Il y a tant de sujets possibles aujourd'hui pour un blog, sérieux, graves, même tragiques ou badins mais riches d'enseignement que j'ai un peu honte de m'être laissé guider par le bonheur d'une opportunité dominicale.
Je suis allé voir l'exposition consacrée à Georges Brassens à la Cité de la Musique. Le commissaire en est Joann Sfar à l'évidence bien meilleur et même remarquable dans ce registre que comme cinéaste. En effet, ce qu'il nous offre est exceptionnel. L'existence de l'homme et de l'artiste Brassens, du poète et de l'être privé est détaillée grâce à une multitude d'éclairages : tableaux biographiques limpides, amours, amitiés, l'incessant travail du créateur, films, manuscrits, chansons et entretiens. Son enfance et sa jeunesse y sont notamment présentées de manière très émouvante avant que Patachou lui donne sa chance artistique à l'âge de trente ans et qu'il connaisse la formidable carrière que l'on sait d'auteur-compositeur et d'interprète, personnalité à la fois discrète, modeste, simple et adorée des Français (Le Monde, Le Figaro, Libération, Marianne 2, nouvelobs.com).
J'ai été d'autant plus surpris par les trésors de cette exposition qu'inconditionnel de ses textes et de ses musiques qui n'ont pas pris une ride - beaucoup de visiteurs fredonnaient ce que Brassens chantait -, lecteur de ses biographes, j'étais persuadé que je n'y apprendrais rien de fondamental. Quelle erreur ! Je suis ressorti enthousiasmé avec l'envie décuplée, traduite aussitôt de retour à mon domicile, de me replonger dans l'univers de Brassens qui, passant par toutes les veines de l'inspiration poétique, a su satisfaire, entre autres, les anarchistes libres et iconoclastes, les désengagés intelligents de l'Histoire, les tendres masqués, les amoureux du quotidien, les défenseurs de la faiblesse et les contempteurs de la célébrité vulgaire.
Ecoutant les chansons, tout au long de cette exposition, et constatant l'acharnement avec lequel Brassens peaufinait ses textes en fuyant la facilité, en recherchant le mot juste et la rime nécessaire, on ne peut qu'être conscient de la qualité irremplaçable de cet artiste. On ose le qualifier de génie de la variété parce que lui-même, plus que tout autre, était conscient des limites de ses exercices par rapport aux immenses poètes qu'il admirait comme, par exemple, Rimbaud et Mallarmé.
Il n'empêche qu'un gouffre sépare Georges Brassens de beaucoup de créateurs d'aujourd'hui et même de ses compagnons artistiques d'alors, notamment Charles Aznavour et Jacques Brel. Il arrive même à ceux-ci de s'abandonner à des rimes qui n'ont pas de raison profonde mais résultent de la domination de la sonorité précédente. Aujourd'hui cette licence est la règle au point que le sentiment est inspiré par le mot au lieu de le gouverner. Chez Brassens rien de tel. Impossible de trouver une faiblesse, une paresse qui feraient dire à l'auditeur qu'il y a là une scorie qu'un peu plus de travail aurait fait disparaître. Il y a une logique du thème et de son développement qui représente le terreau exclusif à partir duquel le langage se déploie, ironique, désarmant, satirique, provocant ou délicat.
Ce qui se dégage aussi de cette multitude d'aperçus sur Georges Brassens dans sa totalité, ce sont les métamorphoses de sa personnalité. En effet, une approche sommaire, voire simpliste aurait pu laisser croire à un Brassens brut, structurellement anarchiste, anti-religieux et anti-autorité, dont les phases ultérieures de sa vie n'auraient fait qu'exploiter cette base originelle. En réalité, et lui-même n'a cessé de le faire valoir dans des entretiens, sa vision a évolué, ses détestations ont été sinon dissipées du moins atténuées et il est devenu une sorte de sage "tout terrain" avec une tolérance qui résultait directement de son indifférence moqueuse à l'égard des joutes de l'immédiat. Ce qui est demeuré et qui me touche au-delà de tout, c'est son incoercible besoin de liberté, sa haine du troupeau et du grégarisme humains, sa pitié émue et jamais mièvre pour les humiliés et les petits de la vie, sa critique sarcastique des puissants contents de l'être.
Il y a des livres de chevet. Pour moi, Georges Brassens est un chanteur de chevet.
Quittant cette exposition de haute volée, je songeais à quel point l'inégalité culturelle était choquante. La mémoire et l'importance de Brassens ont été honorées. Mais quoi, par exemple, pour un Jean Anouilh ? Pas une exposition, pas un colloque, pas une émission spéciale, pas une seule grande pièce représentée ces dernières années, pas un geste ni un hommage du ministère de la Culture. Une honte quand tant sont couronnés qui ne le méritent pas. Les décrets de nos Autorités sont impénétrables.
Rien à jeter chez Georges Brassens. Rien de bon chez Jean Anouilh ?
Même les gendarmes de Brive-la-Gaillarde n'en voulaient pas à Brassens, toutes ces années après le gorille, même un magistrat lui rend hommage. Pierre-Antoine, lorsque ce n'était pas la mode fit chanter le roi des cons à des... militaires ! Quelle clairvoyance !
Ce qui prouve que les temps ont bien changé, il aimerait !
DRV.
Rédigé par : routa villanova | 24 mars 2011 à 22:20
Tu es un indécrottable janséniste, Philippe, alors qu'il y a tant de petits bonheurs à cueillir à la volée, sans honte ou retenue.
J'ai adoré ton billet; irai voir cette expo qui se tient jusqu'au mois d'août, il me semble. Ce qui m'horripile vois-tu, c'est toutes ces écoles baptisées Georges-Brassens. Parce que Georges le sétois était un esprit éminemment libertaire. L'institutionnel qui s'empare sans vergogne d'un artiste si souvent censuré et raillé de son temps montre que la versatilité obséquieuse n'est pas le monopole des sans-grade. Le nom de Brassens côtoie donc au hit-parade des établissements scolaires ceux d'assassins légaux comme Ferdinand Foch ou Lazare Hoche. Aurait-il supporté ça, notre moustachu qui ne marchait pas au pas ? Hum hum....
Enfin, je crois qu'il est très délicat de comparer Georges aux écrivains. Chanson et poésie n'obéissent pas vraiment aux mêmes règles. Le plus difficile dans la variété - mot détestable - est de générer de l'émotion avec des mots simples et une ou deux notes placées au poil. Mise en valeur façon cathédrale du silence à venir et qui donne tout son sens au son. Brassens, c'est le Thelonious Monk du chant d'expression française.
Rédigé par : scoubab00 | 23 mars 2011 à 13:14
Il y a eu à la Libération une tentative d'assassinat intellectuel de Jean Anouilh, organisée par les staliniens, qui n'avaient pas hésité à truquer le dossier.
Le but de leur manoeuvre a été de présenter Antigone comme une ode aux nazis.
Christian Millau vient de publier quelques pages talentueuses sur les malheurs de l'auteur maudit dans son 'Journal impoli' (edit. du Rocher ).
Sur un autre sujet qui nous est cher, je conseille la lecture de la page 482 du même ouvrage.
Rédigé par : yves | 22 mars 2011 à 11:37
Merci adamastor. J'ai écrit inconnu et non anonyme ce qui est le cas quand Brassens avait déniché ces paroles personne ne savait qui les avait écrites. L'auteur identifié, Brassens décida de le rencontrer, hélas Antoine Pol mourut avant ce rendez-vous. Mais vous avez rudement bien fait, cela dit, de rappeler son nom.
Rédigé par : catherine A. inconnu n'est pas anonyme mais merci... vraiment | 21 mars 2011 à 20:07
Même impression de génie total chez Brassens et Brel, avec un côté universel et intemporel là où de nombreux succès d'aujourd'hui seront totalement inécoutables dans quelques années.
Du coup je pense que je vais faire un saut pour voir cette exposition.
Rédigé par : Marc | 21 mars 2011 à 17:00
Quand j'étais instructeur à l'armée, il était de bon ton de chanter en marchant au pas.
Un jour j'ai fait défiler ma section pendant toute la durée de la formation sur l'air de cette chanson de Georges Brassens.
http://www.dailymotion.com/video/xkb8x_georges-brassens-le-roi
Il faut dire que ça "avait de la gueule" :-)
Je n'ai toujours pas compris pourquoi on me m'a pas convoqué pour me dire d'arrêter.
Peut-être qu'aucun chef n'a osé prendre le risque qu'on l'identifie.
Aujourd'hui cette chanson est toujours d'actualité. Il est toujours aussi difficile de détrôner ce roi, même avec une armada aérienne c'est dur dur...
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 21 mars 2011 à 16:03
Rédigé par : MS | 21 mars 2011 à 08:53
Pourquoi pas.
Mon email est aisément "dénichable" sur le site auquel je renvoie.
Il y aurait mille choses à conter sur ce petit périmètre, Walczak, le peu banal estaminet de mets du Sud Ouest un peu plus haut sur la rue Brancion, l'ancienne usine de salaison de la rue du Sommet des Alpes (ce nom, déjà...), et les improbables rues de l'autre côté de la petite ceinture, comme l'aménagement délicieusement foutraque de la rue Villafranca...
Juste une petite, narrée à ce fin connaisseur que semblez être.
Il est depuis le début des années 90 (de mémoire, 91 ou 92, à vérifier) une statue à l'entrée Est (côté bouquinistes) du parc Georges Brassens, bronze (?) qui glorifie les costauds charriant les lourds quartiers de barbaque.
La statue n'a pas été réalisée au hasard, elle est l'image statuaire d'un homme qui travailla en les toutes dernières boucheries encore présentes, notamment rue Fizeau.
Me demande s'il posa ou si une ou quelques photos suffirent, quoique doute fort de l'occurrence de la première possibilité.
Être arrivé si tard, au crépuscule du lieu, après tant d'à jamais anonymes collègues et laisser seul témoignage de leurs indispensables activités, mériterait en soi l'écriture d'une nouvelle.
AO
Rédigé par : oursivi@MS | 21 mars 2011 à 14:54
@Savonarole!
"Tac, poum, poum. Tac, poum, poum, c'est de la musique country française ?", s'étonnait un chanteur anglais, délicieusement moqueur...
Ah!,
c'est pour cela qu'un autre, peut-être le même, s'étonnait quand je lui décrivais la plupart du rock et du pop être de la musique militaire civile ?!
Heureusement, y'a les Vibes, ça départage...
Rédigé par : zenblabla | 21 mars 2011 à 14:54
Juste pour éclairer Catherine A. : Les passantes ne sont pas d'un inconnu mais d'Antoine POL.
Rédigé par : adamastor | 21 mars 2011 à 12:46
Quel week-end ! La France est en guerre et nos jeunes soldats sont partis; le Japon s'écroule et la mondialisation avec; les élections cantonales, reflet des résultats européens en général, nous disent le degré de désespoir de notre continent... Il me tardait de retrouver mon cabinet et ses problèmes récurrents, sur lesquels je peux penser et agir...
Rédigé par : DOMINGA | 21 mars 2011 à 12:39
Là je vous suis; mais aussi Brel, Ferré, Ferrat, Barbara... Je sais, la brochette révèle d'abord mon grand âge... Allons, j'aime aussi Sanseverino, Juliette, HFT, heuheuheu...
Rédigé par : DOMINGA | 21 mars 2011 à 12:27
Après Zemmour, Brassens !
Tempête sous un crâne ?
Allons, rien n'est perdu.
Même pour Khadhafi, sans doute en train de relire fébrilement Montesquieu dans son bunker.
Au fait comment va M. Ollier, ces temps-ci ?
Rédigé par : Clafoutis | 21 mars 2011 à 12:25
L'an passé, le centenaire de Jean Anouilh a donné lieu à nombre de manifestations, émissions ou représentations théâtrales sur l'ensemble du territoire national.
Les éditions de la Table Ronde, premier éditeur d'Antigone en 1946, ont repris, à travers dix volumes de la collection de poche La petite Vermillon, les pièces du dramaturge dont notamment ses pièces farceuses et ses pièces secrètes.
La Mairie du 1er arrondissement de Paris a rendu quelques hommages et notamment accueilli "Fables" interprétées par Laurent Cochet et ses élèves.
L'ENS de la rue d'Ulm a organisé une soirée avec Michel Bouquet...
Canal-Académie et l'Institut ont consacré, ainsi que France Inter, plusieurs émissions.
La Comédie des Champs-Elysées a réuni durant quatre mois Anny Duperey, Sara Giraudeau, Rufus, Gregori Baquet pour "Colombe"...
J'en passe...
Rédigé par : Jeanne | 21 mars 2011 à 11:33
Bonjour Philippe,
Je vous signale les versions très réussies des "sabots d'Hélène" et "le père noël et la petite fille" chantées... par une petite fille :
http://www.deezer.com/fr/#music/result/all/la%20petite%20fille%20chante%20brassens
Rédigé par : michel V | 21 mars 2011 à 10:21
"Tac, poum, poum" par le fait d'arrangements souvent minimalistes, mais jusqu'à ceux du jazz les musiciens n'ignorent pas la richesse harmonique et mélodique des compositions de Brassens.
S'agissant des textes, c'est certainement en matière de chanson le maître absolu. Pas un mot, pas une rime, pas un angle de chanson, même la plus anecdotique en apparence, qui ne soit au service du sens. Il y a du La Fontaine en Brassens. Je ne sais s'il est à ranger dans la catégorie des poètes, lui-même s'en défendait, mais on trouvera difficilement une oeuvre aussi respectueuse des exigences de l'Art poétique de Boileau.
Pour la petite histoire (Oursivi, allons boire un coup dans notre quartier !), Brassens habitait au 42 puis acheta également le 46 pour y installer son activité d'édition. Il essaya sans succès par la suite de convaincre le propriétaire du 44 d'opérer un troc. Je ne sais si c'est à ce N° 44 que l'on doit ces vers qui me semblent assez bien résumer tout le bonhomme.
"Gloire à qui n'ayant d'idéal sacro-saint
Se borne à ne pas trop emmerder ses voisins."
Rédigé par : MS | 21 mars 2011 à 08:53
P. Bilger : "Mais quoi, par exemple, pour un Jean Anouilh ? Pas une exposition, pas un colloque, pas une émission spéciale, pas une seule grande pièce représentée ces dernières années.."
_______________________________________
Mais si, mais si, Francis Perrin joue "Le Nombril" à Paris en ce moment.
Il ne faut pas désespérer, dès que le théâtre français sera libéré des blémitudes lacaniennes de Jean Vilar, on retrouvera Anouilh.
Rédigé par : Savonarole | 21 mars 2011 à 08:50
"Tac, poum, poum. Tac, poum, poum, c'est de la musique country française ?", s'étonnait un chanteur anglais, délicieusement moqueur...
On s'attendait à un Brassens au XVIIe siècle. Ses ritournelles où des gorilles pourchassent des bergères n'auraient choqué personne.
C'est le paradoxe de Brassens : il a toujours fait vieux.
Et quand il ne chantait pas, on se pinçait pour ne pas sombrer dans l'ennui. Qui se souvient de l'héroïque Jacques Chancel, tentant désespérément de lui faire dire trois mots.
On va me jeter des pierres, mais il représentait une France que je n'aime pas : bistrot-charcuterie-pinard, carrousel de cocus et cuisses légères.
C'est mince.
(En revanche, il vaut mieux l'écouter au travers de Maxime Le Forestier, qui a su gommer la jobardise j'm'en-foutiste de Brassens et lui donner un peu plus de classe qu'il n'en avait (le CD : "12 nouvelles de Brassens")...
Rédigé par : Savonarole | 21 mars 2011 à 08:12
Vous m'avez donné envie, cher Philippe, d'aller voir cette exposition.
Je me souviens quand j'avais travaillé pour lui comme "chasseur de têtes" avoir entendu Jean Bodson, homme d'affaires qui avait hérité de Bobino, me parler de son admiration pour Brassens auquel le liait un contrat purement moral.
Celui-ci, reconnaissant de l'aide qui lui avait été apporté à ses débuts, est resté fidèle à Bobino, la célébrité venue.
Il a réservé, jusqu'à l'extrême limite de ses forces, ses passages sur scène à Bobino, où il était rémunéré alors au pourcentage du remplissage de la salle sans trop se soucier de ses cachets.
Peu de célébrités se comportaient ainsi.
Rédigé par : christian dulcy | 21 mars 2011 à 08:08
Point de comparaisons : il suffit de passer
le pont pour n'avoir rien à jeter !
Un sétois à qui la mer fit préférer les
vers car en termes élégants ces choses
furent dites.
L. Ferré avait la musique dans la peau
et une certaine forme de symphonie qu'il
adaptait quelquefois avec des mots.
Rédigé par : calamity jane | 21 mars 2011 à 08:08
Merci beaucoup pour ce morceau d'ovation.
Il se passe une juste séquence de nostalgie avec Brassens.
En fin d'année dernière, de ceux à qui je disais m'étonner du peu de traces apparentes qui filtrent encore de son œuvre, car je croyais qu'il n'inspirait plus, je recevais de l'étonnement en retour.
Vous parlez de Brel, mais il y avait aussi Léo Ferré, apparenté dans la sympathie des êtres, qui lui aussi rendait un grand hommage à la poésie, à la puissance d'évocation des mots avec leurs troubles accolements.
Brassens accolait des réalités, en orthodoxe fabuliste, comme nous ne voyions pas avant que cela fût possible.
Je remercie aussi mes parents, qui m'ont traîné tout jeune à un premier concert de chansonnier, celui de Brassens dans la salle minuscule et feutrée de l'opéra de Marseille.
Je me rappelle que le gorille, que je n'avais pas compris, reçut le plus d'applaudissements...
Mais ce que j'avais perçu, c'est l'incroyable timidité de Brassens, entre chaque morceau, puis son entraînement après les premières mesures entonnées.
Le recueil complet de ses chansons qui me fut offert, traîne entre mes enfants, se vole, disparaît, réapparaît.
La semaine dernière, ma fille a relié en Italie dans le réseau facebook, un enregistrement vidéo d'une chanson de Brassens.
Je ne résiste pas à mettre ici le lien.
http://www.youtube.com/watch?v=3sAyO7o6RBo&feature=player_embedded#at=15
On y voit toute la sérénité durant le chant, puis l'incroyable regard du retombé sur terre, à la fin de la chanson.
Comment pouvait-il s'arrêter ?
Rédigé par : zenblabla | 21 mars 2011 à 03:13
Ah oui, tiens, une anecdote pour notre JPL.
Sur Brel et Brassens, justement.
Il y a une dizaine d'années, chez ce même ami breton fils adoptif de ce quinzième-là, je rencontrais un personnage assez peu banal, ayant été garde du corps dans le show-biz, il n'était pas du genre à s'étonner de la présence de telle ou telle célébrité.
Une de ses amies emménagea dans un immeuble du 14ème que fréquentait aussi pour je ne sais plus quelle raison, Brassens.
Un jour usant de l'ascenseur, dont il prenait déjà près de la moitié doté d'une masse de bien plus de cent kilos - encore - Marcel, tel est ou était son prénom, vit monter après lui, Brel et Brassens qui de fait durent épouser ses formes...
Brassens, toujours impassible, ne dit mot, mais Brel avec sa verve parfois hautaine lui lâcha.
"Comment cela Monsieur, vous êtes en étroite compagnie avec M. Georges Brassens et M. Jacques Brel, et... pas un mot, un bonjour, un regard... de quel bois êtes-vous fait ?!"
Pour toute réponse, il haussa les épaules autant que l'espace le lui permettait ; à ce qu'il nous en a dit.
AO
Rédigé par : oursivi@JPL&AP | 20 mars 2011 à 23:24
Presque tout à fait d'accord avec vous. J'admire Brassens mais j'aime tout autant Brel, puis Ferré... mais qui s'est souvenu du dixième anniversaire de la disparition de Charles Trenet le 19.02.2011? C'est autre chose bien entendu mais c'était aussi un immense artiste (même si je n'aimais pas trop son oeuvre) qui méritait plus que l'oubli. Mais qui se souvient des académiciens qui meurent? On les dit pourtant immortels!
"...e aqueles que por obras valerosas
Se vao da lei da Morte libertando
- Cantando espalharei por toda a parte
Se a tanto me ajudar o engenho e arte"
L.Camoes - Les Lusiades (1572) - chant I - 2
Rédigé par : adamastor | 20 mars 2011 à 23:19
Si, la moquette !
Il se trouve que je possède un appartement à côté de la rue Santos Dumont où me suis plusieurs fois garé ces dernières semaines.
Que, le rénovant, j'en ai changé la moquette et que ne sais pas quoi faire de l'ancienne.
Donc, du côté de Brassens, il y a la moquette à jeter.
Comme quoi, votre titre est mensonger !
Mais bon, compte tenu de la nature de notre divergence, je ne préviendrai pas le parquet, c'est déjà fait...
En ai beaucoup eu l'occasion de repenser au Georges, de ces aller et venues dans son dernier quartier, quand on y tranchait les derniers quartiers, d'ailleurs.
Un jour récent, sortant de voiture face à ces étranges maisons qui semblent plates comme des décors de ciné, j'en vins à me demander s'il habitait au 44 ou au 42 aucune plaque de quelque nature rappelant quoique ce soit, puis de là, voulus interroger les passants.
J'évitais de m'adresser aux Français trop récents ou trop jeunes qui méconnaissent totalement cet homme disparu il y a déjà trente ans - fait en soi déjà difficile à croire, voire même à penser - et choisissant afin la bonne personne, une septuagénaire à l'air vif et instruit, je pus évoquer l'homme du... 42, qu'elle croisait parfois dans le quartier. C'était il y a quinze jours, trois semaines à peine.
Un ex copain de quartier retourné dans sa Bretagne natale et revu lui aussi très récemment en ce quinzième profond - j'adore les coïncidences - m'avait justement parlé de lui lors d'un récente périple-dérive que nous y fîmes. D'un Georges fort naturellement visible et accoudé au zinc des "cents kilos" tout proches, que connaissent désormais les habitués des bouquinistes du parc.
Toutes les personnes que je qualifierais d'intéressantes respectent ou adorent cet homme, son oeuvre sa trace, cette odeur faussement bourrue et son anarchisme-populisme délicat.
"Au bois de mon coeur" n'aurait pas pu être composé par quelqu'un qui n'aurait pas compris les subtilités les plus intimes du Jazz, et plus encore, n'aurait pas trempé dans ce si particulier Jazz du Paris des années 50-60, celui que tentèrent de ressusciter Alain Gerber et ses invités lors d'une des dernières saisons de "Black and Blue", en 2004, je crois.
Quelque subtil et achevé que fût son art du trio acoustique, son étroitesse me fait confesser lui préférer Ferré et Trenet que je place au-dessus de tout ce qui se fit ici, juste devant Brassens, Brel et Gainsbourg... avons été gâtés.
Pouvoir dire que nous avons respiré le même air qu'eux et que fûmes l'esprit trempé en leurs airs intimes, vous je ne sais, mais moi, je m'en porte mieux et en partirai un jour le coeur plus léger que d'y avoir logé de cela.
AO
Rédigé par : oursivi@quandilaplusdevindansmontonneau | 20 mars 2011 à 23:02
qui, je cite de mémoire, au jeu de l'amour vaut son prix mais qui ne brille ni par le goût ni par l'esprit et qui n'opta pas pour la vieille comme l'aurait fait n'importe qui............
Même quand il emprunte à d'autres les textes qu'il chante, à Paul Fort le Petit cheval, à Hugo Gastibelza ou à un inconnu ces magnifiques Passantes, pas un mot n'est à jeter. Et surtout pas une idée. Et en pensant à votre précédent billet me revient en mémoire "la ballade des gens qui sont nés quelque part", une chanson que devrait écouter en boucle Claude Guéant. Et quelques autres.
Rédigé par : catherine A. même pas Le gorille ? | 20 mars 2011 à 19:36
"Y a pas d'musique chez Brassens" me disait mon père, fan de Tino Rossi.
En ce temps-là, sans avoir jamais fait de solfège, j'essayais de gratter la guitare en chantant. La musique de Brassens m'en faisait baver. Trois accords ne suffisaient pas.
Mon vieux Georges !
la la la la
1 2 3
Sim Sol La7 Ré Lam Si7 Mim Sim Sol Do#7 Fa# Sim Sol La7 Ré Lam Si7 Mim Sim Fa#7 Sim
Fa#7 Sim La7 Ré Si7 Mim La7 Ré Sol Fa#7 Sim La7 Ré Si7 Mim La7 Ré Sol Do Fa#7 Sim
Sim Sol La7 Ré Lam Si7 Mim Sim Sol Do#7 Fa# Sim... etc, etc, etc.
Rédigé par : bernard | 20 mars 2011 à 19:27
Ma mère, atteinte de la maladie d'Alzheimer, souriait, avant que la maladie la rende totalement absente du monde, quand l'aide soignante lui chantait du Brassens.
Je crois que je connais toutes ses chansons par cœur !
Rédigé par : DOMINIQUE | 20 mars 2011 à 19:09
Georges Brassens, enfin un qui est votre genre.
Rédigé par : Céleste | 20 mars 2011 à 18:59
Cher Philippe Bilger
Vous dites
"Impossible de trouver une faiblesse, une paresse qui feraient dire à l'auditeur qu'il y a là une scorie qu'un peu plus de travail aurait fait disparaître."
Je crois avoir trouvé une répétition inopportune, dans
Une jolie fleur dans une peau de vache:
Je lui en ai bien voulu mais à présent
J'ai plus de rancune et mon coeur lui pardonne
D'avoir mis mon coeur à feu et à sang
Pour qu'il ne puisse plus servir à personne.
@ jpledun
Je crois comme vous que les chansons de Brel marchent mieux à l'étranger, sauf en Italie peut-être.
Peut-être que les thèmes et la construction des textes sont plus faciles à traduire pour Brel que pour Brassens et Ferré. Brel lui-même a adapté des chansons étrangères (La Quête). Le jeu de scène de Brel était exceptionnel, comme vous le soulignez.
Il est plus délicat de traduire du Brassens. Fabrizio De André en Italie et Pablo Ibañez en Espagne y sont bien arrivés quand même.
Ferré, inégal mais pourtant mon préféré, est encore plus difficile à traduire.
Rédigé par : Alex paulista | 20 mars 2011 à 18:48
Brassens, Brel.
Ils sont ici très honorés á longueur d'année scolaire.
Leurs textes vivent encore et toujours.
Ils sont disséqués, analysés, débattus.
Donnez aux élèves "Voir un ami pleurer" de Brel á discuter et ils vous pondent de petites perles d'explications adaptées á leur génération.
C’est une grande joie de voir les petits autrichiens aimant á ce point la langue française.
Brassens, Brel. Il n’y a pas photo. Ici, ils sont tous les deux adorés.
Moi, vous le savez, je suis plus « brélien » par les thèmes qu’il défendait : l’amitié entre hommes, l’amour poussé á son paroxysme, la bêtise, l’hypocrisie, la mort bien sûr. L’amour.
Aussi le jeu de scène inexistant chez Brassens ne rend celui de Brel que plus flambloyant, même quand il exagère.
Je me suis toujours demandé pourquoi Brassens, avec ses textes aussi purs et puissants n'avait jamais eu la reconnaissance internationale d'un Brel.
Peut être n’en voulait-il pas. Je n'en sais rien.
Merci cher Philippe, d'alléger un peu ce dimanche guerrier. Une bien bonne bouffée d'air.
Rédigé par : jpledun | 20 mars 2011 à 16:18