Il paraît que "la com à la papa, c'est fini" et qu'en 2017, l'heure n'est plus "aux spin doctors omniscients... mais à l'impro et à la créativité" (Le Parisien).
Mais dès lors que cette "impro" et cette "créativité" ne surgissent pas de l'être qui seul pourrait leur donner sens et authenticité, mais de la cellule en communication qui l'entoure, qui l'enserre, elles sont caduques et de fait, la plupart du temps, apparaissent moins comme l'expression d'une personnalité que comme la soumission à un verbe et à une cohérence venus d'ailleurs.
Le jour où la vie publique sera débarrassée de la communication institutionnalisée, où les cellules de communication ne viendront pas pour tout et n'importe quoi dicter aux élites, à des responsables politiques ou autres, dans tous les domaines du pouvoir, de l'autorité, de l'entreprise et de la culture, pour l'attaque aussi bien que pour l'apologie, ce qu'ils devront proférer, la démocratie s'en trouvera mieux. Et la morale. Et la capacité de convaincre.
Au hasard de mes rencontres professionnelles je suis tombé des nues quand on m'expliquait que par exemple des grands patrons avaient besoin d'intenses travaux préparatoires pour s'exprimer devant des assemblées générales. Même très peu de temps. Comme s'ils ne savaient plus penser par eux-mêmes - ou en tout cas sans le concours d'une "cellule de com" -et parler librement.
Quand je lis cette interrogation : "Anne Méaux sauvera-t-elle Fillon ?", immédiatement je crains le pire et de fait, depuis quelques jours, il est parfois advenu.
Je ne connais pas Anne Méaux dont la réputation est irréprochable et la place dominante dans son espace professionnel.
Pour ma part, et j'ai bien conscience d'ériger une piqure d'épingle en démonstration incontestable, je me méfie des célébrités et des compétences systématiquement vantées qui ne sont même pas capables, malgré leur infrastructure technique et d'assistance, de cette politesse élémentaire, pour qui prétend enseigner la bonne manière de communiquer, de l'accusé de réception pour les courriers et les messages reçus.
Je suis en effet obligé de constater que la communication du candidat Fillon qui avait dominé la primaire de la droite et du centre et suscité l'adhésion à la fin de "L'Emission politique" avec David Pujadas n'a pas été à la hauteur depuis la publication d'une charge du Canard enchaîné contre lui-même et son épouse.
Et je connais trop bien cette publication pour imaginer que son offensive va s'arrêter net alors qu'au contraire elle va être de longue haleine et s'en prendre, sous toutes ses facettes, à l'existence politique et personnelle de François Fillon.
Il faut donc se préparer à cet avenir et la meilleure des méthodes - je continue à le penser au risque d'apparaître pour un naïf - est de laisser le principal intéressé et son épouse - puisqu'ils ont été entendus déjà dans l'enquête ouverte par le Parquet national financier (PNF) - exprimer avec sincérité et sans calcul la vérité de leur proximité, de leur collaboration et de ses avantages de toutes sortes.
J'ai été effaré quand la première réaction de François Fillon, après la publication de l'article du Canard, a incriminé "le temps des boules puantes" et dénoncé "la misogynie". Ce n'était pas le sujet et la riposte était totalement inadaptée. C'était de la com !
Ensuite il a heureusement rectifié le tir et sa prestation sur TF1 a été remarquable. Il était parfaitement capable à lui seul de répondre aux questions de Gilles Bouleau en mettant l'accent sur la manoeuvre politique, les éléments factuels du travail de son épouse et l'émotion de l'époux de la voir ainsi accablée. J'espère qu'il n'a pas eu besoin pour préparer ces quelques minutes de télévision de tout un "staff" auprès de lui venant lui présenter des idées et une argumentation infiniment banales pour qui se trouve dans la position d'un favori dénigré.
La manifestation de La Villette a été un succès considérable avec tout de même, dans l'ambiance enflammée, une ou deux considérations qui ne me semblaient pas opportunes. Il ne peut pas déplorer que son épouse soit dans le débat public alors que la polémique, à laquelle il oppose sa vigueur intellectuelle et son talent de contradicteur, la met forcément, avec lui, au coeur de celle-ci. Pas besoin de com pour comprendre cela !
Une équipe doit-elle réfléchir à la place de François Fillon, alors qu'il a auprès de lui l'aide précieuse du sénateur Retailleau, pour appréhender les divers niveaux de la dispute ? Le légal, la réalité du travail, la décence du comportement, tous éléments qui ne seraient pas autant pris au sérieux si François Fillon n'avait pas réussi à imposer, dans une classe politique pas trop rigoriste, jusqu'à aujourd'hui une image de parfaite intégrité. A-t-on besoin d'une cellule de com pour se pencher sur ce possible hiatus dont les conséquences pourraient être dévastatrices si sa bonne foi et son honnêteté n'étaient pas admises ?
Il y aura d'autres attaques. François Fillon ne devra pas organiser un symposium pour tenter de trouver la parade ! La plus belle, et en même temps la plus efficace, tiendra à l'affirmation de ce qu'il est, de ses forces et éventuellement de ses faiblesses. L'amour qu'il éprouve pour son épouse ne peut que toucher le citoyen. Un tel sentiment lui attirera les faveurs d'une majorité s'il ne se traduit pas de sa part par une volonté excessive et peut-être trop habile de mettre Penelope à l'abri. D'aucuns sont choqués qu'elle ne prenne pas la parole. De fait, si elle s'exprimait, elle ne tomberait pas dans la vulgarité médiatique...
La com, c'est la plaie pour cette raison fondamentale que pour se justifier, ces cellules, ces équipes, ces collectifs ont besoin de faire croire à ceux qu'ils conseillent et inspirent qu'ils ne sauraient pas trouver eux-mêmes les mots et les idées. C'est absurde.
Et il y a encore plus grave.
Pour démontrer leur nécessité, ils cherchent à proposer des répliques, des argumentaires et des stratégies qui se doivent à toute force d'apparaître originaux, inventifs et parfois tellement décalés qu'ils tombent dans le ridicule.
Pour que leur "poulain" - leur protégé ou leur victime ? - ne puisse pas concevoir une seconde qu'il serait capable à lui seul de les élaborer, d'avoir l'imagination pour les concevoir. Il faut qu'il se ressente inférieur à ceux qui lui font croire que leur dictée est la bonne.
Et c'est la catastrophe. Face à un réel qui appelle des réponses claires, sans équivoque, adaptées à la joute, au lieu de privilégier sa parole, sa sincérité, sa bonne foi, l'homme ou la femme, se croyant en péril, va chercher hors de lui ou d'elle une matière qui sera maladroite, imprudente, biaisée et corsetée.
Puisque ce ne sera pas la leur, authentique et spontanée.
On n'a pas à travailler sur la vérité pour l'organiser ou la rendre présentable, on a à la dire. Et on gagnera sur les deux tableaux.
La com, c'est vraiment la plaie !
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