Même quand Jean-Pierre Raffarin m'énerve, je l'aime bien.
Ancien Premier ministre, il se laisse aller parfois à un peu de vérité et délivre, mine de rien, des messages qui ne sont pas toujours dénués de sens.
Quand, par exemple, il déclare que "Sarkozy nourrit son énergie de l'antisarkozysme", qu'Anne Hidalgo "est à fond alors que NKM a encore beaucoup de réserves" et qu'il a cette intuition que la politique de Nicolas Sarkozy était plus appréciée que sa personne alors que c'est l'inverse pour François Hollande, il me semble qu'il fait preuve de lucidité et qu'il échappe aux banalités sentencieuses proférées parfois quand il répugne à s'engager (Le Parisien).
Depuis quelque temps, Jean-Pierre Raffarin s'obstine, sans doute parce que la formule lui a plu et qu'il y tient, à dénoncer "la peopolisation de la justice" et "l'orchestration" des affaires.
Il énonce très précisément ceci quand il est questionné "sur ces politiques beaucoup cités dans des affaires judiciaires, Tapie, Guéant, Cahuzac, Sarkozy" : "Ce spectacle judiciaire est affligeant et démobilisant. Il occupe toute la scène nationale... Je vois bien la manoeuvre qui consiste à salir tout le monde. On est dans une peopolisation de la justice, et tout est orchestré comme un spectacle".
Cette salve va plaire évidemment à tous ceux qui soupçonnent la justice d'inventer les affaires qu'elle poursuit et d'être responsable du bruit médiatique qui entoure certaines d'entre elles.
Surtout, elle aurait ce pouvoir inouï d'imposer son rythme à l'univers politique et d'extraire de son carquois, à son gré, selon un tempo qui lui serait propre, des flèches à l'encontre de la gauche ou de la droite ou même, pire, destinées à combattre un seul camp et à protéger l'autre. Elle aurait de l'emprise sur le cours du temps et saurait faire se téléscoper miraculeusement les avancées judiciaires et les aléas politiques !
Qu'un reproche aussi absurde puisse naître dans le cerveau d'un responsable politique d'expérience montre à quel point la justice peut susciter de fantasmes et se voir prêter une influence redoutable et une capacité d'initiative hors du commun. Pour une institution qui n'est qu'une autorité, c'est beaucoup d'honneur !
Ce qui est mal compris, et parfois mal analysé, est l'impression qui est donnée depuis le mois de mai 2012. Tout ce qui est survenu sur le plan judiciaire, dans l'espace public et médiatique à partir de l'élection de François Hollande, à l'exception des turpitudes de Jérôme Cahuzac, n'a pas trouvé sa source au cours de ces derniers douze mois mais dans le quinquennat précédent.
Ce qui laisse croire à Jean-Pierre Raffarin, et sans doute à d'autres, que la justice "orchestre" ou "peopolise" résulte de l'avancement concomitant de plusieurs procédures "sensibles", à leur accélération technique qui tient probablement à une plus grande liberté laissée aux juges d'instruction.
D'ailleurs, penchons-nous sur cette expression de "peopolisation" qu'affectionne l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac.
Je n'imagine pas un instant qu'il puisse faire le grief aux magistrats instructeurs les plus en vue à cause de la nature de leurs dossiers de s'abandonner à la vanité médiatique alors que tout démontre au contraire qu'aussi bien à Paris qu'à Bordeaux, les plus réputés comme les moins connus cultivent une discrétion exemplaire qui paradoxalement leur a parfois été reprochée. On les déteste bavards et extravertis mais on ne les souhaite pas non plus murés.
Si on veut bien faire preuve de bonne foi et donc tenter de mieux appréhender les ressorts de la justice dans ses rapports avec les médias et les pouvoirs, il faut accepter que la peopolisation arrive souvent de manière indirecte et fortuite.
Elle est créée par les politiques qui par exemple s'en prennent aux juges plus que par ceux-ci qui n'en peuvent mais. Henri Guaino, notamment, a beaucoup fait, et tristement, pour la peopolisation en insultant Jean-Michel Gentil à plusieurs reprises et de la sorte il a évidemment placé ce magistrat au centre d'un débat public auquel, député, il était le seul à aspirer.
Je pourrais multiplier les exemples pour faire valoir que la sérénité légitimement exigée des juges n'est le plus souvent troublée que par les immixtions intempestives, au-delà de l'exercice normal de l'information, du contrôle, des voies de recours et de la vigilance citoyenne, de journalistes, d'avocats, de politiques et de citoyens plus soucieux de mettre le feu que de favoriser une administration tranquille de la justice.
Quant à ces personnalités citées qui "seraient salies" parce que "la manoeuvre serait de salir tout le monde", cette assertion n'a pas l'ombre d'un fondement.
Qu'il y ait toujours eu, dans le domaine pénal, une justice plus spectaculaire que l'autre pour plusieurs motifs, notamment celui de la qualité des mis en cause, est une évidence et cette banalité explique aussi pourquoi naturellement la lumière rejaillit sur tel magistrat plutôt que sur tel autre. Que les médias s'attachent tout particulièrement à ces dossiers relève également d'un constat facile à opérer quotidiennement.
D'une part, ces procédures ne sont pas nées de rien et se rapportent à des données qui sont parvenues au niveau judiciaire grâce aux mécanismes de l'état de droit. Les magistrats recueillent en aval ce qui en amont a été accompli, fomenté ou soupçonné. Ils n'inventent pas, ils récoltent, instruisent puis jugent.
D'autre part, à côté de ces péripéties judiciairement et médiatiquement éclatantes - il y en a eu beaucoup ces dernières semaines -, existe une autre justice discrète, compétente, efficace je l'espère, qui accomplit sa tâche. Ce n'est pas parce qu'on ne parle pas d'elle et qu'on n'écrit pas sur les dossiers qu'elle traite qu'elle ne constitue pas un énorme et très utile contrepoids à la justice people inévitable et qui apparemment avance à bride abattue.
Que Jean-Pierre Raffarin veuille bien se lasser de ce concept parce qu'il est faux et ne correspond à rien de concret.
Il avait déjà, à propos de Nicolas Sarkozy, souligné qu'il fallait "arrêter la chasse". C'était la même idée et la même erreur.
La justice n'invente pas le gibier. Elle s'occupe de lui, éventuellement le poursuit quand il s'est égaré ou qu'on l'a traîné sur ses terres.
Belle mission sans orchestration ni peopolisation.
@ Alex paulista
En parlant de collectivisme, et de la fin de la sphère privée, je crois que vous êtes aussi un peu partial.
Je crois, comme vous, que chacun doit être rétribué selon son mérite.
Mais je refuse de me résigner à croire, comme vous l’écrivez, que l’injustice est une condition nécessaire aux entreprises humaines. Même si ça paraît utopique.
Qui a dit que les utopies d’aujourd’hui sont les réalités de demain ?
Le monde est en train de craquer. Mon sentiment est que dans les 20 ans qui viennent, des bouleversements majeurs vont survenir. De façon très chaotique, vu l’incapacité crasse de nos dirigeants à les anticiper. Ca relativisera beaucoup les turpitudes de certaines bandes organisées.
Rédigé par : Claude L | 03 juillet 2013 à 11:16
Qui sait que le père de Jean-Pierre QUIFAITDUBONCAFE a été ministre de Pierre Mendès France ?
En 1954-1955, l'initiative de donner à boire du lait dans les établissements scolaires aux élèves venait de Jean Raffarin, père de Jean-Pierre. Mais c'est si loin tout ça...
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Raffarin
Rédigé par : Bernardini | 03 juillet 2013 à 09:35
Raffarin... Polichinelle-Balourdingue qui après avoir servi la soupe à Jacques Chirac balance ses oeillades et son phrasé huileux dans le PAF connivent chez la nunuche de service...
Il bouge encore et enfonce toujours les mêmes portes ouvertes ou sans issue...
Il fait partie de la bande des "qu'est-ce-qu'on-est-bien-entre-nous", qui vit largement et abondamment de l'argent public et étatique. Il se dit de droite mais très très tellement modéré qu'il flotte dans le rien de nulle part, mais toujours bien payé...
Heureusement la France est toujours bonne fille et puis surtout toujours encore riche... continuons et déclarons la République soviétique... nous avons tout pour le faire depuis 1945... prélèvements (57% du PIB), brigades fonctionnaires, police et justice rigides et exécutives sans contre-pouvoir, contrôle et complicité des médias, dénonciation et délation triomphantes, mentalité revancharde, anti-riche, anti-travail et inquisitoriale, santé gratos... tout y est...
Rédigé par : lafleur | 03 juillet 2013 à 00:03
@ Claude L | 02 juillet 2013 à 20:28
Sur le cas Adidas les versions divergent quant à la quantité financée. Mais de toute façon vous avez une vision partiale et partielle du problème: en échange de cet argent qu'on vous prête vous mettez des biens en garantie, ainsi qu'une certaine compétence. Cela peut être un carnet d'adresses, des équipes, un savoir-faire pour restructurer des entreprises, un savoir-faire pour faire tourner une entreprise (les LBOs sont parfois organisés au profit des cadres clefs).
Après on peut regretter cette tendance du capitalisme à accumuler les richesses, un peu comme au poker. C'est injuste mais n'est-ce pas non plus une condition nécessaire à certaines entreprises humaines ?
Au moins Tapie n'est pas un héritier.
En tout cas, dire que tout argent accumulé est du vol ou de la spoliation est une projection idéaliste de la société dans un monde collectiviste très sympathique sur le papier (infernal à mon avis, car c'est la fin de la sphère privée) mais qui n'existe pas.
Rédigé par : Alex paulista | 02 juillet 2013 à 23:11
L'intervention hier de Tapie au JT de France 2 ainsi que les déclarations, nombreuses et fortes, des avocats dans les Affaires Bettencourt participent bien de cette volonté de déplacer le débat judiciaire sur la scène publique : la justice ne serait plus rendue au nom du peuple, mais le public pourrait voter directement en faveur des meilleures prestations. L'émotion spontanée pourrait alors l'emporter sur l'examen raisonné des faits. Mme Le Pen, qui vient de perdre son immunité de parlementaire européenne, déploie cette même stratégie. Condamnée ou acquittée, elle pense pouvoir gagner sur tous les plans. Tous sont des bêtes de médias. Tous crient au complot, à l'injustice, à l'acharnement. Voyez ce grand homme de médias que fut Berlusconi : tant qu'il peut faire le show, il se croit sauvé.
Rédigé par : Juan DeGranada | 02 juillet 2013 à 22:59
@ Surcouf | 01 juillet 2013 à 20:30
Votre interrogation sur le mot élégance me surprend.
Du fait de leurs hautes fonctions, les magistrats "ne mettent jamais les mains dans le cambouis". Cela est réservé aux policiers et gendarmes. D'où le fait qu'ils ne traitent les affaires que dans ce que j'estime être l'élégance des dispositions des codes de procédure pénale et pénal qui permettent ainsi à certains magistrats de traiter les dossiers avec la distance et la hauteur qui sied à leur majesté en méprisant le travail d'enquête. Ce qui est d'ailleurs aussi le cas de nombre de défenseurs qui s'attachent à rechercher les erreurs de forme des procédures pour les faire annuler, au détriment du fond qui condamnerait leurs clients.
Quand le législateur crée la course d'obstacles en matière de procédure, dans les dossiers complexes il est rare que quelque procès-verbal ne soit pas entaché d'erreurs minimes de forme. Telle est aussi l'évolution de l'exigence des preuves. En cette matière, il suffit de se reporter aux affaires liées aux interpellations en flagrant délit au cours de manifestations : la plupart des personnes présentées sont relaxées pour défaut de preuve alors qu'elles ont bien été vues commettant des violences ou dégradations. En l'espèce la parole de l'officier de police judiciaire et plus encore de l'agent de police judiciaire n'a que peu de valeur...
Mais c'est bien le texte de la loi qui tend de plus en plus à privilégier la forme sur le fond et ce n'est là qu'exploitation des dispositions de la loi...
Rédigé par : Robert | 02 juillet 2013 à 22:43
@Alex paulista
Je ne suis pas sûr qu’on parle de la même chose.
Prenons le cas Adidas, puisqu’il est d’actualité.
Qu’est-ce que ça signifie de racheter une entreprise avec 0 cts d’apport personnel ?
Ca veut dire qu’on va faire suer le burnous au collectif de travail pour rembourser la totalité de la valeur de l’entreprise. L’entreprise rachetée par elle-même, mais au seul profit du propriétaire. Qui la revendra à terme en empochant le pactole.
En langage économiquement correct, ça s’appelle LBO. Moi, j’appelle ça hold-up légalisé.
C’est comme ça qu’on a des smicards d’un côté, et de l’autre, un mec avec son yacht, son jet privé, ses propriétés au bord de la mer et son hôtel particulier à Paris. Et fier de lui.
Et pour finir avec une petite provocation, je dirai qu’un investisseur n’apporte jamais rien.
Voir la thèse de Bernard Friot, qui ne manque pas d’arguments très convaincants.
Rédigé par : Claude L | 02 juillet 2013 à 20:28
Rédigé par Monsieur "Dites-pas-ca" le 02 juillet 2013 à 17:34
Peut-etre un commentateur octogenaire qui commence un peu a radoter... d'ou son pseudo ?
Rédigé par : Valerie | 02 juillet 2013 à 19:50
@ hameau dans les nuages | 02 juillet 2013 à 18:04
Elle n'avait qu'à fermer sa fenêtre, on éteint bien notre télé.
Ça ne m'étonne pas qu'elle ait judiciarisé l'affaire.
Rédigé par : Alex paulista | 02 juillet 2013 à 19:37
""Tapie, à sa manière, est un libertaire, sa lucidité se tient dans son froc.
C'est ça qui vous est insupportable, au fond".
Rédigé par : Alex paulista | 02 juillet 2013 à 17:20
Ce serait, paraît-il, à peu près la ligne de défense de l’avocat de l'agresseur de madame Claire Chazal.
Âpres sur la forme, c'est bien sûr éminemment contestable.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 02 juillet 2013 à 18:04
Christian C,
Avant de supputer, vous devriez mieux me lire et vous relire.
J'ai mis en exergue au début de notre échange deux extraits de vos propos :
"On peut gloser indéfiniment sur le mur des cons, il restera difficile d’en démontrer l’influence sur la nécessaire neutralité politique des magistrats."
"il [Jean-Pierre Raffarin] est dans son rôle de responsable UMP pour décrédibiliser l’action des magistrats, mais je ne parierais pas sur la sincérité de son propos."
Comme vous, je faisais donc référence aux magistrats membres du SM. Vous semblez plus assuré de leur impartialité que de celle de Jean-Pierre Raffarin, quand je pense que les deux sont sujettes à caution. D'où la question qui suivait, que je me permets de réitérer.
En vertu de quel humaniste principe, Christian C, la neutralité d'un Raffarin serait-elle plus douteuse que la sincérité d'un magistrat ?
Rédigé par : MS | 02 juillet 2013 à 17:39
@ octoocto 12:19
Votre commentaire a-t-il été écrit :
a) Sous hypnose,
b) Dans le cadre d’une thérapie transpersonnelle,
c) Pour dissuader la NSA d’espionner le Blog de Philippe Bilger.
Prière de cocher la ou les bonnes réponses.
Rédigé par : Tipaza | 02 juillet 2013 à 17:34
Mais on ne peut pas accumuler les millions, quelles que soient les circonstances, sans confisquer de la richesse créée par d’autres. En ce sens, Tapie est un voleur. La jalousie et la haine n’ont rien à voir là-dedans.
Rédigé par : Claude L | 02 juillet 2013 à 11:07
Dites-vous assis devant votre ordinateur produit en Chine à vil prix, créé par IBM et Microsoft, après avoir parcouru des pages Google.
Chez vous, vous avez cassé tous les miroirs ?
Tapie, à sa manière, est un libertaire, sa lucidité se tient dans son froc.
C'est ça qui vous est insupportable, au fond.
Rédigé par : Alex paulista | 02 juillet 2013 à 17:20
Cher M. Bilger,
J'ai beaucoup aimé le message de "jack" que je reproduis intégralement ci-dessous. Il mériterait que vous nous apportiez votre opinion sur ce point crucial, bafoué à chaque instant : le secret de l'instruction.
"La "discrétion exemplaire" évoquée ici est parfois battue en brèche, de manière très spectaculaire, par la publication de PV d’audition. Certains ne prêtent pas suffisamment attention à la confidentialité des documents, qui sont alors un régal pour la presse et les lecteurs. Fortuit ? Délibéré ?"
Rédigé par : jack | 01 juillet 2013 à 09:59
Un jour où j'assistais au procès d'un fonctionnaire placé sous mon autorité [pour faux et usage...] et où un avocat soulevait (déjà ! Il y a plus de 20 ans !) des "fuites" sur le dossier, le Président a eu cette réflexion : "Je déplore tout comme vous, Maître, ces informations transmises en dehors de toutes les règles prévues par le Code de procédure pénale".
A l'époque, cette formule m'avait amusé. Aujourd'hui, beaucoup moins !
Rédigé par : Bernardini | 02 juillet 2013 à 14:56
@MS
Assumez jusqu'au bout ce qui est fait pour ressembler, de votre part, à un début de syllogisme : vous souhaitez qu'on interdise l'exercice de la profession de magistrat à qui n'est pas de droite, ce qui - c'est bien connu - serait la seule garantie d'impartialité.
L'appartenance à un syndicat n'a pas, jusqu'à présent, été interdite (me serais-je encore trompé ?) aux magistrats.
Je ne doute pas que les porteurs de votre idéal une fois au pouvoir, seuls les magistrats de droite auront le droit d'exercer.
Peut-être êtes-vous épinglé au mur des cons ?
Je vous félicite de tout cœur dans ce cas.
PS : Un doute m’habite ; vous écrivez : « Jean-Pierre Raffarin est membre de l'UMP et les magistrats dont vous parliez le sont du SM. » D’où tenez-vous que les magistrats dont je parle(rais) sont adhérents du SM ? Je n’ai parlé d’aucune catégorie de magistrats en particulier. Vous seriez victime également de la théorie du complot ?
Rédigé par : Christian C | 02 juillet 2013 à 13:07
N. Sarkozy : le complot !
Le "cabinet noir" est fermé de l'extérieur.
Raff y est enfermé. Et Le Foll qui a perdu la clef !
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Il devient romanesque, Carlito. C'est nouveau !
Alexandre Dumas n'a qu'a bien se tenir.
Quand on n'arrive à faire partie de l'actualité que par des péripéties judiciaires, il faut s'inventer un complot visant sa petite personne et impliquant le sommet de l'État.
Pour se racheter une conduite. Croit-il.
Pour se martyrvictimiser. Pour se donner de l'importance, en somme.
Encore mieux, en employant une terminologie accrocheuse - un "Cabinet noir", excusez-le du peu ! -, c'est gagné d'avance, même si un peu facile pour faire parler de soi.
Enfin, facile façon de parler, parce que seuls les UMPistes de tous bords (et il y en a des mouvances mouvantes !) et quelques rares UDIstes pourraient être compatissants.
Et encore !
En est-il beaucoup à regretter "vraiment" leur ex-président, ou s'en servent-ils plutôt comme d'un épouvantail, à la limite du repoussoir ?
Du style : regardez
comme il était grand, notre petit,
comme il a dirigé la France avec brio,
comme il savait parler aux pôv cons,
comme il a été réactif face à la crise (celle de 2008, pas celle qui nous pend aux basques depuis 2011),
comme il a été reréactif pour la Géorgie (pourquoi, au fait, spécialement la Géorgie ? Mystère !),
comme il a été volontariste et interventionniste en Libye (pourquoi, au fait, tant d'intérêt soudain pour la Libye ? mystère, mais moins profondément énigmatique tout de même à la lumière d'événements récents !),
comme il nous a mené à la victoire que l'on sait en 2012,
comme il était maître en stratégie électorale,
comme c'était un gagneur né.
Si,si ...
Ah ! Quel succès, quel rapport qualité-prix politique, le virage (serré, très serré) à droite !!
Et l'autre, là,
le paltoquet,
le nul,
l'incapable,
le sans expérience du pouvoir (Ah ! ça, en matière de pouvoir, il en connaissait un rayon, l'Ex),
l'internationalement peu crédible,
l'incapable de remonter le pays de l'héritage mirifique que lui a laissé l'Ex,
le traître à la patrie,
le déserteur (face à qui, à quoi?),
le qui ne comprend rien à rien,
le qui prend comme ministre un suissosingapourien,
le qui ne s'occupe pas de la justice et la laisse faire son métier (non mais on va où, là ? Il est fou Hollandou !),
le qui met les procureurs au chômdu et laisse les juges d'instruction instruire (non mais on va où, là ? Il perd les pédales Goudalou !),
le qui veut que tout le monde connaisse le patrimoine des élus et ministres (alors là, il déraille, il faut le faire interner !),
le qui baisse son salaire,
le qui a gagné par hasard en 2012 avec un toupet indécent,
le qui serre aussi la main à Barack, comme un grand,
le qui fait la bise à Angela (ça c'était chasse gardée, pourtant, y avait une pancarte !),
le qui veut enrayer le chômage fin 2013, sombre legs de l'homme à poigne,
le qui est le plus mauvais Président de la Ve République (dixit Riri le Guaino),
le qui..., et qui...
Mais c'est dingue cette affaire : de quel droit a t-il gagné la présidentielle ?
Pourquoi squatte t-il l'Élysée ? La trêve hivernale est levée pourtant.
Mais que fait la police ?
C'est un complot, ça est sûr !
Pourquoi la justice libérée (il n'y a pas qu'en Dauphiné que cela se passe) ne s'intéresse qu'à Nicolas et consorts ?
Pourquoi certaines de ses fréquentations sont-elles prioritairement sur la sellette : Bettencourt, Tapie, Kadhafi, Guéant, Courroye... ? Pourquoi ?
C'est un complot, c'est LE complot que d'aucuns osent fomenter contre le Maître.
C'est l'oeuvre indigne du cabinet noir managé par Stéphane Le Foll, ci-devant ministre de l'agriculture, très proche de F. Hollande.
Pourquoi ?
Pourquoi Le Foll ? Pourquoi pas, heeuu... Montebourg ou Cahuzac ?
Non, Cahuzac, ce n'est pas possible, il est déjà dans la "m..de", alors diriger en plus un cabinet, ça ne l'emballerait pas.
Et puis, il n'est plus au PS, ni au gouvernement d'ailleurs, encore moins familier du Président.
Non, mais pourquoi Le Foll ? Mystère ! Les voies du complot sont impénétrables.
Allez, finissons-en. C'est Le Foll, parce que c'est comme ça ! Y a pas à discuter.
Non mais !
Si Carlito le dit, s'il l'affirme dans les magazines, c'est que c'est vrai.
Pas probablement vrai, non, mais vraiment vrai !
Il ne ment jamais, il affabule encore moins. Et encore moins que jamais ça confine au néant.
Vous voyez que c'est vrai !
Il y a un cabinet noir. Je vous l'ai dit. Comme l'Ex.
Y a pas que lui, tout de même, à savoir les choses et à décider qu'il est victime d'un complot.
D'ailleurs, d'ailleurs, j'ai un allié
de poids,
quasiment de droit divin,
la sibylle de la Vienne,
la pythie poitevine,
Raffarin le bien nommé, Raff pour les casuistes férus du décryptage des raffarinades Van Dammesques.
Certains intimes politiques l'appellent aussi Dodo (de Maurice), allusion à la bêtise de cet oiseau à la silhouette pataude, très Raffarinesque, disparu totalement au XVIIe siècle.
Son petit nom latin était "Raphus cucullatus". Faut le faire ! Ça ne s'invente pas.
Il y a donc eu un ornithologue de génie qui a pressenti qu'un jour, un homme politique de droite et racontant des bêtises grosses comme lui, viendrait à être connu pour ses c....ries dans le beau pays de France. Incroyable. Et qu'il s'appellerait Raffarin.
Donc, "Raphus", d'où découla au fil du temps le diminutif "Raff".
Et "cucullatus" comme cerise sur le gâteau ornithologique. Incroyable, non ?
Ça lui va tellement bien, comme un gant en peau de dodo.
"Cucul" !!
Mais comment cet ornithologue a t-il pu avoir cette intuition, que ce Raffarin-là serait en plus le roi des cuculs ?
On ne le saura jamais. Et ça vaut sans doute mieux.
Nous on doit faire avec. Lui, pas.
Quel chanceux, cet amoureux du dodo (de Maurice) !
Bon, pour en revenir à Raff qui cherche une nouvelle place de Premier ministre en 2017 auprès du plus présidentiable (croit-il) des éventuels-futurs-ex-recours-providentiels candidats de la droite, il y a bien complot contre Sarkozy. Si, si.
Jean-Pierre a encore sévi sur les ondes dimanche dernier et à lancé que la chasse au Sarko, autre gallinacé bien plus vif que le dodo (soit dit en passant et entre parenthèses), était intense ces derniers temps.
Il n'a pas osé le "cabinet noir" notre Raff.
Mais il a quand même pu glisser dans la conversation que la justice faisait du "spectacle" en cernant de toute part le pauvre bipède désemparé.
En cela il se rapproche de Riri le Guaino. Il ne supporte pas les juges Riri.
La justice serait la source de tous nos maux. Enfin, de tous leurs maux, pour être plus précis.
Et si en plus elle se lance dans le spectacle, où va t-on ?
En somme, d'après ces messieurs on supprimerait la justice pour la remplacer par des arbitrages menés par de grands spécialistes du style Estoup, Bredin et Mazeaud, eh bien, on ne s'en porterait que mieux.
C'est Tapie qui nous le dit. Et il faut toujours croire Nanard.
Allez, terminons-en !
Le Foll - pas fol Le Foll -, a évidemment démenti manager un quelconque cabinet noir visant la personne de Carlito. Pas plus qu'un cabinet jaune ou vert.
L'Ex ne sait plus tout compte fait s'il a bien dit une co...rie de ce genre, celle du cabinet noir, s'il ne l'a pas rêvée, s'il aurait dû s'abstenir. Il ne se souvient plus très bien. Il se tient coi. Le ridicule ne tuant aucun politique, il est quand même un tant soit peu rassuré.
Raff nous prépare sa prochaine saillie (en tout bien, tout honneur) et s'est inscrit à des cours particuliers auprès de Jean-Claude Van Damme pour peaufiner son style.
Guéant s'est acheté au comptant un appartement de 717.500 €uros. Mazette ! Ça n'a rien à voir (c'est à voir) mais je n'ai pas pu résister au plaisir de voir se compléter sa batterie de casseroles. Il est sur la voie du Guinness !
Guaino, j'ai failli l'oublier, continue à haïr copieusement F. Hollande "le plus mauvais Président de la Ve République". Il ne cesse de se répandre dans les médias à ce sujet.
Le dodo est toujours un oiseau carrément supprimé de la carte animalière.
Estoup tombe dans un cul-de-basse-fosse de plus en plus profond.
Tapie reste philosophe et d'une apparente décontraction. Sacré Nanard !
P.S. : Feu Yves Bertrand doit se retourner dans sa tombe. C'était, paraît-il, une référence, lui, en matière de cabinet noir.
Le même article avec des illustrations commentées sur :
http://fuliginox.blogspot.fr/2013/06/n-sarkozy-le-complot.html
Rédigé par : octoocto | 02 juillet 2013 à 12:19
Au secours, on me vole, c'est un complot !
C'était hier soir sur France 2, du "Au théâtre ce soir" avec Nanard dans le rôle titre, Acte 1 scène 2. L'outrance, l'invective, un culot d'acier, le bateleur s'époumone et privilégie l'attaque comme son ultime défense. Comment peut-on imaginer que des enquêteurs chevronnés, des magistrats instructeurs spécialisés qualifient d'escroquerie en bande organisée la mise en examen de plusieurs mis en cause sur la foi d'un dossier qui serait totalement vide ?
Le people hier soir était plutôt du côté du défendeur que de la justice.
Attendez-vous à savoir que ce feuilleton va réserver encore beaucoup de suspens à ses chers auditeurs.
Rédigé par : Jabiru | 02 juillet 2013 à 11:29
Philippe fera peut-être un billet sur le déséquilibre scandaleux entre le devoir de réserve des magistrats d’un côté, qu’ils ne peuvent enfreindre un tant soit peu sans que le ciel leur tombe sur la tête, et un prévenu qui peut venir faire son numéro en direct au 20 heures.
Tapie excelle dans son numéro de comédien retors. Son ego lui permet d’être convaincu que tout lui est dû. Il jouit de l’envie et de la haine qu’il croit susciter.
Au-delà de l’affaire en cours, qui pour moi n’est qu’une péripétie, on peut vivre bien, très bien, même devenir riche. Mais on ne peut pas accumuler les millions, quelles que soient les circonstances, sans confisquer de la richesse créée par d’autres. En ce sens, Tapie est un voleur. La jalousie et la haine n’ont rien à voir là-dedans.
Rédigé par : Claude L | 02 juillet 2013 à 11:07
"Je pensais également que les magistrats, dans l'exercice de leur profession, étaient censés faire abstraction de leur opinion politique. Ce n'est pas le cas non plus ?"
Rédigé par : Christian C | 02 juillet 2013 à 09:11
____
Jean-Pierre Raffarin est membre de l'UMP et les magistrats dont vous parliez le sont du SM.
"étaient censés..."
Sans le moindre paradoxe, un mur des cons dans leur enceinte laisse échapper en effet un doute.
Rédigé par : MS | 02 juillet 2013 à 10:33
"Je n'imagine pas un instant qu'il puisse faire le grief aux magistrats instructeurs les plus en vue à cause de la nature de leurs dossiers de s'abandonner à la vanité médiatique".
Ne manqueriez-vous pas d'imagination ?
Qu'est-ce qui peut bien animer l'action d'un juge mettant un ancien président la République en examen alors qu'un procureur peut sous les feux de la rampe déclarer qu'il n'y a pas de charges ?
La vanité médiatique, peut-être, non ?
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 02 juillet 2013 à 09:24
MS,
Quelque chose a dû m'échapper, je vous prie de m'en excuser.
Je croyais que Jean-Pierre Raffarin était un éminent membre de l'UMP ; ce n'est pas le cas ?
Je pensais également que les magistrats, dans l'exercice de leur profession, étaient censés faire abstraction de leur opinion politique. Ce n'est pas le cas non plus ?
Rédigé par : Christian C | 02 juillet 2013 à 09:11
Bonjour Philippe Bilger,
« Depuis quelque temps, Jean-Pierre Raffarin s'obstine, sans doute parce que la formule lui a plu et qu'il y tient, à dénoncer "la peopolisation de la justice" et "l'orchestration" des affaires.»
Jean-Pierre Raffarin ne restera dans l’histoire, si toutefois il le reste, que par ses « raffarinades », sortes de métaphores qui ne veulent rien dire ou pas grand-chose.
En matière de peopolisation, je pense que les politiques n’ont pas de leçons à donner. Ils sont intimement intégrés dans ce club de « célébrités » qui ont une haute opinion d'eux-mêmes et qui n’existent que par et pour les médias.
J’en veux pour preuve le show que nous a donné Bernard Tapie, hier soir, au JT de France 2.
Se posant en victime d’un complot et dernier rempart de Nicolas Sarkozy, il nous a fait son petit numéro de persécuté, n’hésitant pas à se moquer de Pujadas et à travers lui les journalistes. Cela pourrait en être risible, si ce n’en était insupportable de suffisance.
A noter que son attitude n’a rien à envier à un Nicolas Sarkozy, une Marine Le Pen ou encore un Jean-Luc Mélenchon. Tous tirés du même tonneau !
On les aime ou ils nous sont insupportables, mais ils ne sauraient nous laisser indifférents et pour eux, c’est l’essentiel, car cela permet de nourrir leur ego surdimensionné.
Rédigé par : Achille | 02 juillet 2013 à 08:16
J'ai vu l'intervention de Tapie, j'ai rajeuni de vingt ans. C'était raccord avec la coupe de cheveux de Pujadas.
Il envoie du lourd !
Jusqu'à la Coupe du Monde 98 qui y est passée.
Sacré Bernard.
Rédigé par : Alex paulista | 02 juillet 2013 à 07:36
Quand on a une profession en permanence sous les feux de la rampe, défendre les siens est une nécessité.
Certes il y a des brebis galeuses et/ou incapables et malheureusement il est difficile de s'en séparer.
Monsieur Bilger a raison de défendre ses confrères.
Cependant je crois que monsieur Raffarin dénonce plus une médiatisation et une posture d'une certaine magistrature qu'autre chose, car certains membres de ces professions participent à cette médiatisation et cela de manière politique.
Pour moi, ils sont dans l'erreur la plus grande.
S'attaquer aux élites politiques qui fautent alors même qu'ils nous prennent pour des c..., je n'y vois pas d'inconvénient mais il ne faut pas y ajouter une couleur politique personnelle.
Le pourri n'a, lui, pas de couleur, tantôt connoté de gauche tantôt étiqueté de droite, mais c'est la même engeance.
Comme dit mon papa, il faut le cravater.
La justice n'invente pas le gibier et la police les crânes mais il faut bien admettre qu'il est de leur ressort de s'en occuper.
Robert parle d'élégance, mais de quoi parle-t-il ?
Quelle élégance y a-t-il à traquer des escrocs qui vous donnent au quotidien l'envie de vomir ?
Quelle élégance doit-on adopter ? Je n'en vois pas.
Je tiens cependant à défendre les vrais travailleurs de la justice, de la police et de la politique qui font avec conscience et application leur métier.
Il y a en beaucoup et ils souffrent plus que les autres des brebis galeuses de leurs professions respectives.
Rédigé par : Surcouf | 01 juillet 2013 à 20:30
Les brigades financières: nouvelles arènes du cirque.
Rédigé par : SR | 01 juillet 2013 à 20:29
"On peut gloser indéfiniment sur le mur des cons, il restera difficile d’en démontrer l’influence sur la nécessaire neutralité politique des magistrats."
"il [Jean-Pierre Raffarin] est dans son rôle de responsable UMP pour décrédibiliser l’action des magistrats, mais je ne parierais pas sur la sincérité de son propos."
Rédigé par : Christian C | 01 juillet 2013 à 17:36
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En vertu de quel humaniste principe, Christian C, la neutralité d'un Raffarin serait-elle plus douteuse que la sincérité d'un magistrat ?
Rédigé par : MS | 01 juillet 2013 à 20:22
"...existe une autre justice discrète, compétente, efficace je l'espère, qui accomplit sa tâche. Ce n'est pas parce qu'on ne parle pas d'elle et qu'on n'écrit pas sur les dossiers qu'elle traite qu'elle ne constitue pas un énorme et très utile contrepoids à la justice people inévitable et qui apparemment avance à bride abattue."
Pourquoi, vous Philippe, ne parlez-vous jamais de la justice du quotidien, des larmes, des chagrins et des peines infinies qui s'y déversent tous les jours ?
De cette justice de l'humilité qui, parfois, sait si bien accueillir, malgré tout, en dépit de tout, comme cette greffière ou sous-greffière ou sous-sous-greffière, que sais-je, qui spontanément, a quitté la petite pièce protégée par une vitre pour me rejoindre dévastée dans l'antichambre d’un tribunal d’instance de province. Pour rejoindre le malheur.
Oui, pourquoi dans vos billets, cette absence des autres proportionnelle à votre goût aujourd'hui immodéré et insatiable pour la seule justice calibrée "célébrités" qui traque ses gibiers ?
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 01 juillet 2013 à 19:42
Ce qui m'inquiète chez tous ces juges, c'est qu'ils appréhendent leur mission comme la protection des faibles, et non l'application du droit.
J'avais entendu Perben énoncer ce principe quand il était garde des Sceaux (que la première mission de la justice était de protéger les faibles) et cela m'avait fait froid dans le dos.
Comme on dit l'enfer est pavé de bonnes intentions.
Rédigé par : Alex paulista | 01 juillet 2013 à 18:42
Ces deux passages de votre billet, Monsieur Bilger, disent, me semble-t-il, l'essentiel :
"La sérénité légitimement exigée des juges n'est le plus souvent troublée que par les immixtions intempestives, au-delà de l'exercice normal de l'information, du contrôle, des voies de recours et de la vigilance citoyenne, de journalistes, d'avocats, de politiques et de citoyens plus soucieux de mettre le feu que de favoriser une administration tranquille de la justice"
"La justice n'invente pas le gibier. Elle s'occupe de lui, éventuellement le poursuit quand il s'est égaré ou qu'on l'a traîné sur ses terres."
Le premier est un constat de la situation telle qu'elle est exploitée par les avocats ou la presse. Néanmoins, un certain nombre de magistrats ne sont pas insensibles aux sirènes de la presse et peuvent distiller "off the record" quelques éléments de dossiers sensibles. Le plus souvent cela est réalisé pour faire pièce aux allégations de certains défenseurs dont la presse s'empare et avec lesquelles elle "fait bouillir la marmite"...
Le second passage est cependant plus sujet à caution. De fait, si "la justice n'invente pas le gibier", en revanche une fois le gibier sur ses terres, la poursuite n'est pas qu'élégante. Sans être une chasse à courre, elle peut être lancée ou ne pas l'être au gré d'un classement sans suite, le Parquet restant maître de l'opportunité des poursuites... Pour le juge d'instruction, l’ordonnance de non-lieu est aussi une porte de sortie élégante.
En réalité, les qualités morales des magistrats et leur neutralité politique, bien plus que les qualités professionnelles, sont les vraies garantes de la justice et de nature à assurer la "belle mission sans orchestration ni peopolisation".
Le problème est que beaucoup de citoyens s'interrogent sur ces vertus qui ne me semblent pas être si bien enseignées à l’École de la magistrature au point que les magistrats qui en sortent les fassent intimement leurs dès leur sortie d'école et surtout tout au long de leur carrière. La gestion des carrières est bien aussi l'une des entraves à la bonne administration de la justice, quelles que soient les dispositions constitutionnelles qui la garantissent.
Si le pouvoir corrompt, la fréquentation de ses approches corrompt aussi, notamment l'indépendance des magistrats...
Rédigé par : Robert | 01 juillet 2013 à 18:07
Cher Philippe Bilger,
Les porteurs de mauvaises nouvelles ne sont que rarement approuvés ; les commentaires qui assaisonnent votre billet en témoignent.
On peut gloser indéfiniment sur le mur des cons, il restera difficile d’en démontrer l’influence sur la nécessaire neutralité politique des magistrats. Si la solution résidait dans le limogeage de tous les juges ayant une couleur politique, il ne resterait pas grand-monde dans les tribunaux.
Il est évident pour nombre de vos détracteurs que Madame Bettencourt n’a jamais été en état de faiblesse, sauf quand elle distribuait les dons à… François-Marie Banier. Il leur apparaît également que le comportement de M. Woerth, trésorier de la campagne de Nicolas Sarkozy puis ministre du budget, dont l’épouse était embauchée par Patrice de Maistre, était celui d’un chevalier blanc. Les turpitudes de Monsieur Guéant leur apparaissent sans doute également comme une construction, mieux même, un « montage » destiné à salir la réputation de ce grand homme d’Etat. Sa compétence de vendeur de tableaux hollandais ne devrait évidemment pas lui valoir la curiosité des juges, pas plus que l’usage qu’il a pu faire des 250.000 euros prélevés en espèces sur le budget du ministère de Nicolas Sarkozy dans le dos de ce dernier. Quant à l’arbitrage qui a valu à Tapie d’être spolié au regard des « richesses » qu’il a créées lorsqu’il était le sémillant propriétaire d’Adidas, il s’agit tout au plus d’une interprétation déloyale de l’action du précédent président de la République, qui voulait mettre la France à l’abri d’un camouflet financier alors que la Cour de cassation avait depuis 2006 tranché en faveur de l’Etat.
Quand Jean-Pierre Raffarin déclare : «Je suis triste pour la démocratie française de voir à quel point notre justice fait du spectacle. Aujourd'hui, elle a un seul premier rôle : Nicolas Sarkozy», il est dans son rôle de responsable UMP pour décrédibiliser l’action des magistrats, mais je ne parierais pas sur la sincérité de son propos.
Il n’est, curieusement, venu à l’idée de personne de qualifier les juges qui ont mis en examen Jérôme Cahuzac de juges « de droite ».
Rédigé par : Christian C | 01 juillet 2013 à 17:36
Non, vu de l'intérieur, la Justice n'invente pas de gibier, mais elle tend différemment les filets qui le retiennent.
Sensible au vent du moment, elle saccagera plus volontiers un délinquant qui touche à un sujet sensible, cela, au pénal comme au civil. Ainsi la préférence pour la femme dans le divorce, au sujet des enfants notamment, a ruiné bien des vies d'enfants. Les femmes sont tout aussi mauvaises que les hommes.
Dans certains départements, la volonté carcérale a également engendré des laideurs, manifestement sous-tendues par un mot d'ordre, non matérialisé, mais ambiant, "en taule !".
En revanche, de saines réactions se manifestent, des coups de poing sur la table, au figuré bien sûr, des attitudes résolument analystes, des rédacteurs pointilleux.
Dès qu'on aborde la grande délinquance politique, rien ne va plus, non à cause des juges, mais en raison même de l'effet qu'elle produit sur les populations. Casser du Sarko n'a rien d'extraordinaire, de même qu'on a cassé du Mitterrand, qu'on cassera du Hollande quand le temps sera venu.
C'est le temps de la découverte, du soupçon, de la dénonciation, puis de l'instruction qui produit cette hystérèse.
Même en détestant M. Hollande, pour l'image apparemment désastreuse qu'il propose aux Français, surtout à travers la garde des Sceaux, on n'a pas l'impression qu'il s'acharne, ce sont ses ministres qui n'arrêtent pas de faire de la passéophobie (?) et se déconsidèrent petit à petit ; pas de noms, tout le monde les connaît, surtout quelques dames manifestement en panne d'idées originales, et surtout exemptes de formation initiale.
Le complot judiciaire est matériellement impossible, il y a des tendances et des moments, on peut en être la victime. Ainsi, celui qui se défend est-il très exposé à la suspicion du Parquet, qui n'aime pas du tout les victimes rebelles. Si j'étais l'agresseur de la bijouterie qui a été ligoté par les voisins, je déposerais une plainte pour arrestation arbitraire, séquestration et violences volontaires, malgré les arrêts Baud et Thomas figurant au recueil des grands arrêts du Conseil d'Etat. Il aurait quelques chances de voir sa revendication examinée avec sérieux. Bien sûr, ça ferait s'indigner la population, n'irait pas très loin mais donnerait à penser que la Justice est du côté des bandits. Un de mes amis, grand spécialiste d'arts martiaux, a mis en fuite quatre voyous qui l'assaillaient avec armes. L'un a été sérieusement amoché par une projection au sol. Il a déposé une plainte, mon ami a été convoqué, entendu, déféré, jugé et relaxé par le tribunal malgré la véhémence du Parquet qui soutenait qu'en tant que combattant expérimenté son corps était une arme. Les politiques sont des experts de la manipulation des choses et des esprits, ils doivent l'assumer.
Rédigé par : amfortas | 01 juillet 2013 à 17:34
"Elle (la peopolisation) est créée par les politiques qui par exemple s'en prennent aux juges plus que par ceux-ci qui n'en peuvent mais", écrivez-vous, Philippe.
Ainsi c'est sans doute par l'opération du Saint-Esprit que le secret de l'instruction est systématiquement trahi.
Cela ne semble pas vous émouvoir. Et pourtant c'est ce qui permet de livrer en pâture aux médias des personnes soupçonnées, mais non convaincues, de délits ou de crimes.
Les politiques, toujours les politiques : tout est de leur faute.
Et vous dites ne pas vouloir tomber dans le "tous pourris" !
Rédigé par : Frank THOMAS | 01 juillet 2013 à 17:30
Je lis régulièrement votre blog et j'apprécie que vous défendiez "la justice", à laquelle vous avez consacré votre vie professionnelle. Pour ma part je ne la connais, actuellement, qu'au travers des médias dont les sources (donc les informateurs) sont protégées par la loi. Tout ce que j'apprends n'est donc pas forcément "la vérité". Je ne sais pas si "la justice choisit son gibier", mais les médias choisissent leurs sujets... comme vous-même les sujets de votre blog. Ceci étant dit, je n'ai toujours pas compris qu'un (ou trois) juge d'instruction ait pu mettre en examen pour "abus de faiblesse" le précédent président de la République, avec des interprétations de faits/témoignages contestés par le parquet de Bordeaux (d'après ce que j'ai lu dans le JDD d'hier). Je serais très heureux de connaître votre opinion sur ces contradictions entre des juges "libres et indépendants".
Rédigé par : Jean-Claude Samson | 01 juillet 2013 à 15:41
La justice n'invente pas le gibier, certes mais on a l'impression qu'elle le traque en dehors des périodes d'ouverture et parfois avec des armes non autorisées.
Et quand le gibier est abondant, n'a-t-elle pas tendance à choisir untel plutôt qu'un autre ?
Rédigé par : Polochon | 01 juillet 2013 à 15:30
Vous me donnez l'impression de faire partie d'une caste qui défend envers et contre tout les siens !
Quand aurez-vous le courage de reconnaître que le niveau de recrutement des magistrats, tout comme celui d'autres professions, est fortement dégradé ?
Rédigé par : Margot | 01 juillet 2013 à 15:21
Tant que les "murs des cons" fleuriront dans les officines de certains "syndicats", il va vous être difficile de convaincre vos lecteurs.
J'espère que Raf ne se lassera pas de dénoncer les travers de la justice comme vous-même ne vous lassez pas de casser du sucre sur le dos du petit bonhomme.
A chacun ses plaisirs.
Rédigé par : Jean-Paul Ledun | 01 juillet 2013 à 14:52
M. Raffarin, comme tout sénateur, mérite qu'on s'attarde sur son cas de temps en temps. Rappelons qu'il est un maillon de la chaîne de décision et de commandement grâce à laquelle nous devons les statistiques suivantes.
Dans la zone euro (ZE17), le taux de chômage corrigé des variations saisonnières s’est établi à 12,1% en mai 2013, en hausse par rapport au taux de 12,0% relevé en avril.
Aujourd'hui, il y a deux Europe :
- l'Europe des pays périphériques : ces pays sont en faillite. Le chômage atteint des niveaux catastrophiques ;
- l'Europe des pays du nord : ces pays sont en train de sortir de la crise.
Ces deux Europe s'éloignent l'une de l'autre de plus en plus vite.
Zone euro : chômage pour le mois de mai 2013 :
1- Médaille d'or : Espagne 26,9 %.
2- Médaille d'argent : Grèce 26,8 %.
3- Médaille de bronze : Portugal 17,6 %.
4- Chypre : 16,3 %.
5- Irlande : 13,6 %.
6- Italie : 12,2 %.
Ces six Etats européens périphériques s’enfoncent dans la crise de plus en plus profondément. Leur situation devient désespérée.
Et les pays qui ont le moins de chômage ?
Pays-Bas : 6,6 % de chômage.
Luxembourg : 5,7 % de chômage.
Allemagne : 5,3 % de chômage.
Autriche : 4,7 % de chômage.
http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/3-01072013-BP/FR/3-01072013-BP-FR.PDF
Chômage des jeunes de moins de 25 ans :
Grèce : 59,2 % .
Espagne : 56,5 %.
Portugal : 42,1 %.
Italie : 38,5 %.
Slovaquie : 34,6 %.
Irlande : 26,3 %.
Rédigé par : Archibald | 01 juillet 2013 à 14:42
La nécessité où vous vous trouvez, cher Philippe, de défendre la justice, si violemment attaquée et dénoncée en toutes circonstances, me fait penser à la réflexion fort intéressante de Castoriadis sur la délation. Réflexion qu’on peut écouter à la fin de la vidéo que j’ai proposée récemment.
Dans la démocratie directe athénienne, les citoyens votaient les lois directement. C’était leurs lois, et tout citoyen trouvait normal de dénoncer quiconque enfreignait « ses » lois, sans devoir passer par des tiers pour les faire respecter.
Dans notre système moderne, la délation est connotée extrêmement négativement. On ne dénonce pas. Nous n’avons pas le sentiment que les lois sont nos lois, mais qu’elles sont faites par le pouvoir, et qu’elles nous sont imposées. Ce qui crée une solidarité de fait qui explique pourquoi nous ne nous dénonçons pas entre nous.
La justice n’est donc pas notre justice, puisqu’elle agit en fonction des lois qui ne sont pas perçues comme étant nos lois.
Et tous ces soupçons, ces critiques et ces attaques contre la justice, très généralement injustes, car tout magistrat a droit comme quiconque, à la présomption de sérieux et de compétence, montrent la différence entre une justice rendue au nom du peuple, et une justice rendue par le peuple.
Il n’est pas question de défendre la délation, ou de nier l’importance de professionnels pour rendre la justice. Mais il me semble important de réfléchir là encore, sur les conséquences visibles d’un déficit démocratique.
Rédigé par : Claude L | 01 juillet 2013 à 14:09
Il est évident que le "Mur des Cons" ne peut que nourrir tous les fantasmes et qu'il est destiné à être le Fouquet's de la magistrature...
Rédigé par : Guzet | 01 juillet 2013 à 13:57
Il est compréhensible que vous défendiez l'Institution à laquelle vous avez donné votre carrière et en laquelle vous continuez de croire. Vue par un béotien, la Justice (l'institution comme le jugement) dépend en fait énormément des hommes et femmes qui la rendent ou qui y contribuent; elle apparaît trop souvent comme subjective. Il me semble qu'un nombre non marginal de juges militants ou ayant au moins une contestable stratégie de communication (fuites organisées, signatures de pétitions à connotation politique...) portent atteinte au devoir de réserve, voire au principe d'indépendance. Les conjonctions astrales sont si nombreuses dans les affaires à connotation politique que le citoyen de base est tenté de croire à un certain pilotage. En toute hypothèse, ces hommes et femmes de justice contribuent à dégrader l'image de la Justice. L'habile Monsieur Raffarin a fait dans la litote.
Rédigé par : JP | 01 juillet 2013 à 13:18
Intéressant propos sur votre perception de la Justice, M. Bilger. Mais qui ne convaincra pas grand-monde...
L'ancien magistrat que vous êtes fait un excellent avocat d'une institution qui ne rassure plus le citoyen, tant elle accumule les "dysfonctionnements", les erreurs, les partis pris...
Car cela nous ramène à l'éternelle question : une Justice indépendante ?? Tous les Républicains sont pour. A condition qu'elle soit à l'écart de tout soupçon de partialité.
Ce qui inquiète c'est de voir se multiplier les indices de l'existence d'une "Justice de droite" et d'une "Justice de gauche".
Car après tout, pour être juges "ils" n'en sont pas moins des hommes...
Rédigé par : berdepas | 01 juillet 2013 à 12:21
Vous êtes bien bon M. Bilger avec JP Raffarin.
Il arrive qu'il soit amusant dans ses expressions, entre deux stupidités, et de longues périodes de nullité.
Cet ancien bourgeois de Conseil général, centriste eurolâtre à souhait, bien vu par le centre catholique fréquentant Notre-Dame la Grande à Poitiers, que Chirac nomma Premier ministre en étant certain qu'il ne lui ferait pas d'ombre, à tout de même été celui qui, lorsque sous son ministère, les ministres se sont cupidement augmenté leur traitement "avec effet rétroactif", a fait cette déclaration qui montre la profondeur de son âme : "je n'étais pas demandeur".
Et que roule la France dans l'abîme...
Rédigé par : Arobase du Ban | 01 juillet 2013 à 12:09
La "discrétion exemplaire" évoquée ici est parfois battue en brèche, de manière très spectaculaire, par la publication de PV d’audition. Certains ne prêtent pas suffisamment attention à la confidentialité des documents, qui sont alors un régal pour la presse et les lecteurs. Fortuit ? Délibéré ?
Rédigé par : jack | 01 juillet 2013 à 09:59
« La justice n'invente pas le gibier »
Hélas, hélas, hélas, si.
Et elle va même jusqu’à l’épingler sur le trop fameux « Mur des Cons » à la façon dont les chasseurs de la belle époque coloniale accrochaient leurs trophées de tigres, d’ours, de lions, de gazelles, etc.
À chaque époque ses Kipling, la nôtre a des chasseurs qui ne prennent aucun risque dans leur chasse à l’homme et qui ne donnent même pas une chance à leur gibier, comme le faisait le Comte Zaroff. Sauf évidemment si le gibier est la « chance de la France » : vous n’êtes pas sans avoir remarqué (j’utilise le style alambiqué de nos médias de gauche) la différence de traitement entre les casseurs du Trocadéro et du RER d’avec ceux de la manif anti-mariage gay.
Votre billet est un excellent billet théorique défendant une justice idéale.
Hélas, hélas, hélas (chez le Général, la répétition du hélas traduisait son accablement), la réalité est tout autre.
Il n’y a plus de justice, au sens de justice équitable, remarquez que La Fontaine l’avait déjà dit « selon que vous serez puissants ou misérables », sauf qu’il y a eu une inversion des bénéficiaires.
Quant aux gentils, autrefois ils désignaient pour les juifs ceux qui ne l’étaient pas, puis pour les auteurs chrétiens ils désignaient les païens, ils pourraient désigner à présent un juge qui ne l’est pas… équitable !
Rédigé par : Tipaza | 01 juillet 2013 à 09:13
On se demande ce que vous appelez la justice pour l'opposer à gibier plutôt qu'à délit.
Il demeure que, sauf à être tous des surhommes, les juges, eux, s'inventent forcément parfois le gibier.
Rédigé par : MS | 01 juillet 2013 à 08:52