Je ne voulais pas aller voir le très long film de Claude Lanzmann consacré pour l'essentiel au ghetto de Theresienstadt et à un entretien avec celui qui fut son dernier Doyen des Juifs Benjamin Murmelstein.
Pourtant, j'ai craqué et j'ai tenu.
Je n'ai jamais été fanatique ni inconditionnel de Claude Lanzmann.
D'abord il l'est suffisamment de lui-même.
Ensuite, il a, pour le servir et l'honorer, une cour intellectuelle et médiatique largement assez fournie pour la vanité d'un seul homme. Quoi qu'il fasse ou qu'il écrive - il y avait de très beaux passages dans le Lièvre de Patagonie mais que de tunnels et de longueurs ! -, les hyperboles pleuvent sur lui et sur ses oeuvres et la moindre voix discordante constituerait une faute de goût.
Par ailleurs, lui qui, pour beaucoup, est une exemplaire incarnation de l'humanisme avec un devoir de mémoire ne laissant place à rien d'autre a tout de même été le compagnon idéologique d'un Jean-Paul Sartre qui n'a jamais brillé, contrairement à Camus, par une recherche éperdue de la vérité et de la justice et par le refus de tout totalitarisme meurtrier.
Bref, Claude Lanzmann est un homme, pas une figure.
Son film sur "le dernier des injustes" est passionnant, au moins pour une large part.
Dès que Lanzmann s'affiche, se montre, est à l'écran, parade au milieu des tragédies et des exterminations qu'il relate, son narcissisme même talentueux m'est insupportable.
Mais il est un formidable questionneur, et étrangement discret, réservé, attentif et à l'écoute. Cela nous change de lui et de ses monologues aussi graves qu'ils soient. Dans les échanges qui représentent le meilleur de l'oeuvre, Lanzmann est à son meilleur et il révèle une facette de sa personnalité qu'il gagnerait à privilégier. La vanité lui va moins bien que la retenue.
Mais, sans vouloir diminuer son mérite puisqu'il a eu l'idée de nous offrir ce dialogue avec ce personnage, il a trouvé, avec Benjamin Murmelstein, un interlocuteur d'exception.
Une intelligence remarquable, une capacité d'analyse hors du commun, une aptitude à la clarté et, à la fois, à la profondeur, une culture éblouissante, un réalisme froid et lucide sur les rapports humains au sein du ghetto, sur les relations de pouvoir et de jalousie avec les deux Doyens des Juifs auxquels il avait succédé.
Une explication sans fioriture, aussi, de sa démarche quand, Doyen des Juifs, il a tout fait pour que le ghetto demeure, qu'il soit le plus présentable possible afin qu'on vienne le voir, le visiter. Le ghetto maintenu, c'était la survie, la sauvegarde de ceux qu'il avait sous sa responsabilité malgré la tutelle nazie du commandant du ghetto.
On n'a jamais mieux fait comprendre - grâce à la parole convaincante et sincère de Murmelstein qui, à l'issue de l'enfer, a été exonéré, en fin de compte, de toute charge,- la philosophie, la tactique, les forces et les faiblesses de l'attitude de collaboration, son efficacité et ses risques.
Je me demandais, face au comportement si aimable, presque fraternel, de Lanzmann face à son interlocuteur, si celui-là était bien conscient de la possibilité de généraliser cette pratique du moindre mal, cette volonté de pactiser avec le diable pour obtenir en échange des bénéfices pour la communauté ou des personnes en particulier - de se compromettre mais par éthique en quelque sorte.
Evidemment, devant une telle interprétation, Lanzmann serait certainement horrifié car je présume que s'il a pu nouer un contact durable et chaleureux avec le "collabo" Murmelstein, cela tient seulement au fait que cet univers oppose les bourreaux et les gardes nazis mais seulement à des Juifs - que Murmelstein, qu'il s'agit pour Lanzmann de comprendre et d'absoudre à tout prix, est juif, que les malheureux dans ce ghetto sont juifs et que ceux qui vont plus tard blâmer Murmelstein avant de l'innocenter sont juifs. Dans ces conditions, Lanzmann n'éprouve aucun scrupule à user d'empathie à l'égard d'une connivence, d'actions et de compromissions qui chez d'autres non juifs l'auraient révulsé.
Pourtant, il y a eu certainement des condamnations, de la justice expéditive, des exécutions sommaires de gens qualifiés de "collaborateurs" qui avaient été inspirés par le même souci de sauvegarde que celui manifesté au sein du ghetto par Murmelstein. La différence est qu'ils n'étaient pas juifs et qu'ils n'avaient sans doute pas risqué leur honneur et leur réputation que par souci des juifs mais pour sauver tous ceux que leur conception de la collaboration avaient mis sur leur chemin.
Pour tous ces collabos qui étaient tout sauf des salauds - il y en a eu, et d'absolus, je ne le nie pas -, Lanzmann n'aurait jamais éprouvé l'envie d'aller dans leurs tréfonds pour appréhender leurs motivations, leurs ressorts. Ils n'étaient pas Murmelstein.
Celui-ci termine ce film, parlant du dernier Doyen des Juifs qu'il a été, du survivant qu'il est, par cette pensée qui mériterait un long moment de silence et de réflexion. "Les Doyens des Juifs, on peut les condamner, pas les juger".
Encore un effort, Claude Lanzmann, pour admettre qu'il y a de la compréhension à donner, à offrir partout.
Mais enfin notre hôte !!
Pourquoi tant de répulsions reconnues ici comme procédant d'un a priori totalement subjectif, tellement subjectif que cela suffirait à mettre en examen, ainsi qu'il faudrait en examiner la nature Juste, et plus loin avec la Justice jauger benoîtement la valeur avec le bon sens par les mœurs ?
Vous n'aimez pas CL, il vous rebute, c'est ainsi en subjectivité.
Quels arguments plus forts ?
Vous avez tenu, je me suis endormi..., suivant une subjectivité qui m'est propre et que je ne maîtrise guère sinon en dessous de mes espoirs...
Je n'en veux en rien à Claude Lanzmann, son ego disproportionné ne gomme pas en ce qui me retient par mon intérêt subjectif que j'avoue pouvoir être sous-tendu...
Mais en réalités, c'est tandis que les propos qu'il expose m'ont inexorablement endormi, comme d'autres par Alain Resnais m'ont poignardé et rendu interdit de dormir sans autre propos.
Ainsi vont les attachements, les choses subjectives qui interdisent les détachements.
Comment faire avec tout ce fatras des attachements ?
(Vivement une petite Mathématique des attachements !!, qui, n'aidant plus les Spéculateurs mais les Politiques du côté de leurs attachements, permettrait aux Politiques de prouver que de leurs bords ils retranchent sans faire semblant d'ajouter, puisque c'est immédiatement ainsi qu'à la longue ils gonflent... mais,
il en va aussi bêtement que cela, comme si en Mathématiques il y avait du génie malin, le pouvoir de gérer l'addition pour dénoncer la soustraction !)
La Justice et le Politique ont encore beaucoup de chemin à parcourir s'il ne savent pas se saisir du motif et exposer la soustraction, comme il faudrait être une soustraction à zéro mort...
En attendant qu'une telle prouesse politique advienne en pouvoir, la soustraction idéologique par l'argent, celle qui par définition entraîne zéro mort tue inexorablement...
- C'est lamentable les circonvolutions de qui fait croire qu'il ajouterait s'il faut ne pas retrancher !!
- C'est lamentable les circonvolutions de qui fait croire qu'il retrancherait s'il faut ne pas ajouter !!
J'attends que l'on ajoute, sans retrancher, c'est bête mais c'est simple, et cela engage un minimum de pensée rationnelle, ce qui ne brille pas vraiment d'aucune visée dont on se munisse.
Il y a quand même une intelligence crasse avec la tenue compte d'un Descartes qui ne règne plus faisant Lumières et c'est un problème..., historique j'oserai !
Que valent, finalement, les détachements ?
Comment faire, puisque la Justice n'envisage pas autre chose pour mettre en balance la valeur d'un poids qui serait celui des attachements ?
- Pourquoi n'y a-t-il pas égalité devant les attachements, et pourquoi la Loi s'échine-t-elle à seulement jauger les attachements comme en cases à cocher ainsi qu'ils seraient considérables ?
- Pourquoi la Loi ne dit-elle que des cases, simule examiner les détachements, dire avec tout ce qui par définition dépasserait, déborderait la case, ne trouverait pas de case ?
- Pourquoi la Justice préjuge-t-elle généralement avec les attachements mettant l'ignorance en Majesté, sans par nature se préoccuper de juger les détachements, alors que c'est là son seul propos plausible ?
- Comment la démocratie se saisit-elle de la possibilité de juger ?
- Pourquoi la Justice ne jauge-t-elle que la force des attachements, n'argumente-t-elle que par la force qui s'inscrit avec les attachements dans ses tables, et refuse, malgré les moyens que fournissent largement les Sciences, de comprendre qu'un attachement fût-il subjectif et considéré du dehors par un tribunal, cette chose abstraite en discours mais concrète en chacun par l'occupation physique et dure des réseaux neuronaux, cette propriété d'une humanité aussi obligatoire que bizarrement occulte qui mérite mieux que des cases inscrites en Lois...
cette chose ne débordera-t-elle pas du droit, de la vérité comme la réalité déborde la vérité, et comme s'imposent autant les détachements ?
Sensiblement je serais comme vous (?)!, mais je m'endors avec CL !
Rédigé par : zenblabla | 01 décembre 2013 à 16:07
Extrait d"Eichmann à Jérusalem d'Hannah Arendt page 131 :
"Ils n'étaient que des gratte-papier pour qui tout était décidé par paragraphes, par ordres, qui ne s'intéressaient à rien d'autre, qui étaient, en somme, ces petits rouages que, selon son avocat, Eichmann lui-même avait été."
Rédigé par : Carl+Larmonier | 27 novembre 2013 à 17:06
Lanzmann - Adler - BHL - Glucksmann et bien d'autres se sont intronisés vigies et gardiens d'une Histoire dont ils ont décidé qu'elle leur appartient. Ils en ont fait leur fond de commerce qu'ils surveillent farouchement.
Ils ressassent et justifient leurs outrances tel des radoteurs statufiés dont on ne comprend plus l'acharnement suranné, au point de les fuir par lassitude.
Heureusement que Eric, Alain, Elizabeth, Michel et bien d'autres nous parlent d'une autre vie... plus vivante et positive.
Rédigé par : poil à gratter | 26 novembre 2013 à 18:27
"...ne pas devenir le mièvre de chaque agonie..."
Rédigé par : sbriglia | 25 novembre 2013 à 08:58
Eh oui.
On se croit mèche, on n'est que suif...
Rédigé par : Alex paulista | 26 novembre 2013 à 16:23
Rédigé par : Trekker | 25 novembre 2013 à 19:48
Ce que vous dites est exact et bien connu.
Il est probable que GdV l'excitait autrement de par ses relations aux lisières qui faisaient de lui cet homme fort bien informé et d'une fréquentation fort utile.
Garaudy a maintenu un certain nombre d'âneries dictées par un "épidermisme" mal pensé, l'abbé Pierre l'a sinon soutenu, au moins a-t-il refusé de le condamner, par sens de l'amitié, assurément, dont on peut facilement supposer qu'elle était moins intéressée que celle qui devait lier Lanzmann à GdV.
L'intellectuel subtil qu'il est censé être devrait quand même le réaliser seul.
L'autocritique ne doit pas être son fort.
Kouchner l'avait un jour gentiment repris là-dessus (ses critiques sans mélange contre l'abbé), chez Laure Adler ou Michel Field. Chez Adler, je crois, Laure pas Alexandre, qui eut lui abondé sans nuance.
Lors de "l'affaire" (milieu fin des années 90, de mémoire), Libé avait encore été en dessous de tout, titrant "l'abbé Pierre persiste et insiste" là qu'il déclarait à son reporter qu'il avait toujours été l'ennemi de ce qu'avait sottement écrit Garaudy, dans le même temps qu'il avouait n'avoir pas lu son livre et qu'il ne voulait pas le lire - à l'évidence de peur d'être déçu - pas plus que lui retirer son amitié, tout en ayant donc dénoncé ce que celui-là avait dû dire et qui, en effet et pour de bonnes raisons, choquait.
Cela ne suffisait pas à Libé, stupide comme a toujours su l'être, ni à Lanzmann, d'un cynisme consommé.
AO
Rédigé par : oursivi | 25 novembre 2013 à 22:15
Aucun rapport, quoique... j'ai réécouté cette vidéo de Jim Garrison sur l'assassinat de JFK...
http://www.dailymotion.com/video/x17crvw_jfk-le-combat-de-jim-garrison-pour-la-verite_news#from=embediframe
Quelles forces sont donc assez puissantes pour que sans nier le fait historique on ne puisse pas s'interroger sur les modalités ? Quelle importance ?
Jim Garrison : "comment un éléphant au-dessus d'un précipice peut-il se retenir à la tige d'une marguerite pour ne pas tomber ?"
Chape de plomb.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 25 novembre 2013 à 21:01
@ oursivi - 25 novembre 2013 à 18:39
"Lanzmann est un intellectuel estimable mais l'homme ne m'a jamais été sympathique un instant, ce qu'il avait déclaré de l'abbé Pierre avait été si cinglant et glaçant que je ne donnerai jamais la moindre chaleur à l'estime que ses travaux peuvent lui attirer."
Ses propos publics sur l'abbé Pierre, qui ne se fourvoya qu'une seule fois afin de soutenir une personne qu'il estimait (R. Garaudy), étaient pour le moins contradictoires avec une de ses fréquentations régulières depuis plusieurs décennies, le romancier Gérard de Villiers qui fut toujours d'un antisémitisme constant et revendiqué : voir son portrait-nécrologie par Ariane Chemin dans "Le Monde" du 5 novembre, où sa relation avec Claude Lanzmann est évoquée et revendiquée par ce dernier.
Mais peut-être pour Claude Lanzmann l'antisémitisme professé de manière récurrente en privé par un romancier de "seconde zone", réactionnaire et aux positions flirtant avec l'extrémisme de droite, était-il chose vénielle comparé à une déclaration publique ponctuelle d'un homme dont la vie ne fut qu'altruisme et sainteté ?
Rédigé par : Trekker | 25 novembre 2013 à 19:48
Excellent billet, beaucoup de bons commentaires, Alex, Achille, Mary, Trekker, et d'autres...
Pas grand-chose à ajouter sauf à chercher à pérorer, l'essentiel est là et bien tourné.
Plutôt de cela que je vous eus aimé entendre parler avec Alain Finkielkraut, de la notion d'élection, de sa nécessité si elle n'est pas exclusive ni liée à une simple naissance, du possible de ce tropisme vers l'excellence dont elle conditionne qui en est à la fois prisonnier, redevable et accablé, de ce que peut et doit être l'affirmation de soi comme d'une identité commune à certains avec toutefois pour eux le souci de tous, de ce en quoi l'arrogance peut être créatrice et universellement utile...
De ces faux paradoxes dont l'humanité attend inconsciemment la remise à plat ; aussi en quoi ils lui sont carburant indispensable.
Lanzmann est un intellectuel estimable mais l'homme ne m'a jamais été sympathique un instant, ce qu'il avait déclaré de l'abbé Pierre - rejoignant sur ce point les propos de ce personnage tout similaire à lui qu'est Alexandre Adler - avait été si cinglant et glaçant que je ne donnerai jamais la moindre chaleur à l'estime que ses travaux peuvent lui attirer.
AO
Rédigé par : oursivi | 25 novembre 2013 à 18:39
Jean Morland, cessez votre numéro de bonneteau et de faire dire à nos commentaires ce que nous n'avons jamais dit, le révisionnisme ça commence comme ça.
Rédigé par : Savonarole | 25 novembre 2013 à 17:59
Bonjour,
Pourriez-vous m'aider à me mettre en relation avec des personnes susceptibles de m'aider à trouver une étoile jaune des déportés ? Toute ma famille fut décimée dans les camps et j'aimerais garder un lien précieux à travers ce symbole. Merci de me guider dans ma recherche. J'ai écrit à à la fondation française, à Chambon-sur-Lignon, en Israël, en Allemagne, en Hollande... et ils n'ont pas pu m'aider.
Merci de votre attention et de votre aide.
Anne Rottenberg
Un mail pour me joindre :
[email protected]
Rédigé par : Rottenberg Anne | 25 novembre 2013 à 16:50
@ Jean Morland - 25 novembre 2013 à 09:07
"(Les juifs)...sont les seuls dont on a exterminé les enfants et les vieillards, systématiquement, avec froideur et méthode, comme on gazerait des poux..."
Loin de moi l'idée de banaliser le génocide des juifs par les nazis, mais l'extermination systématique d'une population (quasi totale ou partielle), y compris vieillards et enfants, ne fut pas l'apanage des nazis. Pour se limiter aux deux derniers siècles et génocides les plus emblématiques, on peut citer :
- Colonisations britanniques en Tasmanie, Nouvelle-Zélande et Australie ; ce fut de même. Dans ces deux derniers pays si une minorité d'autochtones a survécu, cela ne résulta pas de l'humanité des colonisateurs mais d'absence de moyens techniques pour les éradiquer : trains, véhicules automobiles et avions.
- La conquête de l'ouest aux USA généra des pratiques et résultats similaires, à titre d'exemple : colonnes d'Indiens (vieillards et enfants compris) acheminés à pied en hiver vers les réserves ; question mortalité elles furent similaires aux "marches de la mort" des nazis.
- Lors de l'holomodor entre 1931-33 en Ukraine et Kouban (famine généralisé organisée sous Staline), il n'y eut aucun traitement de faveur pour les vieillards et enfants. Si une partie des populations a survécu, ce fut surtout à cause des méthodes archaïques utilisées alors.
- Au Rwanda lors des massacres réciproques entre Tutsis et Hutus, là encore il n'y eut pas de discrimination entre adultes, vieillards et enfants. De même l'archaïsme des méthodes utilisées fut le principal facteur de non éradication totale d'une des deux populations : les Tutsis.
Où il y a une spécificité dans le génocide des juifs par les nazis, c'est dans la rationalisation industrielle d'une partie de celui-ci : camps d'extermination organisés et alimentés tels des usines.
Pour avoir une vision bien conceptualisée des massacres-génocides perpétrés par les Nazis et Soviétiques en Europe centrale et Urss, qui aboutit à la disparition du Yiddishland, je conseille la lecture de "Terres de sang - l'Europe entre Hitler et Staline " de l'historien Timothy Snyder. Entre autre point de cet ouvrage remarquable, un chiffre effrayant pas toujours connu : entre 1933 et 1945, soviétiques et nazis ont tué 14 millions d'êtres humains en Europe de l'Est.
Rédigé par : Trekker | 25 novembre 2013 à 15:01
@Savonarole
Je ne sache pas que les Tchèques se soient montrés plus tendres que les Polonais ou les Français envers les Nazis et leurs complices. Ils se sont même montrés passablement brutaux avec les Allemands des Sudètes en masse.
Couve n'a jamais trié parmi les Français ceux qui méritaient le poteau allemand. Quant à Pucheu, il ne risquait pas la mort en cas de victoire allemande... Le refus de désigner la victime laisse à l'assassin la responsabilité de son meurtre. Dans un contexte de contrainte absolue, c'est une forme, sinon de résistance, du moins de limite à la compromission. Ni Pucheu, ni Touvier, ni même Papon n'ont eu le courage de ce refus-là... alors même qu'ils ne risquaient rien.
Rédigé par : Jean Morland | 25 novembre 2013 à 13:56
"Désolé pour tous les commentaires qui cherchent à relativiser le Génocide, si grandes qu'aient pu être les souffrances des autres victimes du nazisme, les Juifs (avec les Tziganes, il est vrai) sont les seuls dont on a exterminé les enfants et les vieillards, systématiquement, avec froideur et méthode, comme on gazerait des poux..."
Rédigé par : Jean Morland | 25 novembre
2013 à 09:07
That is the problem..........
Ohttp://www.dailymotion.com/video/xsdfs1_claude-sarraute-vive-la-shoah_news
J’espère ne pas trop faire craquer le plancher.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 25 novembre 2013 à 12:24
"Murmelstein a refusé de dresser des listes. Il a été acquitté (par les Tchèques). Pucheu en a dressé. Il a été fusillé. Le problème de la collaboration, c'est jusqu'où elle va..."
Rédigé par : Jean Morland | 25 novembre 2013 à 10:02
Certes, certes, mais être "acquitté par les Tchèques", c'est pas ce qu'il y a de plus glorieux, surtout à l'époque.
Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui m'ait dit "j'ai été acquitté par les Tchèques"... Voyons...
Quant à Pucheu, un homme brillant mais faible, il a cru à Giraud qui lui avait promis un avenir au Maroc jusqu'à la fin de la guerre. Pucheu a raté la carrière d'un Couve de Murville qui corrigeait les discours du Maréchal, puis est devenu le ministre des Affaires étrangères de de Gaulle....
Dieu quelle époque !
Rédigé par : Savonarole | 25 novembre 2013 à 12:07
Murmelstein n'a pas pu témoigner au procès d'Eichmann. On l'a écarté.
Leur proximité semblait déranger tout le monde.
Je veux bien faire du politiquement correct, mais ne me demandez pas la lune.
Vous verrez qu'un jour Lanzmann fera un film où il nous prouvera que Jésus-Christ a été crucifié par Pierre Laval et le microcosme parisien le croira.
Rédigé par : Savonarole | 25 novembre 2013 à 11:48
Je n'ai jamais visité de camp de concentration, j'aurais trop peur que l'on m'oublie quelque part ; dans les douches ou dans un fourgon blindé par exemple.
Il est vrai que l'on parle beaucoup moins souvent d'une autre Shoah, celle des goulags. C'est miracle que le témoignage indispensable et indépassable nous soit parvenu sur ce sujet avec la somme qu'est l'Archipel du Goulag d'Alexandre Soljenitsyne.
Je me suis toujours demandé malgré le fait d'avoir lu ces livres sur la question, si, en somme, ce n'était pas une forme de mauvais voyeurisme.
J'irai voir Le dernier des injustes car le billet de Philippe Bilger m'en a donné grandement envie.
Rédigé par : Carl+Larmonier | 25 novembre 2013 à 10:10
Petit codicille à mon précédent commentaire.
Murmelstein a refusé de dresser des listes. Il a été acquitté (par les Tchèques). Pucheu en a dressé. Il a été fusillé. Le problème de la collaboration, c'est jusqu'où elle va...
On a critiqué, à juste titre, la "justice" à chaud. Paradoxalement, à froid, elle est encore plus dure. Si l'on s'en tient au critère de l'humanité des protagonistes, un Touvier ou un Papon ont fait vraiment triste figure à cet égard. C'étaient de tristes sires, et des hommes petits. Ce que ne semble pas être Murmelstein.
Rédigé par : Jean Morland | 25 novembre 2013 à 10:02
"Bref, Claude Lanzmann est un homme, pas une figure".
Quel beau compliment ! Dans l'entrevue avec Elkabbach sur LCP (où Elkabbach l'a à peine laissé parler) ce dernier a dit de Murmelstein qu'il était un homme. Il a aussi parlé de fraternité... Il a aussi souligné que les Juifs ne se sont pas tous comportés comme des héros, loin de là, et qu'ils ont été des hommes avec leurs défauts. Ce que les Nazis, précisément, leur refusaient.
Quoi qu'on en dise, Lanzmann a été l'auteur du film le plus bouleversant, car le plus vrai, et le plus dénué de pathos, sur le Génocide. Cela restera à son crédit, si agaçant puisse-t-il être par ailleurs.
Désolé pour tous les commentaires qui cherchent à relativiser le Génocide, si grandes qu'aient pu être les souffrances des autres victimes du nazisme, les Juifs (avec les Tziganes, il est vrai) sont les seuls dont on a exterminé les enfants et les vieillards, systématiquement, avec froideur et méthode, comme on gazerait des poux...
Rédigé par : Jean Morland | 25 novembre 2013 à 09:07
"J'en conclus que ceux qui me font suer sont définitivement ceux qui me poussent à choisir un camp qui n'existe pas" a écrit Alex.
Ou comment ne pas devenir le mièvre de chaque agonie...
Rédigé par : sbriglia | 25 novembre 2013 à 08:58
Résistance frontale, résistance passive.
Collaboration imposée, collaboration choisie.
Coopération intéressée, coopération naïve.
Et pour finir complicité.
La liste est longue de tous les comportements possibles en de telles situations ; chacun de ces comportements ayant d’ailleurs ses nuances. Avec pour chacun le dilemme entre le dur désir de durer et celui de vivre ses convictions.
Dans l’instant c’est la conscience qui décide.
Mais il convient de se méfier de l’héroïsme du martyr, qui peut cacher des motivations multiples. L’Église l’a compris assez vite, puisque dès la fin du premier siècle, et au début du deuxième elle a interdit à plusieurs reprises le martyr volontaire, car elle s’était aperçue que certains candidats au martyr espéraient ainsi laisser un nom à la postérité.
Dans le temps l’attitude juste est celle qui assure la pérennité de ses convictions et de la communauté à laquelle on appartient, dans ses principes et ses traditions, sachant que les traditions sont évolutives.
C’est la seule loi qui permet de trier le juste du faux.
Cette survie impose parfois des actes incompréhensibles dans l’instant, parce que l’attitude juste relève de l’instinct ou de l’inconscient (au choix), et n’est pas une attitude rationnelle.
La raison n’intervient que comme moyen d’action d’une décision qui lui échappe.
On ne peut pas juger la décision qui est de l’ordre du destin individuel, alors que l’on peut juger des moyens qui ont été mis en œuvre.
Toute morale rétroactive relève au mieux d’une illusion de supériorité sur le passé, et au pire d’un sentiment de vengeance ou d’une volonté d’instrumentalisation de ce passé pour bénéficier d’avantages illicites.
Pourquoi ces litanies sur la Shoah, et rien ou presque sur les massacres de même ampleur exercés par les dictatures communistes, les famines voulues pour exterminer des populations récalcitrantes à la servitude marxiste ?
Tout simplement parce que la gauche utilise les crimes génocidaires de la Shoah à son avantage, pour s’ancrer dans une posture du Bien, en rejetant dans le camp du Mal les opposants à la doxa marxiste.
La loi Gayssot, imposée par un communiste, empêche le travail d’historien, et a pour but de verrouiller des positions politiques acquises à partir d’un combat qui ne fut pas seulement celui de la gauche.
Cette loi est une loi politique et pas une loi morale, c’est une évidence. On en est arrivé à confondre le travail de mémoire humanitaire et la manipulation politique au profit d’un choix de société, qui porté à ses limites a donné les mêmes excès que ceux qui sont dénoncés.
Rédigé par : Tipaza | 25 novembre 2013 à 08:35
Dans la famille Lanzmann on peut préférer Jacques, qui en deux minutes 35 de bonheur nous troussa "Il est cinq heures Paris s'éveille".
Que Claude Lanzmann se soit trouvé tardivement son Capitaine Dreyfus n'en fait pas pour autant un Zola.
Le personnage de Murmelstein demeure controversé et on nous invite à penser que tout le monde s'était mis le doigt dans l'œil jusqu'en 1989. De surcroît l'unanimité de la critique cinématographique parisienne met mal à l'aise. On connaît des innocents plus crédibles.
Que n'a-t-on fait un film sur Marc Boegner, couramment appelé le pasteur Boegner ?
L'originalité de Claude Lanzmann réside dans la surprise que nous avons d'entendre enfin clairement quelqu'un qui nous met un abat-jour sur ce phare aveuglant qu'est Hannah Arendt et ses sornettes sur la "banalité du mal".
Restons-en au chef d'œuvre œuvre de Claude Lanzmann, "Shoah", qui demeure indépassable.
Rédigé par : Savonarole | 25 novembre 2013 à 04:27
Je suis en train de lire "Eichmann à Jérusalem" d'Hannah Arendt, rapport sur la banalité du mal, essai qui a été si controversé qu'Hannah Arendt ne devait plus avoir un ami sur terre, même pas son reflet dans son miroir après avoir commis cet ouvrage. En parlant de miroir, Hannah Arendt nous fait passer de l'autre côté et nous montre un autre reflet, celui de la théâtralité qui entourait ce procès d'Eichmann ; qui lui-même était cloisonné lors du procès comme dans un bocal, voire un aquarium, étant la représentation même d'une pauvre loque humaine.
Je comprends mieux en lisant Hannah Arendt ce qu'elle exprimait en parlant de banalité du mal, celle devenant la pire des atrocités si on lit bien entre les lignes ; ce mal incarné étant perpétré par des pauvres pions dans l'ensemble avec des fous furieux en haut de la pyramide.
Je ne sais pas ce que se raconteraient Hannah Arendt et Claude Lanzmann s'ils se retrouvaient, aujourd'hui attablés autour d'un pot.
Rédigé par : Carl+Larmonier | 24 novembre 2013 à 18:28
J'allais écrire que c'est vrai, qu'ils nous font suer ces drôles avec leur juiverie recroquevillée et égoïste, leur humanité à deux vitesses, leur Dieu extérieur et leur Peuple Élu. Puis je me suis repris.
Que penseraient tous mes amis et collègues juifs, ces Nathaniel, Samuel, Mickaël, Marcelo, Lauro auprès de qui je n'ai jamais, strictement jamais, ressenti une once de comportement différent de si j'étais juif moi-même, y compris lorsque j'osais la vanne antisémite de mauvais goût. Certains blaguent régulièrement avec ça en me disant "c'est bon, maintenant qu'on se connaît, tu peux me le dire que tu es juif".
J'en conclus que ceux qui me font suer sont définitivement ceux qui me poussent à choisir un camp qui n'existe pas, en ressassant des vieux démons d'il y a soixante-dix ans.
Vous êtes capable de dépasser ça, de voler bien plus haut qu'un Francis Szpiner.
Encore un effort Philippe Bilger.
Rédigé par : Alex paulista | 24 novembre 2013 à 16:59
Nous avons bien compris les ressorts de l'argument de notre hôte.
Le doyen Murmelstein a accepté de se salir les idées pour protéger sa communauté au-delà de l'impossible, certes à la marge, mais c'était déjà ça. Il fut acquitté par ses juges tchèques.
D'autres "collaborateurs" eurent la chance de subir une instruction honnête qui déboucha sur des procès presque normaux, à leur bénéfice.
Des soldats perdus comme le capitaine Henri Fenet (SS Charlemagne, Berlin mai 45) verra sa peine de travaux forcés commuée en conditionnelle en 1949.
La justice d'alors essaya quand même de trier dans le second tiers.
Elle le ferait sans doute encore aujourd'hui dans les mêmes circonstances ; mais la presse et les ligues jamais, qui raisonnent par bloc, anathémisant tout porteur du calot sans chercher ce qu'il a (ou pas) dans tête.
"Salut à toi, dame Bêtise..." chantait Brel.
Rédigé par : Catoneo | 24 novembre 2013 à 16:47
Est-il pertinent de parler de "collaboration" à propos des Conseils Juifs des ghettos ?
La différence qui existe entre un ghetto assiégé et la France occupée est du même ordre que celle qui existe entre Socrate et Jésus. Socrate a le choix, prendre la fuite ou boire la ciguë, il choisit de boire le ciguë, donnant raison à ceux qui le condamnent, c'est-à-dire "collaborant" avec eux. La France occupée fait le même choix, dissoudre la République plutôt que poursuivre la lutte ailleurs, et donc collaborer. Mais le ghetto assiégé, lui, n'a pas plus de choix que Jésus. L'un et l'autre ne peuvent que subir la raison du plus fort, ligué contre eux, unanime, convaincu de la justesse de sa cause.
Jésus mourant dit, à propos de ceux qui le tuent : "ils ne savent pas ce qu'ils font". C'est exactement ce qu'on peut dire du monde occidental, Europe et Etats-Unis mêlés, ligués contre le peuple juif, et dont l'Allemagne n'a été au fond que l'exécuteur des basses œuvres : il ne savait pas ce qu'il faisait. Et peut-être ne le sait-il toujours pas...
On connaît le mot de Jean-Paul II : "Auschwitz, Golgotha du monde moderne". Peut-être aurait-il dû dire, de façon plus explicite encore : "la Shoah, Passion du monde moderne".
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 24 novembre 2013 à 16:33
Il est des expériences qui imprègnent à jamais le souvenir si on les a vécues intensément, des amitiés qui demeurent en dépit des faiblesses ou des erreurs de l’autre, des témoignages qui bouleversent, interpellent durablement, des œuvres puissantes d’auteur ou de cinéaste qui laissent une marque indélébile dans les esprits, des lieux de mémoire que l’on se doit de visiter au moins une fois dans sa vie. Que ce soit Douaumont, Gorée, Auschwitz pour ne citer que trois lieux emblématiques de la souffrance et de la folie meurtrière des hommes. Je ne connais en effet aucun jeune qui ne se soit senti profondément bouleversé en écoutant le témoignage de l’enfer vécu en ces endroits du souvenir que d’aucuns voudraient effacer, estimant que l’on en a assez parlé et qu’il est temps de tourner la page. Aucun même le plus endurci qui n’ait les larmes aux yeux en sortant d’une visite au mémorial des enfants de Yad Vashem. Mon Dieu toutes ces étoiles, quelle sensation ! Se dire qu’ils furent un million cinq cent mille enfants juifs exterminés par les nazis, enfants de tous âges dont on entend les noms égrenés comme une interminable litanie, en circulant dans la pénombre bleutée du mémorial…
Regarder le passé, non pour se complaire dans une rumination culpabilisante et stérile mais pour en tirer des leçons et n’avoir pas à revivre de telles horreurs.
Il me semble qu’une œuvre comme Shoah s’inscrit parfaitement dans cette optique. Et c’est grâce à des hommes tels que Lanzmann, qui se fit un devoir d’exhumer les pages parmi les plus tragiques de notre histoire, que l’holocauste juif est devenu une réalité pour tous ceux qui ne « savaient pas » ou ne voulaient pas savoir. Quand ils ne se bornaient pas (en parfaits petits descendants de collabos et fonctionnaires zélés) à enterrer les terribles récits de survivants sans leur avoir concédé la moindre attention, voire en niant leur réalité.
Rédigé par : Mary Preud'homme | 24 novembre 2013 à 16:10
@ Achille
Je suis entièrement d'accord avec vous, Lanzmann oublie un peu vite tous les autres déportés que les Juifs. Mon grand-père par exemple. Il a été fait prisonnier par les Allemands. Comme on dit "c'était de bonne guerre ;-)) Il a réussi à s'échapper d'un camp qui selon lui, était mal gardé. Ouf ! Il est revenu chez lui, et quinze jours plus tard il était arrêté par la Gestapo direction un autre camp, de concentration cette fois, d'où il ne s'échappera pas. Il reviendra des camps allégé de 40 kg. Plus tard il apprendra que c'est son voisin en face de sa maison qui l'avait dénoncé, il ne saura jamais pourquoi. Il vivra quarante ans de sa vie en face de son voisin dénonciateur. Il ne dira jamais à ses enfants qui l'avait dénoncé de peur que ceux-ci fassent "justice" par procuration. C'est ma grand-mère qui nous l'a dit un peu avant de mourir. Mon grand-père n'était pas juif, il était juste Breton. Je crains malheureusement que des histoires comme cela il y en ait plein M. Lanzmann.
Rédigé par : breizmabro | 24 novembre 2013 à 12:57
@ Achille
Je partage entièrement votre analyse sur Claude Lanzmann, pour qui toutes les horreurs de la Seconde Guerre mondiale et au premier chef celles des nazis semblent se limiter au génocide des Juifs. A la liste des victimes que vous citez et qui n'ont guère ému Claude Lanzmann, j'ajouterai aussi les prisonniers de guerre soviétiques dont près de 80 % moururent dans les camps de concentration nazis qui leur étaient dédiés. Je m'excuse pour cette comptabilité macabre, mais leur nombre est similaire à celui des juifs morts dans les camps d'extermination et du fait des massacres nazis sur le front de l'Est.
Le construction même du film de Claude Lanzmann me dérange, car centrée sur Murmelstein et ses propos. Comment savoir si plusieurs décennies après les faits, cet ancien administrateur de ghetto ne réécrit pas les motivations réelles qui l'animaient quand il exerçait cette fonction ? Assurer la survie et la sauvegarde de ceux qu'il avait sous sa responsabilité, c'est plus valorisant que de reconnaître : je n'étais pas un homme courageux, sauver ma propre vie comptait plus que tout, et certes j'ai tenté de limiter la casse au sein du ghetto mais sans prendre de grands risques.
Certes Murmelstein ne fut pas le pire des chefs de ghetto, mais il n'empêche qu'on ne peut le réhabiliter aussi aisément, voire quasi l'absoudre comme le fait Claude Lanzmann. En s'efforçant entre autres via sa propre police, de maintenir dans la passivité et l'obéissance à l'occupant les juifs du ghetto, il a quand même bien facilité la tâche finale génocidaire des nazis.
Ce que souvent on ne sait pas ou veut oublier, des Murmelstein il n'y en eut pas que dans les ghettos d'Europe centrale et d'URSS mais aussi en France. Dans un contexte qui leur laissait une relative plus grande liberté d'action, ils se comportèrent de manière similaire et de celui-ci ressort les deux dominantes de leurs motivations : mélange d'illusions sur l'occupant nazi, alliées à la volonté de survivre aux dépens de la masse qu'ils étaient censés protégés.
Sur ce sujet des juifs "collabos" Français, il existe un ouvrage fort bien documenté, ostracisé dès sa sortie, jamais réédité et dont l'auteur Maurice Rajsfus fut stigmatisé : Des juifs dans la collaboration, l'UGIF 1941-1944. On ne le trouve quasi plus qu'en téléchargement le PDF :
http://www.fichier-pdf.fr/2013/09/20/maurice-rajsfus-des-juifs-dans-la-collaboration/
Certes comme le fait son préfacier Maurice Vidal-Naquet, on peut reprocher à Maurice Rajsfus d'avoir une lecture très marxiste de ce qui s'est déroulé en France : bourgeoisie juive française / prolétariat juif immigré récent et juifs Français modestes ou pauvres. Mais hormis le schématisme de son analyse, son inventaire des faits mis à jour démontre bien qu'il y a eu une "collaboration" juive en France, et que les motivations de ses accepteurs sont pour le moins contestables.
Rédigé par : Trekker | 24 novembre 2013 à 11:30
Silence...
Chacun avance sur la pointe des pieds chaussés de charentaises, les mains glissant sur les murs, en espérant ne pas faire craquer le plancher pourtant vermoulu... Et l'interrupteur est au bout du couloir.
Qui ne dit mot consent.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 24 novembre 2013 à 11:26
Comment de pas voir que les Français sont saturés de Shoah et d’indignation jusqu’à l’indifférence ?
Comment ne pas voir que de plus en plus de Français finiront inéluctablement par comprendre que ce n’est pas d’histoire dont on nous sature, mais de propagande antinazisme, aussi justifiée soit-elle ?
L’horreur des camps ne mérite-t-elle pas mieux qu’une histoire constamment falsifiée jusqu’à l’absurde ? Pour diaboliser le nazisme, on entend encore dire hier sur France Inter et le plus sérieusement du monde, que la croix gammée nazie tournait vers la gauche.
Un professeur d’histoire pourra-t-il un jour recommander de lire Mein Kampf comme document de base sans se voir menacer d’exclusion de l’enseignement ?
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 24 novembre 2013 à 11:04
Est-ce que ce pourvoyeur de la vérité historique due à la deuxième grande guerre défend bec et ongles une identité ? et qu'elle ne pourrait être malheureuse passant les siècles ?
Que subissant l'inique, elle demeure puisque de nombreux pays ayant eu des victimes qui se racontent seulement selon l'identité culturelle propre au pays ?
Si juif est une identité si prégnante, si forte qu'elle pourrait dissoudre l'essentiel d'autres identités désagrégeant la solidité de la condition humaine, avec le recul on
pourrait se poser d'inquiétantes questions.
Et voilà que le plus grand "injuste" est issu de la même histoire quand des justes étaient éparpillés agissant en leur âme et conscience et à leurs risques et périls...
Plus tragiquement, il démonte près de soixante ans de recherches et poursuites de la vérité quand il suffisait de collaborer in situ.
Fièrement, il entr'ouvre la porte pour la réhabilitation d'autres personnages dits "collabos"! mais à quoi sert d'aller forcer des aveux posthumes quand la vie est faite de situations imprévisibles ?
Rédigé par : calamity jane | 24 novembre 2013 à 10:48
Je partage votre agacement concernant la personnalité de Claude Lanzmann. Je l’ai vu vendredi sur LCP dans un entretien avec Jean-Pierre Elkabbach. Il avait l’air arrogant et ne supportait pas la moindre contradiction. On peut voir cet entretien sur le site de LCP.
http://www.publicsenat.fr/vod/bibliotheque-medicis/claude-lanzmann-et-dominique-de-villepin/claude-lanzmann,dominique-de-villepin/142303
Le souci de comprendre comment Benjamin Murmelstein a pu devenir un « collabo » est louable. Mais je crois, comme vous, qu’il tente de réhabiliter la mémoire de cet homme admirable uniquement parce qu’il était juif. Tout chez Claude Lanzmann semble tourner autour des horreurs qu’ont subies les Juifs d’Europe. Ça peut se comprendre. Mais Maurice Rajsfus avait précédé (et de loin) Claude Lanzmann en publiant en 1980 « Des juifs dans la collaboration ».
Des historiens (notamment Philippe Burrin) ont cherché à comprendre les motivations des collabos. Ils font la distinction entre collaboration d’Etat (régime de Vichy, administration, police), collaboration idéologique (Doriot, Déat, LVF), collaboration économique (Renault, Berliet, Banque Worms, entreprises du BTP) et collaboration au quotidien (artistes continuant à « exercer leur métier », selon la formule de Guitry).
Certains sont donc devenus collabos par opportunisme, par conviction, par intérêt ou simplement par indifférence égoïste au sort des autres. Certains ont aussi collaboré parce qu’ils devaient obéir aux ordres (administration et police).
J’aurais aimé que Claude Lanzmann consacre autant de temps et d’énergie à étudier la résistance allemande au nazisme, dès 1933. Des centaines de milliers d’Allemands ont été envoyés dans des camps de concentration. Ils étaient communistes, socialistes, catholiques, protestants. Et surtout ils n’aimaient pas ce que leur pays devenait. Ne les oublions pas !
Rédigé par : moncreiffe | 24 novembre 2013 à 10:33
Un jour, sans vouloir vous peiner j'avais dit que votre billet était glaçant ; aujourd'hui, je crains qu'il ne faille prendre les armes pour défendre celui-ci. Vous résumez une terrible déchirure, l'exclusivité de la justification réservée à certains, l'impossibilité d'en défendre d'autres, non au fond, mais par l'humiliation répétée de la pensée et l'influence déterminante d'un choix délibéré appuyé par une législation répressive. A cette aune, la logique a été amputée et sans doute, définitivement. L'Histoire, seule, à voix basse, réserve la réalité. Le travail de restitution des éléments divers de la mémoire est aujourd'hui impossible, car la vulgarité, la méconnaissance voulue et l'abaissement culturel obligent à penser à un complot de l'étouffement. La réalité est difficile, l'héroïsation, l'hagiographie, règnent sans partage. Heureusement, la synthèse à partir de Lanzmann sera possible, dans un futur indéterminé qui n'ira pas sans injures, sans damnatio memoriae, peut-être sans condamnations judiciaires. Votre billet me laisse profondément triste en pensant que certaines phrases du Général de Gaulle sont soigneusement laissées sous le boisseau.
Que Ludovic m'excuse, je sors légèrement du sujet en renvoyant les politiques à leur responsabilité cumulée de la perte de l'esprit d'analyse dans la population qui n'en eut jamais beaucoup. La faveur systématique aux violents d'un seul bord a entériné la déchirure de la société, alors qu'il était possible, oui, possible, de la réunir autour de la recherche, même au prix de la reconnaissance de l'horrible.
Lanzmann a le privilège, à travers Murmelstein, de nous renvoyer à cette interrogation spinozienne, mais, comme vous le dites, il cantonne son propos, c'est ce que j'ai ressenti dans son dialogue avec Elkabbach.
Merci pour votre billet, il va falloir ferrailler maintenant et ce ne sera pas facile.
Rédigé par : genau | 24 novembre 2013 à 10:11
Une belle part des choses dans ce billet.
On me pardonnera à ce titre un commentaire non moins personnel.
http://www.marcservera.com/lapartdeschoses.html
Rédigé par : MS | 24 novembre 2013 à 09:33
"Une explication sans fioriture, aussi, de sa démarche quand, Doyen des Juifs, il a tout fait pour que le ghetto demeure, qu'il soit le plus présentable possible afin qu'on vienne le voir, le visiter. Le ghetto maintenu, c'était la survie, la sauvegarde de ceux qu'il avait sous sa responsabilité malgré la tutelle nazie du commandant du ghetto".
C'est là à l'évidence - et cela l'a été - la justification possible de la politique de Vichy, mais ce sont là des choses que la doxa médiatique contemporaine interdit de dire, parmi bien d'autres choses, comme elle oblige, comme ici, à parler indistinctement de "collabos" pour désigner un éventail d'attitudes et de choix aux motivations très variées et aux conséquences très diversifiées. Mais allez confronter la complexité de l'histoire aux certitudes bornées de la culture médiatique...
Cela étant, comme c'est très bien dit ici, on peut se demander si "Lanzmann a bien été conscient de la possibilité de généraliser cette pratique du moindre mal, cette volonté de pactiser avec le diable pour obtenir en échange des bénéfices pour la communauté ou des personnes en particulier - de se compromettre, mais par éthique en quelque sorte".
Rédigé par : Guzet | 24 novembre 2013 à 09:21
Bonjour Philippe Bilger,
« Encore un effort, Claude Lanzmann, pour admettre qu'il y a de la compréhension à donner, à offrir partout. »
La Shoah, les camps de concentration sont le fonds de commerce de Claude Lanzmann. Cela fait cinquante ans qu’il ne cesse de parler de ce drame de la Seconde Guerre mondiale et il continue encore aujourd’hui.
On aurait pu croire que tout avait été dit sur le sujet que ce soit dans des livres, des films, des téléfilms, des documentaires, des débats, des discours et témoignages, mais non, Lanzmann trouve toujours encore de la matière.
A l’entendre le Juifs seraient les seules victimes de la folie meurtrière du nazisme. Il oublie simplement de parler des tsiganes, des homosexuels, des communistes, des pauvres gens qui ont été dénoncés à la gestapo par leurs voisins par simple jalousie alors qu’ils n’avaient rien fait de répréhensible au regard du régime en place.
Il oublie de dire que des millions de soldats sont morts sur les champs de batailles, que des millions de civils (femmes, enfants, vieillards) juifs et non juifs ont péri sous les bombardements allemands, mais aussi alliés, des deux côtés du Rhin.
Pour lui le « détail », à la différence de J-M Le Pen c’est tout ce qui ne concerne pas les camps de concentration et tout particulièrement les Juifs.
Il est vrai qu’aujourd’hui le communautarisme s’affiche de plus en plus en France comme dans bien d’autres pays. Mais il arrive un moment où le devoir de mémoire devient vraiment envahissant et avant de donner des leçons de morale au monde entier il serait temps qu’Israël balaie devant sa porte.
Là aussi il y a un sérieux effort à faire.
Rédigé par : Achille | 24 novembre 2013 à 08:01
Un billet tout en pudeur qui visiblement touche à l'intime...
Rédigé par : Marc Ghinsberg | 23 novembre 2013 à 20:53