En Tunisie, comme il était prévu et, par beaucoup, craint, le mouvement islamiste Ennahda est arrivé largement en tête dans le premier scrutin libre de l'après-Ben Ali. Même s'il y a eu des fraudes comme certains l'affirment, la victoire est éclatante et suscite évidemment l'inquiétude. Ce n'est pas l'expression "démocratie islamiste" employée par Rached Ghannouchi qui est de nature à rassurer (Le Parisien, France Inter, Le Monde).
Débarrassée de Kadhafi enterré en secret, la Lybie, malgré la joie collective de beaucoup de Libyens devant la "libération" qui n'a été possible que grâce aux forces de l'OTAN et, en définitive, à l'exécution du Guide, continue de susciter le trouble, voire l'angoisse chez tous ceux qui ne perçoivent pas l'Histoire des peuples comme une ascension obligatoire vers la lumière.
Il n'était pas nécessaire de se poser en spécialiste de la vie internationale pour être persuadé que Kadhafi ne demeurerait pas vivant. Trop de menaces et trop de secrets. Cette intuition partagée semble confirmée si on ajoute foi à l'information du Canard enchaîné selon laquelle "Kadhafi (avait été) condamné à mort par Washington et Paris... de peur qu'il ne parle trop lors de son procès devant la Cour pénale internationale". Avant cette mort programmée, il y a eu les images de son ignominieuse capture dont une vidéo (nouvelobs.com) nous montre les péripéties indignes et honteuses. La lâcheté et la fureur, en même temps, de ce groupe frappant et humiliant un homme déjà gravement blessé donnent la nausée. Je comprends, regardant cette séquence, pourquoi j'ai toujours détesté les multitudes livrées à elles-mêmes et donc trop souvent à l'abject. Le tour de force involontaire de ces "libérateurs" a été de faire passer Kadhafi sanguinolent pour un personnage quasiment christique !
Au-delà de ces scènes terrifiantes, il y a l'instauration de la charia, la polygamie acceptée, un changement de société que quelques islamologues distingués, avec leur tolérance habituelle jusqu'au prochain démenti du réel, minimisent. Il est vrai qu'on nous annonce - quelle concession ! - que les femmes auront le droit d'être en maillot de bain à la plage (20 minutes).
Alain Juppé, qui sait concilier l'optimisme de l'action avec le pessimisme de l'intelligence, formule, une fois de plus, un propos pertinent lorsqu'il affirme : "Il ne faut pas se crisper sur la peur mais allier vigilance et confiance... Je ne me résigne pas à penser que les peuples arabes sont condamnés à devoir choisir entre la dictature ou des régimes islamistes radicaux" (Le Figaro).
Certes, il ne faut pas "se résigner" mais pourtant ! Qui n'est pas saisi d'étonnement, voire d'incrédulité devant l'évolution de ces pays qui, libérés du pire, s'engouffrent avec une sorte d'empressement qui pour être religieux n'en est pas moins étrange, vers un risque de caporalisation personnelle, familiale et sociale, et semblent accepter par avance les contraintes, les servitudes, les inégalités d'un monde qu'ils s'acharnent à sublimer ? Alain Juppé pose la bonne question. Tout se passe comme si d'un balancier à l'autre, l'Histoire ne savait pas s'arrêter là où il conviendrait. Entre l'horreur d'une dictature rejetée et la détestation d'un Etat islamiste, entre le pire puis le pire.
Rien encore n'est irréversible. On a toujours le droit de rêver mais les yeux plus que jamais ouverts.
Rien de nouveau sous le soleil.
"Les révolutions n'ont généralement pour résultat qu'un déplacement de servitude".
(Gustave Le Bon)
Rédigé par : Suntzu | 06 novembre 2011 à 18:06
Les Tunisiens, contrairement au Libyens, viennent d'offrir leur jeune République aux islamistes de Nahda sans garde-fou ni contre-pouvoir. Que signifie une assemblée constituante dans un pays musulman à 90% et de rite malikite à plus de 90% ? Avec une langue arabe comme outils de gouvernance, MM. Bourguiba et Ben Ali ont gommé par l’école et les médias tous les autres parler. Je me demande qui a recommandé cette constituante qui fera plonger le pays dans des pertes de temps et des concessions insensées. Au final deux courants qui sont maintenant distincts mais finiront par devenir un (les islamistes et les panarabistes) seront les grands vainqueurs. En Algérie, pour ne pas rendre de comptes sur le gaspillage, le népotisme et toutes les trahisons, Chadli et ses conseillers se sont empressés de légaliser les islamistes et par la suite de leur dérouler le tapis rouge (mosquées, système éducatif, assemblées communales). Résultat : une société renfermée sur elle, rétrograde et matérialiste. Le spirituel n'est qu'habillage et fond de commerce. Heureusement les Janviéristes, en arrêtant le processus morbide, ont poussé les islamistes à abattre toutes leurs cartes. Devinez ce qui était dedans : tueries, mensonges, corruptions (autoroute est/ouest) et lutte de pouvoir (déchirement entre leaders islamistes pour des strapontins de pouvoir) et étalement de leur richesse acquises par le truchement de marchés truqués, maintenant qu'ils gèrent des communes et siègent dans les commissions de marchés, sans parler de la défiguration des espaces urbains.
Amis tunisiens j'ai mal pour vous.
Rédigé par : sounas | 02 novembre 2011 à 12:36
Laissons donc ces peuples voir le paradis à leur portée, nous avons le nôtre et nos propres idéaux. Il faut juste veiller à ce que chacun puisse, chez soi, vivre de la façon qui lui convient, sans interférence aucune venue de l'extérieur : "notre liberté s'arrête là où commence celle de notre voisin", ceci étant valable aussi bien pour nous français que pour les autres.
Rédigé par : sophie.mnop | 30 octobre 2011 à 09:20
Jane,
J'aime ce blog autant pour les billets de Philippe Bilger que pour les commentaires qui les accompagnent. Les deux sont parfois aussi inspirés qu'inspirants.
Normal qu'il arrive que des imbécilités soient soutenues. Ca n'enlève rien à la qualité du blog et à leurs auteurs qui sur d'autres sujets peuvent être vraiment intéressants.
Comme tout le monde, j'ai dû en écrire. Je revendique ma part de médiocrité. Personne n'est parfait: Dieu a bien créé les hommes.
Rédigé par : Nordine | 29 octobre 2011 à 15:33
Nordine,
lu et vu sous l'angle : la France blabla,
tu l'aimes blabla !
C'est exactement ce que je disais et
ces phrases prédigérées ne me concernent
pas ; j'avais employé le mot subtilité !
-Les imbécilités que vous lisez ici-
ce blog n'est peut-être pas à la hauteur
de vos recherches intellectuelles.
Rédigé par : calamity jane | 29 octobre 2011 à 09:03
Ce brave homme vient aussi de rentrer en Tunisie...
http://www.tunisienumerique.com/2011/10/urgent-salah-karkar-le-fondateur-et-ex-dirigent-dennahdha-est-de-retour/
J'entends au loin la chanson joyeuse de liberté.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 28 octobre 2011 à 20:35
Décidément, pas évident après beaucoup de temps à signer "Herman" de jongler sur deux signatures sans se planter.
Bravo encore Jean-Dominique, pour votre assiduité...
Rédigé par : herman | 28 octobre 2011 à 20:15
"Il ne savait pas que j'étais Satan dans ses propres murs"
Excellent ! Mort de rire ce matin avant de partir au boulot.
Rédigé par : herman Kerhost | 28 octobre 2011 à 20:08
Pour l'Occident, qu'est-ce qui est mieux : des pays sous dictature comme l'Iran du Shah, l'Irak de Saddam Hussein, l'Egypte de Moubarak, la Tunisie de Ben Ali, la Libye de Moammar Kadhafi , etc etc.
Ou les mêmes pays révolutionnés sous une autre dictature pas vraiment meilleure appelée charia ?
Rédigé par : pierre-alain germond | 28 octobre 2011 à 18:11
@ calamity jane
"Nordine, calmez-vous, vous n'êtes que le
xième d'une suite de personnes venant
d'ailleurs que les Français ont reçues dans
leur pays ! La Tunisie est libérée, s'est
libérée, tant mieux pour le peuple mais
permettez-moi de vous dire que quarante
années sont insuffisantes pour connaître
toutes les subtilités d'un peuple fût-il
français... et encore en l'aimant."
Raté.
Je suis français, né en France, résidant en France.
A ce titre vous comprendrez que je ne peux pas vous accorder la permission de me dire "blabla... La France tu l'aimes ou blabla...."
Je n'ai aucun lien personnel avec la Tunisie. Comme vous je me félicite du tournant historique du pays libéré de la dictature de Ben Ali.
J'approuve votre appel au calme, mais voyez-vous, j'approche la quarantaine, donc voilà, les imbécilités que j'ai pu lire ici je les entends depuis que j'ai des oreilles et cet acouphène chronique finit par taper sur les nerfs.
Rédigé par : Nordine | 28 octobre 2011 à 17:31
Nordine, calmez-vous, vous n'êtes que le
xième d'une suite de personnes venant
d'ailleurs que les Français ont reçues dans
leur pays ! La Tunisie est libérée, s'est
libérée, tant mieux pour le peuple mais
permettez-moi de vous dire que quarante
années sont insuffisantes pour connaître
toutes les subtilités d'un peuple fût-il
français... et encore en l'aimant.
Rédigé par : calamity jane | 28 octobre 2011 à 14:38
J'ai lu ça :
"Le peuple a dit son mot en Tunisie : alors taisez-vous et écoutez notre chanson joyeuse de liberté plutôt que nous gonfler avec vos orchestres classiques ennuyeux."
..........................
Quelle belle chanson ! MDR !
C'est le muezzin qui a gagné au casting de l'émission de "La nouvelle star" tunisienne ???
Vous pourriez aussi comme pour Lourdes et sa basilique , faire des minis minarets musicaux qui diffuseraient des appels à la prière, ça relancerait le tourisme !
Ne me remerciez pas, c'est de bon coeur.
Rédigé par : sylvain | 28 octobre 2011 à 14:26
C'est bien ce que j'écrivais dans mon commentaire d'hier, pas de quoi chouetter un fat ou fouetter une charia, ce genre d'homme inspire plutôt confiance
http://www.lemonde.fr/tunisie/article/2011/10/28/les-priorites-politiques-du-nouvel-homme-fort-de-tunisie_1595530_1466522.html#ens_id=1585247
Quant aux Tunisiens qui nous donnent ici des leçons, nous ne les retenons pas, ils ont un paradis à bâtir... chez eux.
AO
Rédigé par : AOursi | 28 octobre 2011 à 14:18
Merci pour votre "lumière" grand prêtre mais gardez-la ainsi que vos croyances.
J’espère que les Tunisiens, les Libyens et les Egyptiens pourront revenir au Coran avec la compréhension du prophète et de ses compagnons.
Je le souhaite également pour le monde entier car selon le Coran, il faut souhaiter aux autres ce que l'on souhaite pour soi.
J’espère que leurs dirigeants seront à la hauteur de cette immense responsabilité à laquelle selon moi ils n'auraient jamais dû prétendre car on ne donne pas le pouvoir à celui qui le demande.
Rédigé par : minari | 28 octobre 2011 à 12:50
Rédigé par : Nordine | 28 octobre 2011 à 01:15
Vous nous prouvez en effet qu'il y a bien un monde judéo-chrétien d'un côté et un monde arabe de l'autre... et que c'est le second qui mendie depuis des décennies le droit de venir s'installer chez celui qu'il se vante d'avoir dégagé...
C'est vrai que la comparaison des deux Etats d'avancement vous ridiculise si bas que vous avez tout intérêt à vous insinuer pour diluer votre médiocrité de ce sournois mélange.
Quelques-uns ne sont guère dupes...
AO
Rédigé par : AOursi | 28 octobre 2011 à 12:33
@Franck Boizard
Les débats hypocrites sur l'Islam, le voile, la burqa, les arabes, l'immigration blablabla, ça fait quarante ans que ça dure... j'en ai un peu soupé aussi merci.
Rédigé par : Nordine | 28 octobre 2011 à 10:56
Rédigé par : Adel Tounsi | 28 octobre 2011 à 10:02
Ca c'est gracieux, devriez prendre garde qu'on ne vous "dégage" d'ici peu d'années, comme vous dites, comme vous vantez de l'avoir fait... ça ne serait pas difficile.
AO
Rédigé par : oursivi | 28 octobre 2011 à 10:46
Non mais vous vous croyez où ?
La Tunisie est libre et souveraine depuis 1956, je vous signale. On vous a dégagés, je vous signale !!!
De même en 2011, au moment où vous souhaitiez approvisionner votre pion Ben Ali en armes de répression, nous l'avons fait fuir, alors je vous en prie, votre blague sur les droits de l'homme gardez-la pour vous.
Le peuple a dit son mot en Tunisie : alors taisez-vous et écoutez notre chanson joyeuse de liberté plutôt que nous gonfler avec vos orchestres classiques ennuyeux.
Rédigé par : Adel Tounsi | 28 octobre 2011 à 10:02
Pour ma part, j'ai un principe simple : je suis souverainiste.
Aller emmerder les autres chez eux, c'est une erreur, y compris la colonisation, le messianisme mondialiste et l'humanitaire (très cousins). Réciproquement, quand les autres viennent m'emmerder chez moi, j'ai le droit de me défendre.
Les Libyens, les Tunisiens, les Egyptiens étaient gouvernés par de méchants dictateurs ? C'est peut-être dommage pour eux, mais ce n'est pas notre problème.
Rédigé par : Franck Boizard | 28 octobre 2011 à 09:21
La remarque de JDR reprise bêtement par Nordine (la reductio ad hitlerum, on en a déjà eu notre dose, merci) est intéressante.
Des connaisseurs de l'islam estiment que l'islamisme est une réaction de défense face à la mondialisation consumériste et à la féminisation qui l'accompagne. L'islamisme serait, à long terme, un aveu de faiblesse.
Mais à long terme, nous serons tous morts et l'islamisme est aujourd'hui une menace.
Rédigé par : Franck Boizard | 28 octobre 2011 à 08:33
Ce qui est aujourd'hui observable est le changement de ton des responsables et commentateurs français tempérant leurs premières réactions de victoire et de "libération" de la Libye.
Je pense en tout premier lieu à Bernard-Henri Lévy dans Le Point, lequel a enfin pris conscience qu'il ne pourra pas tenir sérieusement et de façon crédible son discours initial exprimé sur Europe 1 se résumant à dire que bon, tous comptes faits, Kadhafi l'avait bien cherché.
J'ai réécouté le C dans l'air du 20 octobre où l'impassibilité des invités à l'image de celle de BHL face à la séquence ignominieuse de la fin de Kadhafi - dont les images terrifiantes tournaient alors en boucle - est proprement ahurissante.
Je ne peux pas m'empêcher de comprendre ces images si complaisamment relayées comme une façon pour le CNT de dire à l'OTAN et aux occidentaux engagés en Libye de quelle manière nous sommes... alliés.
Merci Philippe pour ce second billet face à cette ignominie qui restera, qu'on le veuille ou non, comme l'image fondatrice de la Libye "libérée", celle qui balaie d’un coup d’un seul toutes les autres.
J'aurais souhaité la même fermeté dans les mots, une semblable manifestation de dégoût et une claire condamnation de la part des responsables politiques français et des intellectuels grands supporteurs du CNT.
Quant à la charia décrétée si précipitamment et en l'absence de la plus petite traduction de démocratie par l'ancien ministre de la Justice de Kadhafi, je pense que c'est aussi pour le CNT une manière de dire sans ambiguïté aux occidentaux la vraie couleur de notre alliance.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 28 octobre 2011 à 06:09
@ Jean-Dominique Reffait
"C'est paradoxal, car plus matérialiste qu'un arabe, c'est difficile à imaginer : ils sont pour la plupart accrocs à la consommation, au paraître, à la détention de biens."
Il y a bien évidemment une coquille dans votre intervention. Il s'agissait de lire "juif" en lieu et place de "arabe".
Mais je pense que chaque lecteur aura rectifié de lui-même.
Rédigé par : Nordine | 28 octobre 2011 à 01:15
@Jean-Dominique
Vous êtes allé dans un restaurant chinois halal. Conclusion tous les musulmans sont naïfs donc inoffensifs.
Wahou ! Démonstration imparable en effet. Quand je pense à tous ces chercheurs, ces anthropologues, ces linguistes, ces sociologues qui après des années de travaux restent encore perdus dans un tourbillon d'incertitudes... La réponse était juste là, à quelques kilomètres, sous leur yeux pour ainsi dire: le restaurant chinois halal de Vitry-sur-Seine.
N'hésitez pas à narrer vos prochaines sorties gastronomiques, j'ai hâte d'en savoir plus sur les mystères du genre humain.
Rédigé par : Nordine | 28 octobre 2011 à 01:07
@ xc
« La thèse selon laquelle Kadhafi aurait été "liquidé" pour l'empêcher de parler me laisse sceptique.
S'il est vrai qu'il détenait des secrets, ceux-ci n'étaient assurément pas de nature à faire tomber des têtes. »
Pour que la justice internationale fonctionne, il faut que les accusés se comportent comme de bons clients. Le procès des khmers rouges est en train de tourner en capilotade. Le procès de Milosevic a mal tourné. Celui de Karadzic patine depuis trois ans. Le seul procès qui a donné quelques résultats est celui des génocidaires rwandais devant le tribunal d’Arusha : ce sont de bons clients, parce que les bons Pères leur ont inculqué la notion de repentance.
Un procès de Kadhafi devant la CPI aurait tourné à la farce. Même Maître Badinter n’a pas protesté contre la peine de mort appliquée à icelui.
Rédigé par : Libérus | 27 octobre 2011 à 23:45
@Jean-Dominique
Je comprends votre point de vue.
Mais imaginez, alors que l'on parle d'enseigner l'arabe dans les écoles françaises, qu'un homme ou une femme politique ose parler de pollution de la langue de Molière... l'immense tollé de la classe politique hypocrite toutes tendances confondues, la fatwa lancée contre l'auteur de ce sacrilège, le discours sur la bête immonde rappelant "les heures les plus sombres de notre histoire"... patati patata.........
Rédigé par : hameau dans les nuages | 27 octobre 2011 à 23:44
Hameau dans les nuages :
"parti islamique parlant pour la langue française de pollution linguistique..."
Le terme de pollution est fort mais accepteriez-vous tranquillement que votre langue soit délaissée pour la langue de l'ancien colonisateur ? C'est vite fait d'analyser les choses de notre point de vue, il faut, je pense, toujours se placer sur le terrain de celui qui s'exprime. La langue française n'est pas que la langue de Molière ou de Voltaire, c'est aussi, pour nombre de peuples, la langue de l'ancien occupant.
Nous trouvons normal de nous battre en France contre l'usage effréné d'anglicismes, alors que nous n'avons pas connu d'occupation totalitaire anglo-saxonne.
Cela dit, les Tunisiens feraient bien d'y réfléchir à deux fois : les tentatives d'arabisation au Maroc et en Algérie se sont soldées par des échecs à l'école et à l'université.
"Les importantes populations maghrébines en France (après la Libye, l'Algérie ?) sont avec leurs dissensions de véritables bombes à retardement."
Non, il n'y a aucun risque de ce côté à court ou moyen terme. A long terme, il faudrait avoir une boule de cristal. Les Tunisiens qui ont voté Ennahda en France ignorent tout de ce parti : pour eux, il représente la légitimité de l'opposition frontale à Ben Ali. Aucun parti laïc n'est parvenu à jouer ce rôle dans le passé. Mais voilà, les maghrébins de France clament "Islam, islam !" comme "Halal, halal !" sans comprendre que le label Halal ne sert qu'à leur vendre cher des sous-produits infects.
Anecdote : mon beau-frère marocain, intelligent et fort instruit, est pieux. C'est, de son propre aveu, la meilleure façon qu'il ait trouvée de combattre son athéisme lancinant. Il m'a conseillé un restaurant chinois halal à Vitry, pas cher et à volonté. Peu enthousiaste, j'y suis allé avec ma femme. Le décor y est miteux, la salle pleine de barbus et de voilées. Le patron fait l'article en me prenant pour un converti - il ne savait pas que j'étais Satan dans ses propres murs - en ne s'adressant qu'à moi et non à ma femme, pourtant musulmane officielle, et me vante son halal. En fait, c'est plus cher qu'un autre chinois bas de gamme, c'est moche, c'est infect, c'est un piège à cons et ça marche, bref, c'est halal. J'ai prévenu mon beau-frère de l'arnaque et il retourne chez des chinois normaux bien de chez nous. Mon expérience me démontre chaque jour qu'avant tout, être musulman, c'est être d'une extraordinaire naïveté. Ils tombent dans tous les panneaux. Rien de dangereux.
Rédigé par : Jean-Dominique @ Hameau dans les nuages | 27 octobre 2011 à 23:01
Il me semble qu'au sortir de la Seconde Guerre mondiale, après l'horreur nazie, plus de 30% des français se sont jetés dans les bras de la dictature communiste. Que se serait-il passé s'ils avaient eu la majorité ?
Heureusement, le pire n'est pas toujours certain !
Rédigé par : Polochon | 27 octobre 2011 à 22:47
"Il existe des hommes qui ne sont capables
d'aimer que contre quelqu'un".
On n'est pas obligés de les suivre.
Rédigé par : calamity jane | 27 octobre 2011 à 22:37
« La lâcheté et la fureur, en même temps, de ce groupe frappant et humiliant un homme déjà gravement blessé donnent la nausée. »
Il n’est pas inutile de relire, par exemple dans le livre de Jean Mistler « Le 14 Juillet » comment a fini le gouverneur de la Bastille (M. de Launay). Plus proche de nous, la pendaison de Mussolini et de sa maîtresse, ce ne fut pas mal non plus.
Rédigé par : Libérus | 27 octobre 2011 à 22:21
Bonjour,
Puis-je me permettre ce "copié-collé" directement issu de mon dernier billet.
"Une relation, pour qui j'ai la plus grande estime, me rappelait récemment Etienne de La Boétie qui, en 1550, écrivait le "Discours de la servitude volontaire". Dans cet essai, écrit à 18 ans, l'auteur explique que ce ne sont pas les tyrans qui asservissent le peuple, mais le peuple qui souhaite être asservi par les tyrans. Ce constat est régulièrement conforté par les "élections libres". Hier en Tunisie quand la population se jette dans les bras des religieux, demain quand les Français vont se jeter dans les bras de ceux, de droite ou de gauche, par qui ils souhaitent être asservis.
D'où vient cette étrangeté qui fait préférer aux hommes la servitude à la liberté. La Boétie pense que la servitude les rassure, donc que la liberté leur fait peur. C'est probable, mais c'est cher payé l'apparence de la sécurité.
Le plus troublant pour moi est la nécessité pour les serfs et les tyrans de se mettre d'accord sur un ennemi commun, à partir duquel ils vont justifier leur alliance délirante. C'est l'autre, le bouc émissaire, qui va payer la facture initiale. Mais la facture finale sera évidemment payée par les asservis, ceux-là même qui croyaient devoir leur vie à la destruction d'autres hommes. Quelle folie.
Tous les asservis et leur alliés les tyrans sont des guerriers en puissance, des faiseurs de guerre, puisqu'il leur faut un ennemi fédérateur commun. Pour les religieux ce sont les autres religions, pour les matérialistes ce sont les "riches", pour les prudes ce sont les libertins, pour les fonctionnaires et assimilés ce sont les contribuables, etc.
Le libéral que je suis n'a pas d'ennemi, même s'il a d'inévitables conflits. Pas d'ennemi car qu'importe la folie des asservis et de leurs tyrans, la vie reprendra ses droits, ces folies n'auront qu'un temps. Tyrans et asservis disparaîtront inévitablement terrassés par leur propre système. A quoi bon les haïr, alors qu'il y a tout lieu de les plaindre?
Le libéralisme a peu de succès, entre 10 et 20% d'une population développée, zéro pour cent chez les barbares. On lui reproche son iniquité, son manque de charité, son refus du partage, rien n'est moins vrai."
Nous sommes tous ébahis par les résultats de la démocratie, nous feignons de croire qu'elle serait naturelle à l'homme. En fait elle est son niveau ultime de sophistication.
Elle n'est pas utilisable lorsque la barbarie s'empare d'une société, y compris par la démocratie. Cordialement. H. Dumas
Rédigé par : Temoignagefiscal | 27 octobre 2011 à 19:09
Nouvelle démocratie tunisienne :
Interdiction de tisser des liens avec Israël... peine de mort.
Quinze ans de taule pour celui qui se convertit à la chrétienté.
Si ça c'est pas de la tolérance ! En plus, on a du pot c'est des modérés.
Ils en ont de la chance de vivre sous une démocratie très tolérante.
Rédigé par : sylvain | 27 octobre 2011 à 17:52
@ Nordine,
L'état de vigilance n'est pas un état
interventionniste. Autrement pensé : la
vigilance a déjà fait défaut et permettez-moi de compléter en écrivant que nous n'avons pas non plus (!) de conséquences
à en subir autres que celles découlant de
la politique générale d'un pays à l'égard
d'un autre.
"sous notre dictée"... il semblerait qu'une
partie volée de leur Histoire se soit déjà
accomplie sous notre dictée !
Globalement nous bénéficions du "politiquement correct" en ce sens que il y a belles
lurettes que nous n'assistons plus à de
grands débats contradictoires autres que
-ébats entre partis politiques-... ce qui
restreint leur propre action d'ailleurs.
C'est exactement ce que disait Bruckner
concernant le poids sur la tête de nos
bambins lorsque nous leur assénons de tout
faire pour "sauver la planète".
Rédigé par : calamity jane | 27 octobre 2011 à 14:14
@ Jean-Dominique Reffait :
"doit-on avoir peur, je crois que non""
Puissiez-vous avoir raison ! Les tunisiens de France ayant voté majoritairement aussi pour le parti islamique :
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/Monde/Les-Tunisiens-de-France-penchent-pour-Ennahda-_EG_-2011-10-24-727032
parti islamique parlant pour la langue française de pollution linguistique...
Les importantes populations maghrébines en France (après la Libye, l'Algérie ?) sont avec leurs dissensions de véritables bombes à retardement.
A pieds joints, droit dans ses bottes.......
Rédigé par : hameau dans les nuages | 27 octobre 2011 à 13:11
OUF, ENFIN LE BLOG REDEMARRE !!! Cher M. Bilger ne nous faites plus de frayeurs pareilles !!!
.......................................
Ce n'est pas demain que la démocratie verra le jour dans ces pays arabes qui en sont encore à l'ère de Mahomet.
J'ai été surpris de voir cette jeune fille en Tunisie remettre cette prison portative appelée niqab après la "révolution", et après avoir écouté la parole de ces prédicateurs.
S'ils ne veulent pas nous copier, c'est leur droit ! Ils et elles auront eu le choix cette fois-ci !
Ces révolutions sont du pain béni pour nos islamistes qui doivent avoir des ampoules à force de se frotter les mains
Rédigé par : sylvain | 27 octobre 2011 à 10:36
Monsieur le Haut Magistrat,
Vous rapportez Angeli dans le Canard Enchainé d’hier. Votre componction coutumière vous conduit à le relater avec grande mesure, alors que son article est accablant. Pour le Droit international, pour la diplomatie, pour notre Drapeau.
Je suis dans le vrai si je parle d’un assassinat, c’est-à-dire d’un meurtre prémédité. Il n’y a aucune unicité de situation dans ce que des journaleux ignares ont appelé les printemps arabes, lyriques et grégaires, copiant des formules créées chez les anglo-américains. Chaque pays est un cas particulier; il faut donc traiter de la Libye dans sa particularité. Avant ce saccage, un pays de 6,5 millions d’habitants où le bédouin faisait redescendre toute la manne des hydrocarbures vers la population. Pays riche. Poids de l’islam réduit; les femmes émancipées, habillées à l’occidentale, tenant en entreprises des postes de responsabilité, dans Tripoli une vie nocturne des plus attrayantes.
Pays aux quinze tribus, la Tunisie ayant toujours rêvé de la Tripolitaine, et l’Egypte de la Cyrénaique. Le bédouin était fantasque et imprévisible ? Et c’est une raison pour saccager un pays ? Nous sommes nombreux à avoir suivi (et supporté) les frasques du bédouin depuis 40 ans. Ce qui vient d’être fait est révélateur de l’inconséquence de l’heureux papa élu en Mai 2007. Qui ne laisse pas d’inquiéter. Vous citez Juppé. Le standard du technocrate fruit sec, collant aux bottes américaines dans toutes ses actions, et ce n’est pas d’aujourd’hui.
Le bédouin a eu 40 ans de liens avec tous les pays, au premier rang desquels les USA, hydrocarbures d’abord. Il fallait donc faire disparaître les archives, et les témoins. Le 8 mars dernier le JDD rapporte que Takieddine revient de Tripoli avec 1,5 millions Euro dans sa valise; découvert par les douaniers du Bourget. La banque avait ouvert ses portes à Tripoli ? On attend depuis de connaître la suite ...
La doxa nous vend des musulmans sans islam, et des pays arabes sans musulmans. Va-t-on revenir à un minimum de bon sens ? France pays de brillants universitaires orientalistes depuis deux cents ans.
Le prix Nobel de la paix, Barak Hussein Obama, poursuit dans la ligne de ses prédécesseurs: écraser ce qui est génant pour la bannière étoilée sans aucune considération pour le fond du Droit. Seul l’habillage compte. Le numéro 2 du renseignement américain vient de dire dans Foreign Affairs comment l’OTAN a parfaitement joué son rôle de faux nez. Donc méthode à renouveler. Mon pauvre pays...
Rédigé par : Jean-Louis | 27 octobre 2011 à 09:13
Bonjour Philippe Bilger,
Après les grandes phrases dithyrambiques sur le printemps arabe, la révolution de jasmin tunisienne, la libération des peuples égyptien et libyen, il semble que l’enthousiasme s’estompe quelque peu à la vue de la première élection démocratique en Tunisie où le parti islamiste est sorti en tête et où les propos de son leader Rached Ghannouchi, le chef d'Ennahdha ne semble pas aller dans le sens d’une démocratie à l’occidentale ainsi que leurs « libérateurs », à commencer par la France, l’avaient espéré.
Tout laisse à penser que les frères musulmans vont également s’implanter en Egypte et qu’en Libye la charia sera imposée là aussi.
On aurait envie de dire « Tout ça pour ça ! ». Pourtant la chute de Saddam Hussein en Irak et les conflits ethniques qui s’en sont suivis auraient dû servir d’enseignement à ceux qui se sont voulus les grands défenseurs des Droits de l’Homme.
La culture occidentale ne saurait être imposée à des peuples élevés dans une autre culture reposant sur des valeurs spirituelles et sociétales différentes.
L’époque des croisades et de la conversion des peuples aux bienfaits de la civilisation chrétienne, ça ne marche plus, ou plutôt ça ne marche que pour les catégories sociales qui ont été occidentalisées : intellectuels, classes aisées qui sont déjà imprégnés par cette culture vu que pour la plupart ils sont allés faire leurs études supérieures aux Etats-Unis ou en Europe.
Il sera donc bien difficile à ceux qui se targuent aujourd’hui d’avoir été les initiateurs de cette « libération » d’en faire un argument électoral. C’est ballot quand même !
Rédigé par : Achille | 27 octobre 2011 à 08:50
L'ascension obligatoire vers la lumière passe sans doute par la pratique de boyaux opaques et malcommodes. Si je sais bien compter, 81 ans se sont écoulés entre la Révolution française de 1789 et l'adoption durable de la république ici ! Sans faire l'économie d'un dictateur sanguinolent venu des marches du pays : Buonaparte était son patronyme.
Un certain nombre de ces nations arabes soulevées vont nécessairement vivre de telles vicissitudes, ou pire. Cette charia tant décriée est à géométrie variable, pas du tout la même au Soudan qu'au Maroc. Nous serons vraisemblablement morts avant de savoir si société de consommation, féminité, islam et démocratie sont un quatre-quarts parfaitement digeste et d'une qualité stable. L'exemple séduisant de l'Indonésie, pays islamique le plus peuplé de la planète, permet de croire en des surlendemains qui chantent.
L'important, c'est qu'aucun autocrate bistré ne pourra désormais s'autoriser le luxe d'un sommeil lourd et apaisé.
Rédigé par : scoubab00 | 27 octobre 2011 à 08:14
La thèse selon laquelle Kadhafi aurait été "liquidé" pour l'empêcher de parler me laisse sceptique.
S'il est vrai qu'il détenait des secrets, ceux-ci n'étaient assurément pas de nature à faire tomber des têtes. La preuve: ils n'ont pas empêché l'intervention de l'OTAN.
Et puis, perdu pour perdu, pourquoi les aurait-il conservés après le début de l'intervention, alors qu'il avait encore les moyens de les livrer ?
Rédigé par : xc | 27 octobre 2011 à 07:47
Bien content de vous retrouver, Philippe.
Deux jours sans votre blog et j'étais déjà limite en manque...
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Fallait-il que le peuple tunisien ne se libère pas de l'affreux dictateur Ben Ali ?
Fallait-il ne pas aider le peuple libyen á la reconquête de sa liberté ?
Qu'est-ce que c'est que cette technique d'encenser un jour et de jouer le déçu l’autre jour ?
C'est facile, non ?
Populaire, non ?
Populiste, non ?
Rédigé par : Jean-Paul Ledun | 27 octobre 2011 à 03:21
Personne n'a jamais prétendu que la démocratie rendait intelligent. Ne soyons pas comme ce personnage de je ne sais plus quel roman qui trouvait intelligent ceux qui pensaient comme lui. La pensée démocrate chrétienne ne choque personne, pourquoi pas une démocratie inspirée de l'Islam?
Au nom de quoi devrions-nous être vigilants? Le destin des Libyens ne doit pas s'écrire sous notre dictée. J'aimerais qu'on ne leur confisque pas leur Histoire. Inutile d'avoir peur, elle sera forcément chaotique.
Rédigé par : Nordine | 27 octobre 2011 à 02:07
On pourrait imaginer que "le guide" ne
voulant pas partager son gâteau -ou selon
le cas avec moult conditions- dont nous
n'avons pas eu connaissance alors qu'il
plantait sa tente à Paris (!) certains
gouvernements imaginèrent de lui préparer
le chemin... au guide -of course-!
On n'ira pas jusqu'à penser que les fameuses
propositions concernant le voile et ses
autres déclinaisons, mettant en danger les
principes de la République Française, représentaient l'appât...
on est trop correct pour ça !
Même certain qui savait à qui il avait
affaire avec le guide, ne lui avait jamais
souhaité cette fin, à cause disait-il de
conséquences peut-être irrémédiables.
La variance des vieux réflexes de la
colonisation.
Rédigé par : calamity jane | 27 octobre 2011 à 00:19
Cher Philippe,
Seriez-vous devenu si "buzzant" pour que d'indélicats individus s'acharnent à rendre la lecture de votre blog impossible ou difficile.
Un blog qui donne un espace utile de réflexion et d'expression - sans pour autant labelliser votre blog d'utilité publique - ne saurait être plombé ou plongé dans les limbes sans quelques réactions médiatiques...
Puisse votre blog continuer à nous aider à développer notre compréhension et notre esprit critique.
françoise et karell semtob
Rédigé par : semtob | 27 octobre 2011 à 00:17
Mais où sont-ils, les abolitionnistes de la peine de mort ? Ils sont contre la peine de mort, sauf si c'est Kadhafi - rien à voir avec un bon tueur de petites filles.
Mais où sont-ils les démocrates ? Ils sont pour la démocratie à condition que ceux qui ne sont pas d'accord avec eux soient exclus - rien n'a changé depuis 1793.
Et quel est donc le tort des islamistes ? Mais c'est de croire en Dieu, d'être contre la corruption, et en somme de donner des leçons de morale telles qu'on les aurait données chez nous il y a un siècle à peine. L'horreur !
Là où on peut quand même sourire, c'est à l'idée de voir la tête des nationalistes israéliens qui doivent se faire du souci... Parce que l'alliance méditerranéenne, ce serait plutôt la Turquie que la France qui va la faire. Dommage M. Sarkozy ! Il aurait mieux valu écouter Marine le Pen que BHL...
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 27 octobre 2011 à 00:07
Il faut se demander pourquoi. Le texte coranique institue une communauté religieuse et politique, la Oumma, au sein de laquelle la démocratie s'exerce, encore dans le texte, pleinement. Les femmes elle-mêmes du prophète assistaient aux réunions et la jeune Aïcha n'avait pas sa langue dans sa poche.
Cette conception romantique et nostalgique de l'islam de l'âge d'or, dont les arabes nous rebattent souvent les oreilles, conduit évidemment des pans entiers de la population à aspirer vers une démarche qui allierait la fraternité dans la spiritualité et l'organisation pratique de la société. Il ne s'agit certainement pas d'un désir massif de charia, de châtiments, de sévérité et de soumission, mais d'une utopie que l'on ne cesse de désirer. A chaque nouvelle étape, les arabes sont persuadés de restaurer l'esprit de Cordoue. Et ça rate, parce que les arabes sont de grands rateurs.
Doit-on en avoir peur ? Je crois que non. L'islam radical, je le crois, est derrière nous, il a perdu la partie dans les populations. Il demeure un désir identitaire musulman qui ne veut pas faire le deuil de certaines valeurs. Nous aimerions assister à une modernisation tunisienne sur notre modèle : ils n'en veulent pas. Non pas qu'ils refusent les droits de l'homme, l'égalité homme-femme, la modernité. Mais ils ne veulent pas non plus d'une société dé-moralisée, soumise au matérialisme. C'est paradoxal, car plus matérialiste qu'un arabe, c'est difficile à imaginer : ils sont pour la plupart accrocs à la consommation, au paraître, à la détention de biens.
La révolution tunisienne n'a pas aboli les paradoxes de cette société, les Tunisiens demeurent tiraillés entre la modernité occidentale et le cocon douillet d'un islam idéalisé. C'est sur ce malentendu que prospèrent les islamistes, à grand coups d'actions sociales. Qui sera le plus fort en Tunisie ? Les musulmans ou l'islam ?
Pour la Libye, c'est autre chose. C'est un pays qui n'existe pas, un morceau de Maghreb joint par le désert à un morceau d'Egypte. Le seul ciment, c'est l'islam. En terme d'institutions, le départ de Kadhafi laisse le pays tout nu : aucune administration moderne, aucune institution solide, aucun corpus législatif établi. Il faut construire un état que Kadhafi avait aboli au profit d'une dictature informelle. Annoncer que la charia constituera la première source du droit - et non pas le droit en lui-même - paraît la seule voie pour éviter les affrontements tribaux.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 26 octobre 2011 à 23:57
"Le tour de force involontaire de ces "libérateurs" a été de faire passer Kadhafi sanguinolent pour un personnage quasiment christique !"
PB
...
Et Hitler en torche, vous y voyiez le saint Esprit ?
La vérité est que ces révolutions étaient nécessaires. Que l'évolution désormais possible se fera à coup de balancier de plus en plus amortis, de moins en moins inquiétants. Les Arabes en leur majorité n'allaient pas se faire Protestants et dessinateurs de Saab ou de Bang Olufsen (ou juste apparaître ainsi aux loufs zens) en quelques mois. Les révolutions ici, hors toute inspiration exogénérée, ont mis des décennies à accoucher de la troisième République, "nos" aïeux passant par des restaurations multiples, deux empereurs et des approximations à têtes multiples. Eux, adossés au désert, sont maintenant trempés tant de culture musulmane que de leur proximité médiatique et souvent familiale à nos système aux intérêts bien compris.
Cela oeuvre et oeuvrera.
Il me semble que le parti islamiste tunisien a dû faire dans les 30%, ce qui n'est pas grand-chose, même si l'atomisation forcée due à la nouveauté de l'exercice lui donne ce rôle de dominateur en trompe l'oeil.
Les islamistes auront des responsabilités et feront vite les déçus qu'on voit déjà d'ici. Ils devront s'adapter ou entrer dans une durable opposition, devenant le FN de là-bas. Celui-là ne me dérange plus ici, pas plus qu'eux me dérangeront là-bas.
Ces éléments qui sont des freins à la mondialisation finiraient presque par m'être sympathiques. Lisant l'excellent bouquin de Régis Debray (ou de force), j'ai enfin vu formulé au plus juste mon ressenti vieux d'une ou deux décennies.
Plume régicide de ce roi slogan de mise à bas de tout contour, et bien rég(eou)issante.
Rien à cirer du sort de Kadhafi, il n'a eu que ce que méritait. Votre propos est quasi complotiste quant au rôle de Paris et Washington... un brin décevant que cédiez à ces sirènes brumeuses pour ne vouloir confesser vous être égaré en critiquant si fort BHL et son laquais bordelais.
On se grandit toujours en reconnaissant ses erreurs, ses incompréhensions.
Qu'eussent pensé les Arabes tenus sous semblable joug (et "tendre l'autre joug" n'est pas dans leur culture...) si n'avions joué que l'indifférence polie, choisi la carte de la continuité, du pas de vague, de la hauteur de nos intérêts "essence-ciels" ?
Ils pourront difficilement faire pire, au moins à moyen terme. Quant au long, il suffit de regarder l'évolution de la Turquie pour comprendre...
So, don't worry, Mister PB.
AO
Rédigé par : AOur | 26 octobre 2011 à 23:45
Une fois de plus, on a mené une guerre pour éliminer un dictateur devenu encombrant. On n'a évidemment pas songé aux conséquences et à l'après-guerre. Seul le partage du pactole pétrolier libyen compte : une réserve proche de l'Europe, donc facile à protéger, c'est tentant. Voilà le vrai but de cette guerre.
La Libye est détruite, en proie à une guerre civile (ce n'est pas pour rien que le trop fameux CNT a demandé que l'OTAN reste jusqu'à la fin de l'année) et, pire, à une guerre tribale qui pourrait faire éclater le pays. Bref, une "ex-Yougoslavie" à la sauce Makhrech...
Bravo à nos stratèges en chambre pour leur lucidité et leur hauteur de vue, merci BHL, merci Nicolas, merci David (Cameron). Pour paraphraser Churchill : vous avez voulu le pétrole en soutenant les rebelles, vous serez chassés par eux et vous n'aurez pas le pétrole.
Rédigé par : Pierre Verhas | 26 octobre 2011 à 21:26
"Au-delà de ces scènes terrifiantes, il y a l'instauration de la charia, la polygamie acceptée, un changement de société que quelques islamologues distingués, avec leur tolérance habituelle jusqu'au prochain démenti du réel, minimisent. Il est vrai qu'on nous annonce - quelle concession ! - que les femmes auront le droit d'être en maillot de bain à la plage"
Vous voulez dire comme en Arabie saoudite ?
Mais qu'attend-on pour leur faire alors la guerre à ces bédouins ?
Rédigé par : sbriglia | 26 octobre 2011 à 21:03
Des gens comme Bernard Lugan ont averti de ce qui allait se passer. Personne ne les écoutés car ils sont étiquetés "politiquement incorrects".
Nous payons le prix d'une pensée simpliste, ou plus exactement, de l'absence de pensée, remplacée par le prêt-à-penser.
L'analyse en fonction des lieux, des circonstances, de l'histoire et de la culture : trop compliqué, mon bon monsieur.
Rédigé par : Franck Boizard | 26 octobre 2011 à 20:15
Le pire du pire.
Maintenant que le fracas des bombes de l'OTAN s'éloigne, malgré le fait que le CNT lui demande de jouer les prolongations, n'étant finalement pas sûr d'un entier soutien des Libyens, selon la formule consacrée des voix s’élèvent... et viennent recouvrir les propos "humanistes " de notre Alain national que vous rapportez dans votre post.
L'Affaire était bien montée et bien préparée et cela bien avant les velléités du "peuple libyen", enfin celui de la Séranéïque, de recouvrer sa liberté. Bref nous étions bien au sol, associés aux Qataris et aux SAS anglais et cela dés le départ de l'insurrection. En fait bien avant, vu le temps de préparation d'une opération militaire.
La résolution 1973 de l'ONU était bien une mascarade, le faire-valoir de notre intervention... et l'exécution du sanglier acculé le but final.
http://www.opex360.com/2011/10/26/le-qatar-admet-avoir-envoye-des-troupes-au-sol-en-libye/
Rédigé par : hameau dans les nuages | 26 octobre 2011 à 19:57
Rien de plus affreux qu'un lynchage, c'est vrai, mais rien n'est plus universel non plus. Le mot est récent mais le phénomène est vieux comme le monde, plus précisément vieux comme l'homme. Un lynchage c'est une foule qui tue une victime forcément coupable à ses yeux, qui la tue sans prendre le moindre risque car elle est sans défense, qui la tue sans se salir les mains non plus (quand tout le monde tue, personne n'est personnellement coupable). Nos bombardements ne correspondent-ils pas exactement à cette définition ? Ils sont des lynchages à l'échelle de la technique moderne, des lynchages de géants. Alors abstenons-nous de donner des leçons de morale, alors évitons de verser des larmes de crocodile.
"La violence n'est jamais une solution", "la violence n'appelle rien d'autre que la violence" comme le dit si bien M. Sarkozy à Addis Abeba en janvier dernier au sommet de l'Union Africaine (texte intégral sur elysee.fr). La suite lui a donné raison. Dommage qu'il ne lise pas ce que disent ses discours. Dommage que l'action de la France contredise ses propres déclarations, comme si sa parole n'était plus que bruit dépourvu de sens.
Rédigé par : DMonodBroca | 26 octobre 2011 à 18:36