : « Ne pas consommer de chair d'un animal vivant », on peut observer qu'on a affaire là non seulement à l'archétype de tous les interdits qui se rattachent tant à ce qui nous « nourrit » qu'à ce qui ne saurait nous « nourrir », à la fois en tant que corps vivant nous-même et en tant qu'esprit capable de réflexion, autrement dit notamment, de « retour sur » une pratique qui pour n'être pas nécessairement la nôtre, est tout simplement.
Or, quel groupe humain descendant de Noé s'abstient effectivement de consommer la chair d'un animal vivant en dehors des végétariens de stricte obédience ou de ceux qui comme Prahlad Jani, un célèbre Fakir dont on a récemment appris qu'il n'avait rien consommé depuis une soixantaine d'années, ne se nourrissent pas sinon de stricte méditation? Tels encore les 苦行僧 ou Sādhu (du sanskrit साधु sādhu « homme de bien, saint homme ») qu'on dit apparentés aux gymnosophistes, les philosophes nus) qui frottent leur corps de cendres, matière toute à l'opposé du vivant?
Ne consommons-nous pas en effet nous-mêmes vivantes les huîtres tandis que les Japonais qui eux les consomment en beignets, consomment en revanche vivantes les gambas et les holothuries?
Le terme de l'interdit initial que l'on traduit par « animal » représentait-il une catégorie également applicable aux huîtres, aux crevettes et aux holothuries ou visait-il seulement les animaux du haut de la chaîne alimentaire dont ses nourrissent les gros prédateurs en cherchant en somme à poser une nette distinction d'ordre conceptuel entre l'humanité et l'animalité? C'est une vraie question.
La mise à l'index de L.-F. Céline repose-t-elle sur un autre de ces sept interdits qui est « l'interdit blasphématoire » auquel on peut sans doute rattacher l'interdit de la pratique de magie offensive qui existait encore il n'y a pas si longtemps dans notre code pénal et qui s'y était retrouvé inscrit sur la base d'une croyance au pouvoir de nuisance présumée de la Formule de l'imprécation et porte-t-il seulement sur cette dernière ou sur l'auteur lui-même, définitivement « sacer », ce qui, par voie de conséquence, aurait pour effet de contaminer et rendre impures toutes productions même « expurgées » de toute « formule » condamnable, « impureté » et caractère « sacer » susceptibles d'une extension aux notices relatives à l'écrivain « impur » ainsi que, comme on l'a vu avec les gens qui se détournent d'eux sur leur passage, à leurs auteurs? C'est une vraie question.
A quel interdit en fait obéissons-nous en vérité lorsque nous lançons l'anathème sur toute production ainsi que sur la personne même de l'écrivain que nous ne sommes pas dès lors sans faire disparaître ce qui est une autre manière de le consommer, et définitivement, de façon sacrificielle?
En tout état de cause, deux auteurs ont déjà répondu par avance à BHL, ce sont Paul Valéry : « Il n'y a pas de vrai sens d'un texte. Pas d'autorité de l'auteur. Quoi qu'il ait voulu dire, il a écrit ce qu'il a écrit. Une fois publié, un texte est comme un appareil dont chacun peut se servir à sa guise et selon ses moyens.» , ainsi qu' André Gide : «On ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments ».
« Le personnage odieux » du texte écrit à la première personne est l'auteur lui-même du pamphlet qui se pose ainsi face au Docteur Gutman (lequel porte un nom susceptible d'être entendu dans le sens d' « homme bon » en allemand, une langue que Céline n'était pas sans connaître), et attire sur lui-même l'anathème en digne disciple du grotesque carnavalesque. On peut dès lors sans doute tout de même souligner qu'il n'est pas sans participer a contrario à nous rendre l'anti(notamment)sémitisme haïssable.
Qu'on soit d'accord ou non, c'est un aspect du problème qui peut peut-être faire débat.
Rédigé par : Catherine JACOB@Christelle Andrieu | 30 janvier 2011 à 11:38
@ Mary
"...dois-je vous le rappeler en raison d'une loi toujours en vigueur (incitation à la haine raciale, etc.)"
Je me permets d'apporter une précision.
J'ai lu dans un numéro du Magazine Littéraire publié en 1994 que selon François Gibault, l'avocat de Mme Destouches, compte tenu du principe de la non rétroactivité de la loi, une publication des écrits antisémites de Céline ne pouvait pas en l'état des choses, en 1994, être frappée d'interdiction.
D’un point de vue juridique, j’ignore si l'affirmation de FG vaut encore pour 2011. Aux juristes de le confirmer ou de l'infirmer.
Je vous transmets l'information telle que je l'ai lue.
Par ailleurs, Mary, il faut cesser de vouloir faire dire aux mots ce qu’ils ne disent pas. L’intitulé Célébrations nationales n’a rien à voir avec le festif exposé par Frédéric Mitterrand dans son avant-propos, que l’habileté de Serge Klarsfeld a tordu et dénaturé pour donner à sa contestation une vertu qu'elle n'a pas. Ce qui compte et reste digne d'intérêt est la notice d’Henri Godard à présent censurée.
@ Mme Andrieu
Votre commentaire n'est pas comme vous le dites en introduction de votre post une réaction au billet de Philippe.
Je veux dire par là qu'il n'a rien de spontané, ni d'écrit en "réaction" au billet.
Il y a quelques jours j'ai lu pratiquement mot pour mot votre "réaction" ailleurs, pratiquement telle quelle, avec cette conclusion analogue faite pour mordre, mais sous la signature d’un autre, Pierre Foglia : http://lepetitcelinien.blogspot.com/2011/01/la-litterature-et-la-haine-par-pierre.html.
Alors, dans cette détestable affaire où à mes yeux le vrai scandale est d'avoir vu un ministre de la République, dans l’incapacité de mettre de la distance et de la raison dans le vif et le passionnel qui séparent et qui déchirent, céder en même pas l'espace de 48 heures à l'injonction et à la menace de Serge Klarsfeld, je pense simplement que la conclusion de votre réaction est juste dans le ton et au niveau de ce climat haineux fait de ces ressentiments que rien, visiblement, ne pourront jamais apaiser.
@ Philippe, en réaction aux réactions de votre billet
Concernant l'exigence de Serge Klarsfeld, un président de la République, Jacques Chirac, a dit au nom de La France notre malheur de savoir l'Etat français ayant prêté main forte aux criminels nazis.
Mais cette reconnaissance de vérité ne condamnait pas à perpétuité notre pays à devoir tout le temps nous affliger de tous les manquements. Le discours du Vel d’Hiv était censé nous réunir, vider l'abcès et dire que le passé avait passé.
J’en veux à Serge Klarsfeld d’avoir agi comme si les mots de Jacques Chirac n’avaient compté pour rien. J’en veux terriblement à Frédéric Mitterrand d’avoir eu l’insigne légèreté de valider l’activisme obsessionnel de SK, et par-dessus tout, d’avoir par sa lâcheté laissé entendre que la parole de Jacques Chirac, en réalité, ne valait rien. Puisque, à jamais, notre pays devra encore et encore ne pas cesser de dire qu’il n’est qu’un coupable.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 30 janvier 2011 à 08:16
@Christelle Andrieu
On peut, sans haïr LFC, le laisser à sa place, c'est-à-dire sans aucune influence quelconque, ni culturelle, ni sociale, encore moins philosophique sur ma vie.
Peut-on être un antisémite et un bon écrivain ? Mais bien sur, l'art de l'expression écrite s'accommode parfaitement de l'art de la manipulation des foules pour les endormir et surtout les déculpabiliser pendant que les wagons se remplissent !
Pareillement, peut-on être génie et un parfait pervers ? mais bien sûr, la perversion s'accommode parfaitement de l'intelligence. D'ailleurs il n'y a pas de perversion sans une intelligence... pervertie justement !
Sous-entendrais-je que je classe les antisémites du côté des pervers ?
Mais très certainement, de la même manière que je classe du côté des pervers, celui qui méprise ceux qui aiment !
Il n'y a pas pire perversion que de mépriser l'amour !
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 29 janvier 2011 à 23:10
Dame Christelle !
Si vous savez lire un minimum et vous dites capable de goûter si fort aux subtilités céliniennes, vous êtes d'autant plus à même de comprendre la différence entre être privé de commémoration (ce dont on cause sur ce blog, "seco" en verlan, et que l'on peut traduire par interdit, quoique... Couac !) et être interdit de publication, ce qui n'est pas le cas ici, dès lors que chacun peut se procurer sans difficultés les oeuvres majeures de Céline, hormis - officiellement* - ses pamphlets antisémites interdits, dois-je vous le rappeler en raison d'une loi toujours en vigueur (incitation à la haine raciale, etc.) et de l'opposition de sa veuve, dont les motifs invoqués me paraissent beaucoup plus respectables que ceux de tous les bobos amateurs d'interdits et de sensations fortes. Car j'ose espérer que votre frustration n'a rien à voir avec une quelconque nostalgie de l'antisémitisme des années trente... because la bête immonde au ventre si fécond, you know ?
Ah mon Dieu que l'interdit est joli ! Ah ah !
--
* j'ai bien écrit officiellement (voir définition)
Rédigé par : Mary Preud'homme | 29 janvier 2011 à 20:54
Bonjour,
Venant de lire tardivement ce brillant billet sur Céline et il me faut réagir.
Que Louis-Ferdinand soit hélas antisémite ne fait aucun doute. Ce n'est contesté par personne; 12 millions d'articles ont été écrits sur le sujet. Alors qu'un ministre de la Culture s'en avise si soudainement, comme on s'avise d'avoir oublié le lait sur le feu, est complètement ridicule.
Chaque polémique autour de l'antisémitisme de Céline repose la même question posée par Bernard-Henri Lévy : peut-on être un grand écrivain et un parfait salaud?
Je ne trouve pas du tout que ce soit une énigme. On peut être n'importe quoi et un parfait salaud en même temps. Voulez-vous dire que vous ne lirez plus jamais un auteur qui a déjà touché sexuellement un petit garçon, qui a déjà fait le salut hitlérien, qui a approuvé les goulags de Staline, qui a battu sa femme? Alors vous ne lirez plus Aragon, Sartre, Cioran, Gide, Tolstoï? Qui allez-vous lire? Sollers le maoïste?
Lisez Céline. Pour le texte et pour la musique. Ne lisez pas que Voyage au bout de la nuit et Mort à crédit. Lisez le sublime début D'un château l'autre. Lisez Guignol's band; lisez le dernier, Féerie pour une autre fois. Ne lisez pas Bagatelles pour un massacre, c'est là-dedans qu'il est honteusement antisémite, mais il faut quand même méditer un passage de Bagatelles, écrit avant 1940, qu'il annonce les télé-réalités des années 2000 dans ces quelques lignes :
"Comment le plus infime crétin, le canard le plus rebutant, la plus désespérante donzelle peuvent-ils se muer en dieux et déesses? Recueillir plus d'âmes en un jour que Jésus-Christ en 2000 ans? C'est que la foule à genoux a le goût du faux, de l'or et de la merde, plus insignifiante est l'idole plus elle a de chances de conquérir le coeur de la foule..."
Audiard, Boudard et tant d'autres seraient-ils ce qu'ils sont sans Céline...
Vous pouvez haïr Céline, il vous hait depuis bien longtemps !
Rédigé par : Christelle Andrieu | 29 janvier 2011 à 19:06
Alex paulista
Lucie Destouches n'ignorait pas que les pamphlets de son mari circulaient sous le manteau. J'ai cité un court extrait d'un pamphlet que l'on peut trouver sur internet afin d'étayer mon raisonnement et apporter de l'eau au moulin de LDA m'opposant en cela aux tenants d'une commémoration qui serait l'occasion de ressortir ces "oeuvres abominables" des oubliettes. Néanmoins, en agissant de la sorte je m'attendais tout à fait à une réaction comme la vôtre qui démontre que vous ne comprenez rien, à moins que vous ne le fassiez exprès.
En effet, il n'y a pas besoin d'avoir fait des années de droit pour savoir ce que signifie publication officielle ou réédition. Après la mort de son mari, Mme Destouches s'est toujours opposée à la publication officielle et à la réédition des pamphlets. Ce que j'ai rappelé. Rien à voir donc avec une simple citation sur un blog privé que l'auteur dudit blog a tout loisir de modérer si nécessaire.
Point final.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 28 janvier 2011 à 18:22
@ Mary
"Lucette Destouches qui selon moi a dû beaucoup souffrir et mériterait que l'on respecte ses dernières volontés en ne publiant jamais officiellement ces textes infamants"
Juste après en avoir reproduit ici un passage, comment dire... c'est gonflé.
Sinon sur le fond je suis d'accord avec vous. Céline est mort, paix à son âme. Il ne voudrait probablement pas être célébré, surtout si c'est l'occasion de ressortir des textes dont il n'était peut-être pas fier après la guerre.
Sans tout ce tintamarre, le temps lui-même se charge de faire le tri dans l'oeuvre de Céline. L'homme et sa famille s'en trouvent ainsi honorés dans ce que l'auteur a produit de meilleur.
C'est bien ce que l'on doit aux morts.
Rédigé par : Alex paulista | 28 janvier 2011 à 13:59
@On se bat toujours pour ce qui nous manque le plus
En préambule, commencez par revoir votre post du| 25 janvier 2011 à 01:39 et la réponse que je vous fis le même jour…
Et vous constaterez que c’est improprement et pour induire en erreur les lecteurs de ce blog que vous avez écrit : à l’exemple de MP etc. etc.
Dois-je en effet vous rappeler que, contrairement à vous précédemment, je me suis contentée de citer l‘extrait d‘un pamphlet de Céline, dûment identifié, en prenant soin de le mettre entre guillemets. Alors que de votre côté vous vous étiez borné à copier le texte célinien, sans parenthèses, ni guillemets, ni indication des sources et en remplaçant frauduleusement le nom de Sartre seul mis en cause dans ledit texte par ceux de SK et de FM, ce qui avait manifestement pour objectif de tromper un lecteur non averti, tout en invectivant Serge Klarsfeld et Frédéric Mitterrand à moindre risque. Plagier n’est pas citer, vous le savez fort bien. C’était donc un euphémisme lorsque je vous ai ironiquement fait remarquer que vous ne vous étiez pas trop fatigué les neurones pour pondre ce post nauséeux.
Compte tenu de votre absence de réaction à mon post précédent et à votre amalgame de ce jour, je ne pense donc pas avoir à vous répondre autrement qu’en vous renvoyant à ce que disaient de leur côté la femme et la fille de L-F Céline, qui ne s’expliquèrent jamais l’antisémitisme et la rage destructrice de leur mari et père autrement que par une insurmontable rancœur, suite à une série de déconvenues et d’échecs professionnels, sentimentaux et littéraires dont au moins trois me viennent à l’esprit :
. Primo, grave conflit avec son supérieur hiérarchique, un médecin juif, alors qu’il exerçait dans un dispensaire (1931-1932),
. Secundo, profond dépit d’avoir été spolié du Goncourt qu’il pensait lui être acquis et mériter plus que tout autre (1932 - voir ses échanges musclés et hargneux avec Gallimard) ;
. Tertio, échec amoureux avec Elizabeth Craig qui le quitta du jour au lendemain en 1933 et qu’il chercha vainement à reconquérir jusqu’en… 1936, période à laquelle il apprit son mariage avec un homme d’affaires juif…
Sa paranoïa et sa haine exacerbée ne connurent alors plus de limites et c’est de cette époque que datent ses premiers pamphlets antisémites. Son délire raciste n’a par conséquent rien à voir avec la guerre qui s’était terminée pour lui dès novembre 1914, soit après moins de deux mois de service actif, sans qu’il connût jamais l’enfer des tranchées. Ne se qualifiait-il pas lui-même d’anti héros, de lâche plutôt que de pacifiste et d‘ami des Allemands, au contraire de ceux qui justement avaient fait la guerre et en étaient revenus meurtris. Ne se vantait-il pas d’avoir abusé plus d’un gogo, notamment quand il prétendait que ses maux de tête étaient consécutifs à une blessure au front (et non au Front avec majuscule), ce qui lui aurait valu d’être trépané ! Alors qu’il avait été blessé à l’épaule et réformé illico. C’est ainsi qu’en jouant sur les mots, en corsant ses aventures et en triturant son style, il pouvait aisément faire illusion et retomber sur ses pieds, y compris quand il avait manifestement menti, insulté ou provoqué son interlocuteur.
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Et pour en finir, je doute que ceux qui se pâment d’aise devant le génie de L-F. Céline, dont les pamphlets ne peuvent être dissociés de son œuvre (selon ses propres vœux) auraient eu le même jugement si un Céline (tout aussi talentueux) - mais de nationalité allemande - avait été célébré outre Rhin.
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@Véronique Raffeneau
Evidemment que tout le monde peut lire les pamphlets céliniens qui ont ressurgi comme par magie sur toutes sortes de sites, ce qui permet à ceux qui avaient une opinion tranchée sans les avoir jamais parcourus, même superficiellement, de parler aujourd'hui en connaissance de cause.
Quant à moi, j'en avais pris connaissance (partiellement) depuis belle lurette, à une époque où ils circulaient sous le manteau, même à Meudon, ville où j'ai longtemps résidé à quelques blocs de chez Lucette Destouches qui selon moi a dû beaucoup souffrir et mériterait que l'on respecte ses dernières volontés en ne publiant jamais officiellement ces textes infamants, dont elle a toujours souhaité la destruction, textes qui ne tomberont d'ailleurs pas dans le domaine public avant 2031.
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Rédigé par : Mary Preud'homme | 27 janvier 2011 à 19:01
@ Guillaume D
Les Nazis ont utilisé certains textes de Nietzsche qui soulignaient justement le culte de la faiblesse, en ont occulté d'autres qui raillaient la lourdeur germanique. Cette utilisation des textes est un point commun avec Céline, mais c'est assez ténu.
Les Nazis ont aussi vanté la blondeur, inventé le Reflex, diffusé la coccinelle de VW.
On ne peut pas être en désaccord sur tout, même avec le diable...
Cordialement.
Rédigé par : Alex paulista | 27 janvier 2011 à 16:13
Vous parlez d'oubli, Mary, et de la volonté de l'épouse de Céline de s'opposer à toute publication des tas d'immondices dont avez reproduit un extrait.
Pensez-vous que le silence officiel imposé sur Céline, en même temps qu'il est une promotion de premier ordre d'un Céline maudit, dissuadera un seul antisémite de se vautrer bien planqué dans ce type d'abjections ?
Les écrits antisémites de Céline sont accessibles sur le web et par le biais du web : il suffit de cliquer ici sur le nom de Philippe Régnier pour se les procurer.
Même Frédéric Mitterrand déclare avoir lu et relu le livre que vous avez mentionné.
Même les conseillers de Nicolas Sarkozy se vantent avec grande fierté d'avoir offert au président de la République une relique de Céline.
Et ce sont ces mêmes conseillers qui déclarent aujourd'hui que dans leur esprit supprimer Céline des "Célébrations nationales" ne souffre pas l'ombre d'une hésitation.
Comme je l’ai dit ailleurs, l’hypocrisie officielle consiste pour ces bobos-là à estimer que Céline doit être interdit de commémoration, sous-entendu : eux, peuvent faire la différence et gloser des heures et des heures sur Céline, tandis que la société est forcément incapable de faire la différence entre célébration et commémoration, forcément sotte pour ne pas savoir distinguer l’écrivain prêtant sa plume à une propagande meurtrière et l’auteur du "Voyage au bout de la nuit".
A ce sujet je trouve remarquablement bien vue et bienvenue une réflexion de Constance Debré - que je ne connais pas du tout - publiée sur le site du Monde :
"Mais arrêtez ce bruit autour de Céline, conclut Constance Debré, l’auteur de « Bagatelles » est devenu l’écrivain des bobos..."
Commémoration ne signifie pas célébration. Je pense que c'était au ministre de le mentionner clairement dans son avant-propos, et au besoin de le redire à Serge Klarsfeld.
Est-ce à la société d'essuyer les conséquences de l'abstention du ministre de la Culture qui, après tout, a validé dans son avant-propos l'idée que les "Célébrations nationales" étaient une fête de l'esprit, même quand elles inscrivent à leur programme l'auteur de mots qui font pleurer de rage et de dégoût ?
Rien n'empêchait Frédéric Mitterrand d'attirer l'attention sur le caractère, le moins qu'on puisse dire, équivoque de Céline.
Le professeur Godard avait prévenu et placé d'entrée une "célébration" de Céline au cœur de sa terrible problématique.
Que je sache, l'avant-propos à caractère festif du ministre parade toujours en première page du recueil 2011 relooké.
Qui peut prétendre aujourd'hui que l'avant-propos de FM n'englobait pas aussi un hommage rendu à Céline ?
Plutôt que d’accéder à l’injonction de Serge Klarsfeld, de contribuer ainsi à faire de Céline un maudit, une sorte d’icône du sulfureux et de l'interdit, plutôt que de disqualifier des historiens et des universitaires, je persiste à penser que si Frédéric Mitterrand avait une obligation, c'était celle de corriger l’insignifiance et la légèreté de son avant-propos, de même qu’il pouvait parfaitement répondre à SK que l’objet d’origine des "Célébrations nationales" était "de veiller à la commémoration des événements importants de l’histoire nationale" (site du ministère).
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 27 janvier 2011 à 14:41
@Alex paulista
Loin de moi l'idée de sous-entendre que Nietzsche était antisémite. Je pense pouvoir dire que je suis un grand lecteur de Nietzsche et depuis longtemps et j'adhère entièrement à votre opinion.
Ce que je voulais exprimer réside plutôt dans l'idée que l'on a longtemps classé Nietzsche comme un antisémite, tout comme certaines personnes classent Rimbaud comme un homosexuel. C'est contre ce classement aussi réducteur que faux et injuste que mon commentaire évoquait Nietzsche.
Bien cordialement
Rédigé par : Guillaume D | 27 janvier 2011 à 11:41
A l'exemple de Mary Preud'homme, Il me semble que nous ne ne fatiguions pas beaucoup à copier ou citer Céline mais quel plaisir littéraire immense à le relire ! Et c'est précisément ce pamphlet qui m'est revenu à l'esprit. Je n'ai, comme vous-même et je vous en remercie, pas résisté à la tentation offerte par Philippe Bilger de sa liberté d'expression, bien trop rare de nos jours. Qu'il en soit ici remercié.
Néanmoins, vous me permettrez de ne pas partager entièrement votre affirmation sur ce point:
"Des pamphlets mortels puisque l'occupant les utilisa à pleins jets pour asseoir sa tyrannie, répandre des centaines de milliers d'exemplaires de sa prose jusqu'en Allemagne et justifier ainsi des déportations massives vers les camps de la mort avec la collaboration de Vichy".
Est-ce conclure que Céline serait l'instigateur, le support littéraire du III ème Reich dans sa folie meurtrière et qu'il possédât une quelconque responsabilité de sa justification ?
Je ne vous concède que le fait simple où l'occupant s'en est servi, habilement ou pas en adéquation de sa propagande politique nationale socialiste, pour un vainqueur contre un ancien combattant de la Grande Guerre et un vaincu de celle de 1940. Comme tant d'autres... Subissant sur les routes de l'exode les mitraillages des Stuka de la Luftwaffe, ou sur le navire qu'il sert en qualité de médecin militaire, qui éventre et coule une corvette anglaise dans le détroit de Gibraltar; qu'il dût rentrer à Marseille à la "nage". Puis plus tard en juin 1944, fuyant Paris, traversant l'Allemagne sous les bombes anglo-américaines (dont les équipages alliés avaient reçu l'ordre de mitrailler les civils qui cherchaient à fuir les brasiers comme à Dresde où 135000 civils ont péri carbonisés en une nuit) pour se réfugier au Danemark. Arrêté, prisonnier, détenu de décembre 1945 à juin 1947 dans le quartier des condamnés à mort, soumis au secret, et à l'isolement. En plein hiver, il perdit quarante kilos et souffrit de dépression, d'entérite, de la pellagre, de céphalées insupportables, d'eczéma, de rhumatismes et d'insomnies, au point qu'il dût être hospitalisé à plusieurs reprises. Chaque fois renvoyé en cellule sous la pression des résistants communistes danois, alors que le Danemark s'était tenu hors des combats et qu'il existât davantage de Schalburgkorps que de communistes ! Si, il eût été extradé vers la France, sans aucun doute l'esprit de vengeance qui prévalait, l'aurait immanquablement condamné à mort. Son ami, Maître Thorvald Mikkelsen lui a peut-être sauvé la vie en usant tous les stratagèmes du droit. Condamné le 21 février 1950 à un an de prison démontre donc le peu de gravité retenu des faits de collaboration qui lui étaient reprochés soit bien moins que sa détention préventive dans les geôles danoises.
Certes, le brigadier Destouches, héros et patriote de la Grande Guerre, gravement blessé, n'est plus. Il s'est effacé devant Céline mais qui pourrait lui en vouloir quand tant d'autres combattants et anciens combattants sont devenus amnésiques, fous, suicidaires, criminels, justement parce que certains de ce monde qui nous gouverne sont des va t-en guerre fous furieux. Croyez-moi, rare sont ceux qui s'en sortent indemnes, Céline ne s'en remit jamais. Je ne me refuse donc pas de lui accorder, face aux horreurs, son talentueux droit du délire littéraire.
En fait; excepté Les Entretiens avec le professeur Y, il me semble que ses romans écrits pendant ou après la Seconde Guerre mondiale sont l'errance décrite des drames et des routes ouvertes par celle-ci. La Légende du Roi Krogold apparaissant au long de son oeuvre se présente plutôt comme une chronique rimbaldienne narrant fort justement l'absurdité de la guerre à travers les bains de sang.
Il est aussi plus révélateur de relire "Mein Kampf" d'Adolf Hitler et de visionner ses discours quant aux responsabilités du génocide... Quand tout va mal et c'est un fait historique au cours des siècles passés, l'on s'en prend à la littérature, cause bien commode de tous nos maux qu'il faut brûler, expurger, bannir, censurer...
Rédigé par : On se bat toujours pour ce qui nous manque le plus | 27 janvier 2011 à 04:54
Extrait de Bagatelles pour un massacre, de L-D Céline sorti en 1937 et réédité en 1942 et 1943 avec planches photographiques (s’il vous plaît) fournies gracieusement par la propagande allemande !
quote
« Tout de même, il suffit de regarder, d’un petit peu près, telle belle gueule de youtre bien typique, homme ou femme, de caractère, pour être fixé à jamais... Ces yeux qui épient, toujours faux à en blêmir... ce sourire coincé... ces babines qui relèvent : la hyène... Et puis tout d’un coup ce regard qui se laisse aller, lourd, plombé, abruti... le sang du nègre qui passe... Ces commissures naso-labiales toujours inquiètes... flexueuses, ravinées, remontantes, défensives, creusées de haine et de dégoût... pour vous !... pour vous l’abject animal de la race ennemie, maudite, à détruire... Leur nez, leur "toucan" d’escroc, de traître, de félon, ce nez Stavisky, Barmat, Tafari... de toutes les combinaisons louches, de toutes les trahisons, qui pointe, s’abaisse, fonce sur la bouche, leur fente hideuse, cette banane pourrie, leur croissant, l’immonde grimace youtre, si canaille, si visqueuse, même chez les Prix de Beauté, l’ébauche de la trompe suceuse : le Vampire... Mais c’est de la zoologie !... élémentaire !... C’est à votre sang qu’elles en veulent ces goules !... Cela devrait vous faire hurler... tressaillir, s’il vous restait au fond des veines le moindre soupçon d’instinct, s’il vous passait autre chose dans la viande et la tête, qu’une tiède pâte rhétorique, farcie de fifines ruselettes, le petit suint tout gris des formules ronronnées, marinées d’alcool... De pareilles grimaces comme l’on en trouve sur la gueule des Juifs, sachez-le, ne s’improvisent pas, elles ne datent pas d’hier ou de l’Affaire Dreyfus... Elles surgissent du fond des âges, pour notre épouvante, des tiraillements du métissage, des bourbiers sanglants talmudiques, de tout l’Apocalypse en somme !...
Malheur au damné ! Crève donc animal impossible !... Rebut ! Tu ne sursautes même plus d’effroi à la vue de tels monstres ! Tu ne vois pas ta torture et ta mort inscrites, ravinées sur ces hures ? Quel miroir te faut il donc ?... Pour voir ta propre mort ?... Toutes les laideurs veulent dire toutes quelque chose. Regarde ! Puisque tu es trop fainéant pour lire dans les livres, déchiffre au moins apprends à lire sur la figure des Juifs l’arrêt qui te concerne, personnellement, l’Arrêt, l’Annonce vivante, grimacière, de ton massacre…/... »
« Je ne veux pas monter sur l’estrade.
« Je n’ai pas besoin de puissance
« Mais je suis chez moi, et les Juifs m’emmerdent
« Et leurs manigances me font chier
« Je le dis tout haut, à ma manière...
« Comme je le pense.
« Repos ! »
Unquote
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Et c’est cet auteur qui ne voulut jamais renier aucun de ses pamphlets mortels que l’on voudrait célébrer ou commémorer (à quoi bon jouer sur les mots !), lui qui jusqu’en sa retraite de Meudon disait mépriser les honneurs et souhaitait qu’on le laisse tranquille et être enterré à la fosse commune, ce à quoi sa femme ne se résigna pas. Des pamphlets mortels puisque l’occupant les utilisa à pleins jets pour asseoir sa tyrannie, répandre des centaines de milliers d’exemplaires de sa prose jusqu’en Allemagne et justifier ainsi des déportations massives vers les camps de la mort avec la collaboration de Vichy. Quelle caution inespérée pour les nazis qu'un Céline antisémite et raciste à la tête de la fine fleur de l'intelligentsia française, servant si brillamment leurs oeuvres de destruction massive et encourageant de toute sa verve lyrique le nettoyage des ghettos.
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L’oubli, c’est aussi ce que souhaitait Lucie Destouches Almanzor. Et non pas que l’on exhume des cadavres, et que des foules abusées par un style outrancier et pervers en viennent jusqu’à exaucer et promener la bête immonde parée comme une prostituée sacrée en faisant l’impasse sur ses victimes innombrables.
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Non non et non !
En guise de conclusion, il me revient cette citation d'Aimé Césaire, qui avait coutume de répéter que sur le plan des idées l'on ne pouvait rester neutre, pactiser avec sa conscience ou s'accommoder de demi-mesures pour avoir la paix :
« …Et surtout mon corps aussi bien que mon âme, gardez-vous de vous croiser les bras en l'attitude stérile du spectateur, car la vie n'est pas un spectacle, car une mer de douleurs n'est pas un proscenium, car un homme qui crie n'est pas un ours qui danse... »
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Rédigé par : Mary Preud'homme | 26 janvier 2011 à 15:10
@ Roowirth
Vous savez fort bien que la polémique déclenchée à la suite de la suppression par le ministre de la Culture du catalogue des "Célébrations nationales" n'est pas la traduction du refoulé que vous vous plaisez et complaisez à décrire.
Vous savez aussi fort bien que dans l'esprit des membres du comité qui ont choisi Céline parmi les figurants du recueil, il ne s'agissait pas de célébrer au sens de louer ou d'exalter.
Au reste, quel pourrait bien être l'intérêt d'exalter ou d'encenser telle ou telle personnalité marquante de l'histoire de notre pays ?
Quel peut être l'intérêt intellectuel pour un professeur Godard ou pour tout autre chercheur, essayiste ou historien de raconter des histoires édifiantes célébrant tel ou tel événement ou personnalité ?
Et pour le public intéressé, qui n'est ni sot, ni immature, ni puéril, ni idiot, mais quel ennui !
La notice du professeur Godard est parfaitement claire à ce sujet. Elle n'occultait pas la difficulté, le débat, la question qui était de savoir si Céline devait être célébré :
"Doit-on, peut-on célébrer Céline ? Les objections sont trop évidentes..."
Comme cela a été dit partout, le mot commémoration convient certainement mieux pour nommer le projet des "Célébrations nationales".
Par ailleurs, cette appellation est celle qui définit le plus exactement l'esprit d'origine des célébrations : commémorer des anniversaires.
"qui dirige la France ?
Relisez Céline, vous allez trouver !!..."
écrivez-vous en conclusion de votre post, où, bien entendu, il faut y lire que ceux qui s’élèvent contre cette suppression, ne sont forcément, naturellement, obligatoirement que des antisémites refoulés, trop déçus, amers d'être privés, à travers la suppression de la figure de Céline, de leur passion boueuse, secrète, faite d'obsessions, de détestations et de haines.
Qu’est-ce que vous croyez à la fin !
Un ministre inconsistant qui cède d’un coup d’un seul à l’injonction et à la menace de Serge Klasrfeld est le tremplin le plus efficace offert au déversement de tous les poisons qui ont construit et alimenté l’antisémitisme dans l’histoire de notre pays.
En parlant de l’héritage contradictoire de Céline, Alain Finkielkraut a parfaitement et sereinement posé les termes du débat et la limite d'une commémoration nationale de Céline. Son inquiétude est loin d’être vaine ou illusoire.
"Il nous faut assumer l'héritage contradictoire de Céline, explique de son côté le philosophe Alain Finkielkraut. Jamais un lycée de France ne doit porter le nom de Céline, mais je ne suis pas sûr qu'un tel écrivain ne doive pas faire l'objet de commémoration. Je suis surtout très inquiet des conséquences de cette décision, car cela va accréditer l'idée que le "lobby juif" fait la pluie et le beau temps en France." (le monde.fr).
Plutôt que de culpabiliser les commentateurs de ce blog, prenez-vous en, en premier, à l'inconséquence du pouvoir représenté dans cette affaire par le ministre de la Culture.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 25 janvier 2011 à 16:04
Le retour d'un refoulé intéressant.
Ainsi la République se doit de célébrer, pour sa grande contribution aux valeurs de la France éternelle, cet immense auteur qu'était L-F Céline.
Une bande de policiers de la pensée, de gestapistes de la bien-pensance vient nous priver d'une commémoration méritée du souvenir de ce grand Français parmi les Français.
Il est vrai qu'à l'époque de sa gloire L-F Céline était un excellent Français, authentiquement antisémite, authentiquement vichyste, authentiquement du côté de l'occupant.
Voila des valeurs qu'il y a lieu de célébrer quand on est authentiquement Français !
Oui Monsieur Bilger osons dire tout haut ce que d'aucuns pensent tout blog, et posons la seule question valable, formidablement mise en exergue par M. Philippe Régniez (voir les commentaires plus haut) : qui dirige la France ?
Relisez Céline, vous allez trouver !!...
PS: j'attends des remerciements pour ce résumé (un peu schématique, certes !) des interventions et de votre article !
Rédigé par : Roowirth | 25 janvier 2011 à 11:43
Voir post rédigé par : "On se bat toujours pour ce qui nous manque le plus | 25 janvier 2011 à 01:39"
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Pas trop fatigant de copier servilement Céline quand il descendait Sartre en flammes dans un célèbre pamphlet, en vous contentant de remplacer le nom de ce dernier par ceux de SK et de FM.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 25 janvier 2011 à 11:30
@ Guillaume D
"Je ne crois pas que personne ait jamais
regardé le monde avec une suspicion aussi
profonde, non seulement en avocat du diable,
mais tout autant en ennemi et accusateur
de Dieu ; et qui devinera ne serait-ce qu'un
part des conséquences entraînées par toute suspicion profonde, quelque chose des glaces
et des angoisses de l'isolement auxquelles toute "différence de vue" condamne quiconque
en est affecté, celui-là comprendra aussi
que j'aie si souvent cherché refuge n'importe où pour me délasser de moi-même
(...) pourquoi aussi il m'a fallu, quand je
ne trouvais pas ce dont j'avais besoin,
l'obtenir par force et artifice.
Et c'est ainsi que j'ai inventé, un jour que
j'en avais besoin, les "esprits libres" aux-
quels est dédié ce livre et de courage et de
décourgement : de ces "esprits libres", il
n'y en a, il n'y en eut jamais, -mais c'est
leur société qu'il me fallait alors pour
garder ma bonne humeur au beau milieu
d'humeurs mauvaises." F. Nietzsche
(Humain trop Humain I).
Rédigé par : calamity jane | 25 janvier 2011 à 08:14
A l'agité du bocal
Je ne lis pas grand-chose, je n'ai pas le temps. Trop d'années perdues déjà en tant de bêtises et de prison ! Mais on me presse, adjure, tarabuste. Il faut que je lise absolument, paraît-il, une sorte d'article, le Portrait d'un Antisémite, par "Klarsfeld". Je parcours ce long devoir, jette un oeil, ce n'est ni bon ni mauvais, ce n'est rien du tout, pastiche... une façon de "Lamanièredeux"... Ce petit S.K. a lu l'Etourdi, l'Amateur de Tulipes, etc. Il s'y est pris, évidemment, il n'en sort plus... Toujours au lycée, ce S.K ! toujours aux pastiches, aux "Lamanièredeux"... La manière de Céline aussi... et puis de bien d'autres..."Putains", etc... "Têtes de rechange"... "Maia"... Rien de grave, bien sûr. J'en traîne un certain nombre au cul de ces petits "Lamanièredeux"... Qu'y puis-je ? Etouffants, haineux, foireux, bien traîtres, demi-sangsues, demi-ténias, ils ne me font point d'honneur, je n'en parle jamais, c'est tout. Progéniture de l'ombre. Décence ! Oh ! je ne veux aucun mal au petit "S.K" ! Son sort où il est placé est bien assez cruel ! Puisqu'il s'agit d'un devoir, je lui aurais donné volontiers sept sur vingt et n'en parlerais plus... Mais à la page "une", la petite fiente, il m'interloque ! Ah ! le damné pourri croupion ! Qu'ose-t-il écrire ?
"Si Céline a pu soutenir les thèses socialistes des nazis c'est qu'il était payé."
Doublé au fusil mitrailleur, F.M comme sa mahonnêteté intelectuelle le place dans sa décision antérieur de relire "Bagatelles pour un massacre" "Comme si ce petit FM avait quelque pu me lire et décider d'un futur républicain ou il banni ma gerbe de roses. Dans mon cul où il se trouve, on ne peut pas demander à F.M d'y voir bien clair, ni de s'exprimer nettement, F.M a semble-t-il cependant prévu le cas de la solitude et de l'obscurité dans mon anus..." Au revoir Cendrars, Liszt, Leroi-Gourhan ou...Jean Santeuil; que parler veut dire... "Sur la foi des hebdomadaires J.-B. S. ne se voit plus que dans la peau du génie. Pour ma part et sur la foi de ses propres textes, je suis bien forcé de ne plus voir J.-B. S. que dans la peau d'un assassin, et encore mieux, d'un foutu donneur, maudit, hideux, chiant pourvoyeur, bourrique à lunettes. Voici que je m'emballe ! Ce n'est pas de mon âge, ni de mon état..."
"J'allais clore là... dégoûté, c'est tout... Je réfléchis... Assassin et génial ? Cela s'est vu... Après tout... C'est peut-être le cas de Sartre ? Assassin il est, il voudrait l'être, c'est entendu mais, génial ? Petite crotte à mon cul génial ? hum ?... c'est à voir... oui certes, cela peut éclore... se déclarer... mais J.-B.S. ? Ces yeux d'embryonnaire ? ces mesquines épaules ?... ce gros petit bidon ? Ténia bien sûr, ténia d'homme, situé où vous savez... et
philosophe !... c'est bien des choses... Il a délivré, parait-il, Paris à bicyclette. Il a fait joujou... au Théâtre, à la Ville, avec les horreurs de l'époque, la guerre, les supplices, les fers, le feu. Mais les temps évoluent, et le voici qui croît, gonfle énormément, J.-B. S. ! Il ne se possède plus... il ne se connaît plus... d'embryon qu'il est il tend à passer créature... le cycle... il en a assez du joujou, des tricheries... il court après les épreuves, les vraies épreuves... la prison, l'expiation, le bâton, et le plus gros de tous les bâtons: le Poteau... le
Sort entreprend J.B.-S... les Furies ! finies les bagatelles... Il veut passer tout à fait monstre ! Il engueule de Gaulle du coup" .
Ah si B.H.L était né plus tôt !
"Cette commémoration doit précisément servir à explorer l'énigme qui fait que l'on peut être à la fois un très grand écrivain et un parfait salaud." ...
Au précédent Noël, nous nous étions même cotisés pour offrir à Notre Seigneurie une lettre manuscrite de Céline...
Note: Henri Godard est "tombé des nues" en apprenant que sa notice avait été "censurée". "Quand j'ai voulu me présenter au ministre, celui-ci m'a tourné le dos, il m'a seulement dit : "Pas de polémique, pas de polémique". J'ai le sentiment d'avoir été piégé. Je suis furieux." Rappelant que l'inscription, en 1974, de Voyage au bout de la nuit au programme de l'agrégation n'avait "soulevé aucun problème", l'universitaire déplore une "incroyable régression". (Le Monde du 22 janvier 2011)
Rédigé par : On se bat toujours pour ce qui nous manque le plus | 25 janvier 2011 à 01:39
Deux communiqués, le premier juste après la requête de M. Klarsfeld, le second après le "nettoyage", mais avant son officialisation :
COMMUNIQUE DES EDITIONS DE LA RECONQUÊTE
EDITEUR DE SIX OUVRAGES DE LOUIS-FERDINAND CELINE DONT LES TROIS PAMPHLETS
SUR LA DEMANDE DE RETRAIT DU NOM DE L’ECRIVAIN POUR LES COMMEMORATIONS A VENIR
La France et les Français d’aujourd’hui méritent-ils Céline ?
Ainsi que le dit l’adage, plus on la remue plus elle pue, on pourrait également s’interroger de savoir à qui profite le crime, et de ressortir une fois encore le spectre de l’antisémitisme au cas où on l’aurait oublié.
Pour mémoire Louis-Ferdinand Céline était anti-tout, anti-catholique, anti-franchouillard, anti-chinois, anti-nègres hors de chez eux, et ainsi de suite. A notre connaissance, aucun catholique, aucun franchouillard, aucun chinois, aucun nègre hors de chez lui n’a demandé à ce que le nom de cet écrivain soit retiré des commémorations à venir.
Non, c’est toujours ce même avocat qui veut dicter ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, et ce comme à son habitude d’une façon très partiale et en jouant sur la corde d’une culpabilité tendue jusqu’à la cassure.
C’est un fait incontournable, Céline est l’un des plus grand écrivains du vingtième siècle, si ce n’est son plus grand écrivain, et ce pour l’ensemble de son œuvre.
La question infamante que soulève l’avocat Klarsfeld, est de savoir si les Français sont suffisamment adultes, sont suffisamment intelligents, d’une part pour lire et comprendre Céline, et d’autre part pour intégrer ses écrits dans l’histoire. Apparemment pas, d’après l’avocat Klarsfeld.
Quant à la commémoration elle-même, outre qu’en retirer Céline serait de la censure pure et simple, elle ne nous fait ni chaud ni froid quand on regarde les personnages qui ont les faveurs du ministère de la culture, et les noms de ceux qui aujourd’hui reçoivent la légion d’honneur.
Grâce à Dieu, l’œuvre de Céline se place à un autre niveau, et c’est à ce niveau-là qu’il convient de savoir si les Français d’aujourd’hui méritent ou non Céline.
COMMUNIQUE DES EDITIONS DE LA RECONQUETE
CELINE NETTOYE
C’est dans la plus grande discrétion que la référence à l’écrivain français Louis-Ferdinand Céline a été retirée du programme des Célébrations nationales 2011, comme s’il s’agissait d’un cadavre dont on aurait honte.
La Décision est tombée :
Les Français ne méritent pas Céline.
Les Français d’aujourd’hui sont trop cons, les Français d’aujourd’hui sont des complices en puissance du monstre Céline et il ne faut pas leur mettre n’importe quoi entre les mains, le cinquantième anniversaire de la mort de Céline ne sera pas commémoré.
Avec cette décision une question se pose : Qui dirige la France ?
Rédigé par : Philippe Régniez | 24 janvier 2011 à 22:54
@ Guillaume D
Il est assez dégueulasse, fût-ce pour la bonne cause, de défendre Céline ou plutôt son œuvre, de propager la rumeur que Nietzsche aurait écrit des choses du même ordre et aurait mérité un millième du même traitement.
Nietzsche, c'est une philosophie de la création, du dépassement. Que les régimes fascistes s'en soient servis pour étayer leur éloge de la force n'est pas une raison de condamner celui qui écrivait "Wagner est une névrose".
Nietzsche, au comble de la maladie mentale, se jetait au cou des chevaux pour empêcher qu'on les fouette.
Nietzsche n'a même pas été contemporain de la guerre, il est mort en 1900.
Bref, un tel rapprochement est indigne.
Rédigé par : Alex paulista | 24 janvier 2011 à 12:06
@ Catherine
"Il n'a sans doute pas plus relu ce pamphlet que comme vous et moi, il ne l'a lu une première fois."
Franchement Catherine, je suis bien convaincue du contraire. Je pense que FM a lu et relu comme il l'a déclaré le pamphlet de Céline.
Mais cette question de savoir si FM a lu et relu le ou les pamphlets de Céline ne présente en réalité aucun intérêt.
Ce qui m'est apparu énorme est le fait pour le ministre de découvrir seulement après RELECTURE le propos des pamphlets de Céline.
En déclarant que le relecture de "Bagatelles pour un massacre" a motivé sa décision de censurer Céline dans le programme des "Célébrations nationales", FM a réduit l'œuvre de Céline et l'homme Céline à ce pamphlet et au Céline antisémite. Ce qui est une position et un parti pris proprement inconcevables et totalement irrecevables de la part d'un ministre de la Culture.
D’un point de vue, je dirais plus politique, je rejoins Alain Finkielkraut quand il dit dans Le Monde que la décision de FM "va accréditer l'idée que le "lobby juif" fait la pluie et le beau temps en France.""
Il n’est pas acceptable qu’un gouvernement cède de cette façon aux groupes de pression quels qu’ils soient. Ou alors il doit céder à tous.
En ce sens, je pense que la décision de FM est non seulement imbécile, médiocre et lâche, mais qu’elle aura comme conséquence d’alimenter encore et encore des frustations et des fantasmes d’autant plus pernicieux qu’ils seront véhiculés "sous le manteau", donc placés dans l’impossibilité, comme l’écrivait Jean-François Revel, d’être discutés et réfutés.
Je crains que FM n'ait de cette façon consacré on ne peut plus officiellement l'aspect sulfureux et maudit de l'écrivain Céline. Il y a pas à mon avis de meilleur encouragement, ni de publicité plus efficace faite à la part maudite de Céline que cette décision aberrante et atterrante du ministre censée devoir disqualifier à jamais Céline.
Je ne suis pas une passionnée de l'écrivain Céline. J'ai lu, j'ai envie de dire comme tout le monde, il y a longtemps "Voyage au bout de la nuit", "Mort à Crédit" et, dans la foulée, la biographie de Céline par Frédéric Vitoux.
Cependant, je fais partie des lecteurs qui sont totalement réfractaires à l'écriture de Céline des derniers romans.
Bref, au risque de faire bondir les céliniens, "D'un château l'autre", "Nord" me sont tombés des mains et me tombent toujours des mains. C'est ainsi.
Concernant les pamphlets, j’ai lu ce week-end un numéro du Magazine littéraire paru en 1994 et consacré à Céline.
On y apprend par exemple qu’une historienne américaine, Alice Kaplan – auteur également d’un livre consacré au procès Brasillach, où d’un point de vue factuel, concernant le procès, on apprend beaucoup - a mis en évidence les emprunts de Céline à la littérature de propagande antisémite qui proliférait dans les années 30.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 24 janvier 2011 à 11:36
@ Mary
Extrait de la quatrième de couverture de "La Nouvelle Censure" de Jean-François Revel publié en 1977 :
"(...) on a rarement prêté attention à une forme non officielle de censure, d’autant plus redoutable qu’elle est sincère, se croît honnête et n’a pas conscience d’être censure: c’est la censure idéologique. Plus précisément, la censure idéologique en démocratie, donc ne disposant plus ou pas encore du bras séculier, et que je propose d’appeler “censure élargie”, cas particulier du “stalinisme élargi” que j’ai dépeint dans La Tentation totalitaire. Elle consiste, non pas à empêcher la diffusion des œuvres et des idées, puisqu’elle n’en a pas le pouvoir légal, mais à dissuader le public d’en prendre connaissance. Le lecteur, l’électeur ne sont pas invités à juger par eux-mêmes des arguments d’un auteur, mais à s’en détourner comme on se détourne du péché. Censure prophylactique, consistant à déconsidérer les auteurs dangereux pour la Foi, au lieu de les discuter; à les mettre à l’Index au lieu de les réfuter; à fanatiser le lecteur au lieu de l’éclairer (...) "
A l'exception du mot sincérité qui ne caractérise en rien la décision du ministre, je pense que la définition de JFR s'adapte parfaitement à la suppression par FM de Céline des "Célébrations nationales 2011".
Par ailleurs, Frédéric Vitoux dans Le Figaro a totalement raison quand il déclare :
"retirer le nom d'un catalogue, c'est aussi vain que Staline faisant effacer les photos des dirigeants communistes qu'il n'aimait pas. Ça n'empêchera pas que Céline a écrit des horreurs et qu'il est l'un des plus grands écrivains français."
Enfin, par la force de sa logique imbécile Frédéric Mitterrand vient d'accomplir l'exploit à ce jour inégalé de censurer un texte du professeur Henri Godard.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 24 janvier 2011 à 07:49
Quiconque a lu Céline, et j'entends par là l'ensemble de son oeuvre romanesque, du Voyage à Rigodon, est à même de comprendre que ce personnage complexe n'a en rien l'étoffe d'un "parfait salaud". D'une certaine manière, cet écrivain nous propose le portrait cruel d'un écorché vif sans cesse hésitant entre un naturel humaniste (celui du docteur Destouches, "médecin des pauvres") et une tendance anti-sociale qui s'explique essentiellement par le désespoir qu'il éprouve à la vue de ses contemporains, qu'ils soient riches, pauvres, allemands, français ou américains.
Personne ne peut se permettre de nier que ce désespoir a pris la forme d'une haine irrationnelle et injustifiable. En revanche, il me paraît dangereux de juger l'homme Céline à la lumière exclusive de pamphlets illisibles et grotesques. Il ne suffit pas de souhaiter être le père Ubu pour l'incarner parfaitement. Céline n'a jamais collaboré et sa sympathie pour l'occupant est toujours restée essentiellement intellectuelle. Il serait bien injuste de comparer la fuite de Céline à Sigmaringen à celle d'un Doriot ou d'un Laval.
Cessons donc de vouloir "éclairer" Céline à la seule lumière de ses frayeurs (le riche, le juif, le banquier, son éditeur, les bellicistes, les communistes et j'en passe) et reconnaissons qu'il s'est seulement trompé. Dans ces conditions il nous serait plus facile de retenir son inestimable apport à la littérature française. Peut-être alors pourrions-nous comprendre que le MESSAGE qui traverse son oeuvre est à cent mille lieues de l'antisémitisme crasse qu'il a professé. J'ai le sentiment que ce chemin a été parcouru dans le très fameux cas d'école que constitue involontairement Nietzsche. Je veux croire que le même chemin pourrait être parcouru en ce qui concerne Céline. D'autant que ces procès ne répareront jamais ce qui a été dit, commis et ressenti par les victimes en question. Je ne verrais que du positif au fait que l'on admette une bonne fois pour toutes que Céline s'est trompé durement et pleinement. En admettant cela nous ne trahirions la mémoire d'aucune victime et nous pourrions sans doute aborder ces questions à l'avenir avec une plus grande sérénité.
Quant à FM, je veux croire que sa démarche s'explique aussi par la peur qu'un petit malin (journaliste ou autre) réouvre le dossier complexe de son oncle. L'arroseur arrosé ?
Rédigé par : Guillaume D | 24 janvier 2011 à 00:27
@Véronique Raffeneau | 23 janvier 2011 à 14:11
"Au passage, Frédéric Mitterrand dit que sa relecture de "Bagatelles pour un massacre" l'a convaincu de retirer Céline du programme des Célébrations nationales 2011.
Il faut quand même y aller pour ne se rendre compte qu'après relecture que le pamphlet de Céline est une totale ordure antisémite !"
Il n'a sans doute pas plus relu ce pamphlet que comme vous et moi, il ne l'a lu une première fois. Ce vieux beau fait semblant de tout jusque devant l'appareil photo où il fait même semblant d'être lui en positionnant son poing de façon à tirer la peau et lisser les rides comme aurait honte de le faire une simple cocotte !
Rédigé par : Catherine JACOB@Véronique Raffeneau | 24 janvier 2011 à 00:25
@Mary Preud'homme,
Je vous ferais remarquer, si vous aviez bien lu mon billet, que je commençais à dire et concluait sur ce point que ledit Destouches méritait 12 balles dans la peau. Par deux fois dans un billet.
Donc, ne m'accusez pas d'une quelconque indulgence pour le personnage.
Ensuite, s'agissant de vos réflexions, la guerre de mouvement a duré jusqu'en décembre 1914. Dont acte.
Dites donc, savez-vous que les quatre premiers mois de la guerre avec 850 000 morts côté français ont été les plus meurtriers du conflit, en atteignant presque 50% des pertes totales françaises durant toute la guerre ?
En somme, deux mois de guerre.
Je n'ai jamais prétendu que Céline avait été trépané. Relisez mes propos. J'ai dit qu'il avait connu la boucherie de la guerre et vu la période où il a servi, c'était le mot approprié.
Blague à part, mon défunt grand-père qui a fait le Chemin des Dames hurlerait à entendre vos propos. Céline a connu deux mois de service actif.
Mais, Madame, il y a des minutes qui durent des siècles. Eussiez-vous fait la fière sous le tir des mitrailleuses MG08 et sous les 77, 88 et 155 des Allemands, sans compter les obusiers géants de 450 mm de Paul von Hindenburg qui pulvérisèrent les forts de Liège comme des confettis.
Connaissez-vous l'effroi des minutes sous le feu, où toute votre vie défile devant vos yeux ?
Malraux disait qu'il faut neuf mois pour faire un homme et une seule journée pour le tuer.
Je vous répondrai, moi, qu'une seule seconde suffit.
Combien croyez-vous qu'il faille de secondes pour bouleverser l'intellect d'un homme confronté à une épreuve traumatisante ?
Pouvez-vous me le dire ?
Je n'ai à aucun moment dit qu'il avait été trépané. Je vous dis qu'il a été confronté à l'horreur de la guerre.
Rédigé par : Jean-Nicolas GILLOT | 23 janvier 2011 à 21:03
Mais JDR, n'y allez-vous pas un peu fort en proposant à la place de qui est innommable:
"Vous avez bien raison M. Bilger, la juiverie cosmopolite franc-maçonne abêtit notre peuple de rats."?
N'est-ce pas une formule d'exorcisme, alors pourquoi ne pas propager ainsi:
Il y avaient des rats et même des chats, et puis nous assistions à une bataille de matous, à propos de l'un d'entre eux coupable d'avoir su un jour acoquiner des chats.
Ce fut une bataille menée en haut des murs, qui nous écarta du danger pendant l'exercice d'équilibristes, tandis que nous fouillions les caves...,une querelle à croire profitable, car ni les chats, ni les rats nous inspirons... sinon pour que de nous ces animaux se servent.
Et même comme cela:
-Maman, maman REGARDE la jolie fleur!
-Qu'est-ce que tu fais mon chéri?....Oh oui! Mais tu ne la touches pas, elle est vénéneuse!
-(à part l'enfant: "...vénéneuse?") Maman, Mais maman, je ne la touche pas, je la regarde juste! En plus, je collectionne même pas les regards de fleurs...
-Sors du pré! Reviens sur la route! ...et fais attention aux voitures..
-Mais...(à part l'enfant: "maman, maman, quel âge as-tu, pourquoi ne profites-tu pas du privilège de l'âge?")
Bon, on peut poursuivre éperdument, dans la meilleure manière de dire ce qu'il ne faudrait pas dire, mais de dire ce qui n'est pas dit d'avance, est pourtant ce qui s'entend finalement de tous côtés, alors ce dont on ne risque pas d'éviter la résonance...
Le poisson se noie-il parce qu'il ne manque pas d'air, et votre efficacité restera-t-elle parmi mes préférées s'il faut ensuite suivre Maître Klarsfeld au poids de son argument?
"à ceux qui s'offusqueraient de cette exigence, qu'il faut attendre des siècles pour que l'on célèbre en même temps les victimes et les bourreaux"....
Quand même il y a de l'écho et du trouble,
Outre le fait que l'on peut se demander très vite si le syndrome de Stockholm ne s'applique pas à Céline, s'il n'est pas, un déjà déglingué, dans une terrifiante période son propre bourreau et sa propre victime, alors en oubliant facilement toutes les autres victimes, faut-il entendre un argument de plaidoirie définitif, asséné encore pour voie d'exorcisme:
Comment est la constance de cet argument, quelle est son origine dans le temps?
Il faut bien une origine puisqu'il y a une durée déclarée.
Sinon, ne peut-on qu'avec la force enrayer l'enchaînement de notre pensée, bâillonner sa cohérence, répudier sa sérénité... au motif que cette sérénité durerait plus que momentanément?
Faut-il un temps d'attente permettant d'intégrer en soi Céline, et comment croire qu'un jour cette possibilité échoit, c'est idiot. Céline, c'est pas qu'il va mourir deux fois, c'est que jamais de la sorte il ne sera réuni, jamais il ne sera autre chose qu'une œuvre, et il n'est pas encore temps qu'une chair pareille ait pu cracher des mots...après tout, le voilà pris au mot.
Et surtout, faut-il un ministre pour cela, sacrifiera-t-on l'imbécile heureux pour contrer l'imbécile confit de ressentiments?
Qui dit l'origine alors que vaut l'attente pour la célébration? Combien, toujours plus nombreux entendent étant mis à part Céline: Non, décidément nous ne pourrons jamais compatir!?
Comment tel argument peut-il recouvrir toute vérité définitivement, comment fait-il science, et ensuite fait-il autant bon effet qu'il peut y prétendre?
En vérité, il ne fait pas science cet argument, tandis qu'il fait à coup sûr croyance et précaution, la démonstration que chez nous nous faisons le ménage.
Déjà l'incantation? ou pourquoi se présente-t-il maintenant, dans ces circonstances?
Je crains que la circonstance, celle qui nous démontre bien des problèmes d'envergure autrement pesantes, affaiblit l'argument consenti et pourtant valeureux.
Oui, c'est agaçant cet englobant mal requis pour l'histoire, avec l'origine certaine et la durée indéterminée contre l'origine incertaine et la durée déterminée.
Il s'est passé la convocation d'un ministre qui, on s'en contentera, tranchera l'ordre de la qualification:
"C'est un salaud, et un bon écrivain."ou alors, "C'est un bon écrivain, et un salaud."
Maintenant il nous reste à gager que la décision obligée de Frédéric Mitterrand n'est pas préfabriquée, autorise à se dire les deux choses en même temps, fait simple publicité et ne participe pas aux graves polémiques.
En fait, il nous faut alors créditer nos élites de beaucoup de vertus.
Mais pour un résultat à dire honorable, cela fait pas mal de passages obligés à emprunter pour beaucoup de couleuvres à avaler.
Rédigé par : zenblabla | 23 janvier 2011 à 19:41
Il faut cesser une fois pour toutes de parler de censure au sujet de Céline. Les seules oeuvres censurées étant les pamphlets antisémites et cela pour deux raisons :
. primo, les lois de notre république qui interdisent l'incitation à la haine raciale par des propos, discours ou écrits. Eh oui le droit d'expression a ses limites.
. secundo, Lucette Destouches Almanzor (dernière épouse de Céline) s'est toujours opposée farouchement à la réédition officielle de ces trois pamphlets qu'elle jugeait d'ailleurs insupportables et orduriers, lesquels néanmoins ont toujours continué à circuler sous le manteau. La preuve en est que j'en ai eu connaissance longtemps avant le règne d'Internet alors que je résidais à Meudon.
Quant au reste de l'oeuvre, il (ou elle) reste tout à fait accessible, y compris dans plusieurs langues, notamment en allemand, anglais et danois.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 23 janvier 2011 à 19:20
@ Catherine
Je n'ai pas envie, Catherine, d'utiliser la polémique passée à propos du livre de Frédéric Mitterrand que j'ai lu, mal à l'aise, à sa parution, mais dont j'ai apprécié la sincérité. Son livre n’est en aucun cas une défense et illustration du tourisme sexuel, mais autre chose.
Pour ces raisons je l'ai défendu dans ce blog au moment de la polémique.
Je déteste la lâcheté avec laquelle FM a cédé aux menaces de Serge Klarsfeld. L'insupportable de la censure Mitterrand est qu'un ministre de la Culture cède d'un coup d'un seul aux seules injonctions d'un groupe de pressions.
Il n'y a aucune raison que si demain, la commémoration de tel ou tel écrivain, artiste, scientifique, de tel ou tel événement historique ou œuvre artistique ou littéraire etc. devait scandaliser telle ou telle association ou tel ou tel groupe de pressions ou rassemblements militants, il n'y a vraiment aucune raison que le ministre puisse envisager la possibilité ne pas céder aux injonctions, de ce fait de logiquement censurer des commémorations à caractère officiel qui, à un titre ou à un autre, feront débat ou seulement déplairont.
Au passage, Frédéric Mitterrand dit que sa relecture de "Bagatelles pour un massacre" l'a convaincu de retirer Céline du programme des Célébrations nationales 2011.
Il faut quand même y aller pour ne se rendre compte qu'après relecture que le pamphlet de Céline est une totale ordure antisémite !
Quand bien même on n'a pas lu les pamphlets de Céline - comme moi -, il n'y a pas un seul commentaire, pas une seule analyse de l'œuvre de Céline et de l'homme Céline qui, d'une façon ou d'une autre, n'évoque pas l'antisémitisme ordinaire et virulent affiché et revendiqué par Céline dans ses écrits.
C'est la question qui tourmente et qui hante: comment dans une même œuvre, et chez un même homme, la plus grande humanité et amour désespéré des hommes peuvent cohabiter avec la plus grande abjection et haine délirante pour ces mêmes hommes.
Ce n’est pas une question d’ordre médical ou psychiatrique. C'est une des questions les plus essentielles et les plus graves posées à notre condition d'humain.
En censurant la célébration de Céline, le ministre de la culture interdit et nous prive de ce questionnement universel.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 23 janvier 2011 à 14:11
@Véronique Raffeneau | 22 janvier 2011 à 20:45
Vous avez raison. Tout ce qu'on peut conclure provisoirement du revirement ministériel c'est que:
1. Comme Fafa à l'époque du sang contaminé, le ministre n'est pas au courant de ce qui se passe dans son ministère et signe n'importe quoi sans le lire, ce qui, au minimum, n'est pas sérieux!
2. Seul l'adepte repenti du tourisme sexuel tourné vers les très jeunes hommes ( mineurs ou non, selon les législations en vigueur dans les pays concernés), a droit à une rédemption, et de taille lorsqu'elle s'accomplit sous les ors de la République.
3. Vu que la victime a manifesté son pardon, seule la pédophilie avérée ne peut plus être poursuivie mais seulement défendue une fois que l'auteur des faits aura réussi à fuir la Justice pendant trente ans.
Autrement dit, seul le repentir concernant les mots qu'un auteur refuse pourtant de voir republiés après 1945 est irrecevable, vu que ces derniers oblitèrent tous ceux qui les ont précédés et ont rang imprescriptibilité au même titre que les actes auxquels renvoie la qualification pénale de « crimes contre l'humanité ». Et par voie de conséquence, les gazés de la Première Guerre mondiale et leur famille, les névroses de guerre méconnues comme telles donc non soignées et leurs conséquences dans l'indicible, la condamnation des phénomènes de sur endettement dont l'issue est souvent la violence y inclus celle exercée contre soi-même (suicide), etc. sont dignes de l'oubli! I see!
@Native Proud | 22 janvier 2011 à 21:36 @Catherine Jacob
« Bonjour, ce n'est pas en caricaturant la réalité que l'on rend service à l'histoire, dire que Céline était antisémite à cause d'une maladie mentale ou d'une déconvenue amoureuse est un peu léger... »
Ce n'est pas ce que j'ai dit. Ce que j'ai cherché à dire c'est qu'on a toujours tort de croire servir une cause en occultant les circonstances et une partie des faits quand cela nous arrange. Ce que j'ai également cherché à dire, c'est que les pamphlets limités à une période donnée et consécutifs à des événements manifestement traumatiques qui auraient pu être dans d'autres procès des motifs d'irresponsabilité pénale ou à tout le moins représenter des circonstances atténuantes - PB ou l'un des juristes de ce blog nous diront si je me trompe -, ne font pas de l'écrivain exactement le même salopard que celui qui a purement et simplement dénoncé son voisin, juif ou résistant ou les deux, pour ensuite récupérer ses meubles ou d'une façon générale, son bien.
Quant aux écrivains que vous citez, je constate que vous voulez faire des coupes sombres dans ma bibliothèque! Vous ne seriez pas le premier, hélas, mais je vais prendre le premier cas de votre liste et y répondre:
Pour Bernard Lazare (1er dreyfusard), « si Voltaire – qui fut d'après l'historien Poliakov, in Souvenirs des temps passés, « Revue de la Shoah n°158 », p. 23. « le pire antisémite français du XVIIIe siècle» – et donc un ardent judéophobe, les idées que lui et les encyclopédistes représentaient n'étaient pas hostiles aux Juifs, puisque c'étaient des idées de liberté et d'égalité universelle ». -L'antisémitisme : son histoire et ses causes, « VI. L'antijudaïsme depuis la Réforme jusqu'à la Révolution française », 1894 -
La conséquence de ces idées a été qu'en 1791, « Lors d’un discours sur l’accord aux comédiens, aux non-catholiques et aux Juifs des mêmes droits jugaux que les autres citoyens, Robespierre affirme : « Comment a-t-on pu opposer aux Juifs les persécutions dont ils ont été les victimes chez différents peuples ? Ce sont au contraire des crimes nationaux que nous devons expier, en leur rendant les droits imprescriptibles de l'homme, dont aucune puissance humaine ne pouvait les dépouiller. On leur impute encore des vices & des préjugés ; l'esprit de secte & d'intérêt les exagère ; mais à qui pouvons-nous les imputer, si ce n'est à nos propres injustices ? Après les avoir exclus de tous les honneurs, même des droits à l'estime publique, nous ne leur avons laissé que les objets de spéculations lucratives ! Rendons-les au bonheur, à la patrie, à la vertu en leur rendant la dignité d'hommes & de citoyens. Songeons qu'il ne peut jamais être politique, quoi qu'on puisse dise, de condamner à l'avilissement & à l'oppression une multitude d'hommes qui vivent au milieu de nous. » Résultat : le 27/10/1791 l'Assemblée Nationale octroie aux Juifs l'égalité des droits. - BRAVO!! à tout le monde, aux philosophes des Lumières y compris Voltaire, à Robespierre, aux députés de l'Assemblée nationale (dont, soit dit en passant, l'un de mes aïeux...!!) -
Sous la Terreur ultérieurement instaurée par ce même orateur qui professait également que seule les lumières de la raison devaient nous libérer des chaînes de la superstition et que ce serait une profonde erreur que de décréter la suppression des cultes « 16 594 personnes furent guillotinées et 500 000 emprisonnées, souvent à la suite de procès bâclés. »
Est-ce que ces faits doivent nécessairement oblitérer jusqu'à la sagesse du discours ayant abouti à l'octroi de l'égalité des droits. Répondez-moi!
Les 22 et 23 avril 1793, un décret de la Convention Nationale dispose en son « Article premier:
Tous les ecclésiastiques réguliers et séculiers, Frères convers & lais qui n’ont pas prêté le serment de maintenir la liberté & la légalité, conformément à la loi du 15 août 1792, seront transférés à la Guiane Françoise. » autrement dit, déportés.
Art.2 : « Seront sujets à la même peine ceux qui seront
dénoncés pour cause d’incivisme, par dix citoyens dans le canton. La dénonciation sera jugée par les directions de département, sur l’avis des districts. »
Art. 3: «Le serment qui auroit été prêté postérieurement au 23 mars dernier, est déclaré non-avenu. »
Que ne s'en sont-ils tenus à des discours! Mais, tout comme la Wehrmacht qui avait besoin d'avions a employé des résistants-déportés à Dachau dans des conditions dont l'inhumanité n'est plus à démontrer, « Dans un Exposé des moyens de mettre en valeur la Guyane française édité à Paris en 1791, un nommé Daniel Lescalier conseille d’y expédier des condamnés afin de faire renaître à la vertu des hommes que des besoins intérieurs ou les mauvais exemples ont corrompus. »
Ainsi que cela est exposé ici: « Un témoin haut placé André-Daniel Laffon de Ladebat, victime lui aussi du système écrit :Sous le Directoire [un peu plus tard en 1797] en effet , on évite désormais la guillotine sanglante : on lui préfère la mort à distance, sans effusion de sang, sèche, présentée comme un acte de clémence. Ce sera la mort lente et douloureuse pour les députés, les émigrés, les savants, les journalistes, les prêtres déportés massivement dans les fièvres de la Guyane. Plutôt que de tuer brutalement on y fait mourir à petit feu. C'est ôter mille fois la vie que de multiplier ainsi les angoisses de la mort .
La guillotine sèche tel est, en effet, le nom que l’on donna alors à ce système de déportation. ».
L'antisémitisme circonscrit à la stigmatisation des « jérémiades » reste quelque part de l'ordre des blagues idiotes qui concernent les « belges » ou des sempiternels Frogs, Froggys ou Frog-eaters qui nous mettent nous en scène, nous les français de toute confession et alors que les premiers « mangeurs de grenouilles » auraient été tchèques, ou encore de la description du touriste type sous les aspects d'un japonais faisant le tour du monde en trois jours et dix mille clics d'appareil photo.
Dès lors que la caricature n'enfreint pas certaines limites, je pense qu'il faut accepter d'être caricaturé et retourner la situation en en faisant son profit.
Personnellement, je cuisine les cuisses de grenouilles au riesling et je me délecte des escargots à l'alsacienne mais je ne les aime pas à la bourguignonne!
Comprenant qu'il faille des soupapes à l'agressivité, celle qui s'exerce contre l'économie un temps triomphante du Dragon japonais dont la firme « Canon », ou contre les français pour lesquels la panse de brebis farcie n'est pas de la cuisine, je me délecte doublement de mes escargots en pensant à la tête que ferait un contempteur de Froggys s'il me voyait!
Si je faisais partie des gens dont la propension aux lamentations est objet de caricature, je me lamenterais sans doute encore plus fort et je me demande même si ce n'est pas quelque part, ce que n'est pas sans faire Me Klarsfeld.
Mais est-il obligé de s'y livrer au point de finir par se rendre parfaitement insupportable de ce fait? Sans doute pas plus que je ne suis obligée d'aller pique-niquer au pied de la tour de Londres avec mon petit réchaud munie d'une cargaison de boîtes d'escargots ou de cuisses de grenouilles surgelées ou encore de me faire un petit cochon de lait grillé au pied d'une mosquée en Arabie saoudite!
L'Humanité est inconséquente, mais devons-nous pour autant faire définitivement notre deuil d'un peu de sagesse dans les passions ?
Rédigé par : Catherine JACOB@Véronique Raffeneau&Native Proud | 23 janvier 2011 à 11:22
JN Gillot a écrit :
"A l'inverse du docteur Destouches, blessé par la guerre de 14-18, fantastique boucherie qui eut un effet de "brutalisation" sur tous ceux qui y ont participé (à savoir l'intériorisation de la violence dans leur comportement vécu dans les tranchées dans le cadre du retour à la vie civile) provoquant déjà de difficiles réadaptations"
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En réalité, Destouches, alias LFC fut blessé à l'épaule au début de la guerre alors qu'il remplissait une mission comme agent de liaison. Déclaré inapte au combat, après seulement 2 mois de service actif et réformé en novembre 1914, il n'a donc pas connu la guerre des tranchées, ni de loin ni de près, dès lors que la guerre des tranchées, qui fit suite à la guerre de mouvement, ne commença qu'en décembre 1914.
Par ailleurs, Céline a longtemps fait croire qu'il avait été blessé à la tête et trépané, ce qui bien sûr était faux et donne une idée de la duplicité du personnage.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 23 janvier 2011 à 02:58
Que l'on soit juif ou pas, franc-maçon, bleu, blanc, rouge, noir, truc, ou pas, quand il y a exagération, cela me fout les boules.
. / (Point barre pour les obtus)
Rédigé par : jpledun | 22 janvier 2011 à 23:57
Loin de moi l'idée de défendre Louis-Ferdinand Céline, dont je ne suis pas lecteur.
Le talent est une preuve de responsabilité disait de Gaulle en refusant la grâce de Robert Brasillach réclamée par François Mauriac.
Mais ôter Céline de la liste des célébrations est inapproprié, même si je pense que cet écrivain méritait "douze balles dans la peau" (et j'en suis désolé par rapport aux opinions sincèrement abolitionnistes de l'auteur de ce blog).
Pourquoi ne pas vouer Céline aux gémonies comme Brasillach, dont j'eus hurlé si l'on eut proposé sa célébration.
A l'inverse du docteur Destouches, blessé par la guerre de 14-18, fantastique boucherie qui eut un effet de "brutalisation" sur tous ceux qui y ont participé (à savoir l'intériorisation de la violence dans leur comportement vécu dans les tranchées dans le cadre du retour à la vie civile) provoquant déjà de difficiles réadaptations, cet infecte petite crapule de Brasillach n'avait pas connu l'épreuve du feu.
De la même façon que l'article 132-24 du Code pénal dit que l'on édicte la peine en tenant compte des circonstances de l'infraction et de la personnalité de l'auteur, et je ne veux balancer aucune fleur au docteur Destouches, dit Céline, celui-ci avait vécu une telle "horreur" que cela est à même de radicaliser à tout jamais certaines positions plus par sensibilité et réaction exacerbée que par conviction profonde.
On emprunte, hélas, de mauvais chemins dans la vie plus par une réaction exacerbée suite à des épreuves atroces mal vécues que par des convictions profondes à cet égard par rapport à certaines idéologies. Cela n'excuse pas pour autant le fait d'emprunter de mauvais chemins, car sanction il doit y avoir. Mais il faut être juste.
Même si l'auteur de ce blog n'aime pas Saint Badinter, tout le monde n'a pas la hauteur de vue nécessaire au sortir d'une épreuve atroce (perte de son père à Sobibor et de sa grand-mère en déportation après arrestation par la milice ou la police française à Lyon).
Les hommes dans leurs tempéraments sont plus proches de Céline que de Badinter. La hauteur de vue, le bon chemin, la noblesse des sentiments, et il faut le rappeler, ne sont pas des qualités répandues dans l'humain, mais procèdent davantage du surhumain.
Tout le monde n'est pas Simone Veil également.
Samuel Pisar, un des plus jeunes rescapés de la Shoah, né en 1930, déporté à Sobibor, diplômé de Harvard, conseiller du président Kennedy, président de Yad Vashem pour la France, avait très bien dit cette phrase, quand on lui demandait de résumer l'histoire de sa vie, à la fin de l'interview réalisée par la Mairie de Paris suite au 60ème anniversaire de la libération de Birkenau dans le cadre du projet "Les derniers témoins". M. Pisar avait dit, humblement, en rigolant :
"Oui, j'étais bien parti pour devenir gangster", après s'être évadé d'une marche à la mort, avoir été recueilli par des troupes américaines ("l'étoile blanche de la liberté") et ensuite avoir volé une moto allemande et un ou deux pistolets Luger. Et fait une chevauchée sauvage en moto à travers toute l'Allemagne, terrorisant tout sur son passage, en ayant le sentiment de n'avoir plus rien à perdre.
Jusqu'à rencontrer le frère de sa mère dans une base américaine. Avoir été rééduqué par sa famille à Paris, puis envoyé en Australie pour faire des études.
Je répète n'avoir aucune sympathie pour ledit Destouches. Mais il est moins méprisable à mes yeux que certains comme Brasillach, voire un Pétain (qui quoi qu'on en dise, n'a pas subi étant dans l'état-major de l'arrière les horreurs des tranchées, même si on doit lui tenir crédit d'avoir amélioré le sort des soldats), d'un Laval ayant livré des enfants juifs.
L'homme qu'était Louis-Ferdinand Destouches avait ses parts d'ombre et de lumière qui accentuaient son paradoxe. Ayant des voisins juifs cachés au bas de son immeuble qu'il n'a pas dénoncés.
Cela n'empêche pas que son talent eut mérité qu'il fut jugé bien avant 1951, date à laquelle il est revenu en France.
Céline eut certainement mérité "12 balles dans la peau, mais certainement pas que le tranchant de la hache de la censure s'abatte sur sa tête".
Rédigé par : Jean-Nicolas GILLOT | 22 janvier 2011 à 23:25
@Catherine Jacob
Bonjour,
ce n'est pas en caricaturant la réalité que l'on rend service à l'histoire, dire que Céline était antisémite à cause d'une maladie mentale ou d'une déconvenue amoureuse est un peu léger... La littérature est remplie d'auteurs antisémites, même si le "politiquement correct" interdit de le souligner... Voltaire, Shakespeare, Balzac, Daudet, Gide, Dante, Cervantes, Luther, Goethe, Hugo, Renard ,etc ... ça ne vous dit rien?
On peut citer Dostoïevski si vous préférez
“Il n’y a pas au monde un peuple qui se soit plaint à un tel point et à chaque instant de ses humiliations, de ses souffrances, de son martyre. On croirait vraiment que ce ne sont pas eux les maîtres de l’Europe, des Bourses, de la politique, des affaires intérieures des Etats. ” Mars... 1877
ou encore le dictionnaire
JÉRÉMIADE, subst. fém. Plainte, lamentation, récrimination sans fin et qui importune. Jérémiades continuelles, sans fin, à n'en plus finir; ennuyer qqn de/avec ses jérémiades; cesser ses jérémiades.
Dér., au moyen du suff. -ade*, du nom du prophète Jérémie, aut. du livre des Lamentations sur les malheurs de Jérusalem. Cf. la loc. faire le Jérémie « se lamenter »
Rédigé par : Native Proud | 22 janvier 2011 à 21:36
@ Mary
Mais de quel courage de Frédéric Mitterrand parlez-vous ?
Le professeur Henri Godard, auteur de la notice sur Céline - au passage, que personne au ministère n’a eu la délicatesse ni la courtoisie de prévenir de la censure de Céline à venir - rapporte dans Le Monde que lors de la cérémonie de présentation des "Célébrations", le ministre lui a tourné le dos...
Si Frédéric Mitterrand avait été un ministre d'honneur, si l'idée de Céline dans "Célébrations nationales 2011" le révulsait au-delà de tout - comme il tente, depuis hier, de justifier de cette façon son obéissance à l'ordre de Serge Klarsfeld - plutôt que de désavouer et disqualifier publiquement les chercheurs et les historiens qui ont prêté leur concours aux Archives Nationales, il devait lui, en premier, assumer pleinement l’entière responsabilité du choix de Céline, et en tirer les conséquences évidentes qu'un authentique courage et un sens des responsabilités auraient dû normalement imposer. C'est-à-dire en tirer les conséquences qui s'imposaient en tout premier à… lui-même.
Le recueil "Célébrations nationales 2011" a été adressé dans les organismes culturels à l'automne 2010 :
"Un recueil dont il (Frédéric Mitterrand) a lui-même signé un avant-propos enflammé où il se félicite qu'y soit évoquée "une histoire de France propre à charmer nos imaginations et nos esprits contemporains"."
(Le monde.fr -http://www.lemonde.fr/culture/article/2011/01/22/frederic-mitterrand-fait-volte-face-et-ecarte-celine-des-celebrations-de-2011_1469140_3246.html )
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 22 janvier 2011 à 20:45
@Wardenclyffe | 22 janvier 2011 à 11:19
« Déclaration de Klarsfeld entendue ce matin à la radio :
"Je considère Céline... ...le plus antisémite de tous les Français de l'époque." Venant de Karlsfeld lui-même, censé s'y connaître sur la question, cette façon de plier la réalité pour justifier son action, cela fait peur. Tout est dit.
Hum! Si on veut. Me Klarsfeld n'a sans doute pas eu grand mal à expertiser ainsi l'écrivain, vu que ce dernier revendiquait lui-même, comme on le verra ci-dessous, un tel statut, de façon quelque part totalement ubuesque!
Louis-Ferdinand Destouches dit Céline du prénom d'une grand-mère et d'une mère dont la perte et les difficultés de l'existence l'ont cruellement affecté est cependant publié dans «La pléiade ». Que nous faut-il donc faire de cela? : Un trou dans le rayonnage? Ou bien encore rapprocher Casanova de René Char? Mais avant de décider, penchons nous sur ce qui s'y trouve exactement publié:
Tome I :
Voyage au bout de la nuit (1932): « Louis-Ferdinand Destouches a participé à la Première Guerre mondiale en 1914 et celle-ci lui a révélé l'absurdité du monde. Celui qui, a 18 ans avait devancé l'appel, ira même jusqu'à la qualifier « d'abattoir international en folie »; On définit rapidement ainsi ce 1er roman qui obtint le prix Renaudot en disant qu'il est: « antinationaliste, anticolonialiste, anticapitaliste , anarchiste entièrement écrit en langage parlé, voire en argot. L'idée de Céline étant que la langue classique, la langue académique, celle des dictionnaires, est une langue morte. » -Source wikipedia-
Mort à crédit (1936): L'auteur dont la mère qui tenait une boutique de modes et de lingeries était après de mauvaises affaires redevenue demoiselle de magasin chez sa propre mère, « veut illustrer par ce titre l’étouffement des petits commerçants croulant sous les crédits », problème qui n'est pas inconnu de notre époque non plus.
Tome II:
D'un château à l'autre (1957) Ce roman « dresse un parallèle entre la vie de Céline contemporaine à l'œuvre - en tant que médecin et écrivain, pauvre, maudit et boudé par sa clientèle - et sa vie à Sigmaringen où se sont réfugiés le gouvernement vichyste en exil et de nombreux collaborateurs devant l'avancée de l'armée du général Leclerc. » Résumé wikipedia – Ce séjour, entre autres, fera ultérieurment l'objet d'une enquête.–
Nord (1960)
Rigodon (1969)
N'y sont pas inclus bien évidemment les pamphlets revendiqués par l'auteur lui-même en tant qu'écrits par «l'ennemi n° 1 des juifs» - mais il ne connaissait pas encore Hitler - controversés ultérieurement jusque chez les nazis et qui le feront rejeter par la critique de gauche et juger indésirable par la critique de droite.
Même les journaux collaborationnistes ne publient pas les articles/courriers qu'il leur adresse. Et déjà en mai 1939, un décret oblige l'éditeur (Denoël), à retirer de la vente les deux ouvrages de cette période que sont:
Bagatelles pour un massacre 1vol 384 p. 27 fr - « Pour bien rire dans les tranchées... » - Ce n'est pas un commentaire de Dieudonné, mais le sous-titre donné par cet ancien vétéran de la Première Guerre mondiale qui les a connues, ces tranchées boueuses - (1937) où à la fin de l'ouvrage et après avoir rendu responsable de ses échecs les personnages juifs dont il parle, l'auteur y fait établir à propos de son propre cas, un diagnostic de démence, faisant ainsi preuve d'un éclair de lucidité relativement à une telle attitude et frappant ainsi du même coup l'antisémitisme du sceau d'une forme de paranoïa, même si, restant dans l'ambiguïté, il fait établir ce diagnostic par un médecin d'origine juive.
L'École des cadavres (1938).
Le sujet n'en est pas confiné à l'antisémitisme, mais se distribue autour des thèmes céliniens que sont : « l'alcool, le cinéma, le surréalisme, en passant par l'académisme de la langue française et la littérature, y est dénoncée la décadence dans laquelle, selon lui, s'enfonce la société française des années 1930. »
« Ces pamphlets sont aujourd'hui introuvables en librairie en France, excepté chez des bouquinistes. Lucette Destouches, veuve de l'écrivain, s'oppose en effet à toute réédition, tenant à respecter la volonté de l'auteur qui ne voulait pas que ces textes fussent republiés après 1945 » Source Wikipedia – Là, en effet, il ne pouvait plus ignorer Hitler –
Dans quel contexte la virulence de ces textes qui précèdent le début de la Seconde Guerre mondiale, et dont l'auteur qui avait été décoré de la Croix de guerre avec étoile d'argent lors de la Première Guerre mondiale, n'était pas sans avoir « un ami juif», le docteur René Gutmann, est-elle enracinée?
Il se trouve que celui qui commencé par épouser la fille du directeur de l'école de médecine de Rennes, rencontre à Genève en 1926 « Elizabeth Craig (1902-1989), une danseuse américaine, qui sera la plus grande passion de sa vie. C'est à elle, qu'il surnommera l'Impératrice, qu'il dédiera le Voyage au bout de la nuit. Elle le suit à Paris, rue Lepic, mais le quitte en 1933, peu après la publication du Voyage. Il partira à sa recherche en Californie, mais ce sera pour apprendre qu'elle a épousé Ben Tankel qui se trouve être Juif.»
Autrement dit, est-ce que ces pamphlets ne seraient pas aussi quelque part une extension du sentiment négatif qu'un amant éconduit, blessé de guerre et handicapé à 70%, éprouve pour son rival vainqueur, lequel s'il eût été martien eût sans doute été à l'origine d'un pamphlet contre les extra-terrestres?!
Il écrira encore: « Je suis contre l'iconographie. Je suis mahométan. » justifiant par un interdit de représentation de la figure humaine, un rapport manifestement problématique à sa propre image: « Pas de photo de moi... Je n'aime pas ça. » - François Gibault, L.-F. Céline. Biographie, I, Paris, 1976, cité par « L'album Céline » de la Pléiade.
C'est le même personnage qui ayant comme écrivain écrit un roman antinationaliste, anticolonialiste, anticapitaliste et anarchiste où est clairement dénoncée l'inhumanité du système capitaliste en général et des usines Ford en particulier, lui dont la mère a fait partie des « demoiselles de magasin », donc du menu peuple des vendeuses après une faillite, ce qui est encore beaucoup plus difficile, qui en tant que médecin (formé en accéléré et non en sept années d'études comme de nos jours depuis l'après-guerre pour les généralistes) écrit «le public ne demande pas à comprendre, il demande à croire. », «l'intérêt populaire ? C'est une substance bien infidèle, impulsive et vague. Nous y renonçons volontiers. Ce qui nous paraît beaucoup plus sérieux, c'est l'intérêt patronal et son intérêt économique, point sentimental. »
Et c'est encore le même personnage qui envoyait aux journaux collaborationnistes pendant la Seconde Guerre mondiale des articles antisémites non publiables à force d'excès, ce qui n'est sans doute pas sans signification, qui écrit à Bernard Vorge dans « Défense de l'Occident » en 1957: « […] 2° A ce propos (celui des journaux), je voudrais bien comme le Père Ubu, être ministre de l'Intérieur pendant huit jours pour le plaisir solitaire de me faire communiquer les dossiers de tous les journaux, droite, centre et gauche. Cela seul est intéressant dans un journal, son dossier à l'intérieur. »
Rédigé par : Catherine JACOB | 22 janvier 2011 à 18:15
Ne pourrait-on revenir au sens du terme "célébration" qui est ici de "célébrer" ou fêter un anniversaire. Que Céline soit un grand écrivain, c'est évident. Il n'est pas censuré, il est lu, publié en livre de poche, cité, bref sa dimension littéraire est parfaitement reconnue. Qu'il ait été un homme méprisable, obnubilé par son antisémitisme, ami de l'occupant, excitant les pulsions les plus basses chez ses amis des diverses milices de Vichy, fuyard à Sigmaringen, condamné à une peine fort légère, voilà qui devrait suffire pour que la République ne célèbre pas son anniversaire. A quand la célébration de Doriot, de Laval, de Pétain et autres ?
Rédigé par : Munstead | 22 janvier 2011 à 17:10
Oui Céline est un grand écrivain je l'ai découvert très tard.Céder à Serge Klarsfeld c'est reconnaître le délit de blasphème...
Rédigé par : Germaine Rachine | 22 janvier 2011 à 17:07
@Mary Preud'homme
En gros vous êtes pour la liberté d'expression tant que ça va dans votre sens et celui de vos intérêts...
Rédigé par : Native Proud | 22 janvier 2011 à 15:21
Pour suivre sur le premier billet de Fleuryval, il faut adresser nos compliments à Klarsfeld que j'aimais bien jusqu'à ce jour, mais qui vient de révéler son excès d'ambition dans les termes qu'aurait pu lui appliquer Julien Benda.(v.Mémoires d'un enterré vif)
Alors, Klarsfeld, il va falloir penser à interdire Morand, Léautaud et surtout Paul Valéry. Mais oui, Valéry, dont vous savez qu'il organisa une souscription en faveur du colonel Henry, contempteur de Dreyfus. Il était donc antisémite. A mort Valéry. Et puis, il faudra faire corriger Montaigne, Voltaire, et Racine dont certains vers d'Esther ne sont pas très satisfaisants pour les juifs. Ainsi, Klarsfeld, vous aurez la maîtrise de la culture française, justifiant ainsi les reproches insensés que certains murmurent d'ores et déjà.
Vous avez tout faux Monsieur Klarsfeld, et vous n'êtes pas un maître, vous avez ce défaut que dénonçait J.Benda de l'excès de satisfaction de soi-même. Vous fîtes un beau travail, vous êtes en train de le saborder. Vous avez pour vous protéger l'ombre d'un général qui fait donner des couvertures à son ancien maître, hurlant de douleur, tant qu'on s'en bouchait les oreilles sur l'ile d'Yeu et qui a abandonné ceux qui nous avaient servis en Algérie. Voilà de la culture française, bien perpétuée par F.Mitterrand, l'abandon.
Rédigé par : v Jean-Marie | 22 janvier 2011 à 14:36
Mon post du 20 janvier n’ayant pas été édité pour une raison que j’ignore et que Philippe Bilger (informé en MP) ne s’explique pas non plus, je tiens à en rappeler succinctement la nature :
Dans mon intervention d'avant-hier, je manifestais sans ambages ma stupéfaction, voire ma colère concernant la décision de « célébrer » la mémoire d’un auteur plus que sulfureux, citant au passage un court passage de l’un de ses pamphlets, « l’Ecole des cadavres » où les juifs sont gratifiés d’épithètes d’une grossièreté et d’une violence inouïes, de même que les francs-maçons, les noirs, métis, jaunes, etc. etc. - Céline se proclamant en outre ouvertement pro hitlérien et appelant de ses vœux la guerre (nous étions en 1938) et la victoire du grand peuple allemand. Discours débridé, nauséeux et infect qui se poursuit sur des centaines de pages et où Céline exprime avec jubilation son nihilisme, sa lâcheté revendiquée, ses penchants mortifères et son mépris souverain de nos valeurs humanistes et de notre patrie entachée, je cite, de « pourritures et de dégueulasseries ».
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Alors que dans le même temps où l‘on trouve normal et opportun de célébrer un tel individu, ajoutais-je, nos médias font totalement l’impasse sur le décès le 8 janvier dernier d'un authentique résistant, torturé et déporté, doublé d'un artiste de renom et qui toute sa vie fit honneur à la culture française, lui.
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Par ailleurs, bien qu’ayant peu de sympathie pour Frédéric Mitterrand, je dois reconnaître qu’il a pris, après coup, une décision courageuse. Et à ceux qui se disent indignés par ce qu’ils nomment improprement censure, alors que tout le monde peut se procurer sans peine les œuvres de Céline, je suggère d’introduire une plainte (avec pétitions à l’appui) auprès des tribunaux compétents et d’aviser en même temps le Secrétariat général à la francophonie et les autorités allemandes de cet abus intolérable de notre Etat français souverain !
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Et en guise de conclusion, cette prière empruntée à une œuvre de Senghor :
« Seigneur, éloigne de ma mémoire la France qui n’est pas la France, ce masque de petitesse et de haine sur le visage de la France, ce masque de petitesse et de haine pour qui je n’ai que haine, car je peux bien haïr le mal… »
Rédigé par : Mary Preud'homme | 22 janvier 2011 à 13:05
Bien souvent les commémorations des uns ne sont pas toujours compatibles avec celles des autres et celle de Céline en est un exemple. Mais on pourrait en trouver d’autres comme par exemple Aragon qui a soutenu l’URSS quand Staline était au pouvoir. Mais sans doute ignorait-il tout des méthodes du « petit père des peuples ».
J’ignore s’il en était de même concernant Louis Ferdinand Auguste Destouches avec les méthodes nazies... J’espère que oui.
Rédigé par : Achille | 22 janvier 2011 à 12:21
Les Mitterrand...
"insigne médiocrité et lâcheté" ; la formule est parfaite chère Véronique !
Est-ce pour "se refaire" après la bourde tunisienne que notre présentateur de TV (qui aurait dû le rester) commet une bourde pro lobby juif ?
Notre classe politique est désespérante.
Rédigé par : Jiel | 22 janvier 2011 à 11:25
@France
Oui, France, tu as perdu ton identité !
Avant tu étais une terre de liberté, de circulation, d'expression, de rassemblement, d'accueil, et j'en passe !
Maintenant tu ne peux plus exister que par ceux qui exigent de toi silence, compromission, lâcheté et cupidité !
Avant tu brillais par ton intelligence et ta tolérance, maintenant tu t'enflammes dans des tollés rances.
Bientôt ne crains-tu pas de brûler ?
Crains qu'un jour on ne dise "j'irai cracher sur ta tombe"
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 22 janvier 2011 à 11:25
Déclaration de Klarsfeld entendue ce matin à la radio :
"Je considère Céline... ...le plus antisémite de tous les Français de l'époque."
Venant de Karlsfeld lui-même, censé s'y connaître sur la question, cette façon de plier la réalité pour justifier son action, cela fait peur. Tout est dit.
Cette façon de fabriquer du sens, un sens crédible pour tous les ignorants ou les oublieux... cette façon de simplifier les choses, comme une contribution à la paresse intellectuelle... des ultra-vérités pour la masse...
Et face à ça le silence (au moins pas sur ce blog). C'est plus que de la capitulation, puisque ne rien répliquer, c'est donner raison.
Tiens, pour finir, un conseil de lecture, ça n'a rien à voir et tout à voir, je suis tombé sur un pavé chez un bouquiniste : "Le livre noir du communisme". C'est difficile de s'endormir après.
Merci à l'acteur de ce blog et à de très nombreux contributeurs. Ca aide.
Rédigé par : Wardenclyffe | 22 janvier 2011 à 11:19
Le pire, c'est que cette censure, obtenue d'un claquement de doigt est, et de façon inquiétante, totalement contreproductive, s'agissant de la lutte contre l'antisémitisme.
Comme l'appel contre l'arrêt rendu par la cour d'assises de Paris dans l'affaire Fofana obtenu sur un coup de fil.
Cela alimente le fantasme antisémite d'une toute-puissance de la communauté juive sur les pouvoirs publics.
Quel aveuglement de la part de S. Klarsfeld dans le juste combat qu'il mène !
Rédigé par : Angaro | 22 janvier 2011 à 11:08