Au fil de l’actualité anecdotique qui ne semble pas digne d’occuper une place de choix dans les médias si ce n’est dans les marges, presque invisible sauf pour des lecteurs persuadés que se nichent là souvent les ridicules ou les bizarreries de notre société, j’ai relevé quelques épisodes qui ne manquent pas d’intérêt.
Il y a une farfelue dont j’ai oublié le nom, qui participant à un débat, a proposé très sérieusement que l’importance de l’art soit inscrite dans notre Constitution. Pourquoi s’arrêter là ? Dans notre texte fondamental, on pourrait mettre à l’honneur aussi l’importance de la cuisine, l’utilité du vélo, le bonheur de la lecture, la nécessité de faire de l’exercice et tant d’autres activités qui mériteraient d’être rappelées aux citoyens même si à l’évidence elles se rapportent à leur vie privée et à leur liberté personnelle ! Comment peut-on croire que l’art deviendrait un authentique besoin pour tous parce qu’il serait décrété comme dogme officiel ? C’est aberrant.
Un député UMP n’est pas en reste, qui va déposer une proposition de loi pour que les jurés, demain dans les tribunaux correctionnels et aussi sans doute aux assises, disposent d’un soutien psychologique comme s’il fallait craindre leur effondrement dans l’exercice de ces missions. On n’avait déjà que trop tendance, devant n’importe quelle tragédie, à prévoir une aide psychologique avant même la moindre tentative d’élucidation des faits. Cette initiative parlementaire va dépouiller encore davantage le citoyen de l’honneur d’être soi et d’assumer seul les devoirs et les grandeurs de sa mission. On pourrait peut-être dès la naissance nous faire assister par « une cellule de soutien » qui viendrait consoler nos parents de l’être et nous-mêmes d’être venus au monde !
Dans un tout autre registre, on apprend que les CRS sont en révolte, non pour des motifs de fond mais parce qu’on a décidé de supprimer le vin ou la bière sur leurs plateaux repas. Cette mesure aurait dû être prise depuis longtemps. Il est évident que sur le plan professionnel on ne peut pas faciliter la moindre absorption d’alcool, surtout par les forces d’ordre et d’autorité. Il ne me viendrait pas à l’idée, alors que je ne dédaigne pas la sensualité de l’existence, de boire du vin lors de mes sessions d’assises. Il y a une forme d’ascétisme relatif qui est évidemment corrélatif à la maîtrise de soi, de ses propos et de ses actes.
Enfin, et c’est une démarche qui doit être encouragée, François Korber, un ancien condamné qui s’était déjà battu victorieusement pour imposer un tarif unique raisonnable de location des télévisions dans les établissements pénitentiaires (alors que des disparités choquantes existaient), poursuit son offensive pour sortir le « cantinage » du désordre et de l’exploitation. En effet, on est effaré devant les écarts scandaleux qui affectent les mêmes produits de première nécessité dans un monde pénitentiaire qu’on n’hésite pas à pressurer avec bonne conscience. Il n’est pas tolérable que la prison soit une rente pour certaines personnes sans scrupules et qu’elle fasse subir des injustices qui s’ajoutent à la privation de liberté. J’aime que cette lutte soit menée par un ancien détenu qui n’oublie pas, mais pour le meilleur, l’enfermement qui a été le sien.
On a le choix. Du puéril, du stupide à l’estimable, que de dérisions, que d’enthousiasmes possibles (Le Figaro, Le Parisien) !
Cher avocat général,
Si on inscrivait l 'importance de l' Art dans la Constitution , il aurait été inutile d'y inscrire des inepties comme récemment ! Faites glisser votre billet à JJ Aillagon pour voir ce qu'il en pense ....
Rédigé par : padraig | 26 avril 2011 à 12:16
"On a le choix. Du puéril, du stupide à l'estimable, que de dérisions, que d'enthousiasmes possibles!"
Comment ne pas éprouver une intense émotion lors du dernier lancement de la navette Endeavour vendredi prochain au Centre spatial Kennedy en Floride? Comment ne pas partager la joie de Gabrielle Giffords venue saluer son mari Mark Kelly, le commandant de la mission?
Grièvement blessée lors de l'attentat dont elle était la cible devant un Safeway de Tucson début janvier, la représentante du Congrès a survécu à une plaie céphalique causée par un projectile de 9mm tiré presque à bout portant et endommageant durant son trajet antéro-postérieur toute la partie haute de l'hémisphère cérébral gauche.
Certes, elle ne sera jamais plus la Gabby d'avant et gardera probablement de lourdes séquelles. Mais les progrès accomplis par la neurochirurgie et la rééducation psychomotrice durant la dernière décennie ont de quoi susciter l'enthousiasme.
Rédigé par : Stenaisien | 25 avril 2011 à 08:05
Moi je demande un soutien psychologique sur ce blog. Les autres commentateurs sont trop méchants avec moi.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 25 avril 2011 à 01:12
Et puis quoi encore ? Tant qu'on y est, exigeons que les chirurgiens soient sobres ! Et la convivialité au bloc, alors ? Vous croyez qu'on peut raisonnablement se taper une tumeur sans avaler un gorgeon au préalable ? Et les pilotes d'avion ? Un petit godet au décollage, on l'a constaté, facilite l’ascension de l'appareil et la convivialité dans le cockpit. Gaffe à la cachaça brésilienne en revenant de Rio, ça faciliterait plutôt la descente.
J'ai noté la qualité de l'argumentation d'un syndicat de police : "Il n'y a pas plus de problème d'alcoolisme chez les CRS qu'ailleurs". Ah, ben nous voilà rassurés : pétés comme tout le monde, pas plus ! Le gus détient une matraque, des tasers, des bombes lacrymogènes mais il n'est pas plus alcoolique qu'un autre !
Bon, le système de la cantine en prison n'est rien d'autre qu'un racket, il faut dire les mots. Tout le monde en croque au passage, la corruption est générale, mais chut, il faut sauvegarder le pouvoir d'achat des fonctionnaires mal payés par ailleurs. Il faut savoir ce que l'on veut : du déficit budgétaire ou de la corruption. L'administration pénitentiaire a sagement choisi la deuxième voie, beaucoup plus sûre, jamais décevante. Les produits vendus sont parfois des choses introuvables dans le commerce ordinaire, des marques que personne ne connaît, des trucs immangeables non autorisés ailleurs. Et les familles se font plumer.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 25 avril 2011 à 01:09
@ Yannick
Dans toutes les entreprises du monde, lorsqu'il y a une cantine, l'alcool n'y est pas présent.
Pour autant, exceptionnellement, il n'y a pas de scandale à aller déjeuner au bistrot avec les collègues et ouvrir une bouteille pour, par exemple, célébrer un événement.
Mais si j'applique la situation à mon métier de consultant technique pour les banques, je ne me vois pas boire avant une intervention sur le système en fonctionnement, et encore moins proposer de l'alcool sur les plateaux-repas de mes employés à la cantine de l'entreprise. En revanche, le soir après un "go-live" réussi, j'offre ma tournée de caïpis et petiscos au bar branché le plus proche...
Plus généralement, je vous rappelle que les chauffeurs de bus et taxis sont strictement contrôlés... par des policiers.
Il faudrait donc cesser de distribuer de l'alcool à ces policiers, surtout avant une opération, et interdire la présence de l'alcool sur le lieu de travail.
Quant à organiser des contrôles, même si les éthylotests sont disponibles, je les imagine difficilement à part pour voir jusqu'où l'appareil peut aller...
Rédigé par : Alex paulista | 24 avril 2011 à 21:37
Vous n'y êtes pas du tout.
La prochaine étape sera d'interdire le porc à la cantine pour les CRS.
Car recevoir un coup de matraque d'un infidèle impur deviendra plaidable devant les tribunaux.
Rédigé par : Savonarole | 24 avril 2011 à 19:24
@Tairusu
Si vous le dites... Il est vrai qu’en créant le besoin, on crée aussi des emplois.
Rédigé par : Achille | 24 avril 2011 à 19:20
Boire un verre de vin avant une session d'assises ne me paraîtrait altérer en rien votre discernement et votre droiture par rapport au métier que vous exercez. Il apparaît évident que boire une bière entre midi et deux n'affecte en rien la maîtrise de soi, les propos que l'on peut tenir ou les actes que l'on peut faire. "Un ascétisme relatif" dites-vous, dans ce cas-là, on interdit de boire de l'alcool en EXCÈS. Là c'est relatif. L'interdire de manière absolue c'est de l'ascétisme absolue.
Bref vos arguments ne sont pas du tout convaincants. Il est vrai que votre thèse est difficile à défendre.
Rédigé par : Yannick | 24 avril 2011 à 10:20
« Dans un tout autre registre, on apprend que les CRS sont en révolte, non pour des motifs de fond mais parce qu’on a décidé de supprimer le vin ou la bière sur leurs plateaux repas. »
Il y a des revendications qui, comme celle-ci, peuvent paraître puériles, mais qui sont l’expression d’un sentiment d’exaspération face à des mesures vexatoires, voire injustifiées.
Laisse-t-on entendre par cette décision que nos CRS ne sont pas capables de bien se tenir à table? Déjà que leur boulot n’est pas vraiment marrant, alors que Claude Guéant leur laisse leur petit quart de rouge et leur demi de bière. Il sera toujours temps de s’occuper au cas par cas de ceux qui ne sont pas raisonnables.
Rédigé par : Achille | 24 avril 2011 à 07:42
Ouais ! et ben, je vais demander une cellule
de consultation psychologique pour la vie
que je n'ai pas connue et que mes parents
ne pourront me raconter (enfin quand on en
a eu) et aussi des fois que cette vie-ci soit
la dernière et surtout pour éviter de
revenir polluer; j'espère avoir fini le
cycle des retours ...superbe oeuvre d'art
n'est-il pas ?
Quant'aux braves républicains, je leur
propose de reprendre le gourdin avec
réservoir de picrate !
Bonnes Pâques Monsieur Korber sur le balcon
du succès.
Rédigé par : calamity jane | 23 avril 2011 à 22:21
Achille, quel stéréotype, renseignez-vous un peu avant de dire de telles choses. C'est faux, il y a largement assez de travail pour tous les gens ayant fait psycho.
Rédigé par : Tairusu | 23 avril 2011 à 19:35
Vous avez oublié la demande d'associations étudiantes soutenues par les lobbies du vin d'inscrire au menu des repas du CROUS des pichets de rouge. Après la petite chronique est drôle pour révéler l'absurdité d'une société.
Rédigé par : SR | 23 avril 2011 à 19:31
« Un député UMP n’est pas en reste, qui va déposer une proposition de loi pour que les jurés, demain dans les tribunaux correctionnels et aussi sans doute aux assises, disposent d’un soutien psychologique. »
Il est vrai que les cellules psychologiques connaissent un grand succès depuis quelque temps.
Il faut bien trouver du travail à ceux qui ont fait « psycho » qui sont généralement avec ceux qui ont fait « socio » les cancres des universités de Paris et d’ailleurs. Enfin une occasion se trouver des débouchés à cette filière qui généralement conduit directement à la case Pôle emploi.
Rédigé par : Achille | 23 avril 2011 à 18:24
"On pourrait peut-être dès la naissance nous faire assister par « une cellule de soutien » qui viendrait consoler nos parents de l’être et nous-mêmes d’être venus au monde !"
Vous plaisantez, Philippe, mais la complexité grandissante de notre société pourrait bien, un jour, conduire à des aberrations de ce genre.
Après tout, n'est-ce pas, mutatis mutandis, ce qui se passe lorsqu'on nous vante les mérites d'un biscuit en nous avertissant des dangers d'en manger, du vin en nous recommandant d'en boire très peu ou qu'on nous vend des cigarettes après avoir orné les paquets qui les contiennent d'images repoussantes destinées, paraît-il, à nous dissuader de fumer ? Jusqu'où ira cette prise en charge infantilisante ?
Quant à ce que Cioran appelait "l'inconvénient d'être né", l'arrêt Perruche et la loi anti-arrêt Perruche, dont feu mon frère a eu à s'occuper il y a quelques années (*), sont là pour montrer que tout est possible.
(*) "Du droit de ne pas naître. A propos de l'affaire Perruche." Olivier Cayla et Yan Thomas, Gallimard, 2002.
Rédigé par : Frank THOMAS | 23 avril 2011 à 18:16
Bonjour Philippe Bilger,
« Il y a une farfelue dont j’ai oublié le nom, qui participant à un débat, a proposé très sérieusement que l’importance de l’art soit inscrite dans notre Constitution. »
On pourrait aussi inscrire dans la Constitution l’importance de ne pas sortir des âneries, je pense que ce serait bien plus utile.
Rédigé par : Achille | 23 avril 2011 à 17:44
Sur les cellules psychologiques, j'ai une anecdote. Dans un vol Paris-Londres, un collègue s'est retrouvé dans un appareil dont le train d'atterrissage était bloqué. L'avion est allé vider ses réservoirs au loin, puis a atterri sans train d'atterrissage avec quelques dommages. Les pompiers et les ambulances attendaient.
Mon collègue, qui avait déjà accumulé deux heures de retard pour une réunion critique avec le client dans un contexte conflictuel, n'arrivait pas à se défaire des psychologues qui voulaient le contenir un moment dans la "cellule psychologique". Il a dû insister et leur dire avec humour d'attendre son retour de la réunion pour le consoler pour qu'ils le laissent partir.
Rédigé par : Alex paulista | 23 avril 2011 à 15:06
Aucun inconvénient à ce que les policiers et CRS boivent de la bière ou du vin au repas du moment qu'ils subissent un alcootest systématique avant d'aller bosser, et d'autant plus s'ils prennent le volant.
La mesure aurait été plus efficace et moins hypocrite.
Rédigé par : Patrick Handicap expatrie | 23 avril 2011 à 13:11
Vous aurez mal lu la proposition du Parlementaire : le soutien psychologique est plutôt destiné aux magistrats :)
Rédigé par : JJJ | 23 avril 2011 à 12:38
Et si on revenait à des fondamentaux comme celui de considérer les Français comme des adultes !
Et si comme avait déclaré un jour Georges Pompidou "arrêtez un peu d'emm... les Français" on commençait à y réfléchir vraiment !
Joyeuses Pâques à tous et mangez du chocolat c'est bon pour le moral.
Rédigé par : Jabiru | 23 avril 2011 à 12:30