Le jeunisme me tape tellement sur les nerfs que j'ai tendance parfois à incriminer la vraie jeunesse, à lui reprocher de n'être que ce qu'elle est comme si elle bénéficiait abusivement d'un statut qu'elle n'exploitait pas à fond. Je me suis même surpris parfois à ressentir une forme d'aigreur face à des fraîcheurs triomphantes qui ne démontraient rien de plus qu'elles-mêmes.
Un samedi j'ai été invité par l'AJM au palais de justice de Paris pour parler de la justice, des pratiques professionnelles, de la hiérarchie et de l'indépendance des magistrats. Je ne savais pas ce qu'était l'AJM et j'ai découvert qu'il s'agissait de l'association des jeunes magistrats. J'ignorais son existence. Elle a été créée en 2007 et aujourd'hui compte environ 350 membres.
C'est peu certes mais après avoir échangé avec ceux qui avaient bien voulu venir m'écouter et dont le questionnement a été pertinent et stimulant, je me suis dit que c'était une formidable opportunité pour la Justice et la magistrature que d'avoir la vigueur et l'intelligence de cette jeunesse-là.
Loin d'un syndicalisme judiciaire corseté, idéologique ou corporatiste, passionnée cependant par la réflexion collective et la communication des expériences entre magistrats de tous âges, l'AJM représente une chance dans un monde qui malheureusement oscille trop souvent entre un "marais" et des extrémismes qui déshonorent la Justice. Entre le Mur des cons et des enfermements professionnels qui se gardent bien de toute respiration extérieure.
J'ai été infiniment sensible au fait que l'AJM convie des personnalités judiciaires en activité ou à la retraite pour que celles-ci exposent seulement la conception de leur métier, la manière dont elles avaient affronté parfois de graves difficultés et les relations qu'elles avaient entretenues avec leurs collègues ou leurs supérieurs.
La richesse de cette association est qu'elle permet et facilite ce qui n'a jamais été fait à l'école nationale de la magistrature et ailleurs, dans les juridictions : écouter des gens qui ont eu une histoire, des talents, peut-être des faiblesses et s'enrichir à leur contact. Précisément à cause de leur diversité et de leur parcours différent, aisé pour l'un, malaisé pour l'autre. La magistrature n'est pas friande des réputations qui l'ont honorée ou non. Contrairement au barreau qui, malgré des haines vigilantes, se trouve un dénominateur commun en célébrant ses gloires et ses maîtres.
Je me rappelle avoir dialogué à ma seule initiative durant deux heures à la Cour de cassation avec un avocat général emblématique Marcel Dorwling-Carter. Jamais invité nulle part, sinon, pour évoquer sa technique, ses méthodes et son regard sur la cour d'assises !
J'imagine ce qu'un Eric de Montgolfier, un François-Louis Coste, auraient à exprimer dans un tel cadre et, si on me conviait, j'aurais sans doute un discours autre. Avec tant ayant quitté ce beau métier et tant d'approches riches et diverses.
Ce qui me séduit plus que tout à l'AJM est qu'elle n'est pas tombée dans un défaitisme, dans une morosité et qu'elle est fière d'avoir fait le choix de cette profession. Je me suis félicité de pouvoir lui adresser, ce samedi, un discours roboratif, enthousiaste, sincère qui avait pour finalité de ne pas les décourager contrairement à tant d'autres pessimistes par principe et par paresse.
La présence de l'AJM dans le paysage judiciaire constitue une possibilité - si la jeunesse qu'elle invoque ne s'arrête pas trop tôt - de casser des rigidités, des orthodoxies, des partialités, de faire circuler un air de liberté et de spontanéité, d'amabilité et de souci du citoyen dans un univers qui en a besoin.
Ce sera d'autant plus nécessaire qu'à partir de 2017 la Justice demeurera un enjeu capital et que son administration imposera des contacts et des rapprochements avec des instances moins enkystées dans les processus officiels, plus souples, moins dogmatiques. Impossible, dans tous les cas, d'avoir un garde des Sceaux aussi calamiteux que Christiane Taubira mais il ne lui suffira pas d'être de droite !
Nous ne connaissons pas encore le détail du programme de François Fillon, encore moins celui d'Emmanuel Macron et il faudra attendre quelque temps celui de Manuel Valls qui participera à la primaire socialiste.
Nous disposons cependant d'une base que l'Institut pour la Justice a voulue lors d'une journée où Philippe Houillon notamment est venu exposer les grandes lignes du projet de François Fillon avant la primaire LR du 20 novembre.
Un livre de Louis Vogel, soutien d'Alain Juppé hier et remarquable analyste d'une réalité que maire de Melun il appréhende quotidiennement, formule "20 propositions pour la justice de demain". Aucune n'est indifférente et toutes à discuter.
Qu'on n'oublie pas demain l'AJM dans les tables rondes et dans les commissions qui ne réuniront pas, je l'espère, que des gens pensant la même chose !
@ breizmabro |e 04 décembre 2016 à 21:27
"Je suis entièrement d'accord avec vous et pas que pour la magistrature…"
Totalement OK avec vous, la densité des frères est certainement similaire chez les commissaires et contrôleurs de police : notamment à la PP, où les promotions et affectations sont avant tout « fraternelles ».
"Dans un précédent billet je m'étonnais du nombre de francs-maçons que Hollande avait placés à des postes stratégiques…"
Hélas c’est exact, mais en toute objectivité il en était de même sous Chirac : petit-fils d’un vénérable, et fils d’un frère notoire.
Rédigé par : Trekker | 06 décembre 2016 à 03:20
La liberté d'expression à deux vitesses a encore frappé les esprits par l'incohérence des propos en fonction des situations.
Quand il s'agit de défendre un journal d'extrême gauche, la liberté d'expression ne se discute pas. La pancarte "Je suis Charlie" est déclinée à l'unisson, les mains se tordent en psalmodiant "plus jamais ça".
Quand il s'agit de faire taire un site web qui veut informer les femmes des dangers encourus en recourant à l'IVG, comme c'était prévu dans la loi Veil initiale, alors là, les socialistes ne parlent plus de liberté d'expression mais d'entrave à la libre expression.
La dictature du prolétariat est confisquée par une oligarchie qui se proclame de gauche. La dictature de Rossignol est idéologiquement inspirée de celle de Staline.
Rédigé par : vamonos | 05 décembre 2016 à 16:40
@Yves
Pour trancher le débat puisque vous semblez disposer des chiffres pouvez-vous nous donner ceux du quinquennat de N.Sarkozy ?
Merci par avance.
@Yves | 04 décembre 2016 à 13:15
À la lecture de cette interview de Xavier Roussillon directeur de l’Ecole nationale de la magistrature, on se dit qu’il est vraiment dommage que votre série ne commence qu’en 2012.
http://orientation.blog.lemonde.fr/2015/03/18/le-metier-de-magistrat-interesse-de-plus-en-plus-de-jeunes-xavier-ronsin-directeur-de-lecole-nationale-de-la-magistrature/
Rédigé par : Marc GHINSBERG | 05 décembre 2016 à 10:20
@Marc GHINSBERG 19:53
Si je vous comprends bien, cela fait deux fois en quelques heures que votre bonne foi a été surprise.
Relisez votre texte, relisez le mien, avant de sauter à des conclusions hors de propos.
Rédigé par : Yves | 05 décembre 2016 à 01:09
@Xavier NEBOUT le 04 décembre 2016 à 11:36
"Pour un avenir radieux de la magistrature, il faudrait d'abord poser comme principe que le serment de maître maçon constitue pour un magistrat un crime de forfaiture.
Certes, les francs-maçons sont probablement minoritaires chez les jeunes magistrats, mais le silence sur ce sujet pèse comme du plomb sur la magistrature"
Je suis entièrement d'accord avec vous et pas que pour la magistrature.
Dans un précédent billet je m'étonnais du nombre de francs-maçons que Hollande avait placés à des postes stratégiques.
Le poids des frères se fait également sentir dans le monde de la justice. Quand Vincent Lamanda fut nommé premier président de la Cour de cassation, ce fut une minirévolution dans cette cour suprême. Tempête dans le landerneau judiciaire, truffé de frères.
La justice, même au plus haut niveau, est parfois simple comme une tenue en loge !
Les apprentis pâtissier(e)s, apprentis charpentiers ou autres jeunes à qui on offre une formation, sont aussi, la plupart du temps, des jeunes qui sont bien.
Rédigé par : breizmabro | 04 décembre 2016 à 21:27
Puisqu'on reparle du Mur des cons et que Fidel Castro vient de mourir, signalons que le premier, l'authentique, le véritable Mur des cons se trouve à Cuba, au Musée de la révolution.
Un vrai mur, un mur entier, pas un coin de bureau dissimulé comme chez les communistes honteux du Syndicat de la magistrature. Avec des caricatures géantes de Fulgencio Batista, Ronald Reagan, George Bush père et George Bush fils coiffé d'un casque nazi.
Le tout sous un énorme titre : "Rincon de los Cretinos" -- Le Coin des crétins. L'une des légendes dit à peu près : "Merci, crétin, de nous avoir aidés à consolider la Révolution".
http://bit.ly/2gQQwEM
Comme le dit un visiteur américain, voilà à quoi ressemble un pays quand on l'abandonne pendant quarante ans à des adolescents vicieux armés de mitraillettes.
http://bit.ly/2g8vD9O
Voilà où nos juges du Syndicat de la magistrature sont allés puiser leur inspiration, voilà quelles sont leurs références idéologiques.
Rédigé par : Robert Marchenoir | 04 décembre 2016 à 21:24
@Xavier NEBOUT
"Le Maître maçon jure de faire passer son devoir de fraternité au-dessus des lois !"
Merci pour cette réponse bien documentée. Faut-il les exterminer ?
Rédigé par : Frank THOMAS | 04 décembre 2016 à 20:00
Quand on se syndique à 25 ans à l'AJM c'est une déroute, c'est rejoindre par peur une confrérie de type maçonnique pour préserver sa future carrière. Une débandade.
Si jeunes et déjà si vieux.
Rédigé par : Savonarole | 04 décembre 2016 à 19:54
@yves
Donc si je vous comprends bien, pendant le précédent quinquennat il a été offert 270 places aux concours de magistrats, alors que sous Hollande, c'est 245 en moyenne... chaque année sur quatre ans. Merci pour ces chiffres que je n'avais pas trouvés Je me réjouis effectivement de cette évolution. Je pense que Christiane Taubira n'y est pas pour rien. Mais cela c'est trop difficile à dire pour Philippe Bilger.
Rédigé par : Marc GHINSBERG | 04 décembre 2016 à 19:53
@justice
Je n'ai rien à ajouter ! Fiat justitia et pereat mundus !
Grand merci monsieur ou madame Justice.
Rédigé par : duvent | 04 décembre 2016 à 19:17
@Mary Preud'homme
Lorsque les femmes magistrats sont arrivées, dans les années 70, les avocats disaient que c'était une catastrophe car elles étaient incapables de juger une semaine par mois.
C'était avant que l'espèce humaine évolue, car de nos jours, les femmes n'ont plus de règles et ne font plus d'enfant ; c'est bien connu. A savoir même si la ménopause a une influence sur le psychisme...
Par contre, pour s'avaler du "par coeur", elles sont bien meilleures que les hommes.
Mais elles sont peut-être aussi moins sensibles au carriérisme.
En voilà de beaux sujets de discussion, du moins dans un pays de liberté d'expression.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 04 décembre 2016 à 19:08
@ Frank Thomas
Le Maître maçon jure de faire passer son devoir de fraternité au-dessus des lois !
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 04 décembre 2016 à 18:58
@ Catherine JACOB | 04 décembre 2016 à 15:52
"La question est devenue structurelle dans notre pays désormais à la queue des résultats scolaires de l'Union européenne et qui continue malgré tout à produire des gens à haute opinion d'eux-mêmes et méprisant des qualités d'autrui."
Puisque j'ai relié précédemment le sujet du billet à l'entre-soi, j'en apporte ici un exemple (voir le lien) qui le relie aussi à votre conclusion.
Et pourtant des tentatives pour en sortir existent : à l'EABJM, on cultive l'entre-soi d'une éducation pour les très riches.
http://lucien-pons.over-blog.com/article-a-l-eabjm-on-cultive-l-entre-soi-d-une-education-pour-les-tres-riches-un-article-de-lucie-delaport-113877043.html
@ catherine A. | 04 décembre 2016 à 16:53
C'est même de la bêtise puissance 100 000 victimes.
Petit rappel glané sur le net au hasard :
http://www.boursorama.com/forum-politique-se-souvenir-des-crimes-de-fidel-castro-444768463-1
Ceci dit, il faut aussi entendre ce que dit Régis Debray dans un entretien récent chez Z&N :
https://planetes360.fr/zemmour-naulleau-30-novembre-2016/
@ Tipaza | 04 décembre 2016 à 16:59
"La femme qui incarne la justice n’a plus les yeux bandés et c’est tant mieux, quoique parfois en entendant Christiane Taubira ou Eva Joly on regrette qu’elle ne soit pas bâillonnée."
Pour que ce soit juste et pertinent, je réclame en tant qu'avocat de la défense (seulement le temps de ce commentaire), et pour chacune d'elles, deux preuves accablantes.
Rédigé par : fugace | 04 décembre 2016 à 18:07
@Xavier Nebout
"Il y a tout lieu de penser que si les jeunes optent plus pour la magistrature que pour l'avocature, c'est que sauf à avoir un grand talent teinté de diversité pour défendre les dealers, il est difficile de débuter dans ce métier en gagnant honorablement sa vie - honorablement s'entendant comme ne se croyant pas obligé de matraquer ses rares clients."
Vous ignorez manifestement qu'un certain nombre de jeunes qui ont échoué au concours de l'ENM ou de l'ENSP se rabattent sur le métier d'avocat, l'examen du CRFPA étant beaucoup moins sélectif que les concours précités.
J'ai bien dit un certain nombre... pas tous.
Autre remarque concernant les auditeurs de justice : près de 85 % de femmes dans la dernière promotion. A ce rythme, on atteindra les 100 % dans moins de vingt ans !
Rédigé par : Mary Preud'homme | 04 décembre 2016 à 18:02
@Catherine Jacob
Pour moi, ce qui fait un bon magistrat, ce n'est ni l'âge, ni le clan, ni l'expérience qui ne mésestime pas le fait de se maintenir au courant des nouveautés de la profession, c'est la droiture alliée à l'intelligence et ce ne sont pas là qualités attachées au seul exercice de cette profession.
Je vous suis sur ce point.
Nous avons évoqué cet aspect il y a quelque temps en ce qui concerne la déontologie des journalistes, mais il est commun à plusieurs professions pour lesquelles la compétence technique, validée par un diplôme, est loin de définir à elle seule la confiance que nous pouvons accorder à ceux qui les exercent, qu'ils soient par exemple médecins ou magistrats, voire pilotes de ligne.
Par rapport à d'autres civilisations, la civilisation européenne a très tôt reposé sur la confiance, qui a par exemple expliqué en partie le développement de l'économie au Moyen Âge.
Mais cette confiance, en tant que valeur morale, a longtemps été une retombée de l'imprégnation religieuse de la société.
Comment est-il possible, dans la société laïque actuelle, souvent gangrenée de plus par le « soixante-huitardisme », par le cynisme et par le « je fais ce que je veux », d'estimer à sa juste valeur le degré de confiance que nous pouvons accorder à certains interlocuteurs revêtus de lourdes responsabilités ?
Rédigé par : Exilé | 04 décembre 2016 à 17:55
C'est exact, déjà tout petits les jeunes magistrats sont adorables et gentils, puis ça vieillit, on achète un appartement, on fonde une famille et tout à coup la vie à Saint-Avold ou Charleville-Mézières vous sort par les yeux, une boulangerie, une boucherie, 36 ronds-points giratoires, le Super U du coin, un pressing, un bar-tabac, douze mois d'hiver, tout ça pour ça.
Alors on songe à ce billet "Il y a un procureur à Dunkerque", ce héros de quinze jours, Philippe Müller, fut muté à la Réunion, où il refit parler de lui. Il en avait sa claque de Dunkerque. Promotion soleil.
http://www.lavoixdunord.fr/75574/article/2016-11-17/l-ex-procureur-philippe-muller-sera-juge-dans-l-affaire-dite-du-corbeau
"La magistrature c'est comme la médecine, il vaut mieux avoir un infarctus à Paris qu'à Béthune.
On accordera à ce procureur toutes les vertus, sans barguigner.
Toutefois, on est un peu las de ces "héros du mois d'août" ou de ces "résistants en fin de carrière", dont la mission première est de se la boucler et de mettre du charbon.
De Gabriel Aranda au juge Halphen, on ne compte plus ces sycophantes d'un jour, dont le vrai souci est bien souvent l'obtention d'une mutation dans un endroit plus ensoleillé... Et Dunkerque c'est tristounet les dimanches d'hiver, en taule ou à l'air libre."
Rédigé par : Savonarole | 01 août 2011 à 18:58
Rédigé par : Savonarole | 04 décembre 2016 à 17:50
Je ne savais pas ce qu'était l'AJM et j'ai découvert qu'il s'agissait de l'association des jeunes magistrats.
Que ces jeunes gens, qui semblent être fort sympathiques si nous en croyons volontiers Philippe Bilger, me permettent de leur faire remarquer que la jeunesse est une maladie qui passe très vite et qu'ils risquent - le temps aidant - de se trouver plus rapidement qu'ils ne le pensent personnellement en décalage par rapport à l'appellation de leur organisation.
Rédigé par : Exilé | 04 décembre 2016 à 17:36
"...qui ne réuniront pas, je l'espère, que des gens pensant la même chose !"
Difficile de lutter contre l'entre-soi. Sur ce sujet il a beaucoup été dit et écrit, et il est probable que le sujet soit inépuisable, tant les espaces qui les séparent sont nombreux.
Il est ainsi fréquent de voir l’entre-soi se constituer contre l’espace public, au sein de la sphère familiale, ce lieu où se définissent aussi les identités de classe.
L'entre-soi n'est-il pas finalement une force définissant la place des autres ?
Rédigé par : fugace | 04 décembre 2016 à 17:34
Cher Monsieur,
J'ai lu très attentivement vos propos de ce jour.
Je commencerai par une comparaison. L'émission de débats de Caroline Roux, comme celle d'Yves Calvi, qui a émigré, ont le grand mérite de réunir des gens qui sont, en principe, très informés sur le thème choisi (Amérique, insécurité, terrorisme...). Ils ont donc toujours quelque chose à dire, quand on leur donne la parole.
Au contraire, dans l'émission animée par Fogiel, sur RTL, chaque soir, les gens qui viennent et reviennent ne sont spécialistes de rien et se croient capables de parler de tout. Je rêve d'entendre un jour l'un de ces "experts sur tous sujets" avoir l'honnêteté de dire : "Je n'ai pas d'avis sur la question". Ce n'est pas demain la veille !
Contrairement à moi, qui oserai dire, aujourd'hui : sur le sujet du jour, je n'ai pas d'avis.
Bien cordialement à vous.
Rédigé par : Patrice Charoulet | 04 décembre 2016 à 17:23
Sur la photo du site ENM donné par M.Ghinsberg j'ai compté 30 types reconnaissables, dont 20 femmes. Donc, apparemment, la majorité des candidats et des reçus, peut-être, est féminine. Aucun avis à ce sujet, si ce n'est que la proportion d'impertinentes arrogantes est la même que celle des haussés du col.
Peut-être peut-on expliquer cette recrudescence au fait que les scientifiques s'en vont souvent à l'étranger faire des choses sérieuses, pensent-ils, et que les juristes, encore trop nombreux, conscients de la précarité de leur savoir et du galimatias administratif pensent que c'est dans ce maquis qu'il vaut mieux perdre leur savoir souvent stérile plutôt que de faire le trottoir devant les salles de correctionnelle, ce qui demande un certain talent (M.Giresse en a beaucoup parlé) ou de compléter leur formation par celle d'un IAE ou d'une HEC pour servir à quelque chose dans une multinationale ou encore parce qu'ils ont échoué sur les rivages obscurs de l'ENA, encore que, dans ce dernier cas, ils eussent, hollando vivo, une chance de devenir ministre.
Pour avoir beaucoup fréquenté la magistrature, je n'ai trouvé aucune différence entre les jeunes souvent rigides et hautains, et les croûtons engoncés dans leur pardessus de certitudes. Des gens intelligents, bien sûr, pleins de ressources textuelles, mais souvent titulaires d'un vocabulaire exigu et affectés d'un rachitisme syntaxique qui leur faisait pousser des cris d'orfraie, ou orfèvre, je ne sais trop, devant un factum un peu original, Gérard Cornu ayant échappé à leur sagacité. Evidemment, comme l'écrivait, au fait, je ne sais plus trop qui, "les palais de justice ne sont pas des endroits où on rigole", si ce n'est qu'un observateur extérieur pourrait se gondoler à la vue de la bataille des hauteurs sous faîte que se sont livré un temps palais et préfectures.
Quant à l'optimisme de notre hôte à propos de la santé intellectuelle de ces jeunes gens, leur ouverture d'esprit, il était temps.
J'ai le souvenir d'une jugette répondant à un magistrat expérimenté qui soulevait en privé une difficulté d'expression dans son jugement "Oui, mais sur un autre ton, svp", l'offense étant inscrite sur la conviction de son excellence. Et ce trait d'un hongreur méridional lançant au juge qui barguignait sur une question simple "Fasen ambedous loù meme mestié"
"Comment voyez-vous cela, E castraïre ?" "An leï enguènt d'enguso qué noù fan vivre". Et pour finir ce très très haut magistrat qui n'a jamais compris que chez les asiatiques, le karma ne s'accordait pas toujours à la procédure pénale.
Alors, puissiez-vous avoir raison, cher Philippe Bilger, plein d'usage et raison, ces 350 là sont à peine plus que les hoplites de Léonidas, puissent-ils donner aux citoyens le temps d'organiser la renaissance de la Justice en France, avant de succomber.
Pour ma part, des jeunes très bien, j'en ai aussi rencontré, aux commandes d'érodeuses électroniques, ou le ciseau à froid abouté à la pierre, simples, prêts dès potron-minet, "quittant" à la brune, pleins de travail bien fait, les mains sales et l'âme propre.
Rédigé par : genau | 04 décembre 2016 à 17:19
@ Xavier NEBOUT | 04 décembre 2016 à 11:36
La franc-maçonnerie est un fléau, elle ne propulse que les médiocres aux plus hautes fonctions publiques, c'est un cancer de la société française.
Voyez les nuls de l'ENA qui bloquent la vie démocratique au profit de leur corporation, et qui de plus nous donnent de grands bêtas à la tête de l'Etat.
Je pense sincèrement que la franc-maçonnerie n'est aujourd'hui qu'une vaste escroquerie institutionnalisée.
Vive les révolutions quand elles deviennent nécessaires.
Rédigé par : justice | 04 décembre 2016 à 17:07
@Xavier NEBOUT
"Pour un avenir radieux de la magistrature, il faudrait d'abord poser comme principe que le serment de maître maçon constitue pour un magistrat un crime de forfaiture."
Intéressant. Pourriez-vous être plus précis ?
Rédigé par : Frank THOMAS | 04 décembre 2016 à 17:06
Je ne connais pas grand-chose au métier de magistrat, mais si j’en crois les statistiques on constate depuis une bonne décennie une progression de la proportion des femmes dans ce métier.
Il semble même que le personnel féminin soit majoritaire chez ces jeunes diplômés.
Il aurait été intéressant d’avoir, au travers des questions qui ont pu vous être posées, votre opinion sur ces modifications du corps des magistrats.
Le droit est tout sauf une discipline rigoureuse, l’interprétation des textes joue un rôle fondamental dans les décisions qui sont prises et c’est pourquoi il existe des avocats.
Il ne saurait y avoir équivalence entre les psychologies féminines et masculines et cette différence peut induire une certaine évolution de l’application des textes.
Il était de bon ton autrefois de dire que lorsqu’une profession se féminisait, elle perdait de son aura et certains allaient même jusqu’à dire qu’elle perdait de son efficacité.
Mais c’était autrefois, bien avant le numérique, depuis l’arrivée de NKM nous savons qu’il n’en est rien.
Il est vrai que la Justice a été toujours représentée par une femme aux yeux bandés.
Le mythe est donc devenu partiellement réalité.
La femme qui incarne la justice n’a plus les yeux bandés et c’est tant mieux, quoique parfois en entendant Christiane Taubira ou Eva Joly on regrette qu’elle ne soit pas bâillonnée.
Rédigé par : Tipaza | 04 décembre 2016 à 16:59
Bon je sais je flirte avec le hors-sujet, ce que je n'aime pas, mais je ne peux m'en empêcher tant les propos de Mme Royal sur Castro sont d'une incommensurable bêtise. Il faut dire qu'ils viennent de la part de celle qui trouvait que nous n'avions pas de leçons à donner à la Chine où la justice était plus rapide qu'en France (expéditive eut mieux convenu mais Mme Royal ne connaissait peut-être pas ce terme). J'ai honte pour la France. Mme Royal qui n'est pas une perdrix de l'année n'a pas l'excuse de la jeunesse.
Rédigé par : catherine A. le temps ne fait rien à l'affaire, la preuve par Royal | 04 décembre 2016 à 16:53
Mais il y a des tas de gens qui sont bien dans tous les corps de métier et toutes les professions et à tout âge.
Le problème c'est de juger d'un comportement en fonction de critères qui n'ont aucune pertinence.
Pour moi, ce qui fait un bon magistrat, ce n'est ni l'âge, ni le clan, ni l'expérience qui ne mésestime pas le fait de se maintenir au courant des nouveautés de la profession, c'est la droiture alliée à l'intelligence et ce ne sont pas là qualités attachées au seul exercice de cette profession.
J'ai malheureusement eu l'expérience de gens ne possédant ni l'une, ni l'autre et qui comme beaucoup de personnalités de cet acabit se croyaient malins. Les conséquences ont été funestes, au sens propre, hélas ; mais que voulez-vous y faire ?!
La résolution du problème ne me paraît pas résider dans une quelconque série de mesures, ni une quelconque élection. La question est devenue structurelle dans notre pays désormais à la queue des résultats scolaires de l'Union européenne et qui continue malgré tout à produire des gens à haute opinion d'eux-mêmes et méprisant des qualités d'autrui.
Rédigé par : Catherine JACOB | 04 décembre 2016 à 15:52
Cher PB,
"Je ne savais pas ce qu'était l'AJM...j'ignorais son existence...Elle a été créée en 2007 et aujourd'hui compte environ 350 membres"
Votre information me stupéfie : elle m'en dit plus sur le fonctionnement de la Justice dans notre pays, sur l'ouverture d'esprit des anciens fonctionnaires de ce ministère. La bonne nouvelle, c'est que les nouveaux semblent plus ouverts... peut-être à cause d'un plus grand nombre de femmes dans leurs rangs ?
Rédigé par : Jean le Cauchois | 04 décembre 2016 à 15:44
Merci, Philippe Bilger, de nous parler de jeunes professionnels faisant appel à leurs aînés afin de développer leurs compétences.
Qu'ils ne s'arrêtent pas en si bon chemin !
On imagine qu'ils bénéficieraient d'une information utile en invitant des responsables administratifs et des psychologues des affaires de famille, des hommes de presse, des représentants de services de police, des chefs d'entreprise, des spécialistes de géopolitique, des islamologues...
@ Marc GHINSBERG
Il est en effet convenable d'attribuer à François Hollande et ses ministres la responsabilité de l'afflux de candidats en grand nombre vers ce concours administratif, signe évident que les diplômés de droit n'ont guère d'autres débouchés, dans l'économie, par exemple.
La responsabilité des gouvernants est également engagée dans l'évolution des places offertes aux trois concours de l'ENM.
2012 : 270
2013 : 214
2014 : 205
2015 : 280
2016 : 282.
En résumé : ancien quinquennat : 270 ; moyenne des quatre années suivantes : 245.
Je suppose que vous vous réjouissez de cette évolution. À qui l'attribuez-vous ?
Rédigé par : Yves | 04 décembre 2016 à 13:15
Merci, Philippe, d'évoquer ici la mémoire de cet orateur d'exception, magistrat exceptionnel au charisme hors norme, que fut Dorwling-Carter.
Ayant été commis d'office dans la fin des années 70 aux assises pour défendre un légionnaire qui, ayant déserté, avait eu la fâcheuse idée d'occire le propriétaire de la maison où il s'était réfugié, propriétaire qui revenu à l'improviste n'était autre que son capitaine, j'eus à l'affronter.
J'ai compris très vite que ce fauve me dévorerait tout cru, ce qui arriva et me convainquit d'abandonner le pénal pour le civil.
Merci à lui de m'avoir montré, par son éclatent talent, la voie à ne pas suivre.
Rédigé par : sbriglia | 04 décembre 2016 à 12:24
De ce billet, Monsieur Bilger, je retiendrai ce court passage : "La présence de l'AJM dans le paysage judiciaire constitue une possibilité - si la jeunesse qu'elle invoque ne s'arrête pas trop tôt - de casser des rigidités, des orthodoxies, des partialités, de faire circuler un air de liberté et de spontanéité, d'amabilité et de souci du citoyen dans un univers qui en a besoin."
Le problème reste que ces rigidités touchent un certain nombre de hauts magistrats trop imbus de leurs rangs hiérarchiques. Sans doute sera-t-il indispensable qu'ils (elles) commencent à avoir de la considération pour leurs subordonnés, magistrats comme greffiers en chef ou greffiers. Le malaise relationnel est patent et c'est bien là que l'ENM devra aussi former les futurs magistrats : la relation humaine, tout simplement.
Rédigé par : Robert | 04 décembre 2016 à 11:36
L'avis d'un étranger au palais tout en connaissant un peu le sujet, donc libre et rare :
Les jeunes magistrats francs-maçons ne sont pas encore montés bien haut en grade et donc pas encore confrontés au serment du maître.
Pour un avenir radieux de la magistrature, il faudrait d'abord poser comme principe que le serment de maître maçon constitue pour un magistrat un crime de forfaiture.
Certes, les francs-maçons sont probablement minoritaires chez les jeunes magistrats, mais le silence sur ce sujet pèse comme du plomb sur la magistrature.
Vient ensuite le problème de l'insuffisance de formation philosophique qui devrait être essentielle, et on doit entendre par philosophie, la vraie, celle qui ne se plie ni ne génère les idéologies, notamment celle qui consiste à juger en fonction de la position des parties et non du droit. Le fort qui doit avoir tort face au faible ou supposé tel, c'est de la justicerie, pas de la justice.
Il faudra aussi trouver le moyen de juger les juges pour ne pas que le premier président voulant se débarrasser d'un mauvais magistrat soit contraint de proposer son avancement ailleurs. C'est un comble que les mauvais magistrats aient une plus brillante carrière que les bons !
J'avais évoqué l'idée que les juges soient notés par les avocats et inversement. Il y a peut-être mieux, mais on attend de voir.
@Marc GHINSBERG
Il y a tout lieu de penser que si les jeunes optent plus pour la magistrature que pour l'avocature, c'est que sauf à avoir un grand talent teinté de diversité pour défendre les dealers, il est difficile de débuter dans ce métier en gagnant honorablement sa vie - honorablement s'entendant comme ne se croyant pas obligé de matraquer ses rares clients.
Et c'est d'autant plus difficile que la justice n'étant pas fiable, un avocat ne peut jamais dire à son client "vous avez le droit pour vous, donc, nous allons gagner". Après, il faudrait pouvoir dire "ce juge est pourri" sans se faire rayer du barreau.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 04 décembre 2016 à 11:36
Bonjour,
Bien sûr et heureusement qu’il y a des jeunes bien et ceci dans toutes les corporations, toutes les communautés et tous les milieux sociaux du plus humble au plus élevé.
Tout repose sur une éducation responsable par ceux qui les premiers ont le devoir de l’assurer, à savoir les parents.
Il est vrai cependant qu’avec la multiplication des familles recomposées cela peut poser quelques problèmes. Les obligations professionnelles ont également leur part de responsabilité, se traduisant par un manque d’attention envers le comportement de ses enfants, surtout lorsqu’ils atteignent l’âge de l’adolescence et qu’ils cherchent à s’émanciper.
L’Education nationale ne peut pas se substituer au rôle des parents, son action se situe d’abord au niveau de l’enseignement des matières nous permettant de disposer des connaissances fondamentales pour entrer dans la vie active, ceci en fonction des affinités de chacun.
Les uns seront juristes, d’autres scientifiques, d’autres artistes, d’autres artisans capables de réaliser des choses magnifiques de leurs mains, certains se lanceront dans la politique avec plus ou moins de succès et tout cela fera d’excellents Français, ou presque.
Hélas, il y aura aussi des racailles ou des sauvageons (à chacun l’expression qui lui convient). Il y aura aussi des illuminés prêts à toutes les ignominies pour défendre une cause qui le plus souvent les dépasse car ces individus n’ont généralement pas la force de caractère ni l’intelligence leur permettant de résister à un prosélytisme insidieux.
La vie est faite de gentils et de méchants, d’asociaux et de bons citoyens, d’imbéciles et d’intelligents. Chacun de nous doit faire avec. Parfois c’est dur, mais on y arrive.
C’était ma minute tautologique, j’arrête là.
Rédigé par : Achille | 04 décembre 2016 à 11:32
Il y a des tas de jeunes qui sont bien, pas seulement dans la magistrature.
Le genre AJM est une vaste organisation dans les écoles d'ingénieurs où les devises Fraternité et Egalité sont scrupuleusement honorées.
Rédigé par : Claude Luçon | 04 décembre 2016 à 11:31
Cher Philippe,
Je ne connais pas grand-chose au métier de magistrat. Une question toutefois. Le concours de la magistrature 2016 enregistre une progression de 90% de candidats en cinq ans. Je suppose que vous vous réjouissez de cette évolution. À quoi, ou à qui, l’attribuez-vous ?
http://www.enm.justice.fr/?q=actu-24mars2016
Rédigé par : Marc GHINSBERG | 04 décembre 2016 à 10:11