Ce que ce titre désire laisser entendre se rapporte à l'apparent contraste qui peut exister entre une parole publique, politique au sens large et une politique, une technique de la parole. Entre la vigueur, l'implication de l'une et la neutralité, l'objectivité de l'autre.
J'évoque ce thème en faisant état d'un hiatus, mais seulement apparent, parce qu'il n'est pas loin de me concerner dans ma nouvelle vie professionnelle et de représenter, de l'avis de certains, une difficulté, voire une incompatibilité.
Alors que je n'ai jamais éprouvé la moindre discordance ni même son risque entre les facettes publiques, médiatiques et engagées de mon activité - qu'on se rassure, je ne me pousse pas du col ! - et ma volonté d'offrir à ceux qui viennent solliciter mes conseils en matière d'apprentissage, de perfectionnement et de maîtrise de l'expression orale l'enseignement à la fois le plus libre et le plus empirique possible.
Pour les premières, elles relèvent du citoyen devenu magistrat honoraire et délié de toute obligation de réserve et pour la seconde, de l'ancien avocat général à la cour d'assises de Paris qui a pratiqué le verbe durant plus de vingt ans et du président de l'Institut de la parole.
Craindre, comme j'ai pu ici ou là l'entendre, que l'esprit spontané et direct imposé par les débats médiatiques soit contradictoire avec la neutralité du formateur et la richesse de l'expérience ne me semble pas pertinent. Car cette inquiétude mêle ce qui précisément doit relever de deux registres différents impliquant, pour l'un, la passion orientée et, pour l'autre, la passion pure et nue. Pour le premier, la volupté de dialoguer, de s'opposer et de convaincre et, pour le second, le goût et le bonheur de communiquer d'abord le mieux possible avec soi puis, naturellement, avec autrui.
En effet la parole, pour bien surgir de soi, doit avoir été cultivée avec délicatesse dans le dialogue intime entre le silence et son contraire, entre l'être qui en a peur et celui qui y aspire. Dans cette retraite se préparent les apothéoses qui, proférées, étonnent autant qu'elles fascinent.
Derrière cette réticence à faire fond sur le professionnel de la parole à cause de la lumière projetée par le personnage public, j'ai souvent ressenti le reproche implicite ou explicite de m'abandonner avec trop de volupté aux exercices médiatiques et même, péché mortel, d'y trouver du plaisir.
Ce n'est pas le narcissisme ni la vanité qui m'habitent ou m'inspirent à l'occasion de ces émissions télévisées et/ou radiophoniques mais la seule satisfaction, et j'essaie de ne jamais déroger à cette règle, de demeurer moi-même, quel que soit le climat, la qualité des animateurs, des contradicteurs.
Il s'agit plus d'un défi qui me regarde que du contentement niais à être vu ou écouté. J'ajoute que ce grief serait très largement atténué, voire aboli si on savait ce que je refuse. Je n'y ai pas de mérite particulier mais le boulimique médiatique et l'histrion éperdu de soi, eux, ne manquent jamais une occasion pour ce type de représentation.
Ma chance est ma susceptibilité : par exemple, depuis une prestation infinitésimale au Grand Journal à cause d'un Antoine de Caunes désinvolte et superficiel, je réponds négativement aux invitations qui me sont adressées. Ce n'est pas de l'héroïsme mais j'en connais d'autres qui oublieraient l'offense pour se ruer, même une seconde, sous ces projecteurs.
Il y a tout de même, pour être honnête, entre la parole politique et la politique de la parole que je propose un dénominateur commun fondamental qui a trait, dans les deux situations, à l'absolue nécessité des vertus de liberté, de sincérité, de spontanéité, d'improvisation et de cette faculté irremplaçable, au sujet de n'importe quelle problématique, de la capacité de savoir penser contre soi. Ces valeurs devraient être aussi consubstantielles aux discours politiques, parlementaires, gouvernementaux et présidentiel, aux interventions médiatiques qu'à l'émergence au quotidien ou dans le cadre professionnel d'une parole convaincante, digne de ce nom.
Ce qui pourrait donc prêter à confusion et susciter une forme d'ambiguïté tient aux principes d'engagement, d'affirmation de soi pour un verbe de qualité, de force intellectuelle et de défi mesuré qui se trouvent à la base de l'ensemble des oralités valables, qu'elles soient publiques ou non, médiatiques ou discrètes, politiques ou judiciaires, techniques ou conceptuelles - toujours, partout, la parole même la plus dérisoire, sortie de l'utilitarisme concret, ne pourra jamais faire l'économie de soi, l'impasse sur soi. Sans complaisance, celui qui parle ne pourra jamais se trouver moins important que son propos : l'un et l'autre unis pour la vie.
J'espère que mon argumentation recueillera même l'assentiment de tous ceux qui, persuadés d'avoir en la parole un animal familier et prévisible, une amie sans surprise, ne viendront jamais me rencontrer.
J'attends seulement les conscients de leur imperfection.
Monsieur Bilger, avant de vous offusquer demandez-vous pour quelles raisons untel ou unetelle se voit choisi pour animer une émission, ça vous évitera de perdre votre temps et de le réserver à traiter de sujets bien plus hautement instructifs qui incitent la pensée d'autrui à une réflexion intelligente et constructive.
Quant allez-vous, Monsieur Bilger, vous décider à créer un cercle de la parole ou de la transmission orale ?
Rédigé par : zomia | 06 juin 2014 à 03:25
L'alerte sanitaire devient fiévreuse en ce préau d'Institut de la Salive Prétentieuse (ISP).
L'infirmier-maton en chef, pas si fou, se fait fort, toute honte sirotée, de dénoncer auprès de ses sempiternels addicts... ses
propres turpitudes mentales si récentes !
Somme toute rassérénant : le complexe des petits pois va être purgé au clystère via le retour en fanfare du géniteur du
ci-devant "Prince Jean de la Défense"...
Rédigé par : Cirsedal | 05 juin 2014 à 01:48
Puisqu’il s’agit de parole politique, nous en avons eu un bel exemple avec l’interview de Poutine.
L’homme est apparu tout à fait différent de l’ours que nous décrit la presse bien-pensante.
Une maîtrise parfaite, sans défaut malgré l’arrogance d’Elkabbach. Le sang-froid d’un homme qui sait qui il est et ce qu’il vaut.
Une langue de bois subtile et une détermination sans faille accompagnée d’un humour dont je ne sais s’il est caractéristique de l’humour russe, mais qui vaut largement l’humour british.
Sous ses airs condescendants, l’humour d’Obama apparaît plutôt artificiel, construit pour les besoins des médias et en net retrait par rapport à celui de Poutine.
Quant aux blagounettes de Hollande, elles relèvent, à côté, des blagues de Carambar dont raffolent les enfants de la maternelle ou du primaire.
Et puis, j’avoue que les quelques mots sur Hillary Clinton et les femmes en général, m’ont amusé.
Trierweiler n’a pas manqué de tomber dans le piège tendu malicieusement qui vient de déclarer qu’elle ne serrerait pas la main à cet homme-là.
Mais était-ce vraiment un piège, il avait un tel accent de sincérité !!
Quant à son explication sur les camps de travail, on devrait la passer en boucle à Taubira.
Une remarque sur la gestuelle a minima. Pratiquement toujours appuyé sur l’accoudoir gauche, une façon de se tenir à distance des journalistes, il est passé sur l’accoudoir droit, se rapprochant lorsque les questions devenaient vraiment agressives. Cet homme-là n’esquive pas le conflit.
Bref un vrai homme d’État comme on aimerait en avoir en France.
Une interview à recommander à tous ceux qui souhaitent des conseils de communication.
Rédigé par : Tipaza | 04 juin 2014 à 23:29
Curieuse cette passion pour la parole : de Roland Dumas au sulfureux Vergès en passant par Montebourg, Mélenchon ou Cohn-Bendit, on a coutume en France de s'esbaudir devant un verbe viril et pourtant, que de bêtises n'ont-ils pas dites ! Fouquier-Tinville était un excellent orateur et Hitler était le roi des brasseries munichoises avant-guerre.
Aujourd'hui on s'étouffe d'admiration devant un avocat qui en est à son vingtième non-lieu d'assassins patentés ! Ah c'est beau comme l'antique ! "Dieu qu'il est joli garçon l'assassin de papa !" (Georges Fourest)
On espérait Disraeli ou Churchill qui eux ont sauvé leur pays, mais que nous chante-t-on sur ces bateleurs, ces pétomanes de foire qui vous enchantent au 20 heures chez Pujadas ?
Éteignez vos télévisions, fermez vos journaux, coupez la radio et vous y verrez plus clair.
Rédigé par : Savonarole | 04 juin 2014 à 20:20
@Jean-Dominique Reffait
Quoi qu'on pense, on ne pense rien si l'on n'apprend pas à l'exprimer.
Les moyens d'expression ne se limitent pas à la parole
Nous pouvons aussi mentionner l'écrit ou même l'art.
Rédigé par : Parigoth | 04 juin 2014 à 18:01
@Jean-Dominique Reffait
Malheureusement, c'est courant dans les prétoires ! A chaque fois que l'on entend successivement les plaidoiries des demandeurs et des défendeurs, on a souvent l'impression que l'on assiste à deux "histoires" différentes pour un même dossier. D'où l'importance de s'en tenir aux pièces au cours des délibérés. Et avec un peu de métier, difficile de se laisser impressionner.
Rédigé par : Jabiru | 04 juin 2014 à 17:58
Bel exemple de la vanité de la parole dans les propos de divers élus locaux à propos de la réforme projetée, enfin, projetée, balancée dans les escaliers...
La bouche pleine d'angoisses existentielles, la ruée vers les fauteuils à pourvoir, la dénonciation de l'éloignement, la nécessité absolue d'être près des populations, le sens du devoir... à mourir de rire, d'entendre tous ces faquins défendre leur "siège", leur "pouvoir", leur "fonction".
Où voulez-vous placer la vérité là-dedans, le sens de l'autre, l'amour du travail bien fait ?
Les loups sont entrés dans les régions.
Mais nous n'avions pas envie de parler de cela, il se fait tard.
Rédigé par : genau | 04 juin 2014 à 16:23
Témoin de la défense dans un procès d'assises, nous avions face à nous un avocat de la partie civile abject. Insinuant, racoleur, usant de formules sommaires, agressif, larmoyant, sans l'ombre d'un scrupule, une vraie raclure du point de vue moral. Il a gagné.
Deux ans plus tard, un ami est confronté à de gros ennuis et me demande conseil. Je l'ai orienté vers cet avocat qui l'a sorti d'affaire. J'ai détesté le personnage, j'ai admiré le professionnel.
La parole est un outil, juste un outil. On en fait ensuite ce qu'on en veut ou peut. Je peux jouer Bach ou Duke Ellington au piano à la seule condition de savoir me servir du piano. Je peux même choisir de jouer des marches nazies ou l'Internationale selon mes convictions.
Confondre le maniement de la parole avec le contenu de ce qu'on exprime est une sottise. Quelle tristesse d'entendre un imbécile s'exprimer avec assurance. Quel dommage de perdre les lumières d'un homme intelligent qui s'exprime comme un sabot.
Quoi qu'on pense, on ne pense rien si l'on n'apprend pas à l'exprimer.
Rédigé par : Jean-Dominique Reffait | 04 juin 2014 à 14:50
Monsieur Bilger, je ne vois pas bien où vous voulez en venir. Je comprends qu'il n'y pas d'inconvénient à user de la parole soi-même alors qu'on cherche par ailleurs à enseigner à autrui comment en user au mieux. Ça va de soi. Pour enseigner les praticiens complètent utilement ces théoriciens que sont souvent ceux qui ne sont qu'enseignants.
Et alors ?...
Ce qui me déçoit un peu c'est qu'il n'est question dans votre billet ni de sens, ni de vérité (de recherche de la vérité). La parole ne serait-elle qu'un outil ?
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 04 juin 2014 à 13:50
Il y a tout de même, pour être honnête, entre la parole politique et la politique de la parole que je propose un dénominateur commun fondamental qui a trait, dans les deux situations, à l'absolue nécessité des vertus de liberté, de sincérité, de spontanéité, d'improvisation et de cette faculté irremplaçable, au sujet de n'importe quelle problématique, de la capacité de savoir penser contre soi.
C'est faire l'impasse sur le détournement de la parole et du langage à des fins révolutionnaires : la parole est utilisée comme une arme dont les munitions sont l'altération du sens des mots, pouvant parfois aller jusqu'à l'inversion totale de sens.
Cette technique de manipulation mise au point par les marxistes-léninistes et que nous serions en droit de croire abandonnée ou réservée aux régimes totalitaires pratiquant le « lavage de cerveau » est hélas encore employée chez nous dans les médias (par exemple avec l'expression « sans-papiers », jouant sur l'émotion liée à la privation d'un bien, pour désigner ce qui correspond en pratique prosaïquement à des délinquants) ou bien par une certaine tendance politique à l'occasion de la promulgation d'une certaine loi (le sens du terme mariage ayant été carrément inversé).
George Orwell a bien illustré ce procédé dans son roman « 1984 ».
Bien entendu, les naïfs non au fait de ces méthodes se laisseront prendre au piège de tels discours destinés à faire passer les pires mensonges ou les pires absurdités sous une apparence de cohérence et de vérité afin de « faire prendre des vessies pour des lanternes ».
Quand César s'exprimait, souvent de façon concise et précise, tout le monde savait exactement ce qu'il voulait dire, et deux mille ans plus tard c'est toujours le cas.
Mais pouvons-nous être certains que le sens des mots actuellement utilisés corresponde encore à celui du français classique remontant à quelques dizaines d'années et que tout le monde comprenne la même chose ?
Rédigé par : Parigoth | 04 juin 2014 à 12:41
@Tipaza
Bien vu et comme à l'Assemblée lors de certaines séances agitées, "Du grand théâtre ce soir" !
Rédigé par : Jabiru | 04 juin 2014 à 09:04
Parole politique, politique de la parole ?
J’aurai donc attendu toute la journée sans que personne ne se dévoue pour aborder la vérité sur la parole politique. Une vérité qui est le mensonge tout simplement.
Qui accorde la moindre confiance à la parole politique, et je ne parle pas de la politique de la parole !!
Voici un extrait du dialogue entre les personnages du film César de Marcel Pagnol, qui s’y connaissait en mensonge politique, et qui l’a démontré avec sa pièce Topaze.
Vous pourrez sans risque de vous tromper remplacer Escartefigue par un quelconque de nos brillants politiques de droite et de gauche.
J’avoue que j’aurais eu une certaine admiration pour Cahuzac, s’il avait tenu ces propos à l’Assemblée.
César : – Sais-tu ce que c’est que de mentir ? As-tu entendu parler du mensonge ?
Escartefigue : – Ah là César tu vas un peu loin. A moi il demande si j’ai entendu parler du mensonge, à moi qui le connais par cœur et qui le pratique depuis mon enfance… Mais j’ai menti à ma nourrice, à ma mère, à mon père, à mes frères, j’ai menti à mon quartier-maître, j’ai menti à ma femme, j’ai menti à mes amis…
Les amis : – Aaahhh !!!
Escartefigue : – Ouaiye aouiye ouaiye ! J’ai menti à tous. Et en ce moment même peut-être que je vous mens. Et il vient me dire en pleine figure que je ne connais pas le mensonge !
M. Brun : – Après cet aveu qui est peut-être un nouveau mensonge, il me paraît difficile de mettre en cause sa qualité de menteur.
Fin de citation.
Bien que sans aveu, nous pouvons admettre cette qualité de menteur pour beaucoup, et disons-le, tous les politiques.
Un mensonge qui peut prendre mille et une formes, la plus fréquente et la plus pernicieuse est la silencieuse. Le mensonge sans paroles, par omission ou par oubli !!
Et ces menteurs si particuliers n’ont pas besoin de cours particuliers, ils ont la science infuse.
Rédigé par : Tipaza | 03 juin 2014 à 23:01
@ Alex paulista
Vous avez raison, c'est une autre forme de prise au collet. J'ai connu aussi la rupture tonitruante, convenue, après un arrangement négocié en secret et applicable à terme, sans autre consultation.
De toutes façons, en de pareilles occurrences, l'essentiel est de faire tourner la machine, c'est du pragmatisme qui tient à la bonne connaissance de la psychologie de l'adversaire, hélas, aisément prévisible, dans le cas des cocos.
Il faut bien convenir qu'on est loin de la parole éthique de notre cher M.Bilger.
Rédigé par : genau | 03 juin 2014 à 22:38
Serge Portelli, président de chambre de la cour d'appel de Versailles, que M. Bilger doit connaître, n'a honte de rien.
Ce soir sur i-Télé, il ose dire au sujet du projet de réforme Taubira sur les peines de prison que "la prison est décevante POUR LES VICTIMES parce qu'elle est inefficace..." pour les condamnés !!
Ce serait risible si on ne parlait pas de victimes justement et donc de souffrances endurées.
Comment peut-on être un magistrat digne de ce nom avec une mentalité pareille !
Comment ce guignol peut-il rester en fonction avec de tels propos !
Et après, ils vont s'étonner que le peuple ait une mauvaise opinion de la justice française...
Rédigé par : Wil | 03 juin 2014 à 21:57
Bonjour Philippe Bilger,
« En effet la parole, pour bien surgir de soi, doit avoir été cultivée avec délicatesse dans le dialogue intime entre le silence et son contraire, entre l'être qui en a peur et celui qui y aspire. Dans cette retraite se préparent les apothéoses qui, proférées, étonnent autant qu'elles fascinent. »
La parole n’a de sens que dans l’argumentation qu'elle contient, bien plus que dans son élégance.
Tout comme l’argumentation n'a de consistance que si elle est suivie d’actes.
Les Français sont repus de belles paroles qui ne débouchent sur rien. C’est sans doute la raison pour laquelle ils n’ont plus confiance dans la classe politique. Il suffit pour s'en convaincre de regarder les sondages à ce sujet.
Cela fait au moins dix ans que les citoyens sont menés en bateau par des bateleurs de foire qui n'écrivent même pas leurs discours, préférant laisser cette tâche subalterne à une "plume" plus talentueuse que la leur.
De Gaulle écrivait lui-même ses discours, le plus souvent dans son bureau de la Boisserie. Il les prononçait sans la moindre note, dans un français impeccable. Et généralement il mettait en application ce qu’il disait.
Désormais chaque responsable politique a son conseiller en communication et tous les discours utilisent les mêmes éléments de langage mille fois recyclés.
Il n'y a plus de grands orateurs.
Rédigé par : Achille | 03 juin 2014 à 21:54
Si je peux vous demander quelque chose : ne devenez pas journaliste, restez le magistrat honoraire que vous êtes et qui vient de temps en temps à la télé.
On ne se refait pas et votre façon de vous exprimer contient encore les échos des prétoires et c'est tant mieux car c'est au service de votre raisonnement et de votre démonstration.
Les journalistes professionnels ne savent plus argumenter ; ils ne sont tissés que de ficelles du métier et leur ambition n'est plus le débat, la connaissance mais le scoop, le clash, en vérité rien d'intéressant.
Vous dites que vous refusez des invitations ; vous avez raison. Les grands acteurs le font aussi.
Le piège dans tout cela est de trop parler et de parler de tout. Car à la télé, on voit toujours les mêmes et c'est vite pénible. A contrario, certaines personnalités de valeur ne sont jamais conviées.
Enfin, il y a des émissions où tout le monde se coupe la parole, parle en même temps ou s'invective : à fuir absolument.
Nous attendons des débats intéressants où parlent des gens compétents, courtois, bien habillés et bien élevés, où toutes les idées peuvent être développées sans procès à la clef, où l'animateur et les spots de pub ou flashs info ne découpent pas à la hache le débat sans arrêt.
Rédigé par : Ribus | 03 juin 2014 à 20:52
genau | 03 juin 2014 à 16:40
Avec la CGT, d'après un patron que je connais bien, la meilleure façon est de céder à leurs revendications en échange d'aménagements qu'ils sont de nature à accepter oralement, puis les inviter à signer l'accord. Là, gênés, ils refusent systématiquement de signer, car c'est un principe de leur hiérarchie.
Il suffit ensuite de publier au tableau d'affichage tous les avantages que vous n'accorderez pas parce que le syndicat représentatif a refusé de signer l'accord.
En général, au bout de plusieurs fois, ça porte ses fruits...
Rédigé par : Alex paulista | 03 juin 2014 à 18:28
"J'attends seulement les conscients de leur imperfection".
J'ai tellement d'imperfections orales que je me garde, sauf nécessité, de prise de parole publique. Car la parole, ce n'est pas seulement l'idée et le texte que l'on dit, c'est aussi et d'abord la voix.
Certains peuvent aimer écouter leur voix, moi pas : timbre, débit ne me sont guère agréables et le seront forcément aussi peu pour mon auditoire. Donc, sauf nécessité, je n'irai pas imposer mon discours à un auditoire, sauf exigence professionnelle.
A mon âge, on n'est plus prêt à réellement changer en ce domaine et donc je ne serai jamais votre élève...
Enfin, la parole, donc l'art oratoire, c'est aussi le respect de la langue, notamment du sens précis des mots, des règles de syntaxe et de grammaire pour exprimer sa pensée avec la rigueur indispensable que notre langue permet tout spécialement.
Or, notre société, qui est celle de la parole étalée sans cesse, est aussi celle du massacre généralisé du français. Et cet à-peu-près langagier est pour moi associé à celui de l'approximation des idées. Triste constat en vérité et là, Monsieur Bilger, c'est presque toute la corporation des médiacrates (politiciens comme journalistes) qu'ils vous faudrait rééduquer ! Vaste programme aurait dit le général de Gaulle...
Rédigé par : Robert | 03 juin 2014 à 17:13
Il faut faire une place à part à la parole politique qui peut emprunter toutes les voies d'expression, de l'éructation permanente à la mellifluence (?). L'important est que le politique est forcément en décalage avec lui-même puisqu'il est là pour être le représentant de ce qui se fait de mieux en matière de voie de progrès. Il a donc le devoir de critiquer ce qui le précède et d'anticiper le futur tout en sachant que ses promesses et prédictions ne sont que le fruit de son autosatisfaction.
Il y a des boulevards pour l'inutile : la vieillesse heureuse, la croissance, l'égalité, la réduction de son contraire, la solidarité, toutes ces nuées qui permettent sans doute de faire progresser le confort général mais très souvent, au détriment du bon sens ou dans la programmation d'une ruine inéluctable du système.
Or, le politique s'exerce au quotidien tandis que ses effets sont à terme éloigné ou sont, à terme, éloignés.
La politique de la parole devient alors un moyen de faire des rapprochements entre son effet immédiat et la longue vue de ses effets.
Abuser de figures de style ou exagérer la longueur des propos ou les cadenasser par une érudition de fiches de lecture a un effet immédiat, admiratif, ennuyeux, lassant, exaltant, et à terme, permet de cacher une volonté dans un flot de prose pour, plus tard, accomplir ce qu'on avait soigneusement enrobé de glaise, pour ne pas risquer de se voir reprocher la fourberie.
Enfin, il y a la perversion de la parole, expression d'un blocage de l'esprit. C'était souvent le cas dans les réunions d'entreprise avec les syndicats, surtout la CGT ; formés à Maisons-Alfort, parlant lentement, à la Paul Laurent, les délégataires répétaient ad nauseam la même phrase, avec de plus en plus de virulence, ne cherchant que la rupture sous le prétexte qu'on ne les écoutait pas ce qui était leur moyen de se dédouaner auprès des camarades pour expliquer l'échec de leurs propositions et déclencher une grève contre les patrons renégats ou autre sucrerie.
Ce moyen a marché pendant quarante ans, marche encore aujourd'hui avec les tenants de l'Islam qui répètent en boucle une phrase tirée d'un enseignement religieux.
Et puis, il y a, bien sûr, le marais des plagiaires, équipés d'une giberne de mots à la mode, au service de l'immédiat bien-pensant, ou du maintien en tutelle des populations peu curieuses. Tout excès y est le bienvenu, du geste à la parole.
Il n' y a guère de place pour les qualités d'authenticité que vous invoquez. Cela est réservé aux "entretiens", pas à la parole de la politique, tumeur invasive.
Rédigé par : genau | 03 juin 2014 à 16:40
Quelle est la différence entre un baratineur ignare et un lettré taiseux ?
En politique, comme dans bien d'autres domaines, c'est le ventilateur qui l'emporte sur le sachant et le compétent.
Ca marche un temps mais ça ne dure pas, encore que !
Rédigé par : Jabiru | 03 juin 2014 à 15:12
L'art oratoire j'en connais un rayon, on m'a brûlé pour cela à Florence en 1498.
Le drame absolu ce sont les "dîners en ville", les hôtes s'acharnent à vouloir composer des tables de convives divers et variés, c'est la mode Canal+, résultat : on n'entend que les cons qui ont tous une opinion et ne se lassent pas de nous abreuver de leurs "vu à la télé", et ce jusqu'au dessert. Ma vie sociale m'oblige à dîner avec des Antoine de Caunes toutes les semaines. Et Dieu sait si la France est peuplée d'Antoine de Caunes ! "Je ris, tu ris, il rit, nous rions, vous riez, ils rient = Canal +..."
Il fut un temps où le con était en bout de table et se taisait. Il avait là l'occasion de s'instruire en écoutant les autres. Mais patatras, voilà qu'il n'y en a que pour lui de nos jours, c'est lui la modernité, c'est lui l'avant-garde et pour peu qu'il ait fait un trimestre au Collège Henri IV alors c'est l'enfer...
Rédigé par : Savonarole | 03 juin 2014 à 14:09
«Ma chance est ma susceptibilité : par exemple, depuis une prestation infinitésimale au Grand Journal à cause d'un Antoine de Caunes désinvolte et superficiel, je réponds négativement aux invitations qui me sont adressées. »
Monsieur le magistrat honoraire, vous n'êtes plus parmi vos pairs. Il vous faut être raccord avec chaque public. La prochaine fois que vous irez voir Antoine de Caunes, mettez donc un kilt. Tout est là, dans les plis du réel. Voyez aussi comment s'y prennent le soleil et la lune à eux deux tout seuls dans leur grand bureau étoilé et prenez-en de la graine...
Ainsi voici la nouvelle version de Quelle heure est-il, Madame Persil?, D Schtund, autrement dit D'Stonn.
Quelle heure as-tu,
Madame Tutu ?
L'heure du verseau,
Madame des Sceaux
En êtes-vous sûre,
Madame Saturne ?
Assurément,
Madame Brillant.
Suite à la PMA du Yut qui a donné naissance à divers jeux de plateau, ou alors à celle du très populaire jeu de comptoir qu'on appelle 421 = 14 risques de discorde modèle Nancy-Metz. Ex. «Je ne peux accepter que Strasbourg, avec son statut européen appartienne à une région dont elle ne serait pas la capitale » déclare Roland Ries qui imagine une éventuelle position de repli avec ouverture sur le Bade-Wurtemberg !
un bouquet de persil dans les oreilles !! Argumenter en disant que l'Allemagne pays de 80 millions d'habitants et 96 députés européens n'a que 16 régions, c'est ignorer que le Land n'est pas une région mais un Etat fédéré dont l'origine remonte à l'occupation soviétique qui les concevaient comme des unités administratives d'un État centralisé, pour commencer, le sien. Autrement dit un coup de force
résultant d'une partition arbitraire entre les alliés!
---------------- A-t-on demandé leur avis aux géographes, aux sociologues, aux linguistes, aux historiens, aux Bohnensack ? Que nenni. On s'est joué sa petite partition tout tranquillement entre Votairien et silla Sacco :
Rédigé par : Catherine JACOB | 03 juin 2014 à 13:47
depuis une prestation infinitésimale (..), je réponds négativement
Vous devriez le faire plus souvent. Je vous ai vu chez Ardisson, par exemple, avoir seulement le temps d'esquisser une phrase acerbe contre la politique de Taubira, mais sans développer plus que ce qui pouvait paraître de l'acidité gratuite.
Votre image en sortait dégradée.
Il est évident que les animateurs de talk-shows comme Le Grand Journal estiment qu'ils font une grande faveur d'accorder quelques secondes de lumière à un invité qui a une idée ou une promo à faire passer. Ils ne ressentent pas le devoir moral de lui laisser en placer une: l'invité est un mendiant.
Laurent Ruquier, que vous critiquez beaucoup, laisse au moins un peu plus ses invités s'exprimer. Certes il y a parfois à craindre un traquenard, mais vous avez les armes pour vous défendre.
Taddéï a le format le plus ouvert. Le problème est qu'il invite souvent les mêmes personnes.
Rédigé par : Alex paulista | 03 juin 2014 à 13:01
Apprendre à maîtriser l’art oratoire et ses techniques ne me semble pas incompatible avec l’expression publique de convictions sincères. Un mauvais orateur, pourtant sincère, mais sans technique et bredouillant, ne convaincra personne. Un orateur habile, mais sans convictions, maniera la langue de bois. Un excellent orateur, lui, mettra la technique au service de ses réflexions, ses convictions, alliant ainsi le fond et la forme.
Ceci me fait songer à tout ce qui sépare Michel Onfray de Jean-Luc Mélenchon. Le premier est un philosophe rigoureux, doté d’un talent naturel (et aussi d’une longue expérience de l’enseignement) pour exprimer clairement et calmement le fruit de ses réflexions. Le second est un tribun politique affligé d’une mémoire de poisson rouge (voir ses positions sur Maastricht) et doublé d’un comédien qui surjoue ses émotions et qui cherche davantage à persuader (ou à briller) qu’à convaincre.
Le style d’Alain Finkielkraut est, quant à lui, singulier et touchant. J’ai l’impression qu’il cherche toujours les mots justes pour exprimer au mieux ses idées et qu’il a constamment besoin de se rassurer en transportant toujours avec lui une lourde sacoche remplie de livres, comme on peut le constater dans cette vidéo.
http://www.agoravox.tv/actualites/europe/article/zemmour-naulleau-onfray-et-45475
Rédigé par : moncreiffe | 03 juin 2014 à 12:28
toujours, partout, la parole même la plus dérisoire, sortie de l'utilitarisme concret, ne pourra jamais faire l'économie de soi, l'impasse sur soi
Mais la parole, la plus ciselée fût-elle, n'est qu'un outil, un vecteur, elle n'est que la servante de la pensée.
« Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement ».
Rédigé par : Parigoth | 03 juin 2014 à 12:04
La parole, voilà bien de quoi il s’agit !
Il faut reconnaître que pour celui qui a l’heur de maîtriser le verbe, c’est une joie puérile mais sans mélange d’en jouir autant que possible !
Il n’est pas tant question d’en faire un usage mesuré, contrôlé, intelligent et utile aux autres, puisqu’il faut convaincre, persuader et plaire, mais que cet usage ait un sens !
Si certains succombent au charme de cette arme à la disposition de chacun, mais dont l’usage subtil n’est connu que de peu, d’autres ne sont pas dupes des ficelles qui sont utilisées. En effet, la parole n’est pas un don c’est un outil, que les médias d’aujourd’hui ont bruyamment utilisé, mais il se trouve que c’est un outil à la fois tranchant, contondant et explosif…
Mise en images, la parole devient autre chose, il s’y ajoute non pas la gestuelle, qui elle est une partie du tout, mais la mise en scène, et personne n’échappe à la mise en scène, pas même celui qui le croit sincèrement.
Dans chaque homme sommeille un troll à moustache qui rêve de plier les autres trolls à ses fantaisies et élucubrations, s’imaginant volontiers irrésistible !
La parole c’est le chant des sirènes et il nous faut rechercher celle qui a mûri sous l’immense front d’un homme libre que le silence n’effraie pas !
Rédigé par : duvent | 03 juin 2014 à 10:09
La parole dès lors qu’elle est publique, politique ou pas, passe par plusieurs niveaux.
Le premier, le plus évident, mais pas toujours le plus maîtrisé, est celui de la maturation. Avant de dire, il faut savoir ce que l’on a à dire, ça a l’air d’une naïveté, mais c’est le genre de naïveté que les hommes politiques, Hollande en particulier, oublient. Son intervention à la télé après les élections européennes est la démonstration parfaite d’une « aréflexion » (*).
Il faut ensuite savoir comment le dire en fonction de l’auditoire. Il ne suffit pas de porter une vérité, encore faut-il qu’elle soit comprise, puis éventuellement admise par les autres.
Enfin, il faut faire un choix.
Est-ce que l’on énonce une vérité, sa vérité, en laissant l’auditoire libre de l’accepter ou pas en fonction des arguments développés. C’est la méthode scientifique, qui considère que la vérité vient à bout de l’erreur, seule, mais avec l’aide du temps et de la réflexion.
Ou bien faut-il énoncer sa vérité, avec l’esprit du missionnaire qui cherche à convaincre à tout prix, et parfois à toutes forces ? Le genre de vérité qui finit par se diluer dans l’espace des lieux communs usagés avec le temps, mais qui peut faire des dégâts au départ.
L’essentiel reste quand même le travail de maturation.
Si le travail de maturation a été bien fait, alors il en est de la parole comme des plantes dans le désert après une pluie bienfaisante. Elle s’épanouit dans toute sa splendeur, lors de l’exposé, et on peut parler sereinement dans le désert des cerveaux inattentifs.
Sans se faire trop d’illusions tout de même, un message bien transmis n’est pas nécessairement un message bien perçu.
Il y a ce qu’on dit,
Ce qu’on voulait dire,
Ce que l’autre entend,
Ce qu’il comprend.
Et pourtant
Il suffit de s’entendre,
Tendrement,
Et tout est dit… (Mais c’est un autre sujet)
Enfin ce que j’en dis.
(*) On peut même inventer des mots, mais point trop n’en faut.
Rédigé par : Tipaza | 03 juin 2014 à 10:09
Pourquoi ne pas parler de rhétorique et nous entraîner vers les joies de la puissance argumentative comme élément essentiel de la charité pour peu qu'elle soit de "bonne foi" stricto sensu ?
Le problème que vous semblez confusément soulever n'est-il pas celui de la présence de l'être au sens de l'aiôn ?
Par ailleurs, l'art du discours n'est pas celui du débat au sens de disputatio.
Ici, la souveraine présence d'esprit relève du savoir être infiniment là, seulement dans le présent, dégagé de l'existence, et de s'abandonner aux éons ou aux anges, autrement dit aux inspirations divines dont l'écoute relève d'un long apprentissage.
Dans l'esprit du XIIe siècle - du temps où les hommes étaient des abrutis selon les esprits à la mode...
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 03 juin 2014 à 10:00
...à cause d'un Antoine de Caunes désinvolte et superficiel,...
Monsieur Bilger,
Définir ainsi l'attitude et le caractère de ce valet de la bien-pensance, est faire preuve de beaucoup d'indulgence et... de retenue !
Rédigé par : Mirella | 03 juin 2014 à 09:58