Cet Etat est à contre-emploi comme un acteur qui ne serait pas fait pour le rôle.
Je ne parle pas de l'application dans l'urgence de la réforme de la garde à vue qui, pour l'instant, ne satisfait entièrement que les suspects et leurs avocats.
Non, je fais allusion à l'incroyable décision de supprimer le classement de sortie à l'ENA. En effet, le Parlement l'a votée le 14 avril mais les sénateurs socialistes ont heureusement saisi le Conseil constitutionnel.
C'est le monde renversé et l'inversion des valeurs. Ce Pouvoir qui en 2007 vantait le travail, le mérite, la compétence, les principes structurant une société autour de l'essentiel et de l'honorable semble s'être engagé avec un malin plaisir à déjouer les pronostics et à surprendre, mais dans le mauvais sens. Discrédit de la culture générale, recul grave des humanités, instrumentalisation de l'Histoire, marchandisation de ce qui précisément ne devait pas avoir de prix, mépris affiché pour les professions du savoir et de l'autorité. Il ne convenait pas de lire La Princesse de Clèves. Mais Le Figaro, trois jours de suite, a estimé capital de nous apprendre que le président de la République avait lu un livre et des déjeuners sont organisés à l'Elysée pour que les convives soient informés de la passion qu'éprouve Nicolas Sarkozy pour Céline. Comprenne qui pourra.
On aurait pu concevoir que, comme hier, la gauche ayant gagné sur le plan culturel avec son culte des égalités abstraites contre les évidences de la vie et les inégalités des natures et des talents, la droite s'était ingéniée à la suivre et à quémander une approbation qui ne lui était d'ailleurs jamais consentie. Mais en l'occurrence c'est la gauche qui rappelle à la droite ce qu'elle n'aurait jamais dû oublier. Les fronts se sont déplacés et l'idéologie de la facilité n'est plus là où on avait coutume de la dénoncer. Les sénateurs socialistes, en effet, ont saisi le Conseil constitutionnel en fondant leur requête sur la violation du principe d'égalité en matière d'accession aux postes de la fonction publique, transgression qui, pour parler net, va évidemment favoriser "le copinage". On aboutira à ce paradoxe que la gauche, le Conseil constitutionnel y mettant du sien, pourrait empêcher la droite de mettre en oeuvre un processus si contraire à son esprit profond et la contraindre à une cohérence aujourd'hui négligée. Cette configuration manifeste comme notre champ démocratique est bouleversé, nos repères disparus et l'horizon brouillé.
Les sénateurs socialistes ne sont pas seuls dans leur combat puisque la Présidente de l'Association des anciens élèves de l'ENA, Christine Demesse, partage leur crainte.
Pourquoi donc cet Etat scie-t-il sans cesse la branche sur laquelle il fondait son pouvoir et son influence ? Pourquoi cette extravagante manie de déjouer avec constance les pronostics en accomplissant le contraire de ce que sa logique et son intérêt devraient le conduire à opérer ? Quelle étrange tentation le pousse à réformer mais surtout ce qui ne méritait pas de l'être ? Comment admettre que ce Pouvoir avec sa conception intégriste de la sécurité et de la justice puisse aussi aisément, et en même temps, se trahir sur d'autres plans ?
En réalité, ces interrogations sont de pure forme parce que la réponse est connue. On n'est pas habitué en République à chercher des raisons personnelles pour justifier des choix politiques. Pourtant, il faut toujours écouter avec beaucoup d'attention le président de la République. Dans ses propos il nous dit tout sur lui et sur ce qui l'inspire et qu'il inspire. Que ce soit pour la Justice, à l'égard des magistrats, ou sur d'autres thèmes comme celui de l'ENA par exemple. Il est présent dans ce qui est advenu et qui adviendra peut-être. Le Parlement vote mais, derrière, le président se laisse deviner à chaque fois avec sa subjectivité, ses humeurs, ses envies, ses regrets, voire ses frustrations.
Tendons l'oreille. Nicolas Sarkozy a déclaré: "Ce qui est choquant dans le classement de sortie de l'ENA, c'est le fait qu'un concours passé à 25 ans oriente toute la vie professionnelle" ou encore "Les grandes écoles ce n'est pas réservé à quelques initiés, à quelques enfants de la grande bourgeoisie" (nouvelobs.com).
D'aucuns ont déjà souligné le caractère "démagogique" de ces pensées d'autant plus que, même le classement de sortie aboli, les disparités de la formation et de la scolarité, les inégalités culturelles, les supériorités intimes ne manqueront pas d'avoir leurs effets.
Mais je veux rester concentré sur les dires présidentiels. On y entend la petite musique aigre de la jalousie, l'aveu, peut-être, d'une nostalgie, en tout cas le désarroi de quelqu'un qui préfère casser un jouet plutôt que l'imaginer en possession d'autres que lui. Il y a quelque chose, dans ces apparentes observations de bon sens, qui renvoie aux jeunes héros amers d'Anouilh sauf que Nicolas Sarkozy n'a jamais connu une misérable enfance contre laquelle il faut toujours prendre une revanche. Dans cette suppression du classement de sortie de l'ENA, on perçoit l'extrême difficulté du président à se situer au-delà de ses sentiments intimes, au service des hautes institutions et administrations qui honorent notre pays, alors qu'au contraire il se consacre tout entier à ce qu'il aurait voulu, à ce qu'il n'a pas eu, à ses espoirs brisés, à sa jouissance de compenser, dans certains domaines, ses déceptions par l'exercice d'un pouvoir présidentiel qui détruit ou affaiblit ce qu'il n'a pas obtenu et que de ce fait il déteste ou tourne en dérision.
Il est encore temps, pour le Pouvoir, de jouer la partition qui lui va le mieux. C'est bien de surprendre mais il ne faut pas en abuser.
ENA, dieu que cet acronyme me hérisse le poil.
Ce n'est pas le classement de sortie de l'ENA qu'il faut supprimer mais l'ENA elle-même et il y a urgence. Les gens qui en sortent ne sont pour la quasi totalité d'entre eux que des carriéristes n'ayant jamais réellement travaillé de leur vie et qui viennent vous en remontrer et vous expliquer ce qu'est le travail.
Qu'on ne vienne pas me dire le contraire, j'ai des dizaines d'exemples concrets à fournir.
Virez-moi tous ces hauts fonctionnaires qui nous coûtent la peau des fesses pour si peu d'efficacité. Le dégraissage de l'administration devrait commencer par eux.
On a malheureusement peu de chance de voir une telle chose vu que ce sont eux qui mettent en œuvre la chose.
Qu'on en profite également pour virer tous les 70/2 qui après avoir une retraite de colonel viennent EN PLUS chercher un salaire d'administrateur civil où il passent leur temps à faire les beaux, alors même que des milliers de fonctionnaires travaillent avec des salaires bien souvent ridicules.
Il paraît que la révolution a eu lieu dans les années 1789 contre les aristocrates. Je pense sincèrement qu'on peut recommencer avec ceux-là.
Foi de Surcouf, qu'on les branche haut et court sur la plus haute vergue du navire. Réhabilitons la lanterne.
Rédigé par : Surcouf très en colère | 26 avril 2011 à 20:10
@aargh27
Je veux bien admettre vos explications. Mais dans ce cas il vaut mieux éviter de ramener le forfait de 300€ pour 24 heures de garde à vue au coût horaire comme pour un travailleur à la chaîne. Cela n’a pas de sens.
Rédigé par : Achille | 20 avril 2011 à 19:17
@ Achille
Pensez-vous vraiment que la durée légale du travail puisse trouver application pour une profession libérale ? Je vous donne la réponse, dans le doute : non. Pour en revenir à l'assistance lors d'une garde à vue, sachez qu'il y a plusieurs auditions en 24 heures. Il ne sert à rien à l'avocat de partir vers son cabinet, s'y installer dix minutes pour revenir au commissariat... Il est évident que sa présence sera quasi permanente tout le long de la mesure, avec d'autant plus de certitude que l'avocat ne sera pas appelé pour une seule garde à vue mais pour plusieurs prévenus, qu'il assistera par conséquent en alternance. Quant à parler de réévaluation des honoraires dus à la commission d'office (comme si les avocats étaient obnubilés par l'enrichissement alors que l'aide juridictionnelle, qu'ils acceptent, leur cause bien des difficultés), c'est rigolo : précisons qu'ils ne l'ont pas été depuis 1991 et que, à cette époque, ils avaient été fixés en deçà du prix de revient d'un cabinet ; ce que la Chancellerie savait parfaitement du reste. M. Achille, votre salaire, il a été indexé depuis 1991, j'imagine ?
Rédigé par : aargh27 | 20 avril 2011 à 17:25
@Mussipont
Ah parce que vous travaillez 24h d’affilée lors d’une garde à vue ? Ce n’est pas très légal ça...
Rédigé par : Achille | 20 avril 2011 à 14:04
La suppression du classement est excellente. Elle est la voie à un recrutement en fonction des intérêts des services et surtout atténue considérablement les notes de stage dont chacun sait qu'elle profite aux enfants de...
Je ne comprends pas ce conservatisme ambiant (maintien du système du classement). Les institutions doivent évoluer avec leur temps. Les grandes écoles nationales étrangères qui forment les fonctionnaires ont depuis longtemps emprunté cette voie. S'il s'avère que ce n'est pas mieux, même plus problématique, alors le législateur si prompt à voter des lois, pourra revenir en arrière. Voyons et tirons en le bilan d'ici 5 ans.
Rédigé par : Pascal JAN | 19 avril 2011 à 18:33
@ Achille : le ministère de la Justice propose aux avocats un forfait de 300h pour 24 heures de GAV. Ca fait 12,5 € de l'heure.
J'ai connu de meilleurs moyens de s'enrichir.
Rédigé par : twitter.com/Mussipont | 19 avril 2011 à 13:56
« Je ne parle pas de l'application dans l'urgence de la réforme de la garde à vue qui, pour l'instant, ne satisfait entièrement que les suspects et leurs avocats. »
Merci à ce magistrat, gardien des libertés individuelles : merci de nous rappeler quel est réellement son rapport à la présomption d'innocence et aux droits de la défense. Tous les Patrick Dils de France vous en remercient.
C'est le même magistrat qui applaudissait des deux mains le "courage" de Rachida Dati lorsqu'elle répondait à un innocent en détention préventive: « Tenez-vous à carreau, et vous serez chez vous, libre, avec une chambre et des toilettes séparées. La prison, ce n'est pas l'hôtel. »
Les Alain Marécaux des prisons françaises apprécieront. Lui qui avait été libéré au bout de 98 jours de grève de la faim, trois séjours en hôpital psychiatriques et de multiples tentatives de suicide, uniquement parce que sa vie était en jeu (il ne pouvait même plus bouger ses jambes, d'après son témoignage devant la commission d'enquête parlementaire).
De toute évidence, il ne manquait plus que le magistrat Bilger à Outreau.
Merci encore : il faudrait que plus de magistrats prennent l'habitude de s'exprimer publiquement comme vous le faites. Que le peuple sache réellement qui est assis dans ses prétoires.
Rédigé par : Vivian | 19 avril 2011 à 13:18
Cher Monsieur,
En plus de mon commentaire précédent, j'aimerais ajouter mon constat (un peu hors sujet, je le concède). J'en reviens à la politique de M. Sarkozy (bonne ou mauvaise, ceci n'étant pas mon propos). Je persiste et signe. Soit les personnes qui l'ont élu sont dénuées de bon sens soit elles se sentent aujourd'hui trahies. Mais la chose qui me tracasse beaucoup plus fortement est le fait que l'électorat bien-pensant de gauche revendique fortement la démocratie mais, hélas, n'en profite pas pour assumer son DEVOIR (non pas droit) de vote ! J'en veux pour preuve l'effet "Jospin" et son absence au second tour lors de l'élection présidentielle, durant laquelle le FN avait atteint le second tour ! Etait-ce simplement le manque de charisme de celui-ci ou le fait que les votants du PS préfèrent trop souvent, hélas, aller au parc avec les enfants plutôt que remplir leur devoir de citoyen, en se disant on ira voter au second tour... La gauche critique, souvent de manière justifiée, mais ne serait-il pas bon de faire le ménage "à la maison" (je n'ose même pas parler des primaires du PS !) avant de s'occuper du nettoyage de l'Elysée ? Bien à vous. J Guilloret.
Rédigé par : Josselin Guilloret | 19 avril 2011 à 13:09
En voilà une belle erreur de casting !
http://www.marianne2.fr/blogsecretdefense/
Depuis quand les informations touchant à l'envoi des forces spéciales relèvent-elles de guignol ?
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 19 avril 2011 à 10:46
« Je ne parle pas de l'application dans l'urgence de la réforme de la garde à vue qui, pour l'instant, ne satisfait entièrement que les suspects et leurs avocats. » ,
Il est quand même curieux qu’une mesure qui existe dans tous les pays de l’Union Européenne et aux Etats-Unis, pose problème chez nous. Encore une exception française sans doute.
A noter que les avocats n’ont pas raté l’occasion de demander une réévaluation de leurs honoraires. Il n’y a pas de petits profits...
Rédigé par : Achille | 19 avril 2011 à 07:46
Bon ou mauvais, on tire toujours sur ce qui est en haut...
Rédigé par : Alex paulista | 19 avril 2011 à 00:35
Et si tout simplement sous ce pouvoir de subjuguer existait une médiocrité d'être.
Rédigé par : phineus | 18 avril 2011 à 20:01
Cher Monsieur,
Comme souvent vous faites mouche ! Certains vous reprochent parfois d'être trop à droite, certains vont maintenant vous reprocher d'être trop à gauche ! Comme si l'amour de la vérité avait un bord politique !
Par contre, ne méprisez pas les votants (nous sommes, hélas, suffisamment rares!). M. Sarkozy a été élu. Si sa politique ne plaît pas (plus ?), il ne tient qu'à nous pour ceci cesse !
Rédigé par : Josselin Guilloret | 18 avril 2011 à 18:19
Les défenseurs de la suppression du classement de sortie de l'ENA ne voient guère plus loin que le bout de leur nez. L'ENA est une école spécifique dont l'enjeu est l'impartialité de la haute fonction publique.
Que se passera-t-il donc après la suppression du classement ?
L'inspection des finances, qui recrutait les mieux classés, continuera à choisir ses candidats non plus sur le classement de sortie, mais sur les résultats de la scolarité. Cela revient donc au même, le classement étant effectué par les recruteurs. Sauf que, l'inspection des finances ou le Conseil d'Etat pourront se voir "fermement proposer" un candidat à la génétique plus flatteuse que les résultats. On continuera donc avec le classement de sortie mais sans la protection règlementaire que celui-ci représentait contre le piston. Et c'est ainsi que Mohammed sera évincé au profit d'un jeune héritier protégé. Mohammed et ses brillants résultats se consolera généreusement ailleurs mais l'administration aura sacrifié le meilleur au plus malin. L'énarque de gauche sera écarté sous un gouvernement de droite, l'énarque de droite sera écarté sous un gouvernement de gauche : c'est l'impartialité de l'Etat à son plus haut niveau qui est menacé sous couvert d'un alignement sur les pratiques du secteur privé.
Pour autant, le régime joue sur du velours : les énarques sont passés maîtres dans l'art de se faire détester et cette fabrique d'aristocrates déplaît à l'égalitarisme jaloux de tous ceux qui, ne pouvant obtenir le pouvoir, se réjouissent qu'on le supprime aux autres. C'est très facile de taper sur l'ENA et tellement populaire. Démagogie et cynisme font bon ménage.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 18 avril 2011 à 18:18
En plus des explications que vous avez évoquées, il y a d'autres raisons d'origine plus politique. En effet, nous savons tous que le président est en campagne pour 2012. Il aime tant le pouvoir qu'il est prêt à dire et faire tout et n'importe quoi, plutôt que de défendre des idées précises et de s'y tenir. Lors de sa précédente campagne, il mettait en avant la culture, etc. car c'est ce que les Français attendaient. Aujourd'hui, on lui reproche d'être le "président des riches", le "président bling-bling". Un nouveau terme politique est apparu : "la prolophobie". Or même si l'admettre fait mal au cœur de bien des gens, la culture est associée à l'argent. Alors pour se faire bien voir en vue des élections et pour prouver qu'il ne soutient pas que les riches bourgeois descendant de Rothschild, il s'en prend aux énarques.
Rédigé par : Morgane | 18 avril 2011 à 14:31
Politique-fiction : dans une société idéale
les sortants de l'école nationale d'administration pourraient être les meilleurs
conseillers d'un président choisi par sa
capacité à être diplomate et à savoir
rassembler le peuple de son pays !
Il est pratiquement impossible de demander
ou même de supposer cette capacité aux
élèves des grandes écoles (sauf exceptions)
ils-elles sont gonflé-e-s à l'hélium et
si la raison n'est pas le décalage social
ces écoles se chargent de leur inculquer
le virus de l'hélium.
Mais, partout des rebelles (dans le sens
littéraire de ce terme afin d'éviter que
ne soit compris que le sens politico-historique) savent pointer certaines incohérences
et qui peuvent nous aider à penser les
choses autrement et non "pour ou contre".
Rédigé par : calamity jane | 18 avril 2011 à 14:05
Suppression du classement de sortie de l'ENA ? Mention bien. Suppression du classement d'entrée de l'ENA ? Mention très bien. Suppression pure et simple de l'ENA ? Ahhh c'est beaucoup mieux ! La création de cette école allait de soi dans le contexte brouillé de l'immédiat après-guerre. Cela n'a servi à terme qu'à créer une "race" de nantis auto-suffisants à compétence très variable. A l'heure d'un rééquilibrage du pays en faveur des régions et d'une agglomération parisienne de plus en plus pachydermique, aux artères proches de l'embolie, l'ENA devrait rendre son tablier. Pour l'Etat endetté, une ligne de dépense en moins. Et pour les classes non-privilégiées, un espoir accru d'accès à des postes publics de haut niveau. Espoir ou chimère ? Ici, décidément, toujours cette culture détestable du tout-diplôme.
Rédigé par : scoubab00 | 18 avril 2011 à 12:45
Comme toujours avec l'ENA - cette école suscite décidément bien des passions! - le débat part dans tous les sens, au risque d'aboutir au n'importe quoi. Je crois une mise au point nécessaire:
Le "classement de sortie" aboutit à ce que les élèves choisissent leur poste (et donc des métiers très différents : inspecteur, magistrat, diplomate, préfet, administrateur) en fonction de leurs notes et non de leurs goûts, compétences et parcours passés ; et que les administrations n'aient pas leur mot à dire dans la sélection des jeunes (et moins jeunes) gens qui vont les rejoindre. C'est un peu archaïque, même si c'est peut-être "le pire système, à l'exception de tous les autres."
La fin de ce classement de sortie était demandée par les élèves eux-mêmes. Elle est cohérente, me semble-t-il, avec les efforts de modernisation de l'administration : il ne me semble pas absurde que les administrations recrutent elles-mêmes, parmi un vivier de candidats pré-sélectionnés, ceux qui semblent correspondre le mieux, de par leurs compétences, leurs goûts, leur personnalité, etc. aux besoins desdites administrations. Cela correspond à ce qui se fait dans le privé en matière de recrutement.
Le problème qui se pose est double :
1) Les postes proposés à la sortie de l'ENA demeurent les mêmes. Demeurera donc la dualité entre les Grands Corps et les autres postes, qui ne laisse pas d'être problématique.
2) Toutes les garanties sur la transparence et l'équité du nouveau système d'affectation des postes ne semblent pas avoir été données. Dussent-elles l'être, il faut bien admettre qu'un recrutement de ce genre sera toujours plus arbitraire qu'un bon vieux classement, puisque l'objectivité de la note disparaît au profit d'appréciations plus subjectives sur la personnalité du candidat.
Rédigé par : Yeurl | 18 avril 2011 à 12:17
Supprimer le classement de sortie de l'ENA est une aberration antirépublicaine quand tous nos concours sont classés à l'heure où celle-ci préfère se faire appeler: «Ecole européenne de gouvernance»... Que souhaiteront nos majors de promo méritants quand leur choix sera dicté par le pouvoir exécutif en charge par cooptation de copinages politiciens qui démarreront au concours d'entrée ? Les régaliens sortants majors ; postulant pour le conseil constitutionnel, l'Inspection générale des finances et la Cour des comptes n'auront pas même ce choix ! Une « sarkozette de plus » dirait Badinter ; parmi 200 autres dont la limitation de l'action du rapporteur public dans les tribunaux administratifs (146 bis) et l'article 54 concernant la lutte contre le travail au « schwartz ». Néanmoins les écoles de management ne manquent pas en Europe ! Quand je constate le coût de 6000 euros facturés d'une session, ou bien 1000 euros la demi-journée de coaching à l'ENA !
Le népotisme de l'exécutif est un fait de Notre Seigneurie, lui qui prône à tout va la méritocratie, elle se voit ainsi annihilée par son discours démagogique du 11 janvier dernier !
Sur la réforme; il est nécessaire de supprimer les nominations des commis de l'Etat, ainsi que notamment le corps préfectoral et les préfectures qui n'a plus aucun sens à l'heure où la régionalisation a son assemblée d'élus locaux en son conseil où l'expression démocratique s'affirme contrairement à ces corps dictatoriaux nommés en Conseil des ministres par décret du président de la République sur proposition du Premier ministre et du ministre de l'intérieur. Le maire de la Faute-sur-Mer est en garde à vue; le préfet qui contrôle les plans d'occupation des sols et des permis de construire devrait également s'y trouver....
La réforme de la territorialité et des collectivités n'a pas d'autre but que de supprimer la représentation élue locale au profit de pouvoirs discriminatoires en gelant pendant trois ans les dotations de l'Etat ; après la suppression de la taxe professionnelle, et la loi de finance qui nous coûtera la bagatelle de 7milliards d'euros ! Ce n'est évidemment pas la bonne manière de réduire les déficits abyssaux !
La disparition des services publics est en marche forcée et ce n'est pas en remplaçant 1 fonctionnaire sur 2 que la France ira mieux. Là où il serait nécessaire d'en embaucher 2 sur certains secteurs déficitaires en Santé , Education, Armée, Justice, Gendarmerie, police....
Rédigé par : On se bat toujours pour ce qui nous manque le plus | 18 avril 2011 à 10:31
témoignagefiscal et Aïssa apportent au débat des arguments passionnants.
Je voudrais y ajouter un témoignage personnel.
Durant 25 ans j'ai siégé comme opposant dans un conseil municipal présidé par un énarque et un polytechnicien sorti dans la botte de ces deux prestigieuses écoles. Au sommet de sa carrière, parsemée de postes prestigieux au cabinet du Premier Ministre, à la Banque de France, à la Caisse des Dépôts, etc. il a été rapporteur général du budget à l'Assemblée Nationale. Bref, une pointure et une grosse tête.
Les chiffres, les bilans, les budgets n'avaient aucun secret pour lui. Mais par ailleurs "homme très ordinaire", manquant absolument d'imagination, méprisant avec les petits, routinier, n'ayant aucune espèce de goût pour la lecture, la musique, l'art sous toutes ses formes.
Que cet homme - qui soit dit en passant s'est révélé un très mauvais élu local, calamiteux pour sa ville, par manque de hardiesse, d'inventivité, de sens du contact humain - ait pu si longtemps (31 ans) encombrer tout le monde de sa lourde personne est sans doute un signe qu'il n'est pas bon de jouir ainsi d'une rente de situation due à des mérites de jeunesse, et au rang de sortie, par ailleurs soumis à tant d'aléas.
Pour notre énarque cette rente continue d'ailleurs puisque, sorti (aux deux sens du terme) de la vie politique, le voici aujourd'hui reconverti en avocat d'affaires. Un cursus honorum typique, comme on le voit...
Sans aller jusqu'à la suppression du rang de sortie de l'ENA, il serait sans doute nécessaire d'en diminuer la portée et de mettre en place une inspection qui permette de tempérer ses effets et d'éviter ces pantouflages qui nuisent à la République.
Rédigé par : Frank THOMAS | 18 avril 2011 à 10:20
M. Bilger, je vous ai connu plus inspiré, sinon plus juste. Penser que la réforme de la GAV ne satisfait que les suspects et les avocats démontre que vous n'avez pas recueilli les avis de ces derniers ; ou alors vous vous êtes contenté des déclarations de certains bâtonniers... Cette réforme, vous ne l'ignorez pas, n'accorde clairement pas tous les droits auxquels elle était censée pourvoir. L'avocat a ainsi accès au certificat médical (utile !), à la notification de la mesure de garde à vue et des droits de la personne retenue (ce que l'avocat vérifiait déjà à l'issue de la mesure avant cette nouvelle loi) et... les PV d'audition de la personne qu'il assiste ! Rien de plus ! La loi est muette sur l'accès aux autres PV et mesures d'investigation. Cette loi est à la limite de l'effet d'annonce. J'ajoute que le financement de la loi n'étant pas intervenu, l'avocat intervient aujourd'hui gratuitement. Les principes qu'il défend le soulagent, mais ils ne sauraient le contenter complètement de sa charge...
Rédigé par : aargh27 | 18 avril 2011 à 09:58
Le PR sous couvert de pseudo égalitarisme ouvre ce faisant une boîte de Pandore : pourquoi s'en tenir à l'ENA ? Je lui suggère d'élargir la pratique en supprimant tout concours, du privé au public, et d'abolir les examens : 100% de réussite au bac garantis.
Voilà qui réjouira peut-être les tenants de la lutte des classes. N'est pas ignare qui veut ; certains(es) irréductibles de la connaissance s'acharneraient-ils à étudier ? au trou...
Démagogie quand tu nous tiens !! Nous reviendrions aux pratiques de l'Ancien Régime par tirage au sort ?
Cette reculade aurait permis à un fils de président embourbé dans ses études de se faire élire haut la main à l'EPAD, que des avantages individuels ; la collectivité dans tout ceci a tout à perdre. La société est déjà extrêmement inégalitaire ; détricoteurs de la législation, du droit, réjouissez-vous sans moi.
Rédigé par : Camero1 | 18 avril 2011 à 09:07
On peut discuter la pertinence de la réforme en question pour limiter la pression de l'Enarchie et ses dérives : l'uniformisation de l'élite dirigeante française, dans la mesure où les énarques de la "botte" colonisent aussi bien la haute fonction publique que la direction des grandes entreprises "privées". En tout cas il est tout à fait judicieux de constater : "notre champ démocratique est bouleversé, nos repères disparus et l'horizon brouillé". La droite ne sait plus qui elle est et dit n'importe quoi, la gauche ne sait plus qui elle est et ne dit rien. La décomposition idéologique de la droite est fascinante. En témoigne dans l'actualité l'asile accordé à Avignon au "Christpiss" par une municipalité UMP...! A gauche la confusion n'est pas moindre, tel le propos prêté au maire de Strasbourg : "j'accorde aux musulmans au nom de la diversité ce que je refuse aux catholiques au nom de la laïcité". Si non e vero... cela correspond bien à l'état de confusion mentale qui s'installe un peu partout et dans tous les domaines. Car que dire aussi de la réforme de la garde à vue et de la décomposition de la séparation des pouvoirs, tant du fait de "l'exécutif" que du "judiciaire"...?
Rédigé par : Guzet | 18 avril 2011 à 09:01
@ Alex paulista
Concernant titanic, je n'avais pas lu la liste. Je présente donc mes excuses.
Rédigé par : Choubidou | 18 avril 2011 à 08:49
@ Choubidou
La promotion "titanic" que vous citez contient le frère de notre hôte qui vient de nous quitter. Au-delà de l'extrême délicatesse dont vous faites preuve, il est ridicule de présenter un des rares - sinon l'unique - dirigeants ayant rendu des millions d'euros de prime comme quelqu'un qui n'a fait que penser à ses intérêts.
Rien que ce nom discrédite la liste entière.
Giscard aussi n'a rien à faire dans cette liste: reçu à l'X, plutôt que suivre les études sous l'occupation il a préféré se battre et a été réintégré comme officier élève au milieu des élèves officiers, en plus décoré de la Croix de Guerre.
Rédigé par : Alex paulista | 18 avril 2011 à 05:03
Ainsi que le fait remarquer Alex paulista, c'est le classement à l'entrée que l'on devrait retenir et non de sortie. Il est avéré que celui-ci est souvent peu objectif et a tendance à défavoriser les candidats à forte personnalité au profit d'élèves planplan, bachoteurs et généralement très conformistes. Un formatage voulu pour fabriquer une pseudo élite qui une fois le poste convoité acquis va poursuivre une carrière toute tracée.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 17 avril 2011 à 23:03
Vous n'y êtes pas, mon cher PB … Ce n'est pas ainsi qu'il faut comprendre ces choses. L'ENA, qu'est-ce? L'Ecole Nationale d'Administration, on est d'accord. Encore faut-il qu'il y ait une Administration si forte qu'elle nécessite une Ecole à elle. Le sarkozysme qui est un ultra-libéralisme est logique avec lui-même qui commence par détricoter cette Ecole singulière avant, un jour, bientôt, s'il demeure au pouvoir, de l'effacer complètement du paysage politico-administratif. L'ENA telle qu'on la connait aujourd'hui fut créée par ordonnances signées (il y fut contraint par les socialistes et surtout les communistes plus légitimes que lui quant à la Résistance intérieure) par le général de Gaulle en 1945, soit juste après la guerre. Il fallait reconstruire le pays et refonder son Administration générale; on a jugé qu'une élite était nécessaire pour cela. Vous avez cette phrase étonnante: «On aboutit à ce paradoxe que la Gauche, le Conseil constitutionnel y mettant du sien (ce qui n'est pas acquis: (note du rédacteur, moi-même donc), pourrait empêcher la Droite de mettre en oeuvre un processus si contraire à son esprit profond et la contraindre à une cohérence aujourd'hui négligée». Par ce texte, vous laissez croire que l'ENA, cette émanation strictement jacobine en son esprit originel, est conforme à l'esprit de la Droite républicaine; ce qui est faux. Et ce n'est sûrement pas un paradoxe si la Gauche cherche à la sauver -cette attitude qui semble vous sidérer-, quand cela ne le fut pas moins lorsque Maurice Thorez mena à terme sa création en 1945 et en signa même les décrets lui donnant naissance. Vous qui êtes de Droite et libéral ne pouvez reprocher et ce sans être profondément contradictoire avec vous-même à la Droite de vouloir l'amenuisement puis à terme la suppression d'une Ecole créée par la Gauche socialiste et communiste et incarnant le centralisme étatique et la toute-puissance de son Administration. Car il s'agit bien de l'Administration de l'Etat; le dernier ou la dernière au classement de sortie de l'ENA ne sera pas nommé(e) ni ne l'a jamais été à une quelconque direction, tiens, par exemple, d'un bureau de Poste de province lorsque celle-ci était il y a peu encore une administration. Le premier ou la première choisira l'Inspection des Finances, comme d'habitude, poste prestigieux et avec un peu de ruse et d'ambition menant droit à la présidence de la République au mieux, à Matignon au pire; le dernier ou la dernière sera nommé(e) au pire sous-Préfet ou recteur d'une Académie d'une petite ville de province … Ces derniers encore, il faudrait qu'ils soient bien bêtes et/ou infinis fainéants ou, ce qui serait alors tout à fait respectable, amoureux irréductibles de la province, pour demeurer à vie confiné(es) en ces fonctions «modestes» alors que toutes les facilités dans la promotion de leur carrière leur sont acquises du seul fait d'avoir été ancien élève de l'ENA (ces fameux réseaux profondément antirépublicains). Vous écrivez que l'ENA et son classement de sortie sont conformes à l'esprit de la Droite républicaine. C'est faux. L'ENA et son classement de sortie sont conformes à l'esprit de la Gauche républicaine qui les ont créés dans une idéologie strictement jacobine et centralisatrice, interventionniste également. Vous êtes choqué de ce que le président de la République veuille déconstruire et à terme réduire à néant l'oeuvre de Maurice Thorez, c'est ainsi qu'il vous faut expliquer votre point de vue si vous souhaitez être explicite et compris. A mon sens, l'ENA créée dans des conditions particulièrement difficiles de l'après-guerre immédiat et la nécessité absolue de remettre le pays sur pied, n'a plus sa raison d'être aujourd'hui et devrait disparaître purement et simplement du paysage français. L'élite qui durant soixante ans en est sortie a plutôt positivement accompli son travail et la France est aujourd'hui un grand pays stable en ses institutions et administrations. Aujourd'hui, l'ENA est devenue plutôt comme une fabrique de rentiers de fonction; c'est insupportable dans une démocratie qui n'a plus à faire face à des contingences qui mettraient en péril la nature même de la République et l'existence de la nation. On fait l'ENA désormais (souvent d'ailleurs de père en fils ou de mère en fille; c'est devenu aussi une «affaire» de famille) pour avoir une bonne place en somme puis aller ainsi en «roue-libre» jusqu'au terme d'une carrière qui quand bien même serait catastrophique pour les meilleurs énarques qui en auraient honte pour ceux-là, serait toujours prestigieuse et comme un long fleuve tranquille pour le commun des citoyens … N'importe qui peut désormais représenter l'Etat et administrer ses affaires; je pense par exemple à l'écrivain Daniel Rondeau nommé ambassadeur de Malte par le président sur recommandation de son très proche ami Johnny Hallyday; je songe à Jean-Christophe Rufin ambassadeur au Sénégal … Etc. Et encore, Rufin comme Rondeau, s'ils n'ont pas fait l'ENA, ne sont pas des médiocres, j'en conviens. Des nominations de la sorte hors l'ENA à des fonctions administratives prestigieuses, il y en a chaque année de fort lamentables, iniques et indignes, mais également de très judicieuses en les choix d'untel ou unetelle infiniment plus compétent(e) et disponible que le mieux ou la mieux noté(e) à la sortie de l'ENA … L'ENA est un archaïsme, un anachronisme, un jacobinisme qui à l'heure de la décentralisation en France, du moins d'Etat en somme et de plus de liberté et de possibilité d'action aux collectivités locales et régionales, à l'individu également, puis aussi de l'Europe naissante, n'a plus de raison d'être. Ce «pré-carré» profondément discriminant car, oui, il est devenu l'apanage d'une certaine haute bourgeoisie, est de ce fait profondément anti-démocratique. Maurice Thorez n'avait jamais songé qu'il en serait ainsi au fil des décennies et que l'ENA sa création serait aujourd'hui comme la propriété privée d'une haute voire très haute classe sociale qu'il a toujours honnie. L'oeuvre de Thorez l'ultra-communiste est dévoyée; Sarkozy l'ultra-libéral lui rend justice et fera tout pour la supprimer! Le paradoxe, il est là et c'est un paradoxe heureux!
L'ENA cette merde! Mort à elle!
Aïssa.
Rédigé par : Aïssa Lacheb-Boukachache | 17 avril 2011 à 21:54
Bonsoir,
Voilà un sujet tabou s'il en est: la sélection. Comment sélectionner ceux à qui l'on va confier le pouvoir ou qui vont le prendre? Car c'est bien de cela que l'on parle. Le classement à la sortie de l'ENA va déterminer les Inspecteurs Généraux des Finances, les membres du Conseil Constitutionnel, de la Cour des Comptes, enfin quoi le pouvoir. Comment faire pour qu'une sélection si unique n'amène pas inévitablement une oligarchie? Ce n'est certainement pas les incantations sur la qualité de ces hommes qui suffira. Le sujet est essentiel, la sélection unique par l'éducation nationale, elle aussi unique, dont le sommet ultime est l'ENA en ce qui concerne le pouvoir administratif et politique, est un des maux qui terrassent notre pays. C'est un peu comme l'idée que seuls ceux qui sortiraient du Conservatoire auraient le droit de chanter, voir d'être décideurs à la SACEM. Sans pour autant que le Conservatoire soit discrédité, on sent bien que ce ne serait pas raisonnable, que nous passerions à côté d'artistes de qualité, voir de chefs-d'œuvre. Alors, l'idée consistant à ne pas réserver le pouvoir aux seuls énarques est loin d'être ridicule. Évidemment, pour un si grand besoin d'espace, d'ouverture, de modification des sélections, se contenter de supprimer le classement en sortie de cette école prête à rire. Mais ce serait dommage. Cette décision résume l'impuissance totale dans laquelle sont nos élus. Un objectif louable, indispensable: repenser la sélection, ouvrir le pouvoir à des horizons différents, à des vies et des expériences qui lui apporteraient peut-être plus de souplesse et d'efficacité en tout cas plus d'humanité, se transforme en gag, en "mesurette" risible, qui plus est provoquant un combat politique de grande envergure à venir. Quel pays entravé, définitivement paralysé, quel malheur pour nos enfants. Cordialement. H. Dumas
Rédigé par : Temoignagefiscal | 17 avril 2011 à 20:01
Je préfère "les têtes bien faites aux têtes bien pleines" et franchement, en plus ,"l'énarchie" se trimballe une morgue... insupportable.
Rédigé par : Domi | 17 avril 2011 à 19:52
Plutôt que de supprimer le classement de sortie de l'Ena pour régler le cas des promotions "titanic" à venir qui feraient passer leur propre intérêt avant l'intérêt général, ne faudrait-il pas commencer par remettre l'intérêt général au coeur des choses ?
Lire "L’intérêt général. Qui s’en soucie ? Communication de P. Mazeaud."
http://www.droitpublic.net/spip.php?article3344
Rédigé par : Choubidou | 17 avril 2011 à 19:42
Où voyez-vous donc une erreur de casting ? La gauche toujours soucieuse d'évaluer les mérites réels en dehors de toute considération de caste est à sa place lorsqu'elle défend un principe d'égalité. La droite qui n'aime rien tant que les dynasties et les cercles cooptés des conseils d'administration sans devoir rendre le moindre compte des véritables talents des élus est à sa place lorsqu'elle casse un outil d'égalité. Et aux manettes, l'homme de la droite décomplexée, celui dont le cancre de fils est promis à toutes les grandeurs sans avoir dépassé le niveau du bac, l'ami des héritiers Bouygues, Bolloré ou Lagardère, ne sommes-nous pas ici en un splendide tableau de la droite louis-philipparde ?
Les erreurs de casting, c'était avant, Philippe, quand la gauche qui les avaient pourtant instituées, a poussé à la suppression des distributions de prix dans les écoles. Quand la droite de de Gaulle s'attachait à maintenir l'égalité républicaine dans le système éducatif, c'était une erreur de casting. N. Sarkozy n'a pas seulement aboli Mai 68, il a aboli le gaullisme pour en revenir à la droite d'avant-guerre, celle des maîtres de forge, des héritiers et des clans.
On peut discuter utilement des imperfections notables de l'élitisme républicain, particulièrement lorsqu'on apprend ces jours-ci que les 15 élèves de la prépa "diversité" ont tous échoué à l'ENA. Il y a fort à faire pour que l'égalité des chances soit une réalité permettant de dépasser les marqueurs socio-culturels. Mais c'est la noblesse de la République que de vouloir distinguer les meilleurs et non les mieux nés. C'est clairement une ambition historique de la gauche que d'établir un classement selon les mérites objectifs et non plus selon la naissance, le compte bancaire ou l'entregent de papa.
Mais vous cernez fort bien le personnage. J'allais dire : enfin ! mais c'est une lucidité qui vous vient depuis maintenant quelque temps. Il est l'homme du passe-droit continuel, de la détestation des élites véritables, du mépris pour le dur labeur de l'étudiant méritant. Contester la présence de la Princesse de Clèves dans les concours du cadre A de la fonction publique, c'est contester l'effort et le dépassement républicain. L'envie et la cupidité du cancre semblent être le moteur de cette démolition.
Vivement qu'on en finisse. N'importe comment, mais qu'on en finisse.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 17 avril 2011 à 19:32
J'ai aussi entendu parler de la promotion titanic dénoncée par l'institut Ifrap.
"Si la grande majorité des énarques sert l'Etat avec compétence et dévouement, la centaine de carriéristes qui détient les postes clés se caractérise quant à elle par son incompétence, son irresponsabilité et le service de ses intérêts personnels. Cette classe omniprésente, omnipotente et incompétente est incapable de créer de la richesse mais elle est seulement apte à distribuer celle créée par d'autres". Après une longue et minutieuse enquête, l'iFRAP a pisté 39 personnalités, recréant leur parcours sans oublier de faire le décompte de ce qu'ils avaient coûté aux Français. Cette "promotion" porte le nom de Titanic… Tout un programme. "
http://www.larevueparlementaire.fr/pages/RP882/RP882_aufilactualite.htm
Rédigé par : Choubidou | 17 avril 2011 à 19:25
Autre remarque sur la sélection opérée par les Grandes Écoles. Ce système met en valeur, au moins en sciences, les candidats qui savent vite et bien répondre aux questions.
Mais dans la vraie vie scientifique il n'est pas très important de résoudre un problème connu en une heure au lieu de plusieurs, car on passe le plus clair de son temps à essayer de se poser les bonnes questions, et la réponse n'existe pas encore, il n'y a pas d'"astuce". Il faut prendre le problème par plusieurs bouts, penser par analogie, etc.
L'intelligence déductive n'est pas tout, la rapidité non plus, or tout système dont le but est d'obtenir un classement va sur-valoriser dans une formation ces éléments facilement mesurables.
Rédigé par : Alex paulista | 17 avril 2011 à 18:59
Si on y regarde de près, supprimer le classement à la sortie de l'ENA aurait pour but de supprimer la constitution d'une race de privilégiés dans les grands corps d'Etat qui sont devenus de véritables castes "d'entre soi".
Comme dirait madame Michu "et en plus ils sont payés pour ça".
1789 et suivants ont vu l'abolition des privilèges... paraît-il qu'ils ont disparu... paraît-il...
Oui je sais... je dois avoir un zeste révolutionnaire coincé entre deux neurones.
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 17 avril 2011 à 18:54
J'ai entendu l'argument suivant
Dans le cas de l'Ena on choisit son poste en fonction de son rang de sortie, et donc on favorise son propre intérêt (sa carrière) plutôt que celui de l'institution que l'on choisit, alors que dans le privé, ce sont les sociétés qui choisissent les candidats, en privilégiant leur intérêt plutôt que celui du candidat.
L'inversion se situe à ce niveau-là.
Rédigé par : Choubidou | 17 avril 2011 à 18:45
Tout cela est bien vrai ! Mais le nœud du problème n’est-il pas que l’homme n’est pas un patriote ?
Rédigé par : Roche G | 17 avril 2011 à 16:43
Pour avoir étudié en Suède, je trouve la conception française en matière d'éducation faussement juste. Je ne crois pas, comme dans force pays développés autre que la France, en une distribution des cartes efficaces à la suite d'un concours follement sélectif dont les candidats doivent triompher à 21-25 ans, alors même que la formation professionnelle s'opère tout au long de la vie. La mesure de suppression du classement à l'ENA me paraît, en ce sens, frappée du sceau du bon sens.
Rédigé par : Marcel | 17 avril 2011 à 16:28
Sur l'erreur de casting, vous prêchez un convaincu.
Pour autant il faut regarder dans le détail ce que vous citez, et il ne faut pas négliger l'opinion du Président de la République quand elle est partagée par beaucoup. Même si ce sont des "frustrés" il faut écouter tout le monde.
- Sur le classement de sortie: vous noterez qu'il s'agit du classement de sortie. Autant le classement d'entrée est basé sur un concours anonyme, autant celui de sortie dépend de diverses "notes de gueule", quémandages de points. Le résultat est que ce sont les plus scolaires, les plus fayots, les plus calculateurs et les plus propres à s'avilir pour glaner un demi-point qui se retrouvent sélectionnés. La vie n'est pas un concours, il faut bien arrêter à un niveau et pour ma part je pense que le système de points et de classement n'est valable que lorsque les candidats passent les épreuves les plus similaires et anonymes possibles, ce qui est le cas à l'entrée mais pas à la sortie.
- Sur le fait qu'il est malsain de voir sa vie dépendre d'un concours passé à 25 ans:
c'est encore plus vrai pour les prépas scientifiques, que l'on passe à vingt ans. Heureusement, en sciences, il y a le cursus parallèle de l'université qui permet à un élève moins précoce de montrer ce dont il est capable. En France les bons élèves issus de la fac sont parfois méprisés injustement par les entreprises, mais tous les brillants chercheurs sortis des grandes écoles savent la vraie valeur de leurs collègues issus de la fac. Pour l'ENA, il n'y a pas d'alternative au concours. On pourrait donc souhaiter que le concours soit ouvert à tout âge. Je crois qu'il y a une limite d'âge aujourd'hui. Est-ce bien normal ?
Rédigé par : Alex paulista | 17 avril 2011 à 16:27
Il n'y a aucune surprise : ce pouvoir a entrepris de désintégrer méthodiquement tout ce qui peut lui faire obstacle, tout ce qui peut le limiter, tout ce qui lui faire sentir sa petitesse.
L'eau chauffe doucement. La grenouille n'a pas encore compris se qui se passe.
Rédigé par : Clafoutis | 17 avril 2011 à 16:24
On pourrait supprimer les jeux olympiques
et leurs médailles ainsi que tous les
palmarès allant avec les compétitions
sportives !
Il ne s'agirait plus d'égalité mais
d'égalitaire du type : tous au départ
donc tous gagnants ! ce qui vu les scandales des dopages ne surprendrait personne.
Quid des capacités de dépassement inhérentes
à la nature humaine dont les scientifiques
sont gourmands pour les statistiques ?
Pas si simple.
Rédigé par : calamity jane | 17 avril 2011 à 16:02
Bonjour Philippe Bilger,
« Dans cette suppression du classement de sortie de l'ENA, on perçoit l'extrême difficulté du président à se situer au-delà de ses sentiments intimes, au service des hautes institutions et administrations qui honorent notre pays, alors qu' au contraire il se consacre tout entier à ce qu'il aurait voulu, à ce qu'il n'a pas eu, à ses espoirs brisés, à sa jouissance de compenser, dans certains domaines, ses déceptions par l'exercice d'un pouvoir présidentiel qui détruit ou affaiblit ce qu'il n'a pas obtenu et que de ce fait il déteste ou tourne en dérision.
Il est encore temps, pour le Pouvoir, de jouer la partition qui lui va le mieux. C'est bien de surprendre mais il ne faut pas en abuser. »
Nicolas Sarkozy ne s’est jamais vraiment distingué par des résultats brillants au cours de ses études. Il a néanmoins réussi à les poursuivre jusqu’à son terme, ce qui tend malgré tout à prouver qu’avec un peu de persévérance on arrive à tout, même si on n’est pas spécialement doué.
Il est clair que son orgueil a souffert d’être systématiquement relégué dans le milieu du peloton, voire sans doute dans le « gruppetto » tout au long de ses études. Quoi de plus normal alors que de le voir relativiser les performances des caciques qui ont toujours été les premiers de leur classe et disposent d’un palmarès à faire pâlir d’envie un besogneux qui a eu bien du mal à obtenir son diplôme d’avocat (ce qui au demeurant n’est déjà pas si mal...)
Il est vrai qu’avoir un fort potentiel permettant d’avaler sans problème des tas de données plus ou moins complexes et de pouvoir les analyser avec pertinence pour ensuite être en mesure d’en faire une synthèse brillante n’est pas vraiment indispensable pour faire une brillante carrière politique, cette dernière faisant d’avantage appel à des qualités « humaines » que véritablement intellectuelles.
Il n’en demeure pas moins vrai, ainsi que vous le faites remarquer que la suppression du classement de l’ENA laisse la voie ouverte à tous les copinages et autres passe-droit qui caractérisent une société oligarchique.
Après la discrimination positive que l’on pouvait admettre dans la mesure où elle permettait de compenser les inégalités sociales, nous allons maintenant vers une discrimination népotique qui a un effet exactement contraire et qui par conséquent est totalement inacceptable.
Rédigé par : Achille | 17 avril 2011 à 15:46