On attendait un grand livre sur François Mitterrand et on l'a enfin avec celui que vient de publier Michel Winock : "François Mitterrand".
Depuis qu'il nous a quittés avec ses dernières années admirables de courage à la fois intellectuel et physique, je ne cesse pas de me demander pourquoi, au-delà du président discuté, voire détesté par certains, il demeure de lui, cependant, une trace forte, ineffaçable dans beaucoup de têtes et de mémoires.
Chacun, je n'en doute pas, a sa vision de François Mitterrand, "son" Mitterrand en quelque sorte. C'est la puissance d'existence de ces rares personnalités de ne jamais susciter la moindre indifférence - l'inverse serait le pire des désaveux - et de permettre à chaque citoyen passionné par la chose publique de considérer la vie si profonde, riche et contrastée de François Mitterrand sous l'angle qui lui semblera le meilleur. Soit pour dénoncer ses ombres soit pour célébrer ses lumières. Soit, plus vraisemblablement, pour mêler, dans son appréciation, les unes aux autres.
Pour moi, avant d'en arriver à deux courts passages auxquels je voudrais faire un sort dans l'ouvrage de Winock, puis-je souligner que le sentiment que j'éprouvais durant son existence politique au sens large et, par comparaison, celui qui m'habite encore davantage depuis sa disparition est fait de la conscience de sa supérieure singularité, de son irremplaçable culture et d'une histoire faisant se rejoindre, avec beaucoup plus de cohérence qu'on ne l'a dit, les sources et le crépuscule, les intuitions, les fulgurances de la jeunesse et la sagesse parfois cynique, en tout cas subtile et pénétrante, de la maturité puis de la vieillesse.
Quand, sur le mode de la boutade, j'affirme que j'ai beaucoup aimé le Mitterrand réélu en 1988 qui a su affronter, sans rien céder, les épreuves et les procès rétrospectifs et médiatiques, parce qu'il était redevenu un homme de droite, mais avec allure, il ne me semble pas que j'ai tort.
Cet être d'exception a sans doute amplifié ce trait chez moi - une faiblesse et un atout - d'être invinciblement attiré, bien au-delà des structures et des apparences officielles, aussi blâmables qu'elles aient pu être, par le caractère, l'intime, la psychologie - toute cette part dans laquelle le partisan plonge mais qui le dépasse. François Mitterrand, un homme que le président n'a jamais étouffé, un amoureux de la France réelle, une majesté qui lui était reconnue non pas à cause de l'exercice de la fonction suprême mais grâce à ce qui, en lui, suscitait l'admiration et, malgré tout, le respect. Il est évident que des présidents comme Nicolas Sarkozy et François Hollande - en dépit du mimétisme maladroit tenté par ce dernier - n'ont pu qu'amplifier cette impression d'un humanisme authentique, d'un langage royal, d'une autorité indiscutée en allés.
Depuis que François Mitterrand, qui croyait aux forces de l'esprit, fait silence dans le cimetière de Jarnac.
François Mitterrand, avant de bénéficier de la Constitution de 1958 voulue par Charles de Gaulle, qu'il avait jugée dangereuse avant qu'elle le serve, n'a jamais été un complaisant du gaullisme. Ses rencontres avec le Général, durant cette période de 1943 à 1946 où Mitterrand avait déserté ses sympathies pétainistes pour devenir un authentique résistant, n'ont jamais été cordiales. Rares, elles ont opposé deux personnalités aux antipodes l'une de l'autre. De Gaulle aspirait à dominer et Mitterrand n'avait pas l'âme d'un serviteur.
Rien ne me paraît à cet égard plus éclairant que le jugement que porte François Mitterrand sur la Résistance extérieure et intérieure. Sur la première, il énonce "qu'elle était non seulement une entreprise militaire et politique de type classique mais aussi une entreprise de pouvoir..." quand la seconde lui apparaissait "au contact du peuple français, de ses souffrances, de ses aspirations, c'était le peuple de France". Ce qui me touche infiniment dans la formulation de ce clivage est qu'il n'est pas loin de définir une attitude que d'autres ont adoptée, même pour justifier une politique de présence en France et de collaboration.
Je songe en particulier au comportement de mon père, à mon sens injustement condamné, qui avait toujours refusé, parce qu'il ne se sentait coupable de rien, de partir en Suisse comme tant d'autres et qui avait légitimé son action en Alsace par l'objectif de "composer pour décomposer". Ce que Mitterrand privilégiait dans "la résistance intérieure" n'était pas étranger, sur un autre registre, à des motivations apparemment antagonistes.
François Mitterrand, à 22 ans, follement amoureux d'une jeune fille qui allait devenir la célèbre présentatrice de télévision Catherine Langeais, lui écrivait beaucoup de lettres, dont cet extrait magnifique : "Voyez-vous, ma chérie, mon grand tourment a toujours été l'accord si difficile de l'éphémère et de l'éternel : toujours cette vieille lutte du relatif et de l'absolu".
L'extraordinaire de cette contradiction non pas banale - beaucoup y sont insensibles - mais capitale est qu'elle exprime un ressort, une inquiétude, une tendance, une constance qui nourriraient sans cesse Mitterrand et au travers de laquelle on peut appréhender, tout au long, une pluralité d'actions et d'abstentions de sa part, pas seulement politiques.
C'est sans doute la principale clé de l'adhésion souvent paradoxale qu'on continue à avoir pour lui et de son implication décisive dans notre Histoire de France bien plus que pour la gauche.
Celle-ci, à l'évidence pour lui, était le "relatif" quand "l'absolu" était dans une manière d'être, de se tenir, de ne pas déchirer, et dans les mystères à l'égard desquels sa curiosité était infinie.
François Mitterrand n'a jamais rendu vain "le grand tourment" du jeune homme de 22 ans : il n'a cessé de le cultiver, de le questionner, de le sublimer. Cette ambiguïté qu'absurdement on lui a si souvent reprochée n'était pas trahison ni instabilité. Mais fidélité à soi et à son désir de concilier contingent et nécessaire, le siècle, le fil du temps avec l'essence des choses, des idées et des songes. Ce qui reste quand l'inutile est répudié.
L'intelligence de son ambiguïté.
@ Archibald
L’autocrate irresponsable que Mitterrand deviendrait durant ses deux présidences se peignait là déjà tout entier
Autocrate cent fois oui mais pourquoi irresponsable, Mitterrand ? Il préférait la lecture de ses livres à celle d'un programme de ronds-de-cuir qui n'avait pour but que de se servir du PC alors relativement puissant afin de lui permettre d'accéder au pouvoir. Certes cela lui a pris du temps mais le résultat a été au rendez-vous, non ? La pollution dans les pays communistes était alors un sujet il me semble peu pratiqué et le placer dans ce Programme commun eût été une maladresse vis-à-vis des encombrants camarades de la place du Colonel Fabien. On avait sans doute mis François au courant, il vous a joué la comédie, étant très doué pour ça. Certains introvertis sont de vrais virtuoses de l'alacrité sans avoir l'air d'y toucher, savez-vous, sans avoir pratiqué le moindre Conservatoire.
Ca a marché pour vous, en revanche comme Philippe le rappelle, pour Catherine Langeais, le râteau fut au rendez-vous en dépit de bien beaux efforts. Les femmes sont souvent plus intuitives, il est vrai.
Rédigé par : scoubab00 | 17 mars 2015 à 14:53
@ Lucile | 09 mars 2015 à 20:58
Oui.
Oxymoronique faisait saigner mon oreille droite.
Merci de m'avoir conconsidéré.
Rédigé par : Alex paulista | 11 mars 2015 à 18:30
@ Xavier Nebout
Si je suis votre raisonnement, les communistes qui sabotaient les armes dans les arsenaux en 39 / 40 n’étaient pas des traîtres car ils pensaient bien faire au regard de leurs convictions !
Quant à la division SS Charlemagne, une petite brigade à son apogée, ils furent des combattants courageux et effectivement les derniers à défendre Berlin. Si la Charlemagne en tant que tel ne commit a priori aucun crime de guerre ou exactions, il n’empêche qu’une partie de ses membres en avaient commis avant au sein de la LVF ou de la Milice.
Je vous ferai remarquer que les Alsaciens volontaires pour servir dans l’armée allemande furent en nombre extrêmement réduit. La très grande majorité fut enrôlée de force, les "Malgré nous", et votre Maréchal, que vous déifiez, ne s’y opposa guère !
Rédigé par : Trekker | 10 mars 2015 à 15:15
@Trekker
Dans tout cela, on peut dire que n'étaient pas des traîtres ceux qui pensaient bien faire.
Concernant la LVF, les rescapés de la division Charlemagne ont été parmi les derniers à se battre à Berlin.
J'irai même plus loin concernant les Alsaciens.
On voit mal pourquoi le fils d'un habitant de Mulhouse devenu français malgré lui en 1798 se serait senti plus français qu'allemand entre 1870 et 1918, et pourquoi son petit-fils ne se serait pas senti plus allemand que français en 1940.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 10 mars 2015 à 11:58
Le Monde du 22.05.2014, Ariane Chemin et Raphaëlle Bacqué brossent un tableau à coups de petits traits qui en disent long sur le personnage et ses rapports à la presse.
Le jour où... Mitterrand suspendit son abonnement. Titre de l'article.
On pourrait citer un passage : "Avec Edwy Plenel, c'est pire : il le déteste. "Vous êtes toujours avec le moustachu ?", demande t-il, réprobateur, à Laure Adler."
Instructif passage aussi sur le livre de Pierre Péan "Une jeunesse française", tout est dans le "Une subtilité qui échappe aux jeunes générations..."
Sans doute, mais parfois les liens s'emmêlent et la clarté toujours un peu confuse.
Rédigé par : Giuseppe | 09 mars 2015 à 21:32
Alex paulista,
Oxymorique, oxymorique. Feeling better ?
Rédigé par : Lucile | 09 mars 2015 à 20:58
@Laurent Dingli | 09 mars 2015 à 17:57
Exact.
J'ai encore du courrier de la famille par alliance avec l'adresse de l'expéditeur ainsi libellée :
A.LXXXXXXX
Lagër II Buchenwald West
G.J.F équipe 20
Auschwitz 0/5
Deutschland
Cela pouvait porter à confusion. De là que certains se soient déclarés déportés...
A ce titre j'ai eu un ami agriculteur maintenant disparu qui était au titre du STO à Auschwitz. Ayant enfreint les règles du camp à plusieurs reprises, il fut convoqué par la Gestapo et dut son salut à l'intervention d'un officier allemand parlant français pour ne pas être effectivement déporté.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 09 mars 2015 à 18:57
Beaucoup ici jugent l'être au lieu de ne juger que la personne, c'est-à-dire les apparences de l'être, ou les actes qui en constituent l'existence.
Qu'untel ait eu les apparences d'un individu sans scrupules au cours de tout ou partie de sa vie est une chose. Ce qu'il était ne se juge qu'en ayant eu accès à sa conscience, ses regrets, son repentir, en somme en se substituant à ce vers quoi il a tourné son esprit en son dernier instant, c'est-à-dire Dieu.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 09 mars 2015 à 18:30
@ Catherine JACOB
Je doute que beaucoup des personnes requises au titre du STO (...) aient jamais confondu cette situation avec la déportation dans les camps
C'est parce que vous n'êtes pas historienne, chère amie, et que vous n'avez donc pas lu les centaines de témoignages qui existent sur le sujet. Pardonnez-moi pour l'argument d'autorité, mais je ne peux pas publier ici toute la littérature qui existe sur le sujet (et n'en ai d'ailleurs ni le temps ni l'envie).
Je n'ai pas dit que les requis se prenaient pour des rescapés des camps de concentration, mais qu'ils utilisèrent, dès la Libération, le terme de manière impropre.
Bien à vous
Rédigé par : Laurent Dingli | 09 mars 2015 à 17:57
@ Xavier Nebout
Autant je suis d’accord avec vous sur les combines du BTP et de la Françafrique des gaullistes (époque 1960 / 70) et en partie sur votre appréciation concernant le dépôt de gerbe sur la tombe du Maréchal par Mitterrand - hommage au grand chef militaire de 1917 / 18 ? au chef d’Etat contestable de Vichy ? mépris pour la pègre intellectuelle qui le suivait ? probablement les trois… - autant je suis totalement en désaccord sur la manière de gagner son élection en 1981.
Il la doit principalement à Chirac (entre autre ce déjeuner en tête-à-tête quelques mois avant les élections présidentielles). Quant à la crapulerie des diamants sur VGE, elle fut initiée et organisée par ce prix de vertu de Charles Pasqua : des affichettes représentant des diamants furent distribués à tous les colleurs d’affiches du RPR, avec ordre de les coller sur les yeux de VGE sur ses affiches. Les médias dont en premier le Canard enchaîné reprirent ce ragot, car il leur était rapporté par quelques officiers supérieurs présents à Bangui lors du renversement de Bokassa. Mais ces quelques officiers faisaient partie de longue date des réseaux Foccart, ce dont il se gardaient bien de faire étalage !
Je suis en total désaccord et cela ne vous surprendra pas, avec votre distinguo : soutenir et pire participer à la lutte contre les résistants entre 1940 / 44 n’étaient que des “erreurs de jugement“, et les sabotages des communistes entre 1939 et avril 1940 étaient des actes de trahison. Désolé mais tous ces faits sont bel et bien des trahisons au profit de l’ennemi.
Les communistes, qui furent au plus quelques centaines à participer à ces sabotages - le PCF avait perdu plus des trois quarts de ses militants après le pacte germano-soviétique - furent incontestablement des traîtres. Près d’une dizaine pris sur le fait ou convaincus d’y avoir participé furent d’ailleurs fusillés rapidement à l’instigation du gouvernement (socialiste et radical-socialiste).
Quant aux collaborateurs français, Franc-gardes de la milice de Darnand, milices Bezen Perrot et nord-africaine, auxiliaires de la Gestapo, bande à Bonny et Lafont, policiers se mettant volontairement et avec zèle au service de l’occupant, ils n’étaient que des traîtres au service de ce dernier. Même la LVF est pour le moins pas très claire : après son échec face à Moscou le commandement allemand conscient de sa médiocrité la ramena à l’arrière pour faire de la lutte anti-partisans. Là elle y appliqua souvent les méthodes allemandes : exécution de civils, villages brûlés, etc.
Là où on peut parler d’erreur de jugement, fréquente entre 1940 et 1942, c’est pour les nombreux politiques nationaux et locaux, des hauts fonctionnaires aux subalternes, tous ces gens qui crurent de bonne foi que soutenir le régime de Vichy était la solution qui éviterait de plus grands malheurs à la France. Après 1942 (envahissement de la zone libre), une grande part prit ses distances avec Vichy, les plus lucides ou / et opportunistes (ex : Mitterrand). La minorité qui reste alors à son poste relève de trois catégories : les déificateurs du régime par aveuglement ou idéologie, ceux persuadés qu’ils limiteront tant que faire se peut la casse (ex : le père de Jospin), ceux qui le font sur ordre de Londres ou de la résistance intérieure (ex : cadres de la préfectorale, commissaires, etc.). Mais pour ces derniers c’était de la résistance à haut risque et non une erreur de jugement.
Rédigé par : Trekker | 09 mars 2015 à 17:46
Mitterrand n'était pas intelligent il était juste instruit (ne pas confondre intelligence et instruction SVP !).
Mitterrand n'était pas ambigu il était juste fuyant, confus, trouble, équivoque, en résumé : flou. Et comme disait la Martine "quand c'est flou c'est qu'y a un loup".
Des loups y en a eu plein durant son règne de quatorze ans dans NOS palais, dont ceux de Bérégovoy et de Grossouvre.
Rédigé par : breizmabro | 09 mars 2015 à 17:34
"L'intelligence de l'ambiguïté, c'est l'obscure clarté qui tombe des étoiles, une formule oxymoronique pour entretenir la légende."
Rédigé par : Lucile | 09 mars 2015 à 09:39
Oxymoronique, oxymoronique... Nouveau mot qui résonne étrangement aux oreilles de tout anglophone. Valérie qu'en pensez-vous ?
Sur les années Mitterrand : comment ne pas ressentir une nostalgie. C'est le temps pour moi de l'éclosion de toutes les bonnes choses.
Mais non, je me refuse à penser que le sommet de l'intelligence serait cette intelligence de l'ambiguïté. Jouer avec l'ambiguïté c'est utiliser la non-intelligence des autres. C'est un talent chafouin qui sert lors des négociations, cela requiert une intelligence émotionnelle pour comprendre ce que l'autre a envie d'entendre, mais sans une vision et des convictions profondes, cela ne mène à rien.
Ce sont d'ailleurs les quelques visions sur l'Europe, la peine de mort, la libéralisation de la parole (sauf sur sa fille...) qui sauvent Mitterrand devant l'histoire. Ces visions qui semblent manquer à François Hollande.
Mais s'il ne se met pas au service d'un projet, ce talent du flou artistique est un jeu qui abaisse tout le monde.
Nicolas Sarkozy, lui, n'est pas doué pour la nuance. On a les qualités de ses défauts, au moins peut-on lui reconnaître celle-ci : il change de version comme il change d’audience, mais ce qu'il dit à chacun ne souffre pas d'ambiguïté...
Rédigé par : Alex paulista | 09 mars 2015 à 16:05
@ François | 08 mars 2015 à 17:03
J'approuve votre commentaire.
On peut être intelligent et pourri de vices (un secrétaire florentin en a fait un essai célèbre - le Roi, l'Archiduc ou quelque chose comme cela). Ce fut le cas de François Mitterrand.
Il m'est impossible de ne pas le voir tout en noir.
Ce n'est pas un hasard s'il est devenu le chef cynique d'une gauche qui, ayant en permanence à la bouche une moraline à deux sous, pense qu'au fond, la seule morale, c'est de prendre le pouvoir par n'importe quel moyen, puisqu'elle est intrinséquement le Bien.
Rédigé par : Franck Boizard | 09 mars 2015 à 13:25
Il est vrai que mon commentaire faisait quelque peu dans la provoc', sans doute hors sujet. Mais on a eu tellement les oreilles rebattues avec son cynisme, son secret personnage, sa Francisque, ses relations troubles ou troublées qu'il me semblait nécessaire d'interpeller sur son action de Président.
Je vais me procurer le livre de Winock, afin de jauger de son angle de vue. Tant de choses ont pu être écrites sur F. Mitterrand que l'on a l'impression à chaque fois de redites, et ne considérer que cela, alors qu' il a parcouru quatorze années de pouvoir, avec des décisions fortes dont on ne parle que trop superficiellement.
Cordialement.
Rédigé par : Giuseppe | 09 mars 2015 à 13:10
L'auteur du "Coup d'Etat permanent" est assurément l'un des personnages les plus ambigus, mais tout aussi cynique que la plupart de ses pairs.
Je n'oublie pas l'attitude de François Mitterrand en 1965 reprochant au général de Gaulle son grand âge alors qu'il briguait son second mandat. Que croyez-vous que fit Monsieur Mitterrand en 1988, alors qu'il avait lui-même dépassé l'âge de de Gaulle en 1965 : il se porta candidat à un second mandat qu'il voulut, malgré la maladie qui le minait, terminer pour être le seul président de l'histoire de France à avoir "régné" deux septennat successifs, dépassant de trois ans le Général. Mesquinerie de l’âge ?
Analyse qui diffère de la vôtre : "Quand, sur le mode de la boutade, j'affirme que j'ai beaucoup aimé le Mitterrand réélu en 1988 qui a su affronter, sans rien céder, les épreuves et les procès rétrospectifs et médiatiques, parce qu'il était redevenu un homme de droite, mais avec allure, il ne me semble pas que j'ai tort".
Là je suis en total désaccord avec vous, Monsieur Bilger.
Rédigé par : Robert | 09 mars 2015 à 12:48
@Laurent Dingli | 09 mars 2015 à 10:27
"Voyez-vous, cela me fait songer au terme de "déporté". Beaucoup de personnes, qui ont été requises au titre du STO, se qualifient ainsi de manière indue. Non, les vrais déportés sont ceux qui ont été traînés dans les camps nazis. Et dire cela n'est pas nier la complexité de cette période. Les mots ont un sens. Il ne faut pas les galvauder."
Je doute que beaucoup des personnes requises au titre du STO, sigle de Service du travail obligatoire institué par une loi du gouvernement Laval (16 février 1943) pour fournir la main-d'œuvre imposée par le Gauleiter Sauckel soit quelque 650 000 le nombre de requis envoyés en Allemagne contre leur gré, afin de participer à l’effort de guerre allemand, auxquels s'ajoutent 900 000 prisonniers de guerre « transformés » aient jamais confondu cette situation avec la déportation dans les camps, ceux qui ont vu le film avec Fernandel intitulé "La vache et le prisonnier" pas non plus, et encore moins les réfugiés des régions annexées rapatriés au mépris des engagements de 1942 avec le rappel de la position de déserteur dans certains cas, pour d'autres le retour forcé en Alsace ou en Moselle avec un passage par le camp de Schirmeck !!
Mais ce n'est pas parce qu'il ne s'agit en effet pas de 'déportés' que leur situation a été nécessairement beaucoup plus enviable !
Ce sans parler du sort difficile et parfois violent des jeunes filles d’Alsace et de Moselle embarquées malgré elles dans la folie nazie et dont le sort a été occulté pendant des décennies.
C'est notamment la raison pour laquelle, lorsque j'ai vu que seules les "Marianne" issues de l'immigration avaient été mises à l'honneur sur France 2 à l'occasion de la journée de la femme, j'ai poussé un long soupir désolé.
S'il est possible aux femmes françaises issues de l’immigration de l'après-guerre de revendiquer aujourd'hui au titre des droits des femmes, c'est bien parce que les combats précédents qui ont ouvert ces droits sur notre territoire ont rendu le leur possible et je déplore l'ignorance de l'Histoire qui gouverne souvent l'action de beaucoup d'entre ces nouvelles pasionarias.
J'ai également été horrifiée par la mise en scène d'un faux dialogue entre deux féministes dont l'une arborait la couronne de fleurs des Femen, version fleurs artificielles, et la somme d’inepties qu'elles ont échangées.
Rédigé par : Catherine JACOB@Laurent Dingli | 09 mars 2015 à 12:01
@ Lucile
Je me pose par ailleurs une question hors sujet ; est-ce bien le rôle du président de la République et du gouvernement d'intervenir de façon aussi partisane et ouverte dans les élections à venir ?
Excellente question, pour ma part ma réponse est NON et NON. Le rôle du gouvernement : gouverner et se préoccuper du sort de TOUS les Français sans distinction de bord politique.
Le Premier ministre dans sa rage de limiter la catastrophe pour le PS aux départementales fait exactement ce que le PS avait reproché au précédent Président, et notamment se servir des moyens de déplacements de la République pour faire campagne.
La seule différence c'est bien, et cela est visible en ce moment plus que jamais, que les exagérations de gauche sont toujours mieux tolérées par les Français parce que non pointées du doigt et donc non discutées par les médias.
Nous assistons à une démesure politique qui n'empêche pas de montrer des sondages défavorables aux leaders PS (l'embellie du 11 janvier est retombée comme un soufflé).
Pour croire en eux, les Français attendent autre chose que la politique politicienne, la communication à outrance, la stigmatisation d'une partie de la population, les réformettes économiques en trompe l'oeil, la nomination d'amis aux postes clés... Bref ils attendent autre chose que la politique mitterrandienne des années 80.
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 09 mars 2015 à 10:42
A la page 368 de ses 'Mémoires, Le voleur dans la maison vide', Jean-François Revel écrivait qu'"on a souvent reproché à Mitterrand de ne jamais reconnaître ses erreurs. Erreurs par rapport à quoi ? De son point de vue et selon son critère, une idée n’est ni juste ni fausse. Elle est efficace ou non par rapport au pouvoir. Je dis bien par rapport au pouvoir, non par rapport à l’action, la vraie, qui exige la connaissance du réel. Si une idée se révèle inefficace ou quand elle le devient, on l’abandonne comme on abandonne un véhicule en panne pour monter dans un autre. (…)
Dans 'Un prince des Affaires' (1996, Grasset), portrait biographique d’un grand capitaine d’industrie, Ambroise Roux, l’auteur, Anne de Caumont, raconte un déjeuner organisé par Laurence et Pierre Soudet chez eux en mars 1977, pour faire se rencontrer le plus influent des patrons français et le Premier secrétaire du parti socialiste. De l’avis général, l’alliance socialo-communiste allait gagner les élections législatives l’année suivante. Les deux hommes ne se connaissent pas. Ambroise Roux raconta plus tard que, posant à François Mitterrand, durant ce déjeuner, plusieurs questions sur des articles du Programme commun de la gauche qui lui paraissaient « extravagantes », il s’aperçut que le chef socialiste ignorait le contenu dudit programme. J’avais fait la même découverte en décembre 1972 (…). Le propos d’Ambroise Roux révèle qu’entre 1973 et 1977, Mitterrand n’avait toujours pas pris le temps de lire ce programme commun, bien qu’il l’eût cosigné, ni de s’enquérir des objections élevées contre ce texte par les économistes et les entrepreneurs, tant était inébranlable son indifférence aux idées. Ses mimiques de cabotin politique ne s’étaient pas non plus modifiées. Ambroise Roux lui ayant cité quelques absurdités du funeste programme, Mitterrand foudroie un Soudet penaud (il en avait été l’un des rédacteurs) et lui demande : « Est-ce vrai ? On a écrit de telles conneries dans le Programme commun ? ». (…) De même en 1972, je m’étais gaussé d’un article du Programme qui attribuait la pollution de l’environnement au seul système capitaliste et j’avais rappelé à Mitterrand ce fait notoire que la pollution était mille fois pire dans les pays communistes. Il partagea ma gaieté jusqu’au fou rire et, m’arrachant le livre des mains pour bien vérifier le passage, il s’écria : « Non ? Pas possible ? Ils ont écrit cette ânerie ? » « Ils »… Toujours les autres. L’autocrate irresponsable que Mitterrand deviendrait durant ses deux présidences se peignait là déjà tout entier."
Rédigé par : Archibald | 09 mars 2015 à 10:33
Je ne connais pas l'activité de votre père qui a été condamné à la Libération. Je me garderai donc d'émettre un avis sur le sujet. En revanche, vous établissez un lien entre la Résistance intérieure et une collaboration apparente qui aurait eu pour but en somme de résister d'une autre manière. Vous illustrez votre propos en citant la justification de votre père dont la volonté aurait été de "composer pour mieux décomposer". C'est votre point de vue et je ne le discute pas, mais je ne saurais trop inviter à la prudence sur ce genre d'assimilation entre résistance avérée et politique d'accommodement, de compromis, voire de compromission revendiquée par beaucoup de serviteurs de l'Etat français ou du Reich afin de justifier ce qui ne peut pas toujours l'être. Même si votre père a tenté de décomposer le système mis en place par l'occupant - ce qui n'a pas l'air d'avoir convaincu la justice - il n'est apparemment pas un résistant. Les mots ont un sens très fort surtout dans un contexte où beaucoup ont, en quelque sorte, écrit cette définition en lettres de sang. Au mieux peut-on parler de résistance passive.
Voyez-vous, cela me fait songer au terme de "déporté". Beaucoup de personnes, qui ont été requises au titre du STO, se qualifient ainsi de manière indue. Non, les vrais déportés sont ceux qui ont été traînés dans les camps nazis. Et dire cela n'est pas nier la complexité de cette période. Les mots ont un sens. Il ne faut pas les galvauder.
Rédigé par : Laurent Dingli | 09 mars 2015 à 10:27
"L'intelligence de l'ambiguïté", c'est l'obscure clarté qui tombe des étoiles, une formule oxymoronique pour entretenir la légende. Il ne faut pas désespérer Billancourt, mais plutôt bercer les socialistes dans l'idée qu'ils ont un jour fait président un "être d'exception" comme vous appelez Mitterrand. Michel Winock se garde bien d'en faire un mythe ; ce ne fut pas, selon lui, un grand homme d'Etat. Il est vrai que pendant que Thatcher et Schröder anticipaient et préparaient l'avenir de leurs pays, chez nous, la démagogie économique florissait. Les eaux étant relativement calmes à l'époque, le gouvernement pouvait se permettre de malmener le bâtiment sans catastrophe imminente, c'est plus dur maintenant, dans la tempête.
L'extraordinaire confiance en lui-même de Mitterrand, son art de la manœuvre en politique, sa constance dans le secret, et ses réseaux lui ont permis de survivre à bien des déboires. Du coup, il est resté trop longtemps au pouvoir. On ferait bien, pour éviter que ne se reproduise une telle longévité gouvernementale avec Hollande ou Sarkozy, de méditer l'éviction du pouvoir qu'a connue Margaret Thatcher au faîte de sa gloire, de la part de son propre parti politique, lorsqu'après avoir fait du bon travail, elle s'est mise à perdre le sens de la mesure. Elle était devenue particulièrement coléreuse, despotique, et humiliante à l'égard des siens.
Je me pose par ailleurs une question hors sujet ; est-ce bien le rôle du président de la République et du gouvernement d'intervenir de façon aussi partisane et ouverte dans les élections à venir ?
Rédigé par : Lucile | 09 mars 2015 à 09:39
Mitterrand, ce gars me donne envie de vomir.
Encore aujourd'hui on paie son comportement au sommet de l'Etat. Il est à l'origine de la création et de la montée du FN. Il est celui qui a fait faire à Hollande de fausses interviews pour discréditer la droite.
Il est l'initiateur d'une manière détestable de faire de la politique qui n'est que l'attaque de la personne sans tenir compte des idées.
Sarkozy est un petit joueur à côté du machiavélisme de ce monsieur qui a menti et truqué toute sa vie.
Le nombre de morts, directs ou indirects, qui entachent ses septennats n'est pas moins monstrueux.
Certes c'était un homme hautement cultivé et très intelligent mais c'était un vil individu. Comment peut-on oser se dire résistant et défendre et protéger un Bousquet ?
Rédigé par : J. Marques | 09 mars 2015 à 09:39
Dumas, Goldman, et maintenant Mitterrand...
Faut rénover les fiches, faire du clair au quartier !
Rédigé par : Alex paulista | 09 mars 2015 à 02:46
« L’intelligence de l’ambiguïté »
La formule est elle-même bien ambiguë.
Ambiguïté c’est la forme politiquement correcte pour dire : rouerie, perfidie, dissimulation, mensonge, hypocrisie, double jeu, tous défauts qui sont des qualités chez un homme d’État, à une condition et une seule : qu’il laisse le pays plus grand et plus puissant qu’il ne l’a trouvé.
En l’occurrence, il ne s’est agi que de prendre et garder le pouvoir. L’individu mérite donc plus le mépris que l'admiration.
Mais il est vrai que l’on peut être admiratif devant le mal, et ses capacités de manipulation. Cette admiration est une des formes par lesquelles le mal s’impose.
Vous trouvez magnifique cette phrase :
"Voyez-vous, ma chérie, mon grand tourment a toujours été l'accord si difficile de l'éphémère et de l'éternel : toujours cette vieille lutte du relatif et de l'absolu".
C’est vrai que c’est bien écrit. Mitterrand avait de la culture et savait s’en servir.
Mais avait-il les moyens intellectuels de maîtriser les concepts aussi difficiles que ceux d’éphémère et d’éternel ?
Le thème du temps chez Mitterrand m’a toujours intrigué et amusé, par son incapacité à trancher entre le temps instantané et le temps long, je n’ose dire comme lui éternel.
Président de la République fraîchement élu, il crée un « ministère du Temps libre » préfigurant les RTT des 35 heures.
Ce temps libre est le temps instantané qu’il offre à la plèbe pour se reposer des efforts et des fatigues du travail. Il suit ainsi la vieille antienne socialiste : le travail fatigue, ne rien faire repose.
L’évidence même dans le temps immédiat.
Mais devenu Pharaon, parcheminé comme un vieux Chinois opiomane par sa maladie, voilà qu’il prétend « donner du temps au temps » dans son action. Autrement dit il se donne le temps long.
A-t-il changé d’avis sur l’utilisation que l’on peut faire du temps, dans la mesure où l’on peut l’utiliser ?
Ou bien a-t-il considéré que le temps de Pharaon ne pouvait être le même que celui du fellah ?
Connaissant son mépris des hommes et du vrai peuple, qui n’a rien à voir avec le peuple de gauche mythique des socialistes, je penche pour la seconde hypothèse.
Quant à la vieille lutte du relatif et l’absolu, il n’a pas hésité une seconde.
Il a choisi définitivement le relatif, puisque l’ambiguïté, avec ou sans intelligence, ne saurait relever de l’absolu.
Rédigé par : Tipaza | 08 mars 2015 à 23:32
@ Michelle D-LEROY
"En politique, avec ses amis, sa famille, avec ses rivaux politiques, il a manoeuvré toute sa vie avec beaucoup de coups bas et de trahisons, de louvoiements et de tripatouillages."
Voilà une excellente définition de la politique.
Rédigé par : hameau dans les nuages | 08 mars 2015 à 20:36
Il n’aurait jamais dû être président de la République.
A lui seul, l’attentat bidonné du jardin de l’Observatoire aurait dû interdire à François Mitterrand de poursuivre la moindre carrière politique. Par on ne sait quel copinage, cette affaire a traîné devant diverses juridictions, jusqu’à devenir prescrite. Mitterrand, blanchi par l’oubli ! Pas mal, non ?
Vive la transparence ! Vive la démocratie à la scandinave ! A quand une vraie responsabilité du personnel politique, avec de vraies conséquences ?
Si François Mitterrand avait été privé de sa capacité de nuire, il n’aurait pas pu poignarder dans le dos Michel Rocard, incomparablement plus brillant et plus honnête que lui. Tout aurait été différent si nous avions bénéficié d’un vrai socialiste réformiste, et non pas d’un pseudo-révolutionnaire, plus à droite que son adversaire.
Notre pays s’en serait certainement mieux porté, puisque Michel Rocard n’aurait pas vidé les caisses, avant de prendre le tournant de la « rigueur » (pendant que nos voisins européens rigolaient bien en profitant – déjà – de notre perte de compétitivité).
Porter hommage à l’ambition démesurée de Mitterrand (à cause de sa grande culture) équivaut à approuver l’ambition démesurée de Sarkozy (malgré sa grande inculture).
Ni le cynisme ni le narcissisme ne sont à ranger au tableau des qualités de l’être humain.
En élisant François Mitterrand aux plus hautes fonctions, et en l’amputant de ses loisirs (à l’exception de ses escapades avec Mazarine, à nos frais) les Français se sont privés d’un écrivain moyen. Ils n’y ont pas gagné un grand président.
Rédigé par : Terrentilius | 08 mars 2015 à 19:19
Personnellement, je n'ai jamais été une fan de François Mitterrand, je n'ai jamais été socialiste et son Union de la Gauche (même si c'était une façon d'appauvrir le PC) était pour moi un repoussoir. Impossible d'admirer les communistes et donc celui qui en faisait des associés.
François Mitterrand était un être ambigu, tellement roué. En politique, avec ses amis, sa famille, avec ses rivaux politiques, il a manoeuvré toute sa vie avec beaucoup de coups bas et de trahisons, de louvoiements et de tripatouillages.
Je doute qu'il fut un humaniste authentique, il avait surtout une ambition incommensurable et il a été socialiste comme il aurait pu être de droite, il briguait la fonction suprême. Il a tout fait pour cela comme d'autres après lui. Il aimait briller et pour cela il n'hésitait pas à torpiller ceux qui se mettaient en travers de son chemin, même ses amis. Côté droiture, c'était loin d'être un modèle.
C'était effectivement un homme très cultivé et intelligent qui, de par sa prestance tant physique qu'intellectuelle, inspirait le respect (si on faisait abstraction du côté coulisses). Aujourd'hui on rêve de ses discours, tant son "élève" nous ennuie lorsqu'il s'adresse à nous.
Et je dois avouer que j'ai supporté quatorze années de Mitterrand, en étant dans l'opposition, beaucoup plus facilement que trois années avec ceux qui nous gouvernent actuellement. Car oui, c'était un amoureux de la France réelle et et un amoureux réel de la France, de ses traditions, de ses coutumes, respectueux du peuple et de la religion catholique.
Rien à voir avec les torpilleurs de notre pays qui ne détruisent pas à coup de hache ou de maillet notre culture comme les fous de l'Etat Islamique, mais tranquillement et avec volonté, avec des mots, des sentences, des réformes sociétales invraisemblables, un humanisme de façade et toujours axés sur la préférence non nationale.
S'il faut dire qu'en cela François Mitterrand était un Président qui a compté, qui a marqué son époque, alors oui je le dis bien que, déjà, côté sociétal il ait été le précurseur de la démesure et de la déresponsabilisation des individus. C'est sous son mandat qu'a vraiment commencé le laxisme de la société (abrogation de la loi anti-casseurs par exemple), sans même parler de l'abolition de la peine de mort. C'est aussi sous ses mandats que la régularisation des sans-papiers et donc d'une immigration de masse s'est amplifiée avec complaisance. Tout inventer pour se montrer humaniste. L'apparence uniquement.
Ambiguïté pendant l'occupation, ambiguïté pendant ses mandats, secret et magouilleur, sans être jamais inquiété ni jugé officiellement, il restera dans l'Histoire comme son ennemi le Général de Gaulle mais, du moins à mes yeux, sans l'égaler. Le Général était le dernier Président, homme de convictions.
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 08 mars 2015 à 18:50
Intelligent, très cultivé, l'homme au double langage, personnage obscur de l'histoire, s'est conduit comme un parfait cynique avec certains de ses proches "collaborateurs". Entouré de personnages interlopes, celui qui croyait aux forces de l'esprit n'a jamais eu de compassion pour ceux qui ont choisi de se donner la mort parce qu'ils ne plaisaient plus au monarque. Mais qui l'a donc aidé à devenir Président sinon Chirac pour barrer la route du pouvoir à son ennemi Giscard ! Il vaut mieux refermer le couvercle au motif d'une désagréable odeur de soufre.
Rédigé par : Jabiru | 08 mars 2015 à 18:20
L'intelligence n'excuse pas tout, c'est même parfois une circonstance aggravante. Mitterrand était intelligent, personne ou presque ne le nie, mais c'était aussi (et surtout) une ordure de la plus belle espèce. Élever le mensonge au rang de vertu cardinale est un peu fort de café pour un ancien magistrat.
Rédigé par : François | 08 mars 2015 à 17:03
« On » (les médias) a souvent désigné Mittrand comme un « Florentin ». Elégante définition pour ne pas dire que Mittrand était le « Machiavel » français du XXe siècle, et qu’il a adoré ce rôle.
Le cynisme politique remplaçant la morale ! Le pendant de la citation de Chateaubriand « Le vice appuyé sur le bras du crime ».
Pétainiste puis résistant, il fut l’ami fidèle, constant, de Bousquet (haut fonctionnaire français qui exerça sous le gouvernement de Pierre Laval les fonctions administratives de secrétaire général à la police du régime de Vichy du 18 avril 1942 au 31 décembre 1943 et qui fut l'organisateur de la rafle du Vél’ d'Hiv’).
Lorsque Zemmour a écrit « Pétain a sauvé des Juifs de la déportation », tollé général, cris d’orfraies…
Mais que Mitterrand aille fleurir la tombe de Pétain, qu'il ait porté la francisque et partagé le pain et le vin avec René Bousquet n'a jamais offusqué beaucoup de socialistes, ni même notre fameux Jacques Attali (qui était son conseiller(sic)) puisque lors d’un repas où était convié Attali et Bousquet, Mitterrand répliqua à Attali qui disait : « Comment pouvez-vous me convier à déjeuner avec cet homme, moi qui suis juif » : « Sachez que Bousquet a sauvé beaucoup de Juifs ».
Et au final Attali est resté « conseiller » de Mitterrand ;-)
François Mitterrand aura une carrière ministérielle exceptionnelle : huit fois ministre dont deux d'État, ayant été au moment de la guerre d'Algérie ministre de l’Intérieur sous la présidence de Pierre Mendès France il deviendra garde des Sceaux, ministre d'État, sous Guy Mollet.
N’oubliez pas messieurs-dames de la gauche socialiste, vous qui prônez aujourd’hui, la main sur le portefeuille (oups, je voulais dire sur le cœur ;)) les négligences faites aux peuples du Maghreb dont Mitterrand, ministre de l'Intérieur lors du déclenchement de l'insurrection algérienne, prendra la mesure de l'événement en organisant une répression sans faiblesse (!).
Rappelez-vous les 45 décapitations en 500 jours !
Sans oublier la trop fameuse affaire de l'Observatoire, dit « des jardins de l'Observatoire », ce pseudo-attentat qui aurait été mené contre François Mitterrand en 1959 et organisé par lui même, qui lui valu d’être rayé de l’Ordre des Avocats :-(
J’aimerais tant que l’on oublie cet homme ! Prononcer son nom me donne des haut-le-coeur.
Rédigé par : breizmabro | 08 mars 2015 à 16:12
[….] Concernant la France de la période de la Seconde Guerre mondiale, les jeunes générations devront comme leurs parents d’aujourd’hui, aussi réapprendre et réentendre les témoignages sans parti pris, qui continuent de se transmettre par la mémoire, les mémoires de leurs aînés successifs. Chacun, à contexte égal, ne pouvant éviter l’interrogation : Qu’aurais-je fait ?
Passées les décennies de la reconstruction au sens large, et les soubresauts des guerres d’Indochine et d’Algérie, un grand espoir pour la jeunesse montante naquit à l’approche de cette année 1981.
Je fais partie de ceux qui dès le début du règne Mitterrand furent convaincu d’un drame annoncé. Les faits ont démontré que le déclin économique de la France a commencé avec le premier septennat mitterrandien, et s’est poursuivi lors de son second septennat. S’y rajoutant faute de ferme volonté la calamiteuse part du laxiste Chirac. 1987-2007, correspondant aux deux décennies perdues au cours desquelles les réformes « courageuses » nécessaires au pays ne furent pas réalisées. Encore Nicolas Sarkozy, à sa manière inhabituelle, n’aura pas réussi ce tour de force, à cause justement de la crise incommensurable de 2008, d’avoir évité la sortie de route. On est en droit de se demander si un second mandat aurait produit l’accélération nécessaire et suffisante. Et encore un mal pour un bien sans aucun doute cette fois avec un François Hollande qui demeuré sous influence faute d’envergure politique, n’aura pas su prendre la mesure de la réalité de son rêve : devenir président de la République. Mais pourquoi faire ?
Alors avancer à pas comptés, dans une Europe et une mondialisation qui justifieraient sa privation de prérogatives, tout en profitant de la situation pour laisser du temps au temps, est-ce la bonne stratégie ?
Je crains fortement pour ma part que le malheur de 1981 se soit à nouveau réinstallé. Il ne reste donc plus que les citoyens éclairants et éclairés pour contraindre Hollande et ses homologues européens à augmenter la pression s’agissant de l’attaque forte vis-à-vis de l’existence même des paradis fiscaux, de la mainmise de la finance internationale sur les énergies, et même de la nourriture de la planète.
Oui cette guerre mérite d’être amplifiée. Mais qui pour suivre tout en en acceptant les contreparties, pour le meilleur destiné aux générations qui montent ?
P.S. : Dire que F. Mitterrand fut un grand président, c’est oublier ses erreurs majeures, ses mensonges par omission, le mauvais chemin sur lequel il a mis la France.
Rédigé par : fugace | 08 mars 2015 à 15:29
Mitterrand ? En gros, je suis d'accord avec M.Bilger, mais tout de même ; quelqu'un d'aussi intelligent etc. me semble bien vite absous d'avoir mené la France à la catastrophe pendant plusieurs années pour en revenir à une vision plus saine. Allons, il le savait bien que la politique de gauche était dommageable, et c'est avec le cynisme des gens politiques qu'il l'a appliquée. Lorsqu'il a vu que la France lui échappait, il a modifié ses visées, il n'apparaît pas autrement qu'en tant qu'opportuniste.
Il arrive un peu la même chose avec le gouvernement actuel, qui tente de redresser la barre, mais sans le talent et c'est une immense différence. Ce matin sur i-TELE, qui n'a déploré la prestation arrogante, déclamatoire, ampoulée, répétitive, abstruse, et de plus inélégante parce qu'impolie, de M.Valls ? Un torrent de mots répétés ad nauseam, avec des valeurs de la république à tout bout de phrase, alors que, dans le fond, il annonçait plutôt des choses banales, mais sans lâcher sur le fond idéologique de l'Etat administrateur-entrepreneur dont on sait les insuffisances.
Ne serait-ce que l'art de dire les choses qui ferait le départ entre les hommes et non ce qu'ils disent ? A cet égard, Mitterrand était un maître. Il est alors normal qu'il engendre la controverse mais il ne peut en aucun cas être un modèle. Fourbe.
Rédigé par : genau | 08 mars 2015 à 15:15
"Je songe en particulier au comportement de mon père, à mon sens injustement condamné, qui avait toujours refusé, parce qu'il ne se sentait coupable de rien, de partir en Suisse comme tant d'autres et qui avait légitimé son action en Alsace par l'objectif de "composer pour décomposer."
C'est l'occasion de dire que dans l'affaire du gang des barbares, l'avocat Szpiner a usé de termes d'une veulerie absolue. Je comprends votre indignation et révolte.
Mitterrand le florentin laissera peut-être une trace dans l'histoire. Être sans doute cultivé et fascinant (voir l'image symbole avec le chancelier Kohl lors de la commémoration de Verdun) on ne peut pas dire que son magistrat - embrumé par les scandales et affaires financières - ait notoirement rendu service au pays. Il a surtout servi de rampe de lancement à la dégradation actuelle que connaît la France (dette, chômage, déficit du commerce extérieur, etc.). La présence dans le gouvernement de ministres communistes dès 1981 n'a pas contribué à améliorer la sérénité des décideurs économiques.
En définitive, à cette époque, il eût été sans doute plus opportun qu'un autre fasse le travail à sa place, mais pas le sortant. On n'en serait sans doute pas là où on en est aujourd'hui. Il est vrai que la succession n'a pas été non plus à la hauteur.
Rédigé par : finch | 08 mars 2015 à 14:29
« Injustement condamné »
N’ont été justement condamnés que ceux qui avaient trahi.
Or, penser à tort ou à raison qu’il valait mieux collaborer avec les Allemands qu'être envahi par les Russes n’était pas trahir. C’était tout au plus une erreur de jugement.
Penser à tort ou à raison qu’ayant signé un armistice, on devait lutter contre la résistance qui mettait la parole de la France en cause et entravait l’action du Maréchal, n’était pas trahir, c’était tout au plus se tromper.
Par contre, saboter les armements français pour aider les Allemands à nous vaincre parce qu’alliés des Russes, puis mener la résistance, non pas pour délivrer le pays, mais en réalité pour aider les Russes en souhaitant qu’ils arrivent en France, ça, c’était la trahison des communistes.
Ne pas prôner la réconciliation nationale pour effacer de l’histoire qu’on a été relevé de son commandement face à l’ennemi du fait de sa désobéissance et de son imbécillité dans la bataille, les glorieux combats de Casablanca et de la Syrie, puis fermer les yeux pendant deux mois sur l’épuration sauvage et les tribunaux des FTP y compris l’assassinat des résistants agissant sous l'autorité de Vichy, ça, ça a été l’infamie de de Gaulle.
Et pour finir, les magistrats qui ont mené les procès de l’épuration légale, ça, ça a été l’infamie de la magistrature – championne devant l’éternel de tous les retournements de veste sous tous les régimes.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 08 mars 2015 à 14:16
Difficile de ne pas reconnaître Mitterrand intelligent.
Mais il a mis son intelligence au service d'une qualité humaine détestable. Son passé, sa vie privée, son exercice du pouvoir, sont l'expression du mensonge. Pas de sens de l'Histoire, pas de vision porteuse, pauvre sens de l'économie, parole, parole... Petit politicien rêvant de la couverture des livres d'Histoire.
Comme disait le Général, "c'est une arsouille".
Je ne lui reconnais comme grand acte politique que l'abolition de la peine de mort. Mais eu égard aux décisions du ministre qu'il fût, je soupçonne Badinter d'en être l'initiateur énergique !
Rédigé par : Furcy | 08 mars 2015 à 13:30
"La France tranquille" de Tonton. Un slogan aussi faux que "Le changement c'est maintenant". On vend du rêve pour accéder au pouvoir et on se casse la figure sur des réalités.
Des politiques économiques en zigzag. Des millions de déçus.
C'est peut-être le prix à payer pour passer du socialo-communisme à la social-démocratie ?
Rédigé par : jack | 08 mars 2015 à 13:23
Belle phrase en effet, "Voyez-vous, ma chérie, mon grand tourment a toujours été l'accord si difficile de l'éphémère et de l'éternel : toujours cette vieille lutte du relatif et de l'absolu", très belle, et pleine de sens !
Que n'a-t-il, mieux qu'il ne le fit, modelé la politique de la France sur ce tourment, sur la conscience de ce tourment, sur la conscience de cet éternel désaccord entre l'éphémère et l'éternel ?
On a le sentiment qu'il a gardé ce "grand tourment" pour lui. Comme s'il ne nous jugeait pas capables, nous les Français, nous la France, de le ressentir, et donc de nous en nourrir, comme apparemment il sut le faire.
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 08 mars 2015 à 12:32
Mitterrand : ELU PAR CETTE CRAPULE on a beau retourner rien n'y fait.
Rédigé par : lefort | 08 mars 2015 à 11:47
Il n’y avait pas mieux à attendre d’un personnage capable de se monter un faux attentat, que la catastrophe morale et économique qu’il a engendrée. Catastrophe morale annoncée avec une élection gagnée grâce à l’infamie des diamants de Bokassa, et qui peut se résumer en l’exclusion de la notion d’honneur du monde politique.
Avec la libération, la France s’était trouvée entre les mains de jeunes écervelés, mais les écervelés peuvent changer et avoir leur sens de l’honneur. Avec Mitterrand, nous avons eu la pègre intellectuelle dont le porc des partouzes et escroc des mutuelles en est l’archétype.
Avec les gaullistes, nous aurons eu les combines du BTP et de la Françafrique. Avec la bande à Mitterrand, nous aurons eu les milliers d’associations bidons. Avec les gaullistes, nous avions quelques magistrats aux ordres, avec Mitterrand, nous aurons une magistrature qui bafoue le droit au nom de l’idéologie de gauche.
Certes, il y a tout lieu de penser que celui qui fleurissait la tombe du Maréchal éprouvait un profond mépris pour cette pègre intellectuelle qui le suivait comme le bétail suit celui qui le nourrit, mais celui-là, il n’appartient qu’à lui-même.
Aujourd’hui, nous nous fadons l’un de ses héritiers : le nul qui parachève la ruine commencée en 1981, et les Français regardent Giscard d’Estaing en se demandant si sa voiture grandeur n’est pas d’un autre monde. Si Giscard se représentait en 2017, ils se jetteraient en pleurant dans les bras d’un aïeul renié à qui on demande pardon.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 08 mars 2015 à 11:38
Un homme méprisable sans foi ni loi. L'arsouille, intello fumeux, une crapule cultivée soit mais crapule quand même. Pas la moindre ambiguïté !
"Mon grand tourment a toujours été l'accord si difficile de l'éphémère et de l'éternel". Il a dû pomper cela chez nos "grands auteurs" !
Votre article me sidère.
Rédigé par : lefort | 08 mars 2015 à 11:13
Ce qui me touche infiniment dans la formulation de ce clivage est qu'il n'est pas loin de définir une attitude que d'autres ont adoptée, même pour justifier une politique de présence en France et de collaboration.
En 1978, à l'issue d'un étrange dîner auquel il avait été convié par Mitterrand, dîner auquel avait participé Bousquet, Attali l'interrogea :
« Comment pouvez-vous fréquenter un tel homme et me le présenter alors que je suis juif ? »
« Les gens qui n'ont pas connu cette époque ne peuvent pas comprendre. La moitié des gens avec qui vous avez dîné ce soir lui doivent la vie », lui répond Mitterrand.
Cette remarque explique en partie la mentalité d'un homme qui a a été confronté à une époque complexe sans en avoir tiré des conclusions sommaires.
Rédigé par : Parigoth | 08 mars 2015 à 10:38
@Cirsedal | 08 mars 2015 à 02:04
" un exercice d'auto-divan qui semble sincère ("injustement condamné")."
Du coup cet outrecuidant et imbécile commentaire de qui se prétendant sans doute venu de nulle part, vierge de tout inconscient collectif, m'incite à ajouter cette phrase de conclusion à Catherine JACOB | 08 mars 2015 à 09:12, après "Les descendants de ceux-là, peuvent dès lors lui en être reconnaissants.": Dans son cas sans doute peut dire que le capitaine n'a pas abandonné le navire... si vous saisissez l'allusion.
Rédigé par : Catherine JACOB@Cirsedal | 08 mars 2015 à 10:36
Bonjour Philippe Bilger,
"François Mitterrand : l'intelligence de l'ambiguïté"
Même si je reconnais son intelligence acérée, sa grande culture littéraire et sa grande maîtrise de la communication dans le domaine de la politique, François Mitterrand m'a toujours mis mal à l'aise.
Son passé trouble dans les années 40-43, sa vie privée cachée, les multiples "affaires" qui collent à son exercice du pouvoir laissent planer une grande part d'ombre à son exercice du pouvoir.
Le seul fait à mettre à son actif est d'avoir réussi à fédérer tous les courants de gauche. Mais il le doit plus à son charisme qu'à ses convictions de gauche. Convictions qui figuraient dans son programme commun, mais qui l'ont conduit à redresser drastiquement la barre en 1983 vu qu'il s'est aperçu qu'il conduisait le pays à la ruine. Lui aussi a été obligé de faire preuve de "realpolitik".
Je pense pour ma part qu'avec Michel Rocard président, notre pays aurait été bien mieux géré. Mais le sort en a décidé autrement et c'est bien dommage. Ce dernier aurait pris en main le problème des retraites dont il avait détaillé la problématique dans son Livre Blanc et que l'on traîne encore aujourd'hui comme un boulet.
Mais François Mitterrand a voulu faire un second mandat bien que connaissant la maladie qui le rongeait. Comme pour Jacques Chirac son second mandat n'a pas été brillant.
Enfin restera de lui les grands édifices publics comme la pyramide du Louvre, l'Arche de la Défense et la Bibliothèque nationale de France, tout comme Louis XIV nous a laissé le château de Versailles.
Rédigé par : Achille | 08 mars 2015 à 10:29
Oui, il est difficile de ne pas regretter Tonton aujourd'hui, même s'il porte une lourde part de responsabilité dans la situation actuelle de la gauche. Et puis, j'aimerais qu'on s'intéresse un peu plus à la culture dans les hautes sphères... comme au bon vieux temps.
Rédigé par : Boris | 08 mars 2015 à 10:22
"Je songe en particulier au comportement de mon père, à mon sens injustement condamné, qui avait toujours refusé, parce qu'il ne se sentait coupable de rien, de partir en Suisse comme tant d'autres et qui avait légitimé son action en Alsace par l'objectif de "composer pour décomposer". "
Parmi les réfugiés français en Suisse n'oubliez pas ces militaires alsaciens et lorrains démobilisés qui n'ont eu que cette solution pour fuir l'endoctrinement nazi qu'on avait commencé à leur faire subir à Fribourg et que les Suisses, les considérant initialement comme de possibles agents doubles, sont loin d'avoir accueillis à bras ouverts et ont emprisonné le temps de décider s'ils allaient les renvoyer vers l'Allemagne où les eut attendu le peloton d'exécution, ou vers la France libre où les attendaient de toute façon les prisons françaises à des fins de ce que l'on appelle de nos jours debriefing, pour en renvoyer ensuite certains vers l'Allemagne, cas de mon propre père, afin d'en exfiltrer d'autres.
Aucun choix n'est jamais facile. Votre papa semble donc avoir eu le choix. Comme beaucoup de ceux qui n'avaient plus l'âge d'être embrigadés dans ceux que l'on appelle aujourd'hui les Malgré nous, il est resté ; et comme beaucoup de ceux qui n'ont eu d'autre ambition, ni par ailleurs pas toujours d'autre choix que de continuer à faire leur métier pour faire vivre leur famille, il en a payé le prix - c'est aussi le cas du père d'une cousine de ma mère, lequel, photographe, s'est retrouvé condamné et emprisonné à la Libération pour n'avoir pas refusé de photographier, aussi, l'occupant.
Cependant que d'autres membres de la famille comme ma grand-mère qui appartenait au réseau de résistance décrit ici : http://www.resistance-deportation.org/spip.php?article237 où elle est désignée comme cette "Marie-Louise qui s’est dépensée sans compter pour accueillir et réconforter des évadés passés par la filière", ont tenté de tout assumer à la fois.
La filière de cette Marie-Louise dont l'active participation à la résistance intérieure a seulement été récompensée par l'arrestation en son absence des deux plus âgés de ses enfants dont l'un a ensuite été déporté après avoir été torturé, a vraisemblablement, ironie du sort, été empruntée par mon père de Lyon à Fribourg et retour.
Si votre père s'était réfugié en Suisse, la première chose qui serait arrivée aurait été, comme dans le cas des parents de mon père, l'arrestation de votre maman par la Gestapo suivie de ce qu'on appelle pudiquement de nos jours un interrogatoire musclé, on ne l'aurait sans doute pas relâchée si facilement et il aurait fallu voir alors dans quel état.
Pendant ce temps, vous-même qui n'aviez pas deux ans à l'époque, ainsi que vos frères et sœurs eussent été, dans le meilleur des cas, livrés à vous-mêmes.
Or, Metz n'offrant pas autant de ressources ni de cachettes à des enfants que la montagne vosgienne, Dieu sait ce qu'il serait advenu de vous dont on aurait pu également se servir pour faire craquer votre mère.
Sans compter qu'on ne fait pas passer clandestinement les frontières à une famille de quatre enfants aussi facilement qu'on la fait passer à des célibataires et qu'un homme politique et sa famille ne disparaissent pas aussi facilement de la circulation qu'un personnage lambda.
Varennes eut vraisemblablement été aussi votre sort.
Je pense donc pour ma part que les procès et les condamnations hâtives qui ont eu lieu à la Libération n'ont pas été sans ressembler, dans certains cas, davantage à une épuration libératrice du stress qu'à une Justice digne de ce nom.
C'est malgré tout là un héritage dur à assumer, comme dans le cas de la cousine de ma mère ci-dessus évoquée, qui est elle entrée dans les Ordres et s'est dévouée sans compter aux femmes enceintes, aux mères célibataires et à leurs enfants tout au long de sa vie.
Ne vous faites donc pas de mouron avec le destin des résistants de la dernière heure comme Mitterrand.
Aucun choix n'est facile et ne vous laissez pas aller à reconnaître aux descendants de ceux qui se sont livrés au marché noir et ont eu la chance de ne pas se faire attraper, aux descendants de ceux qui ont envoyé des lettres anonymes à tire-larigot à la Gestapo, etc. etc., ce sont en général les plus intransigeants, le droit de juger votre famille, car qui sait encore ce qu'il fut advenu de la population dont votre père avait la charge, si, dans le cas d'une fuite de sa part, les SS avaient décidé de la lui faire payer, comme ce fut encore le cas dans d'autres communes où la population a été prise en otage.
Les descendants de ceux-là peuvent dès lors lui en être reconnaissants.
Rédigé par : Catherine JACOB | 08 mars 2015 à 09:12
Il faut savoir compatir sans effusion, presque silencieusement, face à un exercice d'auto-divan qui semble sincère ("injustement condamné").
Répondre par la sage parcimonie à la logorrhée de qui souffre.
Leçon contre le voyeurisme provoqué.
Rédigé par : Cirsedal | 08 mars 2015 à 02:04