Que la politique ait besoin, pour être crédible et respectée, de la morale est une évidence même si, par exemple, le triste épisode relatif à Aquilino Morelle a montré que ce combat démocratique est loin d'être gagné.
Mais la religion ne peut pas de se passer de la politique comme art et technique et le pape François ne cesse pas de le manifester remarquablement.
Une politique sans éthique est un désastre et creuse encore davantage le fossé entre ceux qui gouvernent et les citoyens sans que ceux-ci soient au moins comblés par le bonheur de pouvoir respecter et admirer qui leur montre le chemin.
Une éthique sans incarnation forte dans la pâte du siècle et les stratégies de conviction et de persuasion dont notre modernité est friande serait condamnée à demeurer lettre morte et voeu pieux.
Que ce pape extraordinaire soit un fin politique constitue une évidence tant pour les catholiques que pour les autres confessions et plus généralement pour tous ceux que le fait religieux passionne parce qu'il est devenu une grille de lecture irremplaçable pour notre monde déboussolé en même temps qu'une menace quand l'intégrisme prétend justifier la violence dans le prosélytisme.
Le choix d'avoir fait canoniser ensemble Jean XXIII et Jean-Paul II - pour ce dernier, selon un processus délibérément expéditif - n'est pas neutre et on peut en effet l'interpréter comme une volonté de compenser le vedettariat charismatique du second par l'hommage rendu à la créativité organique et structurelle du premier.
Mais ce n'est pas tout.
La liberté de l'esprit ne réside pas seulement dans les audaces et l'imprévisibilité qu'il s'octroie contre tous les conformismes. Mais aussi dans le refus des adhésions ou des détestations en bloc comme si les détails n'avaient aucune importance et ne permettaient pas d'amender souvent ce qu'une approche systématique pouvait avoir d'obtus et de simpliste.
Sur ce plan j'ai lu, dans Libération dont ma quotidienneté se passe assez volontiers, sous la signature de Bernadette Sauvaget, un formidable portrait du pape François en politique si j'ose dire - cachant "sous son air bonhomme... un personnage complexe, séducteur et fin stratège".
Tout serait à citer de cette remarquable analyse qui synthétise avec talent ce que les uns et les autres pressentions de cette incroyable aura d'un pape ayant changé en un rien de temps, par la seule force de son être, de sa parole et de son commencement d'action, le regard du monde sur le catholicisme et du catholicisme sur lui-même.
Mais je voudrais m'attacher à trois points qui me semblent caractéristiques d'une méthode constituant la politique non plus comme l'auxiliaire de basses oeuvres mais pour une médiatrice fondamentale entre la morale et le réel.
D'abord, le cardinal Jorge Mario Bergoglio, qui n'était pas connu en Argentine comme un rayonnant extraverti, un être habité et joyeux à l'écoute de tous, a su accomplir une mue totale en devenant le chef de l'Eglise catholique parce que ses intuitions et et son analyse avaient impressionné l'ensemble des cardinaux.
Il proposait avec vigueur que l'église ne fonctionne plus en vase clos dans un processus auto-référentiel mais au contraire délaisse le centre qu'elle représentait avec complaisance pour les périphéries - qu'elle s'oublie pour privilégier les fidèles, l'humanité tout entière. Le cardinal argentin a compris que, pour cette universalité, il convenait que sa personnalité, son apparence, sa manière d'être au et dans le monde changeât totalement. Il fallait un être nouveau pour cette vision nouvelle de la papauté et du catholicisme. Personne ne peut soutenir qu'il ne l'a pas été depuis son élection surprenante mais comme la grâce peut l'être.
Ensuite, le pape a engagé un jeu subtil et délicat pour préserver les équilibres et ouvrir à la fois des pistes singulières. S'il n'a pas rien cédé sur les "fondamentaux" de l'église - que serait celle-ci si, dans un univers où le relatif et le fluctuant sont rois, elle ne maintenait pas le culte d'un absolu qui est beau précisément parce qu'il défie le temps ? -, il a, en revanche, instillé de la souplesse et de l'empathie dans la perception des réalités du siècle et des minorités en souffrance ou en quête de considération.
Son tour de force est de conjuguer l'inaltérable de certaines valeurs avec l'heureux et bienfaisant regard d'un homme touché par ceux qui les vivent mal ou douloureusement. Ou qui n'en veulent plus. Au fond, pour ne pas modifier la substance du fond, il a fait de la forme une sorte de noble substitution à l'inévitable rigidité des principes.
Enfin, ce pape "s'intéresse davantage à la personne du pécheur qu'au péché". Cette différence radicale d'approche évite de faire tomber le dogme dans le dogmatisme et contraint à tenir compte des attentes, des désespoirs et des refus de chacun d'entre nous et à appliquer, dans le fonctionnement général de l'église et de la papauté elle-même, une mesure, une parcimonie manifestant la prise de conscience concrète et opératoire de la pauvreté partout.
Les pauvres, pour ce pape, ne sont pas des êtres sur lesquels on pleure mais des détresses à consoler par l'exemple qu'on donne soi-même. Le péché n'existe plus à proprement parler car l'infinie diversité des pécheurs a fait éclater ce concept intimidant et lui a substitué la sollicitude, ici et maintenant, pour les déviations et les transgressions surgies de l'humain si contrasté, émouvant, fragile et faillible.
Le pape François, pour répudier le culte de la personnalité en ce qui concerne Jean-Paul II, n'a cependant pas oublié cette règle de base de toute politique : tout commence par soi.
Son message est si puissant et dépasse le champ du catholicisme parce que sa critique de l'enfermement de l'Eglise et de son narcissisme bureaucratique et confortable est valable pour beaucoup d'institutions profanes, de pouvoir et d'influence, qui fonctionnent trop pour elles et pas assez pour ceux qu'elles doivent servir.
Vraiment, ce pape n'est pas innocent !
Curieusement ce Pape m'inspire. Très observateur, grand connaisseur de la nature humaine et très fin tacticien.
Néanmoins, je me demande s'il attirera les brebis égarées et s'il incitera les catholiques croyants pratiquants à dépasser le simple stade de la bonne parole et à développer un mode de pensée plus enclin à la modestie envers eux-mêmes et à moins de jugement envers les autres.
Rédigé par : Zomia | 03 mai 2014 à 04:04
Pas innocent de la sympathie qu'il m'inspire, déjà.
AO
Rédigé par : oursivi | 01 mai 2014 à 22:22
@ Xavier NEBOUT
Les théologiens ne sont pas inutiles mais je leur préfère les pasteurs, ceux qui cheminent avec et au milieu de leurs brebis.
Rédigé par : Polochon | 30 avril 2014 à 14:03
Les fondements de l'Eglise ? avec la Vierge Marie qui enfante par l'opération du Saint-Esprit ? Ou la négation même de
la vie terrestre... Xavier Nebout.
Rédigé par : calamity jane | 30 avril 2014 à 13:26
La sainteté ne relève pas de la politique.
Est saint, celui qui de par la poursuite de sa vie "au ciel" pour ne pas dire dans une autre dimension, a la possibilité d'influer sur la vie sur terre.
Si on transforme cela en prix Nobel de politique de l'Eglise, on casse un peu plus les fondements de l'Eglise.
Par ailleurs, à cet égard, Jean XXIII aura été une catastrophe.
L'Eglise a besoin de théologiens brillants pour ramener l'humanité vers Dieu, et non de démagogues orgueilleux qui s'arrogent le droit de désacraliser une fonction qui ne leur appartient pas.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 30 avril 2014 à 09:52
@Jean-Dominique Reffait | 30 avril 2014 à 00:21
Ainsi donc le message de Jean-Paul II "n'ayez pas peur" était incomplet.
En vérité, Jean-Dominique Reffait vous le dit, sa parole était :
"N'ayez pas peur de mettre un préservatif et copulez les uns les autres"
Ah ! ces archaïsmes chrétiens appliqués à la société africaine aux mœurs libérées !!
Ah ! La France, vieille fille aînée de l’Église !!
Rédigé par : hameau dans les nuages | 30 avril 2014 à 08:58
"Le Conseil supérieur de la magistrature a proposé le déplacement d'office de l'avocat général qui avait commenté en direct un procès sur Twitter en 2012". A méditer sur l'effondrement de tous les codes quels qu'ils soient, professionnels ou moraux...
Rédigé par : Guzet | 30 avril 2014 à 07:50
@Franck Boizard | 29 avril 2014 à 03:16
"2) L'Eglise a depuis un siècle pris une série de décisions malheureuses. Son absence de révolte contre la Première Guerre mondiale fut une catastrophe."
Qu'il me soit permis d'apporter une nuance:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Beno%C3%AEt_XV#L.27appel_de_1917
Rédigé par : xc | 30 avril 2014 à 07:44
"Natürlich, Herr Savonarole !
Sie sind ein Meister der Wortspiele und Sie haben einen guten Sinn für Humor..."
moncreiffe
Ich bin ganz einverstanden mit diese Meinung !
Rédigé par : Jean-Paul Ledun | 30 avril 2014 à 01:44
Les aspects principaux que vous évoquez dans ce billet sont justement ceux qui font que l'athée que je suis apprécie ce pape François. Il a aussi ce côté matois d'un vieux chat qui paraît somnoler et qui attend que la souris passe pour lui mettre vivement la patte dessus. Il attend les occasions, ne les provoque pas et, lorsqu'elles se présentent, décoche un trait. Ainsi, par petites touches qui semblent dues au hasard, il redessine ici puis là un visage nouveau de l'Eglise.
"N'ayez pas peur" disait Jean-Paul II parce qu'alors, effectivement, les rigueurs catholiques de principes énoncés sans prise en compte du réel, pouvaient faire peur. Il fallait, pour un Africain confronté au sida sans préservatif, pour un homme confronté à l'amour d'un autre homme, renoncer aux impératifs de son humanité pour être bon chrétien.
François abolit la peur car, comme vous le dites, il s'intéresse plus au pécheur qu'au péché. Plus besoin de vaincre sa peur, elle disparaît d'elle-même.
Il m'a été donné la semaine dernière, après un baptême, de déjeuner à côté du prêtre qui avait officié. Il était originaire de Centrafrique et nous avons longuement discuté des drames successifs des Africains. Il me disait qu'en France, dans la banlieue populaire où il est curé, les drames n'étaient pas moins minces mais cachés. Il me témoignait des moments difficiles d'une rencontre avec une jeune fille à peine pubère qui "devait" avorter et de son incapacité à trouver un argument contre cette fatalité. "C'est un crime mais je ne savais pas où trouver la force de l'empêcher". Je lui ai demandé s'il avait "sanctionné" cette personne en la privant, par exemple, de communion. Un silence. "Non. Nous avons prié".
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 30 avril 2014 à 00:21
Et "Ya vol", ça vient de l'hébreu aussi ?
Rédigé par : Savonarole | 29 avril 2014 à 00:38
Natürlich, Herr Savonarole !
Sie sind ein Meister der Wortspiele und Sie haben einen guten Sinn für Humor.
Tschüss !
Rédigé par : moncreiffe | 29 avril 2014 à 23:33
@ Polochon
Il vient de descendre du train pour enfourcher son scooter.
Rédigé par : Jabiru | 29 avril 2014 à 19:15
Vu le peu de commentaires sur le sujet "Pape François", j'en déduis qu'il fait bien son job. On ne parle pas des trains qui arrivent à l'heure.
Quant à l'autre François ...! Est-il encore dans le train ?
Rédigé par : Polochon | 29 avril 2014 à 18:02
Que veut dire Ya vol ?
Etant inculte moi-même je ne trouve que cette explication :
Ja woh l! ou Jawoll !
Expression militaire que les objecteurs de concensciences évitent d'utiliser.
:-)
Rédigé par : Jean-Paul Ledun@duval uzan | 29 avril 2014 à 12:27
Rédigé par : Savonarole | 29 avril 2014 à 00:38
Je n'ai pas compris votre question.
Comme vous le savez je suis un peu inculte alors précisez s'il vous plaît ; que veut dire Ya vol ? merci.
Rédigé par : duval uzan | 29 avril 2014 à 11:34
@jack
Je reste persuadé que pour beaucoup d'ensoutanés de pourpre, il y a longtemps qu'ils n'ont pas rencontré un pauvre et vivent dans un confort indécent. Et ça doit beaucoup agacer celui qui a arpenté les bidonvilles de Buenos Aires.
Rédigé par : Jabiru | 29 avril 2014 à 11:32
Etonnante réaction de M. Onfray !
La Cité du Vatican (et tout ce qu'elle contient) fait partie du patrimoine mondial de l'humanité. Ni le pape ni les ombres
chinoises qui l'accompagnent n'en sont propriétaires.
Qui a vu la Chapelle Sixtine avant rénovation ne peut rester indifférent à cette voûte dont les couleurs passées (fondues dans une sorte de douceur parce qu'ayant accompagné plusieurs siècles) vous envahissaient et vous obligeaient au recueillement. La beauté fait partie intégrante de l'humeur des jours.
C'est son droit de jouissance exclusif par les organisations papales qui est anormal.
Car le visible, l'œuvre visible comme certaines fresques, c'est gratuit et du bonheur à la portée de tous. Contrairement aux livres qu'ils soient œuvre collective ou
individuelle.
François Ier du nom ferait œuvre charitable en concevant une autre manière de partager les beautés de la cité vaticane.
Que celles-ci concernent l'aberration d'illustrations de certains dogmes n'a, à mes yeux, qu'une importance relative, quand les créations d'autres artistes y compris contemporains ne sont qu'excroissances de nombrilisme.
Rédigé par : calamity jane | 29 avril 2014 à 09:54
@ genau | 28 avril 2014 à 23:45
« C'est un acte de foi dans la projection de l'esprit sur la matière. C'est à mon sens, de cette façon que raisonne François. »
C’est ce qu’on appelle de la dialectique matérialiste. Le pape François serait-il marxiste ? Etonnant de la part d’un jésuite.
Rédigé par : Achille | 29 avril 2014 à 09:31
Plusieurs remarques :
1) Ceux qui croient que la foi est une certitude absolue se trompent.
Pour en avoir fréquenté, j'ai rencontré la certitude absolue, fanatique, chez les tenants d'une pseudo-religion comme le socialisme (le cas de l'islam est à part pour des raisons trop longues à expliquer ici).
Ce n'est pas par hasard si les deux horreurs absolues du XXe siècle, le nazisme et le communisme, furent athées militantes.
En effet, se mentant à eux-mêmes, mentant aux autres, en ne reconnaissant pas le caractère religieux de ce qu'ils présentent comme un engagement politique, ils ne peuvent reconnaître la fragilité de leur foi sans que leur monde ne s'écroule d'une pièce.
On ne compte plus les témoignages d'ex-communistes qui ont décrit leur décillement comme une perte de foi religieuse et l'écroulement d'un monde.
S'étant engagés complètement dans une fausse foi, c'est complètement qu'ils la perdent.
Inversement, les socialistes n'ayant jamais eu le courage de s'engager à fond ne perdent jamais la foi totalement. Dans l'engagement comme dans le désengagement, ils restent des mous.
Ce qui permet le Sovietic Park français : le seul pays occidental où l'on trouve encore des syndicalistes marxistes et des socialistes persuadés qu'en taxant les riches, on fait le bien.
Mais, à part ça, voter Hollande, c'était juste parce qu'on n'aimait pas Sarkozy. Heureux les pauvres d'esprit...
2) L'Eglise a depuis un siècle pris une série de décisions malheureuses. Son absence de révolte contre la Première Guerre mondiale fut une catastrophe.
Son penchant pour la modernité (comme chantait Brassens, de manière caricaturale mais éclairante, «sans le latin, la messe nous emmerde») a quasiment achevé le malade, du moins en Occident.
Mais l'Eglise ne meurt jamais complètement : sa spécialité, sa marque de fabrique, c'est la résurrection.
Les papes passent, plus ou moins bons, plus ou moins saints, l'Eglise reste.
AU XIIe siècle, l'Eglise ne pétait pas la santé puis vinrent Saint François et Saint Dominique. On n'est jamais à l'abri d'une bonne surprise.
3) Je ne partage pas l'enthousiasme pour le pape François. Les raisons qui le rendent populaire me semblent superficielles. Mais les voies du Seigneur sont impénétrables.
Rédigé par : Franck Boizard | 29 avril 2014 à 03:16
duval uzan | 28 avril 2014 à 20:57
Et "Ya vol", ça vient de l'hébreu aussi ?
Rédigé par : Savonarole | 29 avril 2014 à 00:38
Tous les commentaires faits sur ce billet sont pertinents... mais j'ai un complément à apporter sur mon commentaire du billet précédent. Je croyais que l'émission ONPC était diffusée en direct le samedi soir mais je viens d'apprendre que celle diffusée samedi soir avait été enregistrée la veille, le vendredi, et qu'une partie importante des échanges entre Aymeric Caron et Alexandre Arcady, et aussi Natacha Polony, avait été supprimée / censurée... Alexandre Arcady le commente sur le net... Ceux qui se sont intéressés au billet précédent et à ses commentaires trouveront sûrement un intérêt à y compléter leur information, pour modifier ou conforter leur opinion et décider de se coucher plus tôt dans la nuit de samedi à dimanche, même s'il n'y a pas tous les dimanches matins une si exceptionnelle cérémonie place Saint-Pierre.
Rédigé par : Jean le Cauchois | 28 avril 2014 à 23:57
Récemment interviewé un matin sur LCI, le philosophe Michel Onfray n'a pas voulu s'associer à l'encensement du Pape François. Il considère que pour être sincère et efficace, une action réelle en faveur des pauvres consisterait d'abord, pour le Vatican, à se dépouiller de tous ses biens (y compris les œuvres du Musée du Vatican) pour en redistribuer le montant... Pour l'heure, la préférence pour les pauvres ne relèverait que de la parole. Rabat-joie ?
Rédigé par : jack | 28 avril 2014 à 23:50
Ni la religion, ni Dieu ne sont indispensables. Un certain Lavoisier a fourni la solution, mais elle n'est pas à la portée de la conception humaine de la durée. La vie est éternelle en soi, sous toutes les formes envisageables. Notre mort n'est qu'une transformation, par la libération des protons susceptibles de s'agglomérer et de former une autre entité. Rien ne se perd, rien ne se crée.
Là commencent les ennuis car l'espace habité, occupé, et le temps vécu, ne sont pas uniques, comme le haut et le bas n'ont aucun sens dans l'univers. Marcher sur l'eau ou faire graver les tables de la Loi par un laser divin ne sont que des traductions de l'incertitude sur la réalité tangible de notre monde, la psychiatrie n'a rien à voir là-dedans. La lecture permanente des interrogations scientifiques, les révolutions périodiques qui permettent d'apercevoir de nouvelles solutions et des limites toujours repoussées sont le meilleur moyen de s'émerveiller des beautés de la Création et le mot mérite développement. C'est l'inimaginable masse de la pointe d'épingle origine de notre univers qui est la plus perturbante quand on songe aux millliards de hasards physiques, combinatoires, puis cellulaires, bactériens, physiques, physiologiques qui ont conduit à cette étrange espèce humaine, dont on découvre sans cesse des cousins avortés. Et vous voudriez réduire le résultat de cette aventure à de simples superstitions ? des aberrations ?
La force d'une pensée métaphysique (après la physique) est de prendre en compte ce puits d'ignorance et la constante avancée de la connaissance, encore embryonnaire, pour contraindre l'homme à regarder plus loin que sa courte vie, si misérablement courte, inscrite dans la permanence de l'univers. Teilhard de Chardin a vu un univers convergent, c'est le contraire, donc un Univers qui laissera un jour notre ciel vide (compter quand même quelques milliards d'années). L'espèce humaine aura alors sans doute disparu après sa brève mais combien riche apparition en tant que telle.
Il me semble que ce Pape a pris la mesure de la connaissance de la matière, des développements de la connaissance universelle, des interrogations majeures sur la composition de notre monde et que sa foi est celle de la fragilité de la reproduction humaine, dont la caractéristique n'est pas la bonté, ni la charité, mais la connaissance.
Il n'y aura jamais d'humanité radieuse, il peut y avoir suffisamment d'hommes conscients de l'éternité de leur participation à la vie pour former un idéal majoritaire, inspiré, bonificateur de la pensée et du comportement de notre état provisoire destiné à rejoindre l'éternité physique. C'est en cela que nous touchons à la nature divine, c'est-à-dire, éternelle.
Je crois que certains souverains ont eu ce sentiment, bridé par l'étroitesse de leur monde, mais pressenti comme une évasion de leur nature organique parce que toute nouveauté convergeait vers eux. Aujourd'hui, la physique, l'exploration mathématique nous fournissent des éléments de réflexion qui justifient la foi, un des actes de gouvernement qui se confond avec l'inconnaissable a été la décison de fondation du CERN : dépasser toute frontière, toute limite pour aller plus avant dans le risque scientifique.
C'est un acte de foi dans la projection de l'esprit sur la matière. C'est à mon sens, de cette façon que raisonne François.
E cusi sia.
Rédigé par : genau | 28 avril 2014 à 23:45
Le billet, excellent sur le Pape, eût été meilleur sans ce bêlement sur A. Morelle.
Rédigé par : CostadelSol | 28 avril 2014 à 22:54
@MCPN
"Ceux qui vous font croire que le monde de l'au-delà existe sont des escrocs de la pensée"
Entre nous, je ne suis pas du tout pressé de me retrouver dans la situation ultime où il serait possible ou non de vérifier que le paradis, l'enfer et le purgatoire ne sont que des vues de l'esprit de mystiques que vous qualifiez de schizophrènes.
Tant que l'Homme ne saura pas répondre à des questions simples telles que : "Qu'est-ce que le temps ?", "Qu'est-ce que l'univers ?" ou bien "Qu'est-ce qui se trouve après le panneau indicateur où est écrit : ici se trouve la fin de l'univers ?", il y aura des mystiques pour tenter d'expliquer l'incommensurable avec leurs pauvres mots de mortels, facilement critiquables d'une manière ou d'une autre parce qu'imparfaits. Les mystiques tentent une approche vers Dieu et simultanément vers l'humanité.
Vous pouvez traitez de folles des mystiques dont la renommée a traversé les siècles ; mais Jeanne d'Arc, Marie l'Egyptienne ou Mère Teresa pour ne citer qu'elles, ont donné leur vie pour sauver le plus d'âmes possibles. Elles ont donné de l'espoir à ceux qui désespéraient.
Rédigé par : vamonos | 28 avril 2014 à 22:40
Je suis un peu comme tout le monde : je découvre petit à petit le message spirituel de ce pape. Votre exposé est argumenté Philippe, et sans doute y a-t-il du vrai là-dedans.
Mais pour moi, François cherche l'épure de la Foi et sa traduction dans le réel. Mais c'est surtout un politique d'exception.
Par cette cérémonie, il a montré son génie. Deux papes vivants canonisant deux papes défunts est une idée grandiose qui a contraint un monde égaré dans le relativisme à venir se recueillir.
En plus, en allant saluer les délégations en fin de cérémonie, il a obligé souverains, chefs d'Etat et de gouvernement à se mettre à la queue leu leu devant lui et attendre leur tour.
Sans s'en apercevoir, ils ont fait allégeance au pape à leur corps souvent défendant et mais ils l'ont fait ! Ainsi, François vient de montrer au monde l'ascendance du spirituel sur le temporel.
Mais ce n'est pas tout : il a donné un saint à la partie Est de la Chrétienté qui sera un véritable bastion du christianisme pour cette partie du monde car Jean-Paul II sera vénéré au-delà des frontières polonaises.
Enfin, il a donné un saint à la Curie romaine et à Rome. Le premier objectif qu'il s'était fixé était finalement de rétablir l'autorité du pape sur l'Occident ; c'est chose faite.
Rédigé par : Ribus | 28 avril 2014 à 20:59
Un million et demi de personne ont chanté alléluia הַלְּלוּיָהּ sur la place Saint-Pierre. Que veut dire alléluia ?
Du verbe hébreu léhalel (qui veut dire glorifier) à l’impératif pluriel, halélou (glorifiez) et du mot YAH qui est un diminutif de yahvé.
Rédigé par : duval uzan | 28 avril 2014 à 20:57
Bonjour Philippe Bilger,
« Un pape qui n'est pas innocent ! »
Avec François Hollande on a un président qui n’aime pas les riches (mais est-ce toujours vrai ?).
Avec François, on a un pape qui aime les pauvres.
Comme quoi un François peut en cacher un autre.
Rédigé par : Achille | 28 avril 2014 à 20:13
N'ayant pu suivre en direct la cérémonie papale, je viens juste de la regarder. Une cérémonie très émouvante.
Jean XXIII, un pape jovial et près des gens, a étonné par sa volonté de moderniser et de faire évoluer la mission même de l'Eglise. Mal compris comme tous les grands changements, Vatican II a été une véritable transformation.
Puis Jean-Paul II (dont on garde malheureusement trop souvent l'image d'un vieillard malade) est arrivé, encore jeune, intellectuel, moderne, gai, lumineux, voyageur, étonnant. Il a bousculé les règles vaticanes, il a appelé les religions du monde entier à venir se rencontrer et prier au Vatican. Un très bel exemple de respect des autres sans que personne ne renie sa culture, ses traditions, ses croyances.
Enfin et surtout, sensible à la liberté des hommes puisqu'il officiait derrière le rideau de fer, il a été un espoir pour le peuple polonais et un acteur indirect de la chute (sans effusion de sang) des régimes communistes.
Nous avons à nouveau un Pape étonnant, polyglotte (comme ses prédécesseurs), ouvert aux autres et aux différences, qui a confirmé la reconnaissance et demandé le pardon pour des crimes pédophiles de certains hommes d'Eglise (déjà condamnés par Benoît XVI). Un Pape qui se réfère à Saint François d'Assise, et donc proche des pauvres et des oubliés. Il va bénir et apporter des subsides aux immigrés de Lampedusa. Effectivement, c'est un Pape qui sait ce qu'il veut, humble et généreux mais ferme et qui entend moderniser et dépoussiérer autour de lui sans pour autant renier les dogmes de la chrétienté. Ouvert au dialogue mais vigilant et aimable a minima avec ceux qui bousculent les catholiques de la fille aînée de l'Eglise.
A chacun son époque. En 1960, il y avait lieu de moderniser l'Eglise pour l'adapter aux temps modernes, en 1980, un pape de l'Est avait en tête de donner la liberté aux peuples opprimés par les Soviets, aujourd'hui ce nouveau Pape souhaite évincer les brebis galeuses de son Eglise, redonner un sens aux valeurs chrétiennes avec "aimez-vous les uns les autres" ou le sens de l'entraide, et peut-être dans le futur des débats sur le mariage des prêtres ou le remariage à l'Eglise des divorcés...
Mais après cela, on ne peut comparer le Pape et nos dirigeants politiques qu'avec ce qui est comparable. Si l'un va tendre la main aux immigrés par grandeur d'âme, un homme politique ne pourra pas accepter toute la misère du monde dans son pays parce qu'il doit rester réaliste et pragmatique.
Notre Président est jovial mais cela ne suffit ni à en faire un bon Président, ni un émule du Pape.
Et si nos trois phénomènes papaux ont transformé l'Eglise, nous, nos dirigeants actuels s'emploient à durer, en laissant croire qu'ils font, en colmatant les brèches les plus criantes, sans réformes de structures, sans transformations pourtant nécessaires. Occuper la fonction, profiter des ors de la République, ors qu'ils font semblant de dédaigner au départ mais dont ils s'accommodent très vite, donner l'impression... Pas innocents non plus.
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 28 avril 2014 à 19:53
La "com" du Pape s'adresse d'abord aux catholiques. Il leur demande tout simplement d'être fidèles à l’évangile et il donne l'exemple. C'est aussi simple que cela.
Bien sûr, il y aura toujours des cas extrêmes, comme MCPN par exemple, ou Rue89 qui n'a pas dit un seul mot de ce qui s'est passé ce week-end à Rome. Mais là, seul l'Esprit-Saint peut faire quelque chose.
Rédigé par : Polochon | 28 avril 2014 à 19:31
Diable "ce pape n'est pas innocent" sous votre plume, M. l'Avocat Général, cela fait un peu froid dans le dos... Serait-il, alors, coupable ?
Rédigé par : NOURATIN | 28 avril 2014 à 18:02
@ MCPN | 28 avril 2014 à 12:29:
Et la multiplication du dollar ? Et la transformation de l'or en tungstène ? Et le miracle du 11 septembre ? Vous y croyez ?
Je suis sûr même que, comme un Caron, vous devez croire à l'apparition miraculeuse d'un Boeing puis sa vaporisation dans la grotte du Pentagone.
A chaque époque ses miracles.
Il suffit de croire.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 28 avril 2014 à 17:33
Pour faire suite à ma précédente intervention et pour compléter la réflexion qui sous-tend ce billet, je ne résiste pas à l'envie de donner le lien d'une réflexion de Jacques Sapir dans un long billet intitulé "Souveraineté et transcendance" daté du 23 avril, réflexion qui rejoint d'une certaine manière celle de notre hôte, mais par une approche sans doute fort différente. L'article est certes long mais à mon sens mérite une lecture attentive, critique mais complète :
http://russeurope.hypotheses.org/2211
Rédigé par : Robert | 28 avril 2014 à 16:20
"Une politique sans éthique est un désastre et creuse encore davantage le fossé entre ceux qui gouvernent et les citoyens sans que ceux-ci soient au moins comblés par le bonheur de pouvoir respecter et admirer qui leur montre le chemin.
(...)Son message est si puissant et dépasse le champ du catholicisme parce que sa critique de l'enfermement de l'Eglise et de son narcissisme bureaucratique et confortable est valable pour beaucoup d'institutions profanes, de pouvoir et d'influence, qui fonctionnent trop pour elles et pas assez pour ceux qu'elles doivent servir".
N'étant plus croyant, le message religieux (dogme et non dogmatisme dites-vous) ne m'intéresse guère. En revanche, les deux alinéas que j'ai sélectionnés sonnent parfaitement juste quant on les rapporte à l'action de notre personnel politique français. Trop professionnalisé, il est uniquement soucieux de sa carrière, de sa trajectoire partisane, de sa culture de l'entre-soi, le peuple n'étant plus perçu que comme un électorat à séduire selon les canons de la communication.
Quant à l'idéologie qui sous-tend les actions de notre actuel personnel politique, il tient plus de la dogmatique que de la réflexion politique au sens noble de l’expression s'entend. En ce sens votre billet, Monsieur Bilger, est une critique en creux mais sans concession du vide de nos politiciens en mal de carrière et donc soucieux principalement de la protéger et de la conforter.
Rédigé par : Robert | 28 avril 2014 à 16:00
Ce pape est bien sympathique. Il fait ce qu'il peut, mais ne peut pas grand-chose.
C'est ça le message ?
À quand un Pape révolutionnaire ?
Rédigé par : Alex paulista | 28 avril 2014 à 14:59
La force de ce prélat, chef de l'église catholique, est de montrer l'exemple en se comportant, comme le décrit un spécialiste et historien de la papauté, comme un curé de paroisse dont le monde est sa paroisse.
De la stratégie et de la communication sans doute mais avec une énorme dose d'humilité.
Au risque d'échauffer certaines mitres endormies dans le confort des ors du Vatican.
Rédigé par : Jabiru | 28 avril 2014 à 13:33
L’hyperpape de l’hypermaladie.
La parole de Dieu : quelle parole, Dieu ne parle à personne.
Si vous croyez qu’un mec peut marcher sur l’eau, c’est que vous avez séché un cours de physique ; c’est un délire mystique digne de nos malades.
Si vous croyez qu’à l’origine ce sont des voix célestes qui ont parlé aux «prophètes», vous êtes dans la zone rouge de la psychiatrie.
Ceux qui vous font croire que le monde de l’au-delà existe sont des escrocs de la pensée.
Religions : les plagiaires de la schizophrénie hallucinatoire.
http://schizo-non.allmyblog.com/441-plagiat.html
Sérotonine, la molécule de la foi.
http://schizo-non.allmyblog.com/418-serotonine.html
Rédigé par : MCPN | 28 avril 2014 à 12:29
Le pape est comme tous les hommes de son époque, un communicant... Il n'y a pas de quoi s'extasier bien au contraire, sa lumière n'est plus divine et à devenir humain l'on devient trop humain... Que l'Eglise se réforme et se modernise c'est recommandé, que celui qui incarne une pensée philosophique et spirituelle fasse le show et satisfasse ceux qui ne comprennent pas autre chose que la communication médiatique c'est triste. Il convient de rentrer en soi-même et de se confronter à l'homme, le prédateur, dévastateur, égocentrique que n'afflige que ce qui lui rappelle sa propre et lamentable petite personne. Mais les voies du seigneur sont impénétrables... SPES UNICA
Rédigé par : duvent | 28 avril 2014 à 11:31
Un bel exercice de style, et vrai qui plus est.
Aucune critique possible sur cette analyse, qui est parfaite.
Il y manque simplement un seul mot, celui de Dieu.
Rédigé par : Tipaza | 28 avril 2014 à 10:45