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16 octobre 2011

Commentaires

protagoras

Curieuse statistique.
Bien qu'à mon point de vue, les statistiques ne soient que l'art scientifique du mensonge, la méthodologie la plus élémentaire, afin d'explorer l'hypothèse "la prison favorise la récidive", serait de comparer une population de délinquants et de criminels ayant été emprisonnés, à une population "homologue" (et là, bonjour la difficulté, mais supposons que cela soit possible) n'ayant pas été pris (les rapports de police regorgent de "soupçonnés" sans preuves recevables) ; à votre avis, le taux de récidive dans la population des "pas pris" est-il inférieur à celui des "emprisonnés" ?

Allons, un peu de sérieux... même avec de "bêtes" statistiques descriptives.

scoubab00

Si la prison n'est pas l'école de la récidive, elle doit en être plutôt le conservatoire. L'homme est un animal grégaire, a fortiori entre quatre murs miteux. Qui constituent souvent le meilleur Pôle emploi qui soit à la délinquance. Unité de lieu, unité de temps, unité d'action à venir, hélas. Le courage que manifestent certains dans ce milieu carcéral n'est quelquefois que le tremplin d'initiatives interlopes futures passibles d'une autre condamnation, et ainsi de suite. Courage et fatalité en circuit fermé.

Y-a-t-il des pays voisins qui s'en sortent notablement mieux dans ce domaine en ayant des taux de non-récidive plus élevés ? Quand on sort de prison, si on compte uniquement sur sa famille ou ses "amis", ça risque d'être un peu juste question réinsertion.


Nordine

@Yves Abram

Bonjour,

J'ai vu "Un prophète" une demi douzaine de fois. C'est pour moi l'un des plus beaux films français de ces 20 dernières années.
Par contre, le quotidien carcéral qui y est décrit me semble pas très crédible et d'avantage calé sur celui des prisons américaines. D'ailleurs, le film paraît s'être inspiré du téléfilm "Les princes de la ville", culte en banlieue et peu connu du grand public.
A mon avis, sur le plan de la vraisemblance, le film de Laurent Bouhnik, "Zonzon", était plus juste.

hameau dans les nuages

@walter
"C’est par l’étude qu’un individu peut être amené à se comporter différemment et non en lui offrant un stage de peintre ou de maçon comme cela se faisait et se fait peut-être encore"

En fait tout dépend des individus et du degré de délinquance.
Pour la primo délinquance, les"sauvageons", les règles de la vie en société peuvent s'inspirer largement des règles de la construction... cohésion et fil à plomb.

Je peux vous assurer que partir de rien, d'un tas de pierres sèches informes pour en faire un mur peut sublimer des individus manquant de repères.

Faire un mur c'est aussi faire le mur.

Cet été dans ma région un groupe de primo délinquants est parti en montagne refaire le toit d'une cabane de berger. Le toit, autre symbolique...

Yves Abram

Il faut absolument avoir vu ou aller voir le film "Un prophète".

Ce film a été réalisé par Jacques Audiard en 2008. Présenté en compétition officielle lors du Festival de Cannes 2009, il y a obtenu le Grand prix du jury. Quelques mois plus tard, il reçoit le Prix Louis-Delluc. Lors de la cérémonie des César du cinéma 2010, il gagne 9 récompenses dont celles du meilleur film et du meilleur réalisateur. Il est sorti en salles le 26 août 2009 et a comptabilisé 1 249 000 entrées.

Je ne pense pas que l'on puisse penser la prison de la même manière avant et après avoir vu ce film.

Walter

Alors que je purgeais une peine à la Centrale de Melun, j’eus l’occasion de lire des articles d’un journal de magistrats dans l’atelier d’imprimerie. L’un des magistrats glosait sur la récidive et s’étonnait que le pouvoir politique persistât à maintenir l’actuelle politique pénale alors qu’un hôpital dont la mortalité dépasserait les 70% serait promptement fermé.

La prison demeure « une école » pour ceux qui pour la première fois sont confrontés à la promiscuité des « criminels par habitude ». On y apprend par exemple comment ouvrir un coffre-fort. Pour avoir connu durant cinq ans la Maison Centrale de Clairvaux à 22 ans, du temps où il était interdit de parler et où, par -15°, les brocs d’eau gelaient dans les cellules, je peux témoigner de la haine qui s’installe en vous. On s’endurcit.

En prison, on se rencontre et on promet de se revoir à la sortie.

La seule vraie question, c’est de se demander comment changer un individu qui n’est pas forcément un monstre de bêtise. S’est-on posé la question du pourquoi de cette récidive en France ? Certains pays préparent le détenu en vue de sa sortie. Il existe parfois des structures qui accueillent les détenus et les guident dans la recherche d’un emploi. Car, quoi qu’il ait commis, un détenu sort de prison et s’il n’a pas la moindre espérance, il retombera. En ce sens vous avez raison.

C’est par l’étude qu’un individu peut être amené à se comporter différemment et non en lui offrant un stage de peintre ou de maçon comme cela se faisait et se fait peut-être encore.
C’est par l’étude que j’ai modifié ma façon de penser. C’est l’Université qui m’a fait comprendre que la vie, c’est autre chose que les cellules infectes du dépôt et la partialité de certains juges.

Nous nous sommes rencontrés il y a vingt ans en cour d’assises, jugé pour un crime que je n’avais pas commis mais mon passé ne plaidait pas en ma faveur. Bruxelles exigeait une condamnation.
Je fus condamné à une peine de prison avec sursis. Vous ne m’avez pas accablé. J’ai repris ma place dans la société et n’ai jamais plus admiré les lambris d’un prétoire.


Pierre-Antoine

@Xavier NEBOUT

La justice moyenâgeuse se réclamait du Divin. Et le châtiment n'avait pour d'autre but que la repentance qui seule permettait d'échapper d'en l'au-delà au jugement de Dieu. Jugement que l'on pouvait réclamer "in vivo" pour prouver son innocence.

Pour avoir vu venir "intramuros" aux offices religieux de nombreuses personnes je ne suis suis pas du tout certain que la repentance fut leur unique motivation.

Il y a une énorme différence entre regretter les conséquences sur soi de son acte et assumer la responsabilité des conséquences de ce même acte sur sa victime.

La repentance procède du "j'ai péché contre le ciel et contre toi" sans rien rajouter d'autre.

Je résumerai pour en avoir côtoyé d'authentiques : "Assumer et se taire !".

Cordialement

Pierre-Antoine

Véronique Raffeneau

@ M. Nebout

Juste une réaction, en légère marge du billet.

Si vous lisez le livre d'Antoine Garapon et de Ioannis Papadopoulos :

"Juger en Amérique et en France" - Odile Jacob, 2003

et plus particulièrement le chapitre: "La peine: tarif ou réhabilitation", vous vous rendrez compte que ce qui fondamentalement, en matière de peine, distingue le système américain du système français est le fait que pour le premier la peine est une rétribution du crime ou du délit, pour le second, elle basée sur son individualisation.

En rapide, le système américain considère le crime, le système français le criminel.

Le premier trouve son origine dans la philosophie protestante et puritaine qui privilégie la conscience de la liberté individuelle, tandis que le second, d'inspiration catholique, privilégie la notion de dignité humaine.

Cela dit assez sommairement, si nous considérons la richesse du livre.

Pour qui désire connaître les différences fondamentales entre les deux philosophies judiciaires, je conseille vivement la lecture de cet ouvrage qui, s'il n'est pas toujours très aisé à lire, permet de les comprendre sur le fond et sur l'essentiel.

Et aussi, le fait de lire un ouvrage comparatif, en réalité, c'est assez curieux, mais c'est encore de cette façon qu'on apprend et qu’on comprend mieux les fondements du système français.

phineus

@semtob
Sur les carences de la symbolisation vous pouvez peut-être renvoyer à Freud mais de grâce ne dites pas de sottises en évoquant Piaget : jamais celui-ci ne s'est occupé de pathologie chez l'enfant (et encore moins chez l'adulte !). Ses études expérimentales concernaient l'épistémologie génétique et justement visaient à dégager les lois universelles du développement cognitif ; en particulier il s'attachait à démontrer que la fonction symbolique apparaît chez tous les enfants à peu près au même moment, faisant suite à l'exercice d'une intelligence uniquement sensori-motrice.

Xavier NEBOUT

Étrange de ne pas voir ici la prison comme lieu de repentance, alors que la remise de peine est largement subordonnée à l'aveu, notamment en cas de crime sexuel avec l'intervention de force psychologues.

Il semble que l'esprit du Moyen Age épouvante alors qu'on aurait tant à en apprendre.
La prison "fermée" ou "ouverte" était alors surtout préventive. La peine relevait le plus souvent du supplice ou de la mort. A la fin du Moyen Age, la plupart des voleurs étaient pendus. En tout état de cause, le premier devoir du geôlier était de veiller à ne pas avilir les âmes.
C'est dans les prisons des monastères que se trouve "l'idéal carcéral". De son cachot, le prisonnier entendait les offices par des canaux auditifs pratiqués dans les murs et ne parlait qu'au chapelain confesseur. La rare condamnation à l'incarcération était à vie, sauf remise de peine... Il n'était pas rare que des prisonniers confiés à des monastères y finissent moines. Même de nos jours, n'importe quel délinquant soumis à un tel régime aurait toute chance de finir en saint homme.
En fait, ce qui épouvanterait aujourd'hui, c'est l'idée que la psychologie et la psychiatrie n'arrivent pas à la cheville des offices monastiques pour le traitement des psychés.

Dans un registre très différent, je m'étonne aussi de la méconnaissance des bagnes américains dont certains sont des réussites notoires.

Jean-Paul Ledun

Dans les années 70, où c'était la grande mode de mettre les patrons d'entreprises en prison, mon père est passé par cette case, pour une malversation de son comptable...

Je ne l'ai pas vu sortir de lá criminalisé, récidiviste et pleurnichard. Il y a eu faute. Il a assumé (pas comme certain) même si ce n'était pas vraiment nécessaire de le mettre en détention.

Qui a inventé la prison ? Les délinquants á la loi, il me semble.

Cette institution en en grand travaux et en pleine réorganisation. Il n'est que temps de cesser de mélanger les publics, de sortir de la vétusté, de dorloter ses fonctionnaires et d'ouvrir plus grandes les portes au monde extérieur pour commencer tout de suite le long travail de réinsertion et de reconstruction.

Il me semble que Mme Dati a commencé á mettre en œuvre cette politique.

Ce n'est jamais sans émotion que je relis la lettre du détenu PL s'adressant á son aîné, s'excusant d'avoir mis sa famille dans le pétrin.

Philippe, n’étiez-vous pas en poste á Lille en 1972 ? Roulement de tambour…

Jean-Louis

Monsieur le Haut Magistrat,

Comme vous le savez, gravitent autour des établissements pénitentiaires quantité de bénévolats, qui sont pour le citoyen qui en fait partie, un poste d’observation assez objectif.
Vous nous dites :
"Je ne discuterai pas l'obligation pour le pouvoir, non seulement de rendre plus effective l'exécution des peines - le garde des Sceaux a pris la mesure de ces carences graves - mais en même temps, de favoriser avec énergie une amélioration matérielle et humaine des conditions de l'enfermement."

Et pour ma part je ne discuterai pas de la philosophie de l’enfermement et de sa nécessité, mais seulement des conditions matérielles absolument abominables de nos établissements.
Je renvoie à une lettre ouverte de l’aumônier de la prison du Mans au garde des Sceaux Elisabeth Guigou, dans Le Figaro du 25 juillet 1997 :
« Il est un test que je vous invite à faire, madame : rentrer le matin à 7 heures dans une cellule. Vous vous heurterez à un mur, mur de fumée, mur d'odeur, mur de misère humaine. » C'est par ces mots que le père Michel Niaussat, aumônier de la prison du Mans, invite Elisabeth Guigou, le ministre de la Justice, à visiter ses geôles, dans une lettre publiée par Ouest-France… Cet établissement, conçu pour 56 places de détention et 12 de semi-liberté, accueille en permanence 160 détenus. Ceux-ci sont à quatre par cellule dans une promiscuité épouvantable et l'un d'eux est obligé de coucher sur un matelas à terre. (...) Ayant été reçu par un de vos prédécesseurs il y a quelques années, j'avoue qu'il y a un monde entre les lambris dorés de votre bureau et les cellules où je pénètre depuis vingt ans. (...) Qu'il est dur de parler d'un « cul de basse fosse » dans un environnement comme le vôtre.»

Certes des conditions d’hygiène normales, ne sont pas toute la solution, les prisons américaines sont là pour le prouver, mais la situation est absolument indigne de la France. Un ami avocat me disait récemment qu'il est inconcevable qu'un détenu n'ait pas droit à une toilette isolée...

At the mercy

Ce rapport montre également toute l'utilité des aménagements de peine qui permettent de diminuer le risque de récidive et augmentent les chances de réinsertion. Mais cet argument est hélas difficilement audible.

Jérôme

Bonjour,

Les arguments sont quasiment sophistes. Dire que la prison n'est pas bien faite et ne favorise pas la réinsertion ne signifie pas que la prison soit responsable des dérives de l'homme.
Dans le discours critique sur la prison j'entends plutôt qu'il est ridicule de se contenter d'enfermer, dans des conditions malsaines au moins dans les prisons d'arrêt, en pensant que cela suffit à la réhabilitation.
A trop vouloir "argutier" le discours devient un peu flou.

semtob

Cher Philippe,

Piaget a fait plusieurs recherches expérimentales qui nous apportent un éclairage intéressant pour tenter de répondre à votre question.
Un grand nombre d'individus n'ont pas accès à la symbolisation, ni à la représentation de la chose. L'accès à la bipédie lui-même demande l'entourage affectif. L'homme est avant tout social et affectif.
Nous avons tous des failles et un instinct de survie.
Notre société qui avait fait longtemps de sa majesté le bébé un projet de société de valeur a oublié son lendemain.
Tout individu doit se reconnaître dans le regard d'un autre qu'il soit tout petit ou très âgé.
L'exclusion scolaire tout comme l'exclusion de la société sans projet rend difficile un développement harmonieux.
Comment peut-on imaginer que l'on puisse aider un individu souffrant d'une carence affective en lui proposant une carence sociétale?
Comment peut-on imaginer que l'humiliation soit un remède à la blessure narcissique?
Vous êtes-vous trouvé un jour devant un individu sorti d'un haut quartier de sécurité? Pensez-vous avoir apporté une solution tant pour cet individu que pour celui qui l'entoure ou se trouve sur son chemin à sa sortie?
Notre société est comme l'enfant qui découvre qu'un problème peut avoir plusieurs solutions.
Notre société oublie que chaque individu est unique et qu'une modélisation de réponse est stupide.
Certains individus cherchent des limites dans les murs de la prison. C'est que personne ne leur a donné les moyens d'accès à la symbolisation ni à se construire un sur-moi, l'intégration des valeurs parentales et culturelles.
Il existe un travail énorme à réaliser qui est un effort de compréhension. Translater un problème dans le temps n'est pas une réponse adaptée.
Mais, de tout cela vous ne le savez que trop comme de l'erreur statistique lorsqu'il s'agit de l'humain.Conduire un humain, lui montrer l'accès à autre chose c'est déjà ça.
françoise et karell semtob

Nordine

Je suis surpris par votre conclusion. Quand la prison n'a pas de prise sur certains individus, c'est qu'ils ont le mal ancré en eux? Pas d'autres alternatives? Je ne pense pas que l'homme soit bon par nature, encore moins mauvais. Il n'y a pas de monstre, il n'y a qu'une suite de défaillances de la société.
Si votre théorie bien pessimiste tenait, il y aurait le même taux constant de récidive dans tous les pays et c'est loin d'être le cas.

Herman Kerhost

Les libéraux aiment la prison pour les pauvres...

Les communistes aiment la prison pour les riches...

Choisis ton camp, camarade !...

"Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes" aurait dit l'autre...

Duval Uzan

Cette étude a omis de tenir compte des millions de citoyens qui ne commettent aucun délit par crainte de l'incarcération.
Elle n'a donc aucune valeur.

Pierre-Antoine

Pour avoir exercé une charge pastorale en détention pendant 13 ans, je peux dire que tous les chiffres ne servent à rien pour comprendre la condition carcérale. J'y ai vu des personnes faire de sérieux retours sur elles-mêmes et sortir changées. J'en ai vu qui revenaient plusieurs fois en un ou deux ans. Ils ont certainement fait gonfler le taux de récidive, mais trois récidives pour une seule personne ça compte pour combien dans les statistiques ?
J'ai vu des bandes de jeunes s'organiser intramuros et se reproduire extramuros (j'habite depuis 1989 un quartier dit sensible).
Les chiffres comme le dit DMonodBroca dans son commentaire, bien torturés on leur fait dire ce qu'on veut.

Les bons sentiments envers les personnes incarcérées ne vont guère plus loin que le journal du lendemain.

La prison est un mal indispensable, non pas comme l'amputation d'un membre grangrené l'est pour le corps, mais comme l'hospitalisation l'est pour un malade le temps qu'il retrouve sa santé et son équilibre.

Tant que l'humain restera aux portes de la prison et n'aura pas droit de cité en cellule, alors tous les chiffres et beaux programmes ne serviront à rien.

Je ne crois absolument pas à la vertu pédagogique de l'enfermement pour l'enfermement, mais je crois à la vertu pédagogique de l'exemple de l'extérieur vers l'intérieur...
Tant que les portes seront fermées pour empêcher ceux qui ont à coeur de tendre la main de rentrer, rien ne changera.

La solitude est salutaire à condition qu'elle prépare à la rencontre.

La prison n'existe et ne peut être coupable, si culpabilité il doit y avoir, que par les hommes qui sont en charge de la gérer.

Cordialement

Pierre-Antoine

Jean-Dominique Reffait

Comment ne pas partager le fait que vous placiez le curseur au milieu : la prison n'est ni coupable de tout ni coupable de rien en matière de récidive. D'un point de vue général, c'est évident. C'est forcément différent lorsqu'on segmente les publics concernés.
Qu'est-ce que la prison sinon la plus grande association de malfaiteurs qui soit ? Et l'on voudrait qu'en plongeant un jeune délinquant là-dedans, il en ressorte avec un sens moral affermi ? Que fait-on pour cela ?
La prison devrait être au pire la privation de liberté, au mieux un lieu d'amendement et de progrès personnel. En fait elle a dépassé le pire et s'est éloignée du meilleur, elle est un levier pour la récidive, elle ne dispose d'aucun outil sérieux pour le progrès personnel.
Certes on peut toujours compter sur la malignité humaine pour trouver toujours de bonnes raisons de s'affranchir des règles communes, certes il en est que la malfaisance n'effraient pas, que le sens moral ne chatouille pas, c'est ce qui les conduit en prison.
Mais que la prison, en tant que représentation institutionnelle, amplifie les travers des condamnés, c'est cela qui est choquant et si l'on ne peut pas attendre d'un caïd qu'il exerce une influence positive sur le jeune débarqué, on aurait pu espérer que l'institution renverserait ce penchant nuisible. Au contraire, elle exacerbe les mauvaises tendances, elle efface les frontières morales dans un univers carcéral amoral, elle laisse faire le pire sans disposer des moyens d'encourager le meilleur.
Vous vous consolez que la prison ne soit la seule coupable de la récidive, je m'indigne qu'elle figure malgré tout parmi les coupables et qu'une institution contribue, malgré elle et aussi peu que ce soit, au développement de la délinquance.

lo

Curieusement vous oubliez le passage de l'article où il est précisé que ceux qui ont bénéficié d'une remise de peine, d'une liberté conditionnelle ont moins tendance à récidiver que ceux qui ont purgé la totalité de leur peine.

Cette donnée me paraît essentielle pour départager les tenants des peines lourdes et exécutées jusqu'au bout des partisans des aménagements et de l'individualisation des peines.

Thierry SAGARDOYTHO

Le titre de l'article paru dans Le Monde est trop manichéen pour tenir lieu de postulat. Il insiste toutefois à juste titre sur ce que chacun sait, et depuis longtemps : le temps carcéral est un temps pour rien. L'accompagnement psychologique spécialisé, la formation, l'ouverture vers l'extérieur souffrent de moyens faibles. Quel sens donner à la peine privative de liberté ? Aussi longtemps que cette question restera en friche, le débat sur le danger majeur de la récidive produira des articles de presse tels celui que vous brocardez. Ni angélisme, ni défaitisme.

DMonodBroca

Il faut se méfier des chiffres. Comme disait Alfred Sauvy : torturés, ils avouent tout ce qu’on leur demande d’avouer.
Et il faut se méfier des études quantitatives. Des prisons sont surpeuplées, la violence en prison peut atteindre des niveaux indicibles, les suicides y sont fréquents, des détenus récidivistes libérés récidivent… Chacun de ces faits condamne la prison, sans qu’il soit nécessaire de dégainer des quantités.
Nous nous efforçons d’être une société raisonnable et rationnelle : en face de chaque crime il est légitime, indispensable, que la loi prévoie un châtiment. Oui, mais… Du coup de bâton à la peine capitale, nous avons supprimé tous les châtiments ! Il ne reste que la prison, châtiment qui ne dit pas son nom, châtiment qui ne fait pas couler le sang, châtiment invisible puisque psychologique, châtiment qui n’altère pas la bonne conscience de celui qui l’inflige, mais peine plus inhumaine parfois que tous les châtiments que par humanité nous avons supprimés.
La prison préventive a sa justification : il faut bien que la justice dispose de celui qu’elle va juger.
Mais la prison en tant que peine définitive, en tant que seule et unique peine (ou presque), devrait être remise en question. Par quoi la remplacer ? ou plutôt par quoi la compléter ? Difficile à dire, j’en conviens, et je n’ai guère de propositions à faire. Les travaux d’intérêt général, le bracelet électronique, etc., des prisons décentes aussi, me semblent aller dans la bonne voie. Il faudrait trouver autre chose...
La prison dans sa configuration actuelle est indigne. Les crimes méritent leur punition, mais nous devons faire l’effort de sortir de cette indignité.
Et au passage nous devons aussi combattre l’idée, aussi répandue que fallacieuse, selon laquelle le châtiment du coupable est nécessaire à la consolation des victimes ou au deuil de leurs proches.

La prison n’est certes pas la seule coupable en matière de récidive, mais elle porte une part de responsabilité et cela justifie qu’on s’interroge. Chaque homme est responsable de ses actes, et donc chaque récidiviste de chacune de ses récidives. Oui, c’est vrai. Nous ne pouvons pas agir à la place d’autrui, mais nous pouvons agir sur ce qui a de l’influence sur lui.

Jabiru

La prison devrait n'être principalement que la privation de liberté d'un individu censé payer sa dette morale à ses victimes et à la société. Malheureusement c'est le lieu de tous les dangers et cela n'est pas acceptable.

Krugger

"la prison serait responsable de la récidive délictuelle et criminelle" ?

C'est un point de vue... qui se discute.

Toujours est-il que des "expériences" dans ce domaine ont été menées, notamment aux États-Unis, et qui ont le mérite d'apporter de nouvelles variables à la problématique ; variables qu'on ne peut, avec honnêteté, ignorer ou occulter - http://fr.wikipedia.org/wiki/Joe_Arpaio

Ce shérif est très critiqué à l'extérieur, mais plébiscité dans son district. Les résultats qu'il annonce, ou prétend avoir, peuvent très certainement être interprétés ou contestés à volonté, mais avouez que tout n'est pas à jeter et qu'il y a matière à réflexion !

Très cordialement, M. Bilger.

JMT

Il y a quelques années, le taux de récidive était, paraît-il, beaucoup plus bas et on nous assénait volontiers qu'il ne dépassait pas 7 %. Ceci était un prétexte pour réclamer un assouplissement de la politique pénale. Ceci fait penser, comme toujours, à la trahison des clercs. Il y a des gens qui savent et qui cachent. Comme il fut un temps à l'INSEE, comme il est de règle en politique.

Temoignagefiscal

Bonjour,
Je poserais le problème différemment: le délinquant est-il lucide?
Dans le monde qui m'intéresse et que je connais bien, celui de l'économie, il y a des règles. Ces règles sont simples: respect de la propriété, de la parole donnée, du mandat reçu, des engagements pris, etc. Bien que simples, ces règles sont complètement perdues de vue par les opérateurs économiques, mais aussi par les tribunaux. Leur simplicité nuit à ces règles, face à un corps social se pensant beaucoup plus sophistiqué. Chaque jour j'assiste à la transgression de ces règles. J'observe, objectivement, que les transgresseurs n'ont pas conscience de leurs dérives et les tribunaux non plus.
Alors la prison ne veut plus rien dire. Que vient-elle faire lorsqu'elle sanctionne une faute que le délinquant pense sincèrement ne pas avoir commise? D'autant plus qu'il se trouve toujours une partie de l'opinion pour le conforter dans son déni. Par exemple est-ce mal de voler un riche, une banque? Non bien sûr, eux-mêmes sont tellement voleurs…ce n'est que vengeance légitime pense le plus grand nombre !!!
Comment imaginer que la prison, sanction ultime d'une société civilisée (dans une société barbare on passe directement à la case exécution), puisse avoir une autre fonction, dans ces conditions, que de mettre le "problème" de côté? Comment ne ressortirait-il pas un peu plus tard, puisqu'il n'est pas réglé?
En fait, il n'y a plus de règles claires dans notre société, plus de règles acceptées par tous. De ce fait, la prison devient inévitablement un lieu d'injustice, puisque sa fonction est de sanctionner une transgression et que le flou des règles rend les transgressions et les sanctions elles-mêmes floues.
Cette relativité par rapport aux règles est-elle un progrès ou au contraire une régression? Là est le vrai problème. Ce n'est qu'après avoir pris position sur cette question que l'on peut débattre de la prison.
Cordialement. H. Dumas

Xavier NEBOUT

Le sens de la prison fut longtemps dans l’isolement du monde propre au repentir ; c'est la vision de l’aura qui devait permettre de connaître le moment opportun de la liberté.
Malheureusement, comme la populace ne cesse de s’enfoncer dans son ignorance et l’abaissement de l’esprit, nous ne sommes pas près de voir à nouveau la gestion des prisons confiée à des moines.

Ceci dit, sans aller jusque-là, on pourrait concevoir que l’avilissement des âmes ou atteinte à la dignité tel qu’on le connaît dans nos prisons, relève du crime contre l’humanité.

Or, nous avons entendu F.Hollande projeter de satisfaire les enseignants - noyau dur de l'électorat socialiste - en sacrifiant le programme de construction et de rénovation des prisons.

Nous voyons ainsi la véritable nature d’un arriviste sans scrupules dissimulé sous un air de sainte-nitouche.

Franck Boizard

La ré-insertion n'est (ou ne devrait être) qu'une mission secondaire de la prison.

Sa mission principale est de protéger la société en mettant hors d'état de nuire des criminels et, ce faisant, de rappeler qu'il faut respecter la loi.

Achille

Je ne suis jamais allé en prison (Dieu m’en garde, s’il existe !) mais j’imagine sans mal que ce milieu est terriblement traumatisant, en particulier pour un jeune délinquant. C’est une véritable jungle où les « caïds » dictent leur loi. L’instinct de survie refait surface comme à l’aube de l’humanité et le cerveau reptilien est bien plus sollicité que les couches supérieures.

Comment s’étonner alors que lorsqu’on relâche un détenu qui a passé ne serait-ce que quelques mois dans cet enfer il ne soit pas retourné à l’état sauvage et ne récidive pas.

Le monde carcéral est complètement à reconsidérer pour resocialiser les détenus. Par ailleurs combien d’employeurs acceptent de prendre un ancien prisonnier dans leur entreprise ?

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