Aujourd'hui, quand on entend une personnalité politique se sortir d'embarras en affirmant qu'elle fait confiance à la justice, on a envie de lui demander laquelle. On est arrivé à un point de déstabilisation tel que les institutions ne sont plus respectées en elles-mêmes mais seulement au regard de la crainte qu'elles inspirent ou de l'espoir qu'elles suscitent.
Philippe Courroye va être mis en examen, dans l'affaire Bettencourt, à cause des fadettes (factures détaillées) de trois journalistes du Monde qu'il aurait requises, pour faire simple. Gérard Davet était plus spécialement concerné (Le Monde, Le Figaro, nouvelobs.com, Marianne 2, Mediapart, Libération).
Le procureur de Nanterre, qui conteste avoir commis les infractions alléguées, a, avec une proche collaboratrice procureur adjoint elle-même incriminée, diffusé un communiqué regrettable par lequel il dénonce "une mise en cause calomnieuse" et s'en prend sans élégance et par avance à son juge. Procédé singulier dont je me félicite qu'il ne soit pas mis en oeuvre par toutes les personnes convoquées par des magistrats instructeurs aux fins de mise en examen. Précisément parce qu'il s'agit d'un haut magistrat, on aurait attendu de sa part de la réserve. Il est vrai que ce n'est rien par rapport à sa nouvelle offensive qui ne vise à rien de moins qu'à l'annulation de la procédure ! Il n'empêche qu'il devra bénéficier de la présomption d'innocence si jamais il se retrouve justiciable ordinaire.
L'histoire judiciaire et médiatique nous a surabondamment exposé, ces dernières trois années, la nature et l'intensité du conflit ayant opposé Isabelle Prévost-Desprez à Philippe Courroye. Je n'ai pas envie d'aborder les ressorts intimes de cette guerre mais il est clair que la divergence des pratiques renvoie d'abord à l'antagonisme de deux tempéraments. Les contentieux ne sont souvent que l'expression d'hostilités plus sourdes et plus instinctives.
J'ai toujours considéré que Philippe Courroye appartenait, même s'il le sait et le dit trop, à la catégorie peu peuplée des très grands magistrats grâce à son intelligence et à sa passion pour la justice, du moins à une certaine époque, avant que l'encens du pouvoir vienne le troubler. Je n'oublie pas qu'il a été le premier juge d'instruction qui à Lyon a permis l'irruption dans notre espace d'une affaire politico-financière gravissime et la condamnation d'Alain Carignon. Celui-ci a certes purgé sa peine mais le savoir aujourd'hui conseiller influent à l'Elysée crée plus qu'un malaise !
Philippe Courroye, adversaire respectable, est aussi une victime. Ses qualités exceptionnelles, son énergie, sa compétence, son ambition longtemps légitime ne pouvaient, si on avait bien voulu le laisser mener seul sa barque sans le tenter par des perspectives de gloire facile et d'amitié présidentielle, que le conduire naturellement au plus haut d'un destin judiciaire. Il avait tout en lui-même pour parvenir au faîte : croire en soi sans modération n'est pas une tare qui détruit et stérilise, ce peut être parfois le contraire.
Il n'aurait donc pas fallu forcément le préserver de lui-même mais ne pas, absurdement, favoriser l'exercice solitaire et impérieux d'un pouvoir qui, vite abusif, l'a incité à ne plus percevoir les limites, la décence professionnelle et les obligations banales qu'impose la justice. Lorsqu'un magistrat est un tel concentré de puissance et d'action, on ne jette pas sur cet explosif humain l'allumette qui dégradera, suscitera le vertige des grandeurs, l'illusion de l'impunité et le sentiment que tout est permis puisque les contre-pouvoirs naturels ont disparu.
Ce n'est pas qu'il soit l'ami du président de la République qui est dangereux. C'est le fait que ce dernier ait affiché publiquement cette amitié en la reliant au poste prestigieux à Paris qui devait lui revenir de droit.
L'effacement du garde des Sceaux d'alors a amplifié le lien privilégié que Courroye a noué, sur un plan technique et politique, avec l'Elysée et n'a pu que lui donner encore davantage la certitude qu'il était au-dessus du commun des professionnels de justice sans avoir à se soumettre, lui, à leurs devoirs étriqués.
Le procureur général de Versailles, Philippe Ingall-Montagnier, n'a pas cessé de paraître aux ordres de son procureur alors qu'en principe, si on tient au système hiérarchique, l'inverse est souhaitable.
Dans ces conditions, avec tant de doux poisons qui venaient gangrener une personnalité ayant déjà du mal à résister à une autarcie dominatrice, qui aurait résisté ? Qui n'aurait pas fait naître en soi la démesure, l'ubris, le goût de maladresses et d'imprudences qui n'étaient pas le fait du hasard mais l'affirmation de ce constat : si Nicolas Sarkozy existe, tout est permis ! Se souvient-on que, phénomène inouï, aussi détonant que cette future mise en examen, Michèle Alliot-Marie, chargée d'arbitrer entre le procureur général Nadal et le procureur de Nanterre, a clairement désavoué le premier pour laisser le champ libre au second et il a fallu des circonstances exceptionnelles pour que, sur injonction, le procureur général de versailles se réveille après des mois d'effervescence conflictuelle et scandaleuse ?
Je persiste même s'il va sans doute détester ce qu'il prendra pour une forme de condescendance. Philippe Courroye est une victime. Tous ceux qui ont facilité le dépassement de son être estimable par lui-même enivré et peut-être arrogant, en tout cas trop sûr de soi, sont coupables. On a enlevé, un temps, de sa route, tous les obstacles salvateurs et on lui a facilité le chemin entre soi et le pire de soi. Il y a non assistance à magistrat éperdu de vanité. Pourtant, ce talent aurait mérité d'être sauvé, et cette force. A vrai dire, je ne me fais pas de souci. Si Nicolas Sarkozy est réélu, les orages passés, Philippe Courroye retrouvera un poste conforme à ses vertus et à la confiance qu'il inspire au président et à ce pouvoir.
Le juge d'instruction remarquable qu'il a été, surtout à Lyon, les troubles d'aujourd'hui, le délitement démocratique, les bouleversements de tous ordres m'obligent à faire amende honorable. C'est ma faute, ma très grande faute. J'ai pensé que même dans un Etat de droit imparfait, une République guère exemplaire, le juge d'instruction pouvait être supprimé au bénéfice d'un parquet qui découvrirait organiquement en quelque sorte - c'était le projet de la Commission Léger - les charmes et l'honneur de l'indépendance, que celle-ci se manifesterait au fil des jours et que le nouveau rôle qui lui serait prêté la contraindrait au port d'un habit neuf. Les procureurs essayeraient l'indépendance après avoir cultivé la dépendance ! A l'évidence, c'était un voeu pieux, une généreuse mais naïve utopie. Je me suis totalement trompé. Je n'ose imaginer ce qu'aurait été la justice actuellement si nous n'avions pas des juges d'instruction à Bordeaux et quatre au moins à Paris qui, grâce à leur pratique, nous rendent fiers de la magistrature. Pour une fois, l'institution et la vertu se rejoignent.
Le jour où il le décidera, Philippe Courroye reviendra.
Et au 15 octobre, je suis quand même rassuré de n'avoir rien inventé.
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/le-president-de-l-usm-attaque-le-procureur-courroye_1040892.html
Quand l'institution judiciaire en est à ce point de décrépitude, c'est quand même très grave pour l'un des principaux pouvoirs régaliens...
Rédigé par : Jean-Louis | 15 octobre 2011 à 10:04
Monsieur le Haut Magistrat,
Je suis sûr que vous comprendrez ma sidération à la lecture de votre dithyrambe.
Evacuons la question de l’existence du juge d’instruction. Qui demande de repenser la totalité de l’architecture de la procédure pénale. Donc dossier lourd et compliqué, mais pas inabordable si on le décide.
Vous prenez objectivement parti pour un personnage des plus critiquables de votre respectable profession, malheureusement très mal règlementée, voire pas règlementée du tout.
Mais un simple citoyen même moyennement attentif alignera sans peine une série de prestations particulièrement douteuses du magistrat Courroye.
Petite déclinaison rapide de quelques prestations de ce magistrat indispensable à la République :
Vous nous rappelez Lyon. Qu’en est-il ressorti ? On apprend que Carignon a portes ouvertes à l’Elysée !! Ce qui vous contraint à un exposé emberlificoté pour évoquer le lien aberrant entre ce fonctionnaire de justice et son ami élu en 2007
En mars 2007, le numéro deux de la société TOTAL inquiété sur de supposées commissions avec l’Iran. Des conditions de garde à vue délibérément humiliantes. La réponse de policiers gênés fut « ordre du magistrat instructeur », un dénommé Courroye. Comme ce pouvoir a tous les culots, un personnage dont il fut déjà question ici, intermédiaire ami du Président proposa même son entregent pour « arranger » ce dossier. De Margerie rappela que sa famille n’avait toujours eu que mépris pour la maçonnerie. Le bruit couru que TOTAL s’était fait tirer l’oreille pour ouvrir sa sébile dans la campagne présidentielle du prince en cours d’élection. Quel commentateur mal intentionné irait supposer une telle horrible collusion ! Par les temps qui courent, impensable…
Et ce fut aussi le dossier pétrole contre nourriture. Où la France se mit à laver plus blanc sur injonction des Américains. Face à des accusations montées de toute pièce au profit des intérêts exclusifs des Etats-Unis pour le contrôle du pétrole irakien, plusieurs hauts fonctionnaires se trouvent renvoyés en correctionnelle après instruction de Courroye. Quelle fut la faute de deux grands ambassadeurs de France ? Croire que la France avait encore une politique arabe indépendante, et fréquenter Tarek Aziz en essayant de conjurer l’agression qui se précisait. Bien entendu les actes de lobbying entrepris furent rémunérés à leur juste prix, sans enrichissement personnel pouvant s’assimiler à de la corruption, et à la vue de tous. On ne sait donc pas comment ce Courroye là a identifié un délit.
29 avril 2011, Charles Pasqua relaxé, Pierre Falcone libéré, Courroye désavoué.
Vous nous parlez d’un personnage qui a une haute idée de la raison d’Etat, et de l’intérêt national. Une petite excuse pour Mme Joly-Farseth qui usa de ses pouvoirs exorbitants sans considération pour la société ELF et le capital d’indépendance qu’elle représentait pour la France, dans un contexte de lutte féroce pour l’accès au pétrole.
Pendant l’Occupation ou à l’époque de la guerre froide, comment appelait-on ceux qui collaboraient avec une puissance étrangère ?
Passons sur l’usage immodéré de la détention provisoire, encore qu’il faudrait s’arrêter sur le sujet, ce que certains de vos confrères appellent élégamment «attendrir la viande».
Ainsi donc ce triste sire a quelques ennuis ? Je n’ai aucune considération pour ce quotidien du soir, que de Gaulle, qui l’avait relancé à la Libération, avait surnommé l’Immonde. Des Plenel, Minc, Colombani, Fauvet ou autre Fontaine philo soviétique ne sont pas loin du marigot où pataugent certains magistrats. Ni pour la protection exorbitante dont bénéficient les journalistes dans notre pays, sans responsabilité aucune en retour. Je dirais donc que dans cette procédure, il n’y en a pas un pour racheter l’autre. Mais utiliser la DCRI, service de guerre, pour faire une recherche classique, s’appelle avoir perdu le simple bon sens. Vertige évident.
Me permettrez-vous de penser que vous ne pouvez rien ignorer de tout ce contexte ?
Votre développement tarabiscoté pour sauver la mise à un triste sire à la connexion établie avec le plus haut responsable de l’exécutif, a quelque chose de poignant. Car une chose est de disserter sur le Petit Journal, DSK ou Ruquier, autre chose de nous alimenter sur des sujets de l’exact ressort de votre profession. Et comment oublier dans cet obscur cénacle le rôle de cet autre magistrat, Patrick Ouart, faisant la navette entre les corridors du prince et le premier groupe mondial de luxe.
Pensez-vous vraiment que le citoyen électeur peut avoir la moindre confiance dans l’institution judiciaire avec des Joly-Farseth ou des Courroye ? Vous nous invitez à « Courroye victime et présumé innocent ». La France compte autour de 570 juges d'instruction qui font tous leur travail dans la plus parfaite discrétion. Et votre commentaire « Je n'ose imaginer ce qu'aurait été la justice actuellement si nous n'avions pas des juges d'instruction à Bordeaux et quatre au moins à Paris qui, grâce à leur pratique, nous rendent fiers de la magistrature. Pour une fois, l'institution et la vertu se rejoignent. ». C’est gentil pour les autres. C’est une blague ?
Rédigé par : Jean Louis | 04 octobre 2011 à 09:47
P. Bilger illustre bien cet axiome philo que la liberté n'existe que si elle est en exercice actuel et ne peut faire l'objet d'un cadeau, si magnanime soit-il. En d'autres termes la liberté ne pousse que sur l'arbre du courage. J'arrête pour ne pas faire rougir PB. Bonne retraite Monsieur le magistrat !
Rédigé par : nguyen tuan | 03 octobre 2011 à 09:18
APPEL D'OFFRES
A compter de ce jour, 1er octobre 2011, la France, Mère des arts, des armes, des lois et des valises à forte valeur ajoutée, ne dispose plus de blog, d'un seul, d'un tout petit blog hésitant et timide de magistrat en activité. Cette extinction brutale, même si elle permet l'assomption du seul specimen connu vers les éthers de la liberté d'expression sans entrave, ne saurait toutefois perdurer sans provoquer de réactions dommageables telles que la prolifération des Marinus-Courroyensis, forme redoutable et en pleine expansion du cannibalisme judiciaire.
Il est donc procédé, selon les dispositions du Code de Mauvaise Conduite des Magistrats Bêtement Convaincus d'Etre des Serviteurs de la République (CMCMBCESR), à l'appel d'offres dont le cahier des charges intolérables suit :
Le poste à pourvoir est situé dans une zone à risque important, radioactive, sujette aux tsunamis, infestée de requins tueurs et génétiquement modifiée. Le candidat devra être physiquement entraîné à gravir les escaliers menant aux convocations de sa hiérarchie. Il devra être équipé d'un coussin amortisseur pour les redescendre sur les fesses.
Le candidat devra être un magistrat en activité atteint toutefois de pathologies qualifiées de graves dans la nomenclature officielle de la place Vendôme :
- Le magistrat-blogueur se considère comme un citoyen à l'égal des autres individus pareillement touchés par cette maladie qu'il retrouve dans un groupe de parole dédié à la désintoxication citoyenne appelé "blog".
- Il accepte le dialogue et envisage parfois, dans les crises aiguës, d'avoir tort (prévoir un traitement anxiolytique pour les premières crises)
- Il signe de son nom et supporte le gros temps sans parapluie
- Il accueille sur son blog les amis personnels de Barack Obama, des clowns franco-autrichiens, des cuistres en pré-retraite, des bibliothécaires amoureuses, des adeptes du théâtre No et des anonymes féroces qui pissent dans le couloir.
- Il défend haut et fort Miss France
- Il se défie des convenances intellectuelles ce qui l'amènera à monter et descendre l'escalier hiérarchique comme vu plus haut.
Le candidat verra sa carrière immédiatement stoppée, ses notes resteront excellentes mais ne serviront à rien, il fera l'admiration des jeunes magistrats qui s'empresseront de ne jamais suivre son exemple, il s'attirera la détestation des anciens contraints d'effectuer sa part de corvée servile de cirage de bottes.
NOTA : parallèlement à ce recrutement improbable, il est procédé à celui d'un magistrat-blogueur en retraite reconverti dans le business, mais le poste est déjà brillamment pourvu.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 01 octobre 2011 à 18:39
@scoubab00
Pas du tout, on écrit ubris ou hybris, car le y français est un dérivé fautif de l'upsilon grec qui, assorti d'un esprit doux se prononce u.
Je profite de ce moment pour remercier Philippe Bilger de son intervention télévisée du 30 septembre et lui dire que j'espère qu'il continuera à titiller les consciences sur notre écran.
Rédigé par : Jean-Marie Thiers | 01 octobre 2011 à 09:57
En son temps nous vous l'avions dit que les juges d'instruction restaient nécessaires... Heureusement, se tromper c'est vivre encore.
Bonne et heureuse retraite cher Monsieur Bilger.
Rédigé par : maxwel | 01 octobre 2011 à 01:49
Bel exercice de style, mais on est gêné par ces attaques entre magistrats. La justice ne sort pas grandie de ces affaires. On peut sérieusement mettre en doute la justice ordinaire quand on voit le comportement des juges qui s'occupent d'affaires sensibles.
Le recrutement des juges par concours ne permet pas d'avoir une justice choisie par les citoyens. Il faut donc se résigner à adopter un mode électif pour choisir nos juges.
Rédigé par : Perplexe-gb | 30 septembre 2011 à 18:33
En tant qu'étudiant en droit et jeune citoyen, votre billet M.Bilger, me rassure quant à l'état de la profession que je risque d'embrasser ; et souligne la tragique et coupable erreur que serait la suppression du juge d'instruction dans un tel climat !
Il est temps que nos gouvernants, nos juges, nos policiers et tout ceux qui incarnent l'état de droit prennent conscience que la révolution peut prendre n'importe quand, du moment que les conditions soient réunies...
Rédigé par : arthur | 30 septembre 2011 à 15:59
"...car Brutus est un homme honorable"
Les critiques les plus amères sont souvent enrobées de miel. J'ai rarement lu des propos aussi violents formulés avec autant d'amabilité.
Un billet extraordinaire, félicitations !
Rédigé par : William Shakespeare | 30 septembre 2011 à 14:48
Admirable "papier". Tout y est clairement exposé : le délitement de la Justice à cause de la politique, le travail des Juges d'instruction - garants de l'indépendance de l'enquête - et malgré tout la nécessité de la présomption d'innocence.
Vite, que ce pouvoir laisse sa place à une politique qui rende à cette noble institution républicaine toute sa place.
Rédigé par : Richard Schneider | 30 septembre 2011 à 13:44
Avec les affaires qui se multiplient dans tous les milieux, pouvoir, finance, justice et police (pour l'Eglise ça semble se calmer), nous pouvons constater que nous sommes dans le règne du clair-obscur, de la rumeur et du mensonge.
"Que peut la vérité froide et nue contre les prestiges étincelants du mensonge" Anatole France (préface de Barbe-Bleue et autres contes merveilleux).
et pourtant "Nulla certior custodia innocentia" Nulle sauvegarde n’est plus sûre que l’innocence.
Burton, Robert, 1577-1640 (The Anatomy of Melancholy)
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 30 septembre 2011 à 13:30
Avant d'en arriver à une république irréprochable, mieux vaut commencer par faire le ménage dans les institutions en se débarrassant des profiteurs et abuseurs de tout poils qui se cramponnent depuis trop longtemps aux commandes et pompent la sève de notre pays comme des sangsues !
Apparemment, avec ces mises en examen en cascades jusqu’au plus haut niveau, c’est ce qui se profile à l’horizon. Réactions en chaîne qui s'apparentent à d’authentiques sursauts révolutionnaires, dangereux certes (si d'aucuns en profitaient pour régler des comptes ou asseoir de nouveaux pouvoirs) mais aussi salutaires et porteurs d‘espérance si conduits sans haine et sans crainte et menés à leur terme.
La France qui depuis trop longtemps s’était assoupie et vivait peureusement recroquevillée sur elle-même, cramponnée à des habitudes mortifères, contrôlée par des barbons archi repus et sans scrupules, en avait grand besoin, un besoin vital après une longue asphyxie. Espérons qu'elle en sortira rajeunie, allégée et régénérée, si toutefois les forces vives de notre nation, au lieu de se contenter de critiques vagues ou injustes, de manifs dérisoires et ruineuses, voire de mépris généralisé ou d'indifférence blasée, s’engagent résolument dans toutes les instances pour traquer l’imposture et préparer l’avènement d’une France nouvelle aux couleurs d'arc-en-ciel.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 30 septembre 2011 à 12:45
Le piège Courroye ?
Je passe mon tour.
Rédigé par : calamity jane | 30 septembre 2011 à 09:53
Un procureur de haut vol et un dirigeant de la PJ de Lyon mis en examen. Il y a parfois une forme de jeu, je crois, dans cette course à la puissance professionnelle publique : jusqu'où puis-je aller dans le cadre de mes fonctions alors qu'il y a un risque certain pour moi, l'officiel ? La question du stade deux : pendant combien de temps je vais ainsi jouer avec le feu puisque ça marche encore ? En nombre de mois, d'années... Sans réponse tangible ou réfrigérante, la troisième étape, façon alcoolo. On ne se rend plus vraiment compte, frénésie ou simple routine; comme si le risque répété - et les relations tissées - avait fini par ankyloser les limites fixées au préalable, au stade un. Et comme Icare, la chute direct, sans palier de décompression. Y-a-t-il seulement une poignée d'humains qui échappe à cet axiome, accédant à une autre dimension en sifflotant ?
Philippe par ubris, vous vouliez dire... hubris ? Merci en tout cas de corriger mes étourderies et autres fautes. Sous des dehors confortables, un vrai punk, ce Philippe. Il décoiffe !
Rédigé par : scoubab00 | 30 septembre 2011 à 09:46
N'est pas Van Ruymbeke qui veut ! Aimer la justice, la vertu de justice et aimer le pouvoir judiciaire, ça fait deux !
Rédigé par : nguyen tuan | 30 septembre 2011 à 08:12
Le procureur de Nanterre mis en examen, le N°2 de la police de Lyon en garde à vue, un ancien ministre de l’Intérieur poursuivi par un avocat pour menace.
Quand des personnes à qui il a été confié de hautes responsabilités se comportent comme les voyous c’est qu’il y a un gros problème quelque part, non ?
Rédigé par : Achille | 30 septembre 2011 à 07:50
Ne me dites pas Monsieur l'avocat général que vous êtes quasiment le seul à ne pas avoir compris que le Philippe Courroye que vous louez, celui des années 90, celui qui embastillait Carignon, celui qui poursuivait Michel Noir et môssieur Charles, roulait pour Chirac et les chiraquiens et que son éthique judiciaire était singulièrement amputée !
On eut aimé que le Courroye de l'époque fasse preuve de la même rigueur vis-à-vis de tous les délinquants... à droite !
Courroye n'a donc pas changé, il a simplement changé de maître.
Rédigé par : Admirateur éperdu | 30 septembre 2011 à 07:32
Bon, de toute façon, Philippe Courroye, vous pensiez pas partir en vacances avec...
Rédigé par : Alex paulista | 29 septembre 2011 à 21:47
Quelle subtilité ! Monsieur le Procureur : vous ne plaignez pas M. Courroye d'avoir été victime de calomnies, ça vous le lui laissez, non, vous le plaignez d'avoir été victime de louanges...
Vous donnez ainsi crédit au propos de René Girard : "la meilleure façon de punir les hommes est de leur accorder ce qu'ils réclament".
Rédigé par : DMonodBroca | 29 septembre 2011 à 19:47
Bonjour Philippe Bilger,
« J'ai toujours considéré que Philippe Courroye appartenait, même s'il le sait et le dit trop, à la catégorie peu peuplée des très grands magistrats grâce à son intelligence et à sa passion pour la justice, du moins à une certaine époque, avant que l'encens du pouvoir vienne le troubler. »
J’adore ce genre de louange appuyée pondérée par un petite pique toute jésuitique qui laisse entendre que finalement il n’en reste plus grand-chose.
Être et avoir été, là est la question !
Rédigé par : Achille | 29 septembre 2011 à 18:11
"C’est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir a tendance à en abuser. Tout homme va jusqu’à ce qu’il trouve des limites. Qui le nierait ! La vertu même a besoin de limites."
(Vous savez qui).
Rédigé par : lo | 29 septembre 2011 à 18:02
Tous les étudiants en droit devraient lire ce billet. Moi j'aurais bien voulu être capable non seulement de l'écrire mais surtout de le penser.
Rédigé par : JClaude PATIN | 29 septembre 2011 à 17:48
Excellente idée que d'avoir rappelé hier chez Yves Calvi vote attachement au maintien de la fonction de juge d'instruction, garantissant l'indépendance du juge instructeur qui souhaite exercer son métier sans pressions.
Que nenni d'une justice à l'américaine qui a largement démontré dernièrement ses excès et ses insuffisances.
Rédigé par : jabiru | 29 septembre 2011 à 17:32
M. Bilger,
Heureusement que vous étiez là, chez Calvi, pour élever le niveau du débat.
Vos interlocuteurs étaient parfaits, on ne peut rien leur reprocher, mais bon sang, quelle médiocrité dans l'éloquence !
Théodore Zeldin a écrit un livre charmant, "L'Art de la Conversation", où il loue le talent des Français pour s'exprimer, jacter peut-être, mais combien plus réjouissant qu'une soirée avec un Anglo-Saxon, un Danois, ou un Batave.
De même que j'ai été frappé par l'éloquence du juge Van Ruymbeke, lors des reportages. Dieu qu'il est triste. Là où on s'attendait à une phrase mortelle dans le plus pur style d'un Moro-Giafferi , on a entendu un expert-comptable mécontent.
"Un technicien"... comme vous avez dit.
Rédigé par : Savonarole | 29 septembre 2011 à 16:58
En effet, Monsieur l'Avocat Général, quand on entend un homme politique qui essaie de se tirer d'affaire en déclarant faire confiance à la Justice, "on a envie de lui demander: laquelle" ???
Celle de Droite ou celle de Gauche ???
Car en effet, le débat sur l'indépendance de la Justice est un faux débat.
On voit bien, dans "l'affaire Courroye", qu'elle est indépendante, et que ceux qui agitent en permanence le chiffon rouge d'une Justice aux ordres de l'Elysée en font trop.
Si la Justice n'était pas indépendante, est-ce qu'une Juge d'Instruction pourrait se permettre de mettre en examen un Procureur de la République réputé "proche du Chef de l'Etat" ???
Le vrai problème n'est pas celui d'une justice "indépendante": les péripéties auxquelles nous assistons actuellement montrent non seulement qu'elle est indépendante, mais qu'elle n'hésite pas à s'opposer au pouvoir dès qu'une opportunité lui en est offerte. Et si possible avec l'appui complaisant d'un journalisme de combat.
Ce que veulent les Français, c'est une justice "impartiale", une justice au-dessus des luttes politiciennes de caniveau, une justice non "militante", une justice qui se débarrasse de ses oripeaux corporatistes, une justice qui protège le citoyen honnête contre le malfrat.
Nous sommes parvenus à un point où le citoyen honnête a peur de la Justice car de tristes expériences récentes ont montré que lorsque vous "tombez" dans ses griffes, elle peut vous détruire sans vous laisser la moindre chance de vous défendre avant que vous ne soyez broyé, alors que les voyous, eux, ne craignent plus la Police et encore moins les Juges, qu'ils insultent dans les prétoires et méprisent pour leur laxisme.
Rédigé par : berdepas | 29 septembre 2011 à 16:43
J'ai du mal à comprendre, en tant que Belge, comment le juge Courroye peut être décrit comme un "ami du président de la République" alors qu'il a fait mettre en prison Alain Carignon, lui aussi décrit comme un proche de Nicolas Sarkozy.
Rédigé par : gery | 29 septembre 2011 à 16:16
Si Monsieur Courroye a réellement commis les faits qui lui sont reprochés, je ne peux pas le considérer comme victime.
Pour faire une analogie simpliste, si je me fais flasher par un radar automatique, ce n'est ni de la faute des policiers qui auraient dû m’arrêter 10 km plus tôt, ni de la faute des autres usagers de la route qui se sont écartés pour me laisser passer, ni celle du constructeur de la voiture. Je suis alors le seul responsable.
Le côté exceptionnel de cette affaire dû autant aux personnalités qu'aux contextes, pour moi, n'y change rien.
Rédigé par : Largentula | 29 septembre 2011 à 15:45
Je ne connaissais pas Philippe Courroye du temps des affaires Carignon et compagnie, mais je vous fais confiance dans votre hagiographie. Votre billet est magnifique. Merci.
Mais les deux dernières phrases de l'antépénultième paragraphe m'interpellent. Doutez-vous tant que cela de la justice que vous avez servi brillamment pour lier à la réélection d'un président le fait qu'un citoyen puisse être, selon le bien-fondé ou non de l'accusation, soit blanchi soit puni puis réhabilité, sans l'intervention de l'exécutif? (qui plus est d'un des exécutifs les moins exemplaires que nous ayons eu depuis bien des décennies)
Rédigé par : Derek | 29 septembre 2011 à 15:26
Après vous avoir lu attentivement, cher Philippe, j'hésite si Philippe Courroye peut voir en vous un avocat ou un procureur.
Un point de votre billet, en tout cas, ne fait pas débat c'est votre jugement terrible sur le Président de la République que vous percez d'une flèche empoisonnée : "si Nicolas Sarkozy existe, tout est permis !".
J'admire ordinairement votre sens de la nuance et de la mesure que vous avez encore démontré hier soir à "C dans l'air"; mais je crains que cette formule ne soit un peu excessive, et que dans l'atmosphère de curée actuelle, elle ne soit pas indispensable.
Rédigé par : Frank THOMAS | 29 septembre 2011 à 15:23
Quelqu'un comme moi, qui ne connaît rien aux arcanes et méandres du système judiciaire, je me dis "voilà le crépuscule de la Justice française !"
Que des magistrats (sur fond de règlements de comptes corporatistes) en soient arrivés à faire ça : "ce qu'on reproche au procureur Courroye" et à réagir comme ça "le convoquer médiatiquement pour mise en examen".
Que le système libère et annule la procédure d'un criminel qui a avoué le crime atroce d'un adolescent parce que son avocat n'était pas présent lors de son audition, http://www.sudouest.fr/2011/09/15/le-meurtrier-presume-remis-en-liberte-499633-4483.php
mais qu'en même temps DSK et CB sont "confrontés" sans leurs avocats.
Je me dis : "Ils se tirent dans le dos, ils scient la branche sur laquelle ils sont assis, ils creusent leur tombe".
Mais en même temps, je me dis "youpeee, enfin le grand ménage va pouvoir commencer !
Oui je sais, mon commentaire n'a rien à voir avec LE droit enseigné à l'ENM... mais qu'est-ce que ça fait du bien, à un simple justiciable et surtout électeur, de pouvoir le dire et surtout l'espérer !
Allez, espérer pour espérer, je rêve que le CSM ait des citoyens ordinaires dans ses rangs et tant qu'à faire, puisque je rêve, qu'il y ait des représentations du CSM dans chaque TGI.
La justice citoyenne au ras du parquet !
Cordialement
Pierre-Antoine
Rédigé par : Pierre-Antoine | 29 septembre 2011 à 15:12
Je suis quand même plus choqué par la mansuétude dont a bénéficié le juge Burgaud pour ses monstruosités légales que par l'inculpation de M. Courroye pour un acte illégal véniel, d'autant que la loi en l'occurrence n'est pas forcément la justice et que l'on devrait autoriser la recherche des sources sous réserve de l'immunité du journaliste et de sa source, puisqu'une action postérieure en diffamation reste possible s'il y a calomnie.
Nom d'une pipe, noch a mohl ! diraient les Alsaciens.
Rédigé par : lefort jacques | 29 septembre 2011 à 12:42
Pour une nécro c'est une nécro !
Rédigé par : catherine A un enterrement de première classe | 29 septembre 2011 à 12:20
Avec un ami comme Philippe Bilger, avez-vous, Monsieur Courroye, réellement besoin d'ennemis ?
Philippe, j'aime assez quand vous trempez vos flèches dans les parfums d'Arabie, à seule fin qu'odorantes soient les blessures et suave l'agonie.
Rédigé par : sbriglia | 29 septembre 2011 à 11:59
<<...les troubles d'aujourd'hui, le délitement démocratique, les bouleversements de tous ordres m'obligent à faire amende honorable... J'ai pensé que même dans un Etat de droit imparfait, une République guère exemplaire, le juge d'instruction pouvait être supprimé au bénéfice d'un parquet qui découvrirait... les charmes et l'honneur de l'indépendance... Les procureurs essayeraient l'indépendance après avoir cultivé la dépendance ! A l'évidence, c'était un vœu pieux, une généreuse mais naïve utopie. Je me suis totalement trompé.
Je n'ose imaginer ce qu'aurait été la justice actuellement si nous n'avions pas des juges d'instruction... qui, grâce à leur pratique, nous rendent fiers de la magistrature. Pour une fois, l'institution et la vertu se rejoignent.>>
J'ai apprécié Mon5 dans l'émission d'Yves Calvi, singulièrement votre "acte de contrition", que vous renouvelez dans ce billet.
Mais le maintien des juges d'instruction ne me paraît nullement antinomique de l'indépendance du Parquet. J'ai toujours affirmé dans mes interventions sur ce blog ces deux membres de l'alternative de la réforme de la Justice.
Mais aucun organisme ne saurait exercer sans un contrôle indépendant et vous avez bien évoqué hier ce que l'on pourrait appeler la "forfaiture" du Conseil constitutionnel dans l'aval accordé à la validation des comptes de campagne de 1995. Or, si cet organe suprême chargé du contrôle et ne subissant par définition aucun contrôle autre que celui de la déontologie et de l'honneur, des magistrats par trop indépendants ne manqueraient de faire courir le risque de la "république des juges".
Donc indépendance des juges et du Parquet, mais définition d'instances de contrôle des excès de pouvoir éventuels...
Rédigé par : Robert | 29 septembre 2011 à 11:56