Il y a, pour un lecteur, des moments magiques, un miracle qui maintient chaque page au plus haut de l'excellence, où questions et réponses s'entrecroisent dans un dialogue à la fois très courtois, urbain et vigoureux, voire profond.
Jean-Christophe Buisson en face de Fabrice Luchini : un régal.
Pas étonnant, me dira-t-on. Impossible, pour un journaliste de talent, de décevoir avec un tel interlocuteur. On sait tous ce que vaut Luchini : il nous le montre assez, il nous le fait assez savoir.
Culture, finesse d'analyse, ironie bien dosée, curiosité infinie, pas trop de révérence pour le siècle mais sans amertume - elle serait indécente de la part de quelqu'un qui exploite merveilleusement les tares de la modernité -, alacrité intellectuelle avec ce qu'il faut d'éthique, par exemple sa fidélité amicale pour Gérard Depardieu, lucidité, enfin, sur les ridicules contemporains et la comédie sociale.
Il y a tout dans cette personnalité pour que le plus difficile des juges soit comblé. Nous ne sommes pas obligés d'aimer mais nous ne pouvons qu'applaudir l'exercice et l'artiste parce qu'en l'occurrence, l'un et l'autre sont authentiques et sincères.
Sur le fond, je ne suis pas sûr d'approuver précisément son indulgence pour Depardieu et si je suis ravi par ses formules, il ne me semble pas, par exemple, "qu'au cinéma, plus on est somnolent, plus c'est payant". Il y a un bonheur des appréciations voluptueusement définitives et adorablement péremptoires qui, en même temps qu'on prétend les contredire, nous font trop plaisir pour qu'on se donne la peine de les réfuter.
Si ce dialogue avec Jean-Christophe Buisson est si complet et achevé dans tous les sens du terme, cela tient surtout au fait que le Luchini de l'écrit n'a heureusement rien à voir avec celui de la télévision, le comédien vif et brillant avec sa caricature médiatique proche parfois de l'histrionnisme.
Pour qui est passionné par l'expression et sa technique, la différence fondamentale entre les réponses de Luchini au Figaro Magazine et les numéros de celui-ci ailleurs, notamment un soir au journal de France 2 avec Laurent Delahousse, tient au fait que dans le premier cas, la quintessence et la justesse du propos sont accueillies, recueillies telles quelles par le lecteur et qu'il n'est pas troublé par le personnage de Luchini qui ferait écran et commettrait un détournement d'attention.
Dans la seconde situation au contraire, l'expansion de son être, la complaisance avec laquelle il profite de la liberté qu'on lui laisse - dommage car il est si bon avec les réalisateurs qui le cadrent sans l'étouffer -, le sentiment qu'il a de pouvoir tout dire et de faire n'importe quoi, la vanité subtile ou, plus rarement, ostensible qui s'empare de lui comme un inévitable poison, prennent toute la place. Il "fait" du Luchini de telle sorte qu'étourdis par ce saltimbanque du mot et de la pirouette, nous devenons prisonniers de l'image qu'il nous offre, qu'il nous tend au lieu de l'être par la force et la fiabilité de son discours.
Lui-même s'abandonne avec une volupté pas dupe à cette représentation, malheureusement trop souhaitée par certains, de lui-même et perd beaucoup de sa crédibilité dans ces prestations où il fait don seulement de lui-même dans ses facettes pas forcément, pour des gens comme moi, les plus séduisantes. J'ai éprouvé, parfois, comme un agacement, un désappointement devant ces parades qu'il avait vidées de l'essentiel.
Grâce à Jean-Christophe Buisson et au Luchini impeccablement naturel, on prend de plein fouet ce que cette personne a d'irremplaçable dans l'espace artistique et médiatique, d'abord par son culte de la grande littérature, sa dilection pour le beau langage, son envie de comprendre et d'admirer et sa géniale emprise pour les faire partager. On ne peut pas, dans ces pages, lui échapper. Ne cherchant pas à séduire à tout prix sous une lumière basique, il gagne notre adhésion par une sorte de sérieux gai et stimulant. Il ne s'occupe que de nous en se distrayant de soi.
On reproche si souvent à Luchini d'en faire trop sans que je sois persuadé de la pertinence de cette critique. Il n'est pas une personne de qualité et de caractère à laquelle on n'impute pas ce grief. La mesure, chez les plus grands, s'incorpore l'excès.
En tout cas, Fabrice Luchini, avec Jean-Christophe Buisson, en fait assez et si on n'en redemande pas tout de suite, c'est qu'on a de la nourriture pour longtemps.
Luchini évite sûrement certains vœux, je crois que c'est heureux, alors je profite, et je présente ici mes vœux pour ici, avec mon honteux décalage, loin des réglages que Fabrice Luchini sait faire à toutes heures et qu'il expose avec bonheur.
Meilleurs vœux !
Rédigé par : zenblabla | 12 janvier 2014 à 19:53
Je ne sais pas si Luchini en fait trop ou pas, s'il est prétentieux ou pas, mais j'aime beaucoup la manière dont il cite Molière et La Fontaine : "Deux amis vivaient au Monomotapa... L'un ne possédait rien qui n'appartint à l'autre... Mais c'est le programme de Hollande, ça !... On va tout donner, tout ce qu'on a, à F. Hollande, par amour..."
J'en ris encore et le remercie.
Rédigé par : Sandrine | 02 janvier 2014 à 17:19
Tout d'abord je tenais à présenter à notre hôte, mais également à tous les participants de ce blog, mes meilleurs vœux pour l'année 2014.
J'aime beaucoup Fabrice Luchini, je le trouve rafraîchissant à souhait tout à la fois saltimbanque et artiste, cabotin et sérieux, vaniteux et lucide. J'aime beaucoup vraiment.
Rédigé par : Surcouf | 02 janvier 2014 à 11:29
Alors Philippe Bilger, quand allez-vous soumettre Fabrice Luchini à la question?
Beaucoup d'intervenants sur votre blog seraient ravis.
Mais attention au chrono car vous risquez de déborder ! :-)
Rédigé par : Achille | 02 janvier 2014 à 09:30
En effet, pourquoi untel plutôt qu'untel autre ? Pourquoi nous prive-t-on de la créativité d'untel en nous imposant celle
d'untel autre quand il s'est déjà inspiré de untel ? Où est le manquement ? A quel moment le commerçant dépasse-t-il l'artiste ?
Les découvreurs ?
Les fric-F.R.A.C. pour les Arts ! Pour la musique ?
Peintres et sculpteurs rechignent à être médiatisés c'est vrai. Qui resteront dans un cercle restreint de connaisseurs avisés.
Rien de comparable avec la photo qui en est encore à distinguer le parfait technicien du créateur, ostracise à tour de bras, créant ses propres aberrations dans la démarche.
Médiatisons les médiatisés et retardons d'autant la conscience et la palette des sensibilités humaines.
Rédigé par : calamity jane | 01 janvier 2014 à 14:54
Je présente mes meilleurs vœux pour 2014 à Philippe Bilger qui nous permet de nous exprimer ici avec beaucoup d'indulgence et de gentillesse même si nos propos ne correspondent pas nécessairement à sa propre vision des choses, ces vœux allant bien entendu aussi à son épouse et puis enfin aux autres commentateurs qui savent rester courtois en dépit des divergences de vues éventuelles.
Rédigé par : Parigoth | 01 janvier 2014 à 13:34
La tradition, la coutume, l'usage, enfin tout ça quoi, veulent que l'on présente ses meilleurs voeux, à tous et à chacun.
Je vous propose une petite histoire, assez connue, mais pas suffisamment de nos politiques, qui seraient beaucoup plus modestes autrement.
SAMARCANDE
« Il y avait une fois, dans Bagdad, un Calife et son Vizir... Un jour, le Vizir arriva devant le Calife, pâle et tremblant : « Pardonne mon épouvante, Lumière des Croyants, mais devant le palais, une femme m'a heurté dans la foule. Je me suis retourné : et cette femme au teint pâle, aux cheveux sombres, à la gorge voilée par une écharpe rouge était la Mort. Et en me voyant, elle a fait un geste vers moi ».
Le Vizir s'écria : « Puisque la Mort me cherche ici, Seigneur, permets-moi de fuir me cacher loin d'ici, à Samarcande. En me hâtant, j'y serai avant ce soir ». Sur quoi, il s'éloigna au grand galop de son cheval, et disparut dans un nuage de poussière vers Samarcande. Le Calife sortit alors de son palais, et lui aussi rencontra la Mort : « Pourquoi avoir effrayé mon Vizir qui est jeune et bien portant ? » demanda-t-il. Et la Mort répondit : « Je n'ai pas voulu l'effrayer, mais en le voyant dans Bagdad, j'ai eu un geste de surprise, car je l'attends ce soir, à Samarcande... ».»
La conclusion de cette histoire ?
Celle de toutes les histoires... Qui croit fuir son destin est seulement attaché à une corde plus longue.
Mais au bout de la corde, pas de choix ?
Mais si !
Le choix du Vizir : nous faisons tous librement ce qu'il était fatal que nous fassions !
Bonne année à tous.
Faites librement ce que vous croyez bien, et pour le mal qu'on pourrait vous faire, fuyez à Samarcande.
On ne sait jamais, la fuite ça peut marcher.
Rédigé par : Tipaza | 01 janvier 2014 à 10:29
Cher Fabrice Luchini, toujours si fin et spirituel ! De plus c'est un homme qui ne suit pas les courants de la pensée unique et qui se forge sa propre philosophie de l'existence, un amoureux des beaux textes qui fait partager sa passion. Au cours de l'entretien avec Jean-Christophe Buisson, il a lancé quelques piques bien senties, qui ne plairont pas à tout le monde : "l'écologie, un privilège de riches".
Monsieur Bilger, en réponse à Axel de Tarlé vous interrogeant au sujet du geste antisémite de la quenelle, vous m'avez ôté quelques illusions : "On ne peut pas réprimer par la loi tout ce qui nous offense". Quel dommage. Comment obtenir réparation de nos offenses subies, ce sera mon sujet de réflexion post-fêtes pour bien commencer 2014.
Au cours de cet entretien sur la 5, votre dynamisme et l'absence de langue de bois ne sont pas sans relation avec Luchini, mis à part le fait qu'il n'est pas un juriste éclairé.
Rédigé par : Camille | 31 décembre 2013 à 22:34
Je souhaite une bonne et heureuse année à Pascale et Philippe Bilger. Et en profite pour les féliciter pour la qualité du blog, la liberté d’expression qui y règne et que l’on ne retrouve sur aucun autre site.
Bonne année également aux commentateurs qui apportent leurs réflexions souvent très partisanes, parfois étranges mais toujours intéressantes même si je ne les partage pas toujours, loin s'en faut.
Rédigé par : Achille | 31 décembre 2013 à 18:42
Mais qu'est-ce qui vous prend les gars ? Un type ouvre sa g... et dit ce qu'il pense et ce devrait être le phare d'Alexandrie ? J'adore Luchini, mais figurez-vous que j'en côtoie tous les jours des Luchini, ou vivez-vous donc pour trouver qu'il est subversif ? La France entière pense comme lui !
Ma concierge est un Luchini à elle toute seule.
Tous les matins elle m'accable "Ah votre Hollande, quel fromage !", elle est persuadée que je suis de gôche. Vivant sous le fouet de ma concierge je continue à lui donner des étrennes, alors que Luchini est millionnaire.
Rédigé par : Savonarole | 31 décembre 2013 à 18:16
Huit César, trois Molière.
Un homme bien élevé, gentil, poli, enthousiaste et charmeur.
Tout pour plaire, bravo l'artiste !
Sur ce je présente tous mes voeux à Philippe Bilger et à son épouse ainsi qu'aux contributeurs de ce blog dont la réputation n'est plus à faire. Bonne et heureuse année à tous.
Rédigé par : Jabiru | 31 décembre 2013 à 17:12
Lu à l'instant dans la rubrique Essentiel du quotidien La Croix :
"Par ailleurs, à Toulouse, une enquête a été ouverte après la diffusion sur internet d'une photo montrant un individu faisant ce salut devant l'école juive où Mohammed Merah avait assassiné quatre personnes en mars 2012."
A ce niveau, ce n'est plus une secte mais un signe de ralliement.
Je me récite ultérieurement moi-même d'après mon dernière commentaire sur le billet sur Manuel Valls :
Imaginons que ce geste se développe dans le quotidien. J'imagine un jeune juif qui dans une cours de récréation est poursuivi par un groupe de la quenelle, ou même, que ce geste se fasse subrepticement au détour d'un couloir ou dans le coin d'une classe.
Je pense que l'on n'a pas fini d'entendre parler de cette quenelle.
Pour le nouvel an, mangez de la quenelle.
C'est bon, mangez-en.
Rédigé par : Carl+Larmonier | 31 décembre 2013 à 15:04
A mes yeux Luchini n'en fera jamais assez.
Pour une fois que l'on en tient un qui fait dans la qualité, qui ne se fourvoie pas avec la mauvaise presse "pipole" et dont les apparitions sont rares, ne boudons pas notre plaisir.
Parfois j'aimerais être parisien... le temps d'un spectacle.
Gute Rutsch an Alle !
Rédigé par : Jean-Paul Ledun | 31 décembre 2013 à 13:25
Bonjour M. Bilger,
Fabrice Luchini est rafraîchissant, qu'on trouve qu'il en fasse trop ou qu'il confine au génie, il ne laisse personne indifférent et avec lui on ne s'ennuie jamais.
Je n'ai pas lu son entretien avec Jean-Christophe Buisson, mais j'ai une certaine admiration pour cet autodidacte, ancien garçon coiffeur, issu d'une famille de modestes immigrés italiens, amoureux de théâtre, de littérature et de philosophie.
Je suis toujours bluffé par l'étendue de sa culture, par sa mémoire prodigieuse, mais surtout par son style, son exaltation, et son talent pour réinventer les auteurs au gré de ses "lectures".
Ce n'est pas un humoriste mais il amuse, il ne se prétend pas intellectuel mais il en impose, il improvise et il réenchante le verbe.
Que mes meilleurs voeux vous accompagnent M. et Mme Bilger, ainsi que vos proches et tous les contributeurs de ce blog, en cette veille de nouvelle année.
Rédigé par : Ludovic | 31 décembre 2013 à 12:43
@Alex paulista
Je crois bien qu'ils ne sont que trois ou quatre sur douze, si on excepte les deux anciens présidents membres de droit, dont un hors service.
Non, je ne pense pas que vous ayez raison de faire cette remarque. Le CC n'est pas suspect d'énarchie.
Rédigé par : genau | 31 décembre 2013 à 11:21
Bonjour Philippe Bilger,
« On reproche si souvent à Luchini d'en faire trop sans que je sois persuadé de la pertinence de cette critique. Il n'est pas une personne de qualité et de caractère à laquelle on n'impute pas ce grief. La mesure, chez les plus grands, s'incorpore l'excès. »
Personnellement, je ferais plutôt partie de ceux qui reprochent à Fabrice Luchini d’en faire trop. J’aime bien l’acteur, sans plus, mais j’ai du mal à supporter sa façon de s’exprimer lors des interviews.
Certes, il lui arrive d’avoir de bons mots, telle cette petite pique pleine de perfidie sur la gauche qui est savoureuse :
« J’adorerais être de gauche, c’est un souhait. Mais je trouve que c’est tellement élevé comme vertu que j’y ai renoncé [...]. C’est un gros boulot, c’est un dépassement de soi. C’est une attitude, une présence à l’autre... Faut être exceptionnel, quand t’es de gauche ! Quand t’es pas de gauche, tu peux être moyen. Quand t’es de gauche, c’est l’excellence : le génie moral, le génie de l’entraide... C’est trop de boulot ! [...] »
Mais d’une façon générale il a trop tendance, un peu comme Christiane Taubira d’ailleurs, à partir dans des envolées lyriques, des circonlocutions alambiquées, le tout agrémenté de tirades d’auteurs divers et variés, et là je décroche.
Il lui est même arrivé de citer dans une matinale du 7/9 à France Inter, en treize minutes, Deleuze, Stendhal, Barthes, Céline, Nietzsche, La Fontaine, Abel Gance, Élie Faure, Louis Guilloux, Julien Gracq, Oscar Wilde et Freud. Cela donne le vertige !
On sent le complexe de l’autodidacte qui veut montrer qu’il a de la culture, même s’il n’a pas fait de hautes études. Personne ne lui demande de jouer les érudits et ce besoin d’étaler ses citations à la chaîne fait un peu potache laborieux.
Penser par soi-même en s’appuyant sur la pensée de grands auteurs d’accord, mais quand ce sont ces mêmes auteurs qui se substituent à votre propre réflexion, là non !
C’est Rabelais qui disait que science sans conscience n’est que ruine de l’âme. Fabrice Luchini ferait bien de méditer cette phrase pleine de sagesse, plutôt que de jouer les Trissotin.
Rédigé par : Achille | 31 décembre 2013 à 06:03
"Le Conseil constitutionnel a donné une volée de bois vert aux ânes de l'ENA, c'est plus réjouissant."
Rédigé par : genau | 30 décembre 2013 à 17:44
Comme si le Conseil constitutionnel ne contenait pas d'enarques...
Rédigé par : Alex paulista | 31 décembre 2013 à 04:02
Luchini le suprême oiseau rare.
M. Bilger, encore une fois, je constate que nous avons les mêmes émotions face au talent.
Votre article est juste, et vous avez bien vu que F. Luchini a quelque chose qui le distingue de ses confrères en art de la comédie, du comportement public, de la vie sociale.
C'est un "aristocrate de la vie" que j'ai depuis longtemps "scanné" comme tel, et qui nous remplit de bonheur par le recul amusé qu'il montre face à la foule "artistocratique" (un mot de P. Muray dont il a saisi toute l'intelligence) et "médiatrique", flambeau pisseux de la démocratie pipée.
Ses confrères et les médias de queue de lot se gardent de l'agonir. C'est une preuve de la puissance de son génie.
Quel talent ! Il fera époque.
Rédigé par : Arobase du Ban | 30 décembre 2013 à 18:53
Merci à Frank Thomas pour le souvenir d'Henri Dutilleux. Sous les doigts son oeuvre est un enchantement, il a passé, inaperçu, trop fort, trop bon, trop modeste comme les jeunes prepa français champions du monde de technologie de la biologie de synthèse au MIT. Ce n'est pas électoral tout ça. Il vaut mieux s'occuper d'un footballeur et d'un histrion, ça rapporte plus.
Rédigé par : genau | 30 décembre 2013 à 17:50
Bien d'accord avec votre dernier billet de l'année.
Ce qui fait le charme de Luchini, c'est d'abord qu'il sort de l'ordinaire, il ne cherche pas à être dans l'air du temps et n'a pas peur de dire ce qu'il pense. Un vrai rebelle gentil et poli à la mémoire stupéfiante. Un artiste hors des sentiers battus, c'est rafraîchissant.
Mes meilleurs voeux à Philippe Bilger et aux intervenants de ce blog.
A l'année prochaine.
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 30 décembre 2013 à 17:47
Permettez-moi d'être intrigué par cette phrase : "On reproche si souvent à Luchini d'en faire trop sans que je sois persuadé de la pertinence de cette critique." L'expression est-elle complète ? "Si" dans le sens de tant tellement n'appelle pas forcément une subordonnée, mais la séquence commençant par "sans que", paraît être une incise et laisse le lecteur mal à l'aise. Non ? J'aurais lu volontiers une consécutive, qui achèverait la proposition générale. Certes, l'absence de virgule fait sens, mais c'est le rythme qui perturbe. Enfin, ce n'est que du français. Le Conseil constitutionnel a donné une volée de bois vert aux ânes de l'ENA, c'est plus réjouissant.
Rédigé par : genau | 30 décembre 2013 à 17:44
Avec Luchini qui met en lumière Céline, on soupire en constatant qu'il y a d'un côté les bons antisémites et de l'autre les mauvais antisémites. Après, pour aller plus loin, on ne sait plus ce que c'est que l'antisémitisme, le racisme, on écarquille les yeux devant les indignations d'une Chantal Jouanno et d'un Jamel Debbouze. On ne sait plus réfléchir avec modération, une banane, une quenelle, et hop une chasse aux sorcières. Dieudonné est banni des plateaux télés, et nous supportons en intraveineuse Philippot, Le Pen père et fille, les Femen qui exhibent leurs seins et un foie de veau pour simuler une IVG dans une église nous sont imposées jusque sur nos timbres-poste. Tout cela est contreproductif et dangereux. Après, les bien-pensants s'étonnent que le saltimbanque Dieudonné fasse salle comble. Luchini aussi fait salle comble en récitant à haute voix du Céline.
Rédigé par : SR | 30 décembre 2013 à 17:22
Mon préféré...
http://www.youtube.com/watch?v=hnf2-YjBLRA
Rédigé par : Boris | 30 décembre 2013 à 16:53
Tout ce qu'il récite, il le fait avec gourmandise et nous dégustons ses paroles. L'excellence avec goût, ça change des provocateurs haineux.
Rédigé par : Jabiru | 30 décembre 2013 à 16:30
Ce qui me fascine avec Fabrice Luchini c'est que sur un plateau télé il peut être souvent imprévisible et des fois au bord, même, de l'ingérable, ce qui rend cette personnalité tout à fait fascinante. Il est beaucoup imité, mais que cela soit en mode majeur ou en mode mineur, il est et restera inimitable. Comme Louis-Ferdinand Céline qui disait en écriture, en littérature, le tout est de trouver la petite musique, Fabrice Luchini a fait de sa musique une apothéose permanente et éblouissante pour chef d'orchestre.
"C'est une grande jouissance que de se transporter dans l'esprit des temps passés, de voir comme un sage a pensé avant nous, et comment, partis de loin, nous l'avons si victorieusement dépassé" - Goethe
Fabrice Luchini nous fait revivre et ressusciter les poètes, leurs oeuvres et les fait ressusciter lorsqu'il nous en donne de bonnes tranches au théâtre.
Rédigé par : Carl+Larmonier | 30 décembre 2013 à 16:08
Les goûts de F. Luchini en littérature sont excellents, et partagés par des millions de lecteurs. Il met à les défendre et à les illustrer par ses récitations ou ses lectures une faconde, une verve peu communes qui, effectivement, les servent admirablement.
Il exploite en réalité un filon, comme d'Ormesson l'a fait avant lui, jouant sur le velours de pages universellement admirées comme géniales.
On aimerait pourtant, de temps en temps, l'entendre s'enthousiasmer pour des écrivains contemporains, moins populaires et qui, eux, bénéficieraient vraiment de l'éclat qu'il pourrait leur donner.
Lire La Fontaine, Proust ou Céline, c'est bien ; mais c'est moins utile, me paraît-il, que de faire connaître à un large public Jean Echenoz ou Franz Bartelt qui auraient bien besoin - comme, dans le domaine de la musique, Henri Dutilleux dont la mort est passée inaperçue parce que cet immense compositeur a eu la mauvaise idée de mourir le même jour que Moustaki - de reconnaissance publique.
Fabrice Luchini ferait oeuvre vraiment utile s'il consacrait une petite partie du temps passé à jouer son propre personnage, comme vous le dites, Philippe, ou à apporter de l'eau au moulin du meunier, à se mettre au service de grands textes qui n'ont pas la chance de passer la rampe.
Ce blog aussi, souvent, rend hommage à des célébrités médiatiques auxquelles il n'apporte aucun surcroît de gloire.
C'est hélas un syndrome de notre temps qui, comme l'a péremptoirement formulé Régis Debray, "médiatise les médiatisés".
Rédigé par : Frank THOMAS | 30 décembre 2013 à 13:06
Globalement je suis assez d'accord avec votre analyse, je soulèverai cependant deux ou trois objections. La première concerne Depardieu. Vous n'approuvez pas l'indulgence de Luchini envers Depardieu alors que moi je l'ai trouvé courageux face à TOUT le beau monde politico-médiatique s'acharnant sur quelqu'un dont il respecte le talent, le Premier ministre en tête (qui ne devait pas avoir autre chose à faire...) ou ce fanfaron de Torreton qui a cru se faire "mousser" dans les salons en ville à bon compte sur le dos d'un autre acteur (qui a traité son "billet" par le mépris, la classe quoi...). Oui, par amitié il faut savoir être courageux.
La deuxième concerne les "apparences" de Luchini à la télévision. C'est vrai il fait "du Luchini", comme son ami Depardieu faisait "du Depardieu" mais ils sont invités par les chaînes de télé pour ça. Ce sont des comédiens qui n'aiment pas le "service après-vente" de leur films ou pièces, alors ils détournent le pensum, ils s'amusent et du coup cela leur devient supportable. Moi qui suis provinciale, je n'ai pas, comme vous, l'occasion de voir Luchini sur scène, donc la télé me l'a, un peu, "révélé". Il n'est pas qu'un acteur, il est aussi un farceur, et j'aime ça (je ne suis pas la seule, visiblement).
La troisième objection c'est que cette admirateur de Céline balaye, trop facilement à mon goût, le passé de cet écrivain qui a quand même écrit des monstruosités sur les Juifs. Certes c'était l'ami d'Aragon, de Sartre et du fameux "tout-Paris intello-de-gauche" mais il l'a été - aussi - des Allemands durant l'Occupation et il le revendiquait, et ça, ça me gêne que voulez-vous ! J'aimerais que l'éloge que fait Luchini du Céline qui a écrit "Voyage au bout de la nuit" soit précédé d'une mise au point sur l'homme qu'il a été (on parle tellement du devoir de mémoire que c'en serait un). Mais bon, finalement, la LICRA n'y trouvant rien à redire... Il est vrai que Monsieur Destouches dit Céline avait de meilleures fréquentations (quoique) que ce saltimbanque de Dieudonné qui n'aura, comme Céline, jamais le prix Goncourt :-(
Etrangement ces trois-là ont défendus, ou défendent encore, les mêmes thèses. Pour afficher les mêmes idées certains seront encensés, d'autres auront "la tête tranchée"...
Rédigé par : breizmabro | 30 décembre 2013 à 12:07
Autrement dit, Luchini c’est :
Le style plus la pensée, et cela en toute « luchidité ».
C’est bien ça ?
Rédigé par : Tipaza | 30 décembre 2013 à 08:26