Il y a des films absolument magiques dont on sort tellement admiratifs qu'on a besoin d'un très long moment de silence avant d'oser dire un mot de peur de rompre la grâce de deux heures de projection.
Philomena, un chef-d'oeuvre.
Un scénario à la fois limpide et structuré. Pas une inutilité, pas une baisse de rythme.
Des dialogues fins, spirituels, sensibles, intelligents. Un bonheur de l'expression et une élévation de l'âme.
Une réalisation en même temps superbe et invisible. Un regard de maître, celui de Stephen Frears, sur une histoire exaltante et terrible. Une mère aimante, déchirée et vaillante pourtant, au bout de 50 ans, recherche le fils qui lui a été arraché à sa naissance par une institution religieuse où une Soeur notamment a eu un rôle odieux et dissimulateur.
Elle va partir dans cette quête, das cette recherche en compagnie d'un journaliste d'abord sceptique, puis conquis, enthousiasmé, transformé par la personnalité authentique et généreuse de cette femme.
Le plus remarquable dans cette oeuvre inoubliable réside dans le parcours psychologique, intellectuel et humain que chacun des protagonistes va accomplir vers l'autre. L'homme va infiniment apprendre de cette femme dont la foi, la drôlerie et l'allure vont résister à la tragédie et lui-même, libre penseur, désinvolte, ironique, brillant se retrouvera, à la fin de ce chemin de tendresse, de souffrance et de nostalgie, différent, métamorphosé.
Mais pas besoin de grandes envolées ni d'élans pompiers pour faire percevoir l'intensité et la richesse de cette intense et réciproque relation.
Par petits signes, grâce à d'infimes attitudes, avec des gestes minuscules et pleins d'une infinie considération pour ce que l'autre représente, tout est magnifiquement proposé, suggéré, décrit et dévoilé.
On sort lavé de tout et prêt à toutes les aventures dont la vulgarité serait exclue. Dans cette salle de cinéma, dans le silence absolu qu'impose la vision d'un spectacle qui laisse loin derrière lui les médiocrités quotidiennes d'une programmation parfois bonne mais jamais irréprochable, on se nourrit, on s'enchante, on se réjouit, on pleure, on devient soi-même un être qui ne se reconnaît plus parce qu'il éprouve de la reconnaissance pour tous ceux, réalisateur, scénariste, comédiens et techniciens, qui ont libéré cette chose inouïe qu'est un objet d'art indépassable.
Deux acteurs géniaux, Judy Dench et Steve Coogan, également scénariste.
Pas une critique à formuler, pas la moindre réserve, une adhésion inconditionnelle.
J'ai aimé passionnément certains films français mais jamais au point d'être empli par une joie sans mélange. Un peu de lenteur, trop de nombrilisme, des acteurs inégaux, trop de narcissisme, la confusion entre originalité et provocation, un scénario étique un rire gras, une dérision de mauvais aloi, une humanité étriquée, un manque de grandeur, les mêmes séquences répétées et donnant au monde l'apparence d'une chambre à coucher ou d'un univers clos.
Dans toutes les oeuvres portées aux nues par les professionnels du cinéma français, aucune, comédies ou dramatiques, ne m'a empli d'une telle allégresse sereine, celle que le meilleur nous inspire et qui suscite de la joie profonde même quand les larmes coulent. Le très grand art est désespérément joyeux.
Seuls peut-être, les films de John Ford, en particulier "La prisonnière du désert", peuvent supporter la comparaison.
Je sais bien que tous les goûts sont dans la nature et que la subjectivité des uns et des autres est dominante qui nous conduit là où nous nous trouvons rassasiés de manière exemplaire.
On ne souhaite rien d'autre que cet assouvissement si rare, si singulier qu'il ressemble à de l'immatériel incarné.
Pourquoi Philomena n'est pas un film français ?
Tout simplement parce qu'il est parfait.
Tonnerre de Brest !
Il n'y a pas de responsabilité collective qui soit éligible à la civilisation, d'où l’intolérable absence de responsabilité individuelle dans toute société évoluée.
En politique, l’Histoire démontre qu’il est vain de juger du passé en termes de responsabilité collective d'autant que les politiciens parvenus au pouvoir par le jeu de l'élection et donc de la séduction se servent de l'Etat plus qu'ils n'incarnent obligatoirement une quelconque "moralité". Leurs buts, leurs jeux si je puis dire sont ailleurs.
Ainsi s’agissant de la Justice, qui ne pourra pas être entièrement en total accord avec « kergroes » : [ Il serait très sain que l'institution judiciaire mette autant de rigueur à respecter les procédures qu'elle en met à les faire respecter ]
S’agissant donc des défaillances en série, dans quelque domaine que ce soit, ce sont d’abord les ministres concernés qu’il faut convoquer en personne et devant la justice si nécessaire, et bien avant que leurs non- faisances (voire malfaisances éventuelles et ou effacement des preuves) s’empilant, ne produisent leurs effets grandissant en nombre tout autant qu’en gravité. Et s'ils indiquent n'avoir pas eu les moyens d'assurer la charge confiée, c'est leurs silences, leurs « non-dit, voire leur non-démission qu'il faut leur reprocher et a minima les contraindre à rendre les trop perçus sur leurs biens propres, ne serait-ce qu’au regard d’un début même de charge non exécutée alors que désirée et acceptée souvent avec les honneurs qui vont avec et bien évidemment l’éthique qui lui est étroitement liée.
Alors, contrairement aux arguments des acteurs de quelque position qu’ils occupent ou occuperaient sans obligation, élus ou non, se disant avoir été aux ordres ou ne se considérant qu’un maillon de la chaîne hiérarchique, ce sont quand même bien des hommes et ou des femmes et eux seuls, qui doivent être interpellés pour rendre compte et être jugés sans délai pour tout ou partie des conséquences additives de décisions, voire d’actions condamnables sans équivoque, vis-à-vis de celles et ceux qui leur avaient donné mandat en toute confiance.
- Comment faisait-on avant l’arrivée et la montée en puissance exponentielle du « fax », lui-même tuant le « télex », pourtant beaucoup plus fiable au sens de l’accusé de réception ?
Pour mémoire :
Claudy un jeune DJ de 33 ans s’est fait agresser au Blanc-Mesnil par des jeunes âgés de 20 à 30 ans parce qu’il a refusé l’accès à une soirée privée (Saint Sylvestre 2010) - Alassane D. avait été au début de l’affaire entendu comme témoin assisté. Puis il s’était évaporé dans la nature avant qu’un mandat d’arrêt ne soit délivré contre lui le 14 avril 2011…
Rédigé par : fugace | 08 février 2014 à 17:34
Cher Monsieur Bilger,
Je vous ai découvert chez Taddéï (ben oui). Je vous considérais au travers de votre brillant parcours comme un apparatchik de la justice, "comme les autres". Je découvre un homme sensible, "humain" (dans toute l'acception du terme) et hanté comme beaucoup d'entre nous de zones d'ombre. J'apprécie votre liberté d'esprit et la justice devrait se féliciter tous les jours de vous avoir eu au plus haut niveau hiérarchique de son appareil. Mais rassurez-vous, je ne quémande rien. Je m'apprête à refaire ma vie à 58 ans sous d'autres cieux pour essayer de m'y rendre utile :-).
Pour revenir au cinéma on pourrait évoquer le terrible "The Magdalene sisters" pour les sommets de cruauté ou, si l'on est d'humeur bienveillante, le tendre et sombre "Biutiful" d'Inarritu avec Bardem.
Avec tout mon respect.
Rédigé par : osteo13 | 29 janvier 2014 à 20:28
M. Bilger, je vous remercie de votre lyrisme à propos de ce film, sorti depuis deux semaines, que j'avais noté comme intéressant et à retenir, mais que...
Mais que sans vous j'aurais "squeezé" en espérant me rattraper plus tard. Vous avez été "prescripteur" comme on dit de certains critiques honnêtes, je veux dire sévères mais justes, loin du copinage éhonté de certain magazine culturel. Leurs avis (je parle de leurs critiques de cinéma) sont toujours, comment dire ? - prévisibles. Je pense à la sortie, il y a une semaine, de l'insignifiant "L'amour est un crime parfait" des frères Larrieu. Porté aux nues par les petits copains de TRA (vous pigez ?) comme une escroquerie, il est descendu en flammes par les spectateurs-internautes. Le public n'a pas toujours raison, mais il se trompe rarement, lui !
Merci, de tout coeur ! C'est un très beau film, d'un bout à l'autre.
Rédigé par : Jean-Jacques Bernardini | 24 janvier 2014 à 17:01
Le cinéma français produit aussi quelques perles : Suzanne, par exemple.
Philomena comporte quelques longueurs, notamment au début. Puis on se laisse capter par cette histoire difficile. On remarquera l'avidité du journal qui souhaitait vendre du papier en faisant dans le sensationnel (cela nous rappelle quelque chose). On a envie de se révolter contre le clergé. Comment se prétendre catholique et avoir si peu de compassion et autant de cruauté.
Rédigé par : jack | 24 janvier 2014 à 00:36
"Le vrai cinéma français restera celui des "7ème Compagnie", films cultes d'anthologie, de très bons acteurs, scénarios solides à couper le souffle !"
Rédigé par : sylvain | 23 janvier 2014 à 15:01
C'est une provocation cher sylvain, mais je me demande si la 7e compagnie ne vaut pas toute la quincaillerie Godard, Jean Eustache (La maman et la putain), tout Marguerite Duras, Ma nuit chez Maud, etc.
Lors du débat sur la suppression de la peine de mort j'avais proposé de la remplacer par des projections incessantes de Ma nuit chez Maud dans les prisons, mais personne n'a retenu mon idée.
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 22:02
"Il y a aussi le western soviétique Dersou Ouzala"
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 11:14
J’ai vu ce film il y a bien longtemps, et il s’est un peu estompé dans ma mémoire.
Pour autant que je m’en souvienne, je ne l’ai pas vu comme un western, mais plutôt comme un conte mythique, celui d’une relation fusionnelle progressive d’un homme avec la nature.
Pour être un western il lui manquait l’élan vital des Indiens, et le ciel si caractéristique des westerns de John Ford. Mais c’est loin dans ma mémoire.
Je vais acheter le DVD !
Rédigé par : Tipaza | 23 janvier 2014 à 21:38
Bonsoir M. Bilger
Là où il n'y a pas de larmes, il n'y a pas de plaisir !
Après avoir lu le synopsis de Philomena il est bien clair que je n'irai jamais voir ce film en salle, je n'ai pas envie de passer pour un sentimental incapable de retenir ses larmes.
Mais puisque vous semblez apprécier le genre, alors laissez-moi vous en suggérer deux, avec lesquels il vaut mieux prévoir une boîte pleine de Kleenex surtout si vous les regardez à la suite.
Le premier est ce genre de film où l'amour est un fleuve qui dégouline noyant tout racisme et où seul la mort de l'être aimé apporte la rédemption au raciste qui a pourtant honte de l'être mais ne peut faire autrement puisque s'y mêle sa propre image.
"Le mirage de la vie" de Douglas Sirk a une telle puissance mélodramatique qu'il vaut mieux ne pas le regarder une deuxième fois, sauf si on est un peu maso, car les larmes commencent à couler dès le début puisqu'on sait la tournure que vont prendre les événements.
Le second, "Le vase de sable", est un mélo nippon doublé d'une enquête policière qui vous fait adhérer complètement et vous prépare au tsunami qu'il vous faudra éponger en implorant la justice de ne pas être trop sévère mais le crime est commis et la musique dédiée s'appelle 宿命 Karma ou prédestination.
Rédigé par : pibeste | 23 janvier 2014 à 21:25
Anecdote cinématographique :
Un jeune comédien est pressenti pour incarner Bonaparte à Arcole, il se précipite chez Albert Dieudonné qui avait incarné un sublime Napoléon d'Abel Gance.
"Maître, comment incarner un tel personnage ?"
"Tu mets le bicorne et tu penses très fort à tes impôts"...
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 20:54
@Tipaza
Et Le Dernier des hommes (en allemand : Der Letzte Mann) un film muet expressionniste allemand réalisé par Friedrich Wilhelm Murnau, sorti en 1924 avec Emil Jannings dans le rôle titre ?
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 18:40
Cher Philippe,
Cine + Famiz diffuse ce soir la célèbre comédie américaine « The Birdcage » produite en 1996 avec Gene Hackman, Robin Williams et Nathan Lane et réalisé par Mike Nichols.
La bande annonce : http://www.youtube.com/watch?v=hoJOol3aoJQ
Nous ne savons pas déterminer si la version américaine dépasse l’originalité française et son succès et nous vous laissons juger de la perfection. La découverte, la variété des interprétations apportent l’infini richesse au cinéma. La perfection n’est que l’epsilon du moment.
françoise et karell Semtob
Rédigé par : semtob | 23 janvier 2014 à 16:54
Le vrai cinéma français restera celui des "7ème Compagnie", films cultes d'anthologie, de très bons acteurs, scénarios solides à couper le souffle !
Rédigé par : sylvain | 23 janvier 2014 à 15:01
Le Bilger et la Plume... Oui très beau film. Judi Dench est solaire.
Rédigé par : SR | 23 janvier 2014 à 14:32
@ Parigoth
==="Un petit coup de griffe au passage du réalisateur (probablement un gentil Wasp) sur les institutions religieuses papistes, dont chacun sait qu'elles ne peuvent être peuplées que de sœurs odieuses et dissimulatrices...
Mais nous commençons à en avoir l'habitude."===
Vous avez mille fois raison, en voyant la bande annonce et les critiques dithyrambiques, mon esprit "borné" m'y avait déjà fait penser.
Les scénaristes auraient de multiples sujets de films, de multiples faits divers à raconter sur le communisme. 70 ans, cela représente une montagne d'anecdotes et de malheurs à raconter, de vies perdues, de faits peu ragoûtants et pourtant bien réels à reprendre au cinéma. Pourtant, à part un ou deux films sur le sujet, nous n'avons rien vu... Il y a des sujets intouchables, impossibles à raconter aux jeunes générations, car ce serait relater des vérités... qui dérangent. L'omerta en quelque sorte.
Le "complot des blouses blanches" il y a quelques années a fait un flop faute de critiques dans la presse. Cela finit par être dérangeant, mais tant que cela ne dérangera pas les esprits bien faits...
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 23 janvier 2014 à 12:12
Tipaza | 23 janvier 2014 à 09:05
Alors vous avez certainement adoré Jeremiah Johnson de Sydney Pollack avec Robert Redford. Filmé dans l'Utah.
Il y a aussi le western soviétique Dersou Ouzala, mais la toundra pendant deux heures c'est long.
Amateur éclairé que vous êtes, vous avez certainement vu "Guns in the afternoon" avec Joel McCrea.
Et "Tell them Willie Boy is here !", un des premiers Redford ?
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 11:14
"Le cinéma est bien le septième art, et bon dernier de la classe, car c'est le seul qui vieillisse mal. C'est un art mineur."
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 05:26
Il faut avoir vu au moins une fois dans sa vie les Nibelungen de Fritz Lang, pour savoir ce qu’est le vrai cinéma, celui qui ne se démode pas, car il est la traduction des profondeurs d’un peuple. Quelque vingt ans plus tard, le destin destructeur que montre le film allait se réaliser.
J’adore ce film. À comparer avec les films français de la même époque, vous verrez qu’on n’a aucune chance face au modèle allemand.
Il y a bien « Le chien andalou », mais est-ce un film français, ou alors Madame sans-gêne.
Installez-vous dans un confortable Chesterfield au cas où le Voltaire serait trop inconfortable sur la distance.
http://www.youtube.com/watch?v=jTXLvCPeAvU
Rédigé par : Tipaza | 23 janvier 2014 à 10:52
"Tipaza finira par trouver que la grotte de Lascaux est un modèle de décoration intérieure"
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 05:26
Je préfère la grotte d’Altamira.
Sa salle des bisons est célèbre, et l’amateur de western, de grands espaces que je suis, y trouve de quoi satisfaire ses rêves même dans un espace clos.
Rédigé par : Tipaza | 23 janvier 2014 à 09:05
Bonjour M.Bilger,
Il me semble que vous oubliez "La régle du jeu"... qui est bien français.
Cordialement
Rédigé par : alain | 23 janvier 2014 à 08:25
Le cinéma est bien le septième art, et bon dernier de la classe, car c'est le seul qui vieillisse mal. C'est un art mineur. On ne peut pas dire que Mozart ait pris un coup de vieux ou que Picasso soit totalement dépassé, mais on peut tomber de son Voltaire en regardant sur ARTE "Le Troisième Homme" ou "African Queen". Ce qui nous arrive rarement dans un musée ou à l'opéra...
Que de films vus il y a à peine dix ans nous semblent tarte aujourd'hui.
Certains passent miraculeusement l'épreuve du temps, mais c'est souvent une certaine nostalgie qui l'emporte sur la réelle qualité de l'œuvre. Le monde qui nous entoure est plus moche donc John Wayne est plus beau...
Tipaza finira par trouver que la grotte de Lascaux est un modèle de décoration intérieure.
Rédigé par : Savonarole | 23 janvier 2014 à 05:26
où une Soeur notamment a eu un rôle odieux et dissimulateur.
Dissimulateur n'était pas suffisant ?
Rédigé par : fredi maque | 22 janvier 2014 à 23:26
Entre les voyages et les séances cinéma, vous me donnez surtout envie de prendre ma retraite !
Rédigé par : Alex paulista | 22 janvier 2014 à 21:56
Vous m’avez donné envie de voir ce film. Le seul fait qu’il soit réalisé par Stephen Frears aurait suffi, mais vous m’avez donné des raisons supplémentaires d’aller le voir. Je partage vos critiques à l’égard du cinéma français et votre admiration pour John Ford. Inutile donc de répéter ce que vous avez écrit. Ayant grandi dans le Canada anglophone, je connais mieux le cinéma canadien, américain et britannique que le cinéma français. En arrivant en France, j’ai été déçu par la production cinématographique récente de ce pays qui se divise, en gros, entre drames bourgeois pour intellos et grosses farces pour prolos. Heureusement, il y a des exceptions. Je songe à Bertrand Tavernier, bien connu pour son amour du cinéma américain. Je conserve religieusement les deux volumes qu’il a écrit avec Jean-Pierre Coursodon (« 50 ans de cinéma américain », 1991).
Pourquoi « Philomena » n’aurait-il pas pu être tourné par des Français ? Tout simplement parce qu’en France les réalisateurs (qui écrivent souvent leurs propres scénarios) se prennent soit pour des artistes, soit pour des intellectuels, alors qu’en Amérique du Nord ils se considèrent plutôt comme des artisans qui se contentent de faire leur métier, le mieux possible. Ainsi on ne parle pas de réalisateur ou de cinéaste, mais de "director" ou de "filmmaker" (littéralement faiseur de films, de la même façon qu’un cordonnier est un "shoemaker", littéralement faiseur de chaussures). On ne parle pas de scénariste ou d’auteur, mais de "screenwriter" ou de "storyteller" (littéralement raconteur d’histoires). L’attitude américaine me semble plus humble, plus saine et plus efficace.
Rédigé par : moncreiffe | 22 janvier 2014 à 18:01
...fils qui lui a été arraché à sa naissance par une institution religieuse où une Sœur notamment a eu un rôle odieux et dissimulateur.
Un petit coup de griffe au passage du réalisateur (probablement un gentil Wasp) sur les institutions religieuses papistes, dont chacun sait qu'elles ne peuvent être peuplées que de sœurs odieuses et dissimulatrices...
Mais nous commençons à en avoir l'habitude.
Chez nous, c'est pareil.
Rédigé par : Parigoth | 22 janvier 2014 à 17:34
@ pibeste
Comme je partage votre fascination et suis heureuse de vous lire !
"Printemps, été, automne, hiver et... printemps" est probablement ma plus grande émotion cinématographique. Quand le cinéma sud-coréen nous donne des leçons de vie dans un dépouillement qui frôle le sublime.
Rédigé par : H.N | 22 janvier 2014 à 17:07
==="On a besoin d'un très long moment de silence avant d'oser dire un mot de peur de rompre la grâce de deux heures de projection."===
Impression qui m'est déjà arrivée après un film marquant.
Je n'ai pas encore vu ce film mais au travers des bandes annonces et de ce que vous en dites, il me revient immédiatement à l'esprit le fait que les sentiments humains ne peuvent être rayés par une simple loi, par des considérations totalitaires.
On peut s'enthousiasmer sur la PMA, la GPA, la simplification du divorce ou de l'IVG, on peut banaliser l'usage de la drogue, derrière il reste l'âme et les émotions, des êtres humains avec leur complexité psychologique, leurs réactions personnelles, leurs questionnements et leur contradictions aussi, parfois.
J'ai pour ma part croisé au cours de ma vie professionnelle trois personnes abandonnées sous X à la naissance et élevées par des parents adoptifs formidables, ces individus-là avaient tous eu pour but et même seul but de rechercher leurs racines, leurs vrais parents, de comprendre pourquoi ils avaient été confiés à la DDASS. Ils étaient fragiles mêmes s'ils aimaient leur famille adoptive.
Leur histoire personnelle m'avait passionnée, parce que j'avais suivi leurs recherches, leurs déceptions et leurs espoirs et dans deux cas les retrouvailles même décevantes, et "Philomena" devrait me plaire car j'y retrouverai sans doute des similitudes (frustrations, doutes, amour, culpabilité et autres sentiments forts).
De même j'ai croisé des parents dont les enfants étaient accro à la drogue, un calvaire. Et je ne crois pas que la dépénalisation dont on nous parle de façon récurrente soit une panacée.
Il suffit d'un film, d'une anecdote ou d'une information pour que je reste convaincue que les belles âmes modernistes qui veulent nous amener vers une société sans âme et froide se trompent et ne comprennent rien à l'humain.
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 22 janvier 2014 à 16:29
« Pourquoi Philomena n'est pas un film français ?
Tout simplement parce qu'il est parfait. »
Un petit coup de blues ?
Après le Sarkozy bashing récurrent, le Hollande bashing mezza voce, voilà que vous vous attaquez au cinéma français !
C’est le passage de Tunis à Paris et le manque de soleil qui s’ensuit qui vous déprime ?
Vite quelques séances d’héliothérapie à la campagne. « Le bonheur est dans le pré », c’est bien connu et vous vous en porterez beaucoup mieux.
Vous pouvez aussi prendre le premier avion vers les USA, pour visiter tous les sites des grands westerns. C’est ce que j’ai fait dès la première année de ma retraite.
J’ai commencé par Monument Valley. L’amateur de western que vous êtes y trouvera le soleil, le ciel bleu à la John Ford, c’est-à-dire avec de beaux nuages blancs, et une terre rouge à perte de vue, avec quelques hauteurs. Il reste encore la petite cabane, qui a servi de bureau au capitaine Nathan Brittles (John Wayne) construite pour les besoins du film « She wore a yellow ribbon ». J’aime beaucoup la tendresse avec laquelle John Ford traite ses personnages, hommes ou femmes, dans ce film.
Et puis ensuite le Wyoming, et la Snake River, qui a servi pour Rivière sans retour et l’inoubliable Marilyn Monroe, et encore après, le Montana avec Red Lodge, le repère de Billy the Kid, Little Big Horn, Custer et Sitting Bull.
Puis encore, l'Arizona, mais j’arrête là vous allez croire que je représente une agence de voyages.
De quoi faire deux ou trois voyages, ou plus, pour se fondre dans de grands espaces, l’infini devant soi et au-dessus de soi.
J’ai compris qu’il ne pouvait pas y avoir de compréhension et encore moins d’entente entre des immigrants venant de villes européennes du XIXe siècle grises, tristes et étroites, et les Indiens enivrés de nature, terre et ciel, sans limites.
Il est impossible de fusionner l’infini et le fini, l’Avoir et l’Être.
Quand je commence à parler de western, il m’est difficile d’arrêter, mais c’est vous qui avez commencé en parlant de « La Prisonnière du désert ».
Rédigé par : Tipaza | 22 janvier 2014 à 15:44
Dans un autre genre mais tout aussi beau : "Don Jon", ou les tribulations d'un Italo-Américain nourri de porno qui parvient dans un film bancal à donner une définition de l'amour dans un monde individualiste abreuvé d'images.
Rédigé par : SR | 22 janvier 2014 à 15:27
Pour le premier paragraphe, c'est exactement l'état d'esprit dans lequel j'étais après "Voyage au bout de l'enfer" ! Sortir du film et voir Paris gorgé par les rayons de soleil me devenait insupportable.
"Et au milieu coule une rivière", pas français hélas, vaut le temps consacré à le regarder.
Rédigé par : calamity jane | 22 janvier 2014 à 14:37
Comme vous évoquez Ford, vous vous situez dans l'histoire du cinéma en général.
Je n'ai pas vu Philomena, mais, par pitié, ne désespérez pas de la capacité des cinéastes français à créer le sentiment complexe que vous dites, qu'il soit joyeux, triste, ou les deux à la fois ! Ne serait-ce qu'à cause de cette scène des Enfants du Paradis - et de quelques autres :
http://www.youtube.com/watch?v=VDAs2K_UZ-0
Toujours dans le même effet, voici un extrait d'un film cher à mon coeur, qui, comme on me l'a dit une fois, pourrait être remboursé par la Sécurité sociale. Je dois reconnaître que le réalisateur est américain. Clarence l'est certainement aussi, même si ce n'est qu'un AS2 (Angel Second Class) : il lit Mark Twain.
Evidemment, il n'est pas idéal de limiter ce lien à la scène finale, pour les raisons mêmes que vous énoncez dans votre billet ; mais difficile de faire autrement, elle dure déjà neuf minutes...
http://www.youtube.com/watch?v=lxNXtjGY_Us
Rédigé par : Boris | 22 janvier 2014 à 14:17
Bonjour M. Bilger
On acquiesce forcément lorsqu'on parle de Stephen Frears. Un artiste nous apporte toujours une vision du monde magnifié qui bouleverse par la pureté de son expression qu'elle soit sauvage ou sophistiquée.
Mais peut-être pourriez-vous élargir votre horizon, non que les cinéastes français soient mauvais non plus que les acteurs qui sont au demeurant souvent très convaincants, mais comme pour le reste la France est en perte de vitesse et de renouveau.
Alors de partout les talents des cinéastes prolifèrent et parmi les moins en vue il en est un dont le dépouillement qui confine au minimalisme emporte l'adhésion. Là, point de désert mais juste un étang, point de fuite ou de vengeance mais juste une tentative humaine de se réconcilier avec son destin, pas de pathos juste l'épure qui est de mise et à chaque plan on suffoque devant tant de beauté où l'insignifiance du temps et de l'espace raconte de fragiles destins qui vont créer du désordre là où le cycle des saisons semblait être immuable : "Printemps, été, automne, hiver et... printemps" de Kim Ki-duk génère sur moi une fascination comme le ferait la démonstration de l'existence du Karma où la force de l'instinct subjugue et contraint les hommes à accepter son immanence.
Quant à John Wayne, il n'a jamais été plus parfait ni à sa place que dans "L'homme tranquille" dudit John Ford.
C'est un plaisir d'esthète que vous nous offrez et soyez-en remercié.
Rédigé par : pibeste | 22 janvier 2014 à 13:52
Si vous avez aimé Philomena, alors vous aimerez The Lunchbox, qui n'est pas français non plus mais indien, à l'opposé des grands spectacles bollywoodiens, et qui présente une œuvre intimiste avec la mégapole Bombay s'invitant à l'arrière-plan. Un film parfait aussi, donc pas français sans aucun doute possible.
Rédigé par : Camille | 22 janvier 2014 à 13:44
Et pourtant Philippe, vous êtes bien Français ?
Rédigé par : polochon | 22 janvier 2014 à 13:39
Bonjour Philippe Bilger,
« Pourquoi Philomena n'est pas un film français ?
Tout simplement parce qu'il est parfait. »
Je vous trouve un peu injuste là, Philippe Bilger.
Sur le même thème il existe un film français qui est excellent, tant en ce qui concerne le scénario que le jeu des acteurs.
Il s’agit de « La vie est un long fleuve tranquille » d’Étienne Chatiliez qui a à son actif toute une série de films particulièrement réussis.
Mais je suis prêt à aller voir Philomena pour faire la comparaison.
Rédigé par : Achille | 22 janvier 2014 à 11:46
Pourquoi Philomena n'est pas un film français ?
Tout simplement parce qu'il est parfait.
Non, probablement parce qu'il n'a pas été réalisé par des gauchistes subventionnés par le Ministère de la Propagande mais par des gens n'existant que grâce à leur talent.
Rappelons que les meilleurs films français ont été produits et réalisés sous l'Occupation dans des conditions très difficiles et avec très peu de moyens...
Rédigé par : Parigoth | 22 janvier 2014 à 11:30