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Rédigé le 28 février 2017 | Lien permanent | Commentaires (93)
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Donald Trump, depuis son accession à la présidence des Etats-Unis, au mieux inquiète, au pire révulse. Il est un diable relatif ou total mais clairement une erreur, une faute de la démocratie.
Le principal grief qui lui est fait - si j'excepte ses foucades brutales sur l'immigration - est d'avoir adopté à l'encontre de certains médias américains une attitude offensive, de discrimination. Les uns sont acceptés et même vantés, les autres ostracisés.
Il y a des opportunités de réflexion même dans les comportements qui apparaissent les plus choquants. Ceux-ci permettent d'appréhender des idées, des problématiques qu'en général on n'aborde jamais parce qu'il y a des vaches sacrées et que l'immunité sociale et politique des journalistes en représente une part fondamentale.
Alors l'attitude de Donald Trump, un scandale ou une révolution ? Serait-elle concevable, un jour, de la part d'un président français ?
Déjà, sur un pied très modeste, je ne me dissimule pas l'inévitable rançon que je devrai payer parce que j'ose formuler une telle interrogation qui est à elle seule blasphématoire.
Il est facile de s'en convaincre quand d'habiles interventions dans la campagne présidentielle, la main sur le coeur et par sincérité ou démagogie, viennent critiquer les candidats et leur public qui huent ou font huer les journalistes. Il y a des lignes qu'il ne faut jamais franchir et qui seraient essentielles pour la dignité de la République et la liberté d'expression.
Sur le plan judiciaire il est clair que des journalistes peuvent être condamnés pour des délits de presse, notamment de diffamation et d'injures, et que la procédure délibérément complexe régissant ce type d'infractions ne les protège pas toujours d'une sanction.
Mais sur tous les autres registres, les médias, dans notre pays, sont tranquilles et sereins. La liberté qui leur est garantie - parce que, paraît-il, sans elle qui est une valeur indépendante du contenu qu'on lui attache, il n'y aurait plus de démocratie - leur permet d'exprimer, par écrit ou oralement, ce qu'ils souhaitent, qu'ils soient les vecteurs de la pensée et des opinions des autres ou les créateurs des leurs. Ils ne sont pas soumis, dans leur quotidienneté, en dehors de périodes exceptionnelles et limitées dans le temps, à un pluralisme qui par ailleurs est généralement célébré. Ils ont le droit, pour leur information, de se rendre auprès de toutes les sources officielles, politiques, culturelles, judiciaires qui sont susceptibles de les éclairer. Ils peuvent rendre compte comme ils l'entendent de ce qu'ils ont relevé, entendu et lu. Ils ne sont pas tenus de résumer honnêtement une globalité, ils ont l'infini pouvoir de la démembrer, avec une partialité subtile ou ostensible qui, sortant aisément du champ étroit de la délinquance de presse, est redoutable parce que nulle obligation n'est imposée aux journalistes qui ne soit pas d'abord validée par eux-mêmes.
Donald Trump innove parce qu'il ne se contente plus des moyens classiques et honorables de rétorsion. Parce qu'il ne tend plus l'autre joue et que de manière explicite, il sépare son bon grain d'une ivraie qu'il dénonce. Il boycotte la soirée des correspondants, sans doute parce qu'il n'aurait pas eu le talent de Barack Obama pour y faire bonne figure, et interdit l'accès à la Maison Blanche à des chaînes et des journaux dont il estime qu'ils lui sont systématiquement hostiles. Par son comportement, il prétend vilipender leur absence d'objectivité et porter sur le plan politique un combat cantonné d'habitude dans les domaines technique et juridique.
Alors, scandale ou révolution ?
Bien sûr on est contraint d'exclure du champ de cette alternative le culturel et spécialement la critique sous toutes ses formes. Pourtant mettre en cause le clientélisme qui prospère en France et qui conduit à douter par principe des appréciations dithyrambiques ou incendiaires relatives aux évaluations littéraires, cinématographiques ou théâtrales est devenu une évidence tant ce milieu est indissociable d'un trouble copinage. Quel bonheur alors, par contraste, d'entendre ou de lire un Philippe Rouyer, un Jérôme Garcin ou un Eric Chevillard qui, avec l'austérité qu'il propose et les ouvrages qu'il vante, nous rassure au moins sur sa parfaite et ennuyeuse objectivité !
Prenons l'exemple d'Augustin Trapenard, aussi agaçant qu'il est stimulant sur France Inter. Après la cérémonie des César, il fait la promotion de Divines. Mais est-il vraiment nécessaire, parce que certaines admirations sont obligatoires, d'évoquer un chemin vers "la dignité et le sacré" quand l'amitié entre les deux héroïnes est belle certes mais sur un fond de drogue et de trafic banalisé, même traité avec complaisance ? L'auditeur peut être contrarié mais n'a pas le choix : même à supposer la liberté de Trapenard contrainte, il convient d'accepter et il serait profondément antirépublicain de laisser l'Etat s'en mêler et gouverner le goût !
Mais pour la politique, il n'est pas honteux d'oser cette question. Quand la liberté des médias les conduit systématiquement, sans l'ombre d'une ouverture, sans un zeste de positivité, avec une constance qui ne connaît jamais la moindre baisse de régime, à fustiger seulement tel ou tel adversaire, responsable de parti, de droite ou mariniste, tel maire ou telle personnalité, le masochisme des victimes est-il obligatoire ?
Quand une publication ou un site révèlent qu'ils ont ostensiblement un préjugé, que celui-ci dans la conscience civique est évidemment licite mais que dans la pratique professionnelle il est dévastateur, que rien, jamais, ne les détournera du combat idéologique qui les anime, serait-il malsain pour les cibles toujours offensées de ne plus se mettre à la disposition libre et ouverte de leurs inéluctables, implacables contempteurs ?
Quand le discours médiatique est d'une hostilité homogène, peut-il réclamer d'être perçu comme si virtuellement au moins il laissait toutes ses chances à l'opinion contraire ? Fermer la porte à qui détesterait entrer ou l'ouvrir à qui détesterait y être ?
Il est ironique de constater que les médias officiels jamais en reste d'une inexactitude, d'une approximation ou d'une partialité ont pour ambition de nous indiquer sur la Toile ce qui est vrai ou faux. Noble dessein mais entreprise périlleuse. Quelle légitimité ont-ils ?
Aujourd'hui ce sont la droite et l'extrême droite qui ici ou là font l'objet de ce traitement hémiplégique et l'extrême gauche et ses suites de violences et de désordres qui en revanche ne se voient jamais décrites et récusées comme elles le mériteraient - François Fillon a eu raison de pointer un climat de "quasi-guerre civile" très préoccupant à cause de la mansuétude du Pouvoir - mais demain ?
Demain ce pourrait être l'inverse.
Alors Trump, scandale ou révolution ?
La France sera toujours à l'abri, d'abord parce que Donald Trump est unique et américain et que notre révérence médiatique est si profondément ancrée dans notre esprit public que parfois elle stérilise et interdit l'audace. Les vaches sacrées le demeureront.
Mais les médias ont dû sortir du champ clos de leur confort et ce n'est pas rien.
Un scandale ou une révolution ?
Un avertissement, une semonce, une prise de conscience.
Rédigé le 28 février 2017 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (57)
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Rédigé le 26 février 2017 | Lien permanent | Commentaires (93)
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Lors de la remarquable campagne de 2007, j'avais rencontré à deux ou trois reprises Emmanuelle Mignon qui avait élaboré le programme de Nicolas Sarkozy et avait toute sa confiance. Il s'agissait de préparer une convention sur la Justice que le futur président de la République allait clôturer et où j'aurais l'opportunité d'intervenir juste avant lui.
D'une intelligence exceptionnelle reconnue par tous mais d'un abord qui n'abusait pas du sourire et de la cordialité, Emmanuelle Mignon avait veillé à mettre en place les séquences et le rythme de cette réunion, la dernière avant le premier tour de l'élection présidentielle. J'avais été à la fois impressionné et réfrigéré.
Ayant suivi vaguement son parcours depuis la défaite de Nicolas Sarkozy en 2012, je n'ignorais pas que celui-ci lui avait fait reprendre du service mais avec sans doute l'arrêt de leur collaboration après la primaire de la droite et du centre.
Aussi, dans une analyse passionnante des projets politiques, d'une certaine manière de leur inutilité puisque le réel et le pouvoir effectif les réduiront en pièces, j'ai retrouvé avec un grand intérêt sa lucidité, voire sa brutale sincérité ne se payant pas de mots (Magazine du Monde, Laurent Telo).
Ne déclare-t-elle pas en effet : "Il faut être cynique. Faire un programme pour se faire élire, le mettre à la poubelle une fois au pouvoir mais prendre les cinq mesures indispensables dans les trois premiers mois".
J'entends déjà les responsables politiques de haut niveau, les anciens présidents comme ceux qui ambitionnent de le devenir, se récrier la main sur le coeur en affirmant qu'une telle démarche aurait été immorale, scandaleuse ou que jamais ils n'en useraient. Ils invoqueraient l'esprit démocratique, la transparence, la fidélité aux engagements.
Pourtant, à bien considérer notre histoire depuis 1958, seuls deux présidents, dont les personnalités étaient dissemblables et les antagonismes profonds, ont contredit la règle énoncée par Emmanuelle Mignon. Charles de Gaulle, quand il est revenu au pouvoir, et François Mitterrand de 1981 à 1983.
Là où celle-ci fait mal et vise juste, c'est quand elle a le culot de ne rien dissimuler et d'afficher que des campagnes sont délibérément trompeuses par rapport à leurs suites, que le gouffre est voulu entre le programme radical pour conquérir et sa réduction pour durer.
Il me semble évident que la radicalité du projet de François Fillon a été décisive pour la joute de la primaire, qu'elle s'est atténuée ensuite et que probablement, lui élu en 2017, il l'adapterait aux aléas, aux contraintes et aux oppositions que la République ne cesse de faire surgir malicieusement ou honorablement pour battre en brèche ce qu'une majorité pourtant avait accepté.
Les personnalités présidentielles peuvent toujours invoquer d'excellentes excuses pour expliquer leurs promesses non tenues. Qui soutiendrait qu'entre la liberté illimitée du volontarisme et des espérances et la pesanteur de l'existant à connaître, mesurer et maîtriser, il n'y a pas un immense, un inévitable hiatus ?
Dans l'observation d'Emmanuelle Mignon, il faut accepter le cynisme et le fait d'une fraude totalement assumée. On ment pour devenir président et ensuite on ne garde que l'essentiel réduit à quelques mesures. Même dans une classe politique dont l'éthique n'est pas le fort, je doute d'un tel degré de mépris démocratique.
Emmanuelle Mignon fournit une clé opératoire, la caricature d'une ambition sans limites mais terriblement efficace. On ne reprocherait pas au président, selon les voeux d'Emmanuelle Mignon, d'avoir renié tous ses engagements mais de les avoir raréfiés pour l'efficacité de son action. Apparaîtrait-il, après les trois premiers mois, comme un président médiocre, frappé d'immobilisme ?
Agir très vite et durer tant bien que mal ensuite jusqu'à la réélection. Et on repart selon le même processus. On se précipite puis on se repose.
Machiavel n'aurait pas détesté la fulgurance sans fard d'Emmanuelle Mignon.
Rédigé le 26 février 2017 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (50)
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Rédigé le 25 février 2017 | Lien permanent | Commentaires (13)
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Pourquoi interdirait-on à ce superbe avocat, qui a été le premier vice-bâtonnier de l'Ordre à Paris, de rêver ?
D'autant plus qu'il a écrit, avec son "Changer la Justice", un livre singulier, unique.
Contrairement à beaucoup d'ouvrages rédigés, seuls ou de concert, par des avocats, il ne s'agit pas d'une exhibition mais d'une réflexion. Deux ou trois exemples personnels viennent illustrer les concepts et renforcer l'argumentation. Mais aucune anecdote superfétatoire ne viendra troubler la pensée ni faire briller le personnage au détriment du professionnel attaché à ouvrir de nouveaux chemins.
Atypique encore ce livre, grâce à son style et à son ton. Qui a eu le bonheur judiciaire d'entendre Jean-Yves Le Borgne avec une éloquence riche, sophistiquée et cultivée, impeccable dans la forme, profonde pour le fond, constatera à quel point l'écriture, chez lui, échappe à des défauts qui me sont familiers et qui renvoient à une longueur "proustienne" pour, au contraire, offrir limpidité et simplicité qui n'excluent pas la prodigalité du vocabulaire et les bonheurs d'expression.
Surtout le lecteur n'est pas confronté à un règlement de comptes. La magistrature ne fait pas l'objet d'un procès aigre et systématique, faisant perdre toute crédibilité aux thèses exposées risquant d'apparaître alors davantage comme la conséquence d'une frustration ou d'un ressentiment que d'une froide lucidité. Le barreau, évidemment, n'est pas vilipendé mais pas surestimé non plus. Jean-Yves Le Borgne ne présume pas le pire chez ceux qu'il évoque globalement mais pour magistrats et avocats, il ne s'abandonne jamais à une dénonciation facile mais les maintient, pour la validité de son raisonnement, dans une honnête moyenne. Ce qui est probablement conforme à la vérité de la plupart des pratiques.
Cette modération, ce souci de mettre l'essentiel à l'abri des foucades et impulsions trop personnelles n'aboutissent pas cependant à un livre tiède, sans provocation ni invention. L'auteur préfère les analyses institutionnelles avec leurs forces et leurs dysfonctionnements structurels à la mise en cause acerbe des comportements. Il fait le procès d'une mauvaise Justice gangrenée par des pesanteurs, des préjugés, des conformismes et des partialités. Son livre s'articule autour des juges, des procureurs, de la peine et de la justice civile et il est enrichi par des encadrés résumant les idées force.
Est-ce à dire que, dans cette réflexion qui s'abstient de démagogie mais est irriguée par une philosophie de la défense coulant en quelque sorte dans les veines de chaque chapitre, tout soit immédiatement admissible ?
Aucun des changements qu'il suggère n'est absurde et on devine comme Jean-Yves Le Borgne s'est efforcé de donner l'impression du caractère opératoire des mesures novatrices qu'il jette dans le débat.
La mise à l'écart sur une île - qui remplacerait la rétention de sûreté pour les êtres irrécupérables - ne s'accomplira jamais.
La volonté d'introduire les citoyens dans les activités juridictionnelles semble irréaliste au regard de la cour d'assises où le jury populaire n'a été une réussite que parce qu'on avait créé une procédure préparée pour lui, adaptée aux citoyens.
L'obsession de trouver des modes de traitement des affaires détachés de la judiciarisation, de la culpabilité et de la sanction révèle la propension de ce brillant avocat à imaginer un monde où il n'aurait plus l'angoisse ou l'espérance de perdre ou de gagner une cause.
L'accent mis constamment sur les principes d'individualisation et de personnalisation impliquerait une grille d'appréhension et d'appréciation tellement fine et sophistiquée qu'elle susciterait le naufrage de la justice par un excès de nuances, à cause d'un étouffement par les détails. Alors que faire fond sur les actes passés et présents et les éventuels gages d'avenir instaurerait une justice plus objective, moins soumise aux humeurs et aux états d'âme. La psychologie peut se tromper, un casier judiciaire ne ment pas.
Ce sont des réserves, des contradictions qui ne sont pas décisives, pas davantage que les orientations que l'auteur soumet à notre attention avec une vision que le péremptoire n'altère pas et que le totalitaire laisse indemne.
Jean-Yves Le Borgne nous expose aussi quelles sont sa conception de la magistrature et son image du barreau. L'une et l'autre sont inspirées par un classicisme intelligent et harmonieux, une maîtrise de soi et de son pouvoir aux antipodes de l'hubris grecque, la démesure. C'est sans doute une tendance forte, une disposition de cette personnalité estimée par tous dans le monde judiciaire.
Pour les magistrats, si l'indépendance des juges du siège est entière et doit être garantie absolument, les procureurs, à son sens, sans qu'il aspire à la création de deux corps distincts, n'ont une légitimité qui ne leur vient que de l'Etat et de la loi qu'ils ont la charge de faire respecter. Ils sont les délégataires de la puissance publique, ils sont ses porte-parole. Si leur démarche autorise l'interprétation de la loi appliquée dans sa généralité à une situation particulière, ils ne doivent jamais oublier qu'ils n'ont pas de pouvoir propre et constituent une partie comme une autre même si leur position due à un "accident de menuiserie" pourrait au profane laisser croire le contraire.
Il y a quelque chose de très révélateur dans la manière dont Jean-Yves Le Borgne, pour détourner le Parquet d'un verbe trop engagé, partisan, autarcique genre "Mur des cons", verbe en effet scandaleux, ne lui propose comme autre perspective qu'une parole quiète, obéissante, dépendante, officielle sans s'arrêter à la possibilité et à la chance médianes d'un ministère public à la fois respectueux de ce qui le justifie et capable de déborder du cadre trop convenu dont on rêverait pour lui. Jean-Yves Le Borgne n'enferme-t-il pas avec volupté les procureurs dans la prison honorable de l'Etat pour en faire des partenaires idéaux pour le barreau, jamais gênants, toujours décents ?
Pourtant la conception qu'il a du rôle de l'avocat est infiniment courageuse et pertinente. Dans un monde judiciaire où l'antagonisme et les "grandes gueules" sont portés aux nues, son analyse tranche. A bien le suivre, l'avocat, plutôt que de cultiver les affrontements, doit faciliter les compromis et être doué pour le dialogue. Loin d'être forcément une bête judiciaire de combat, il ne devrait pas avoir honte de se poser et de se comporter, autant que les affaires le permettent, comme pacificateur. Ce n'est pas du sel qu'il convient de jeter sur des plaies à vif mais de l'intelligence et de la sagesse. Du baume.
Pour cette belle ambition encore faut-il être obsédé par le fait qu'on n'est pas seulement l'auxiliaire de son client mais celui, d'abord, de la Justice. Jean-Yves Le Borgne manifeste ainsi qu'il n'est pas d'avocat exemplaire qui dans le même mouvement ne réunisse compétence et éthique, le service du particulier et la cause de l'universel. Avec l'accusation, on va alors ensemble vers la même vérité. Tous les consensus ne sont pas mous.
Jean-Yves Le Borgne ne s'est pas trompé. Je ne sais si un autre pouvoir pourra mettre en oeuvre certaines de ses pistes mais je suis persuadé que la justice serait profondément changée si demain on n'oubliait pas la teneur de ce livre et la qualité de qui l'a écrit.
Rédigé le 24 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (33)
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Rédigé le 22 février 2017 | Lien permanent | Commentaires (163)
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Le Front national, depuis longtemps, n'est plus en état d'invoquer, en son sein et pour ses attitudes politiques nationales et internationales, l'image d'une intégrité absolue qui le distinguerait radicalement des autres partis. Il est comme les autres, d'aucuns soutiennent qu'il est pire que les autres.
Pourtant le FN ne pâtit nullement des affaires qu'il secrète et beaucoup s'en étonnent. Il suffit de relever les intentions de vote qui régulièrement placent Marine Le Pen en tête du premier tour de l'élection présidentielle. Elle est même en progrès, aidée par une réalité et des adversaires qui semblent la servir (Elabe le Figaro).
Il est facile de donner quelques explications qui, n'étant pas spécifiques au FN, ne seront pas décisives. L'absence d'enrichissement personnel, le constat que les transgressions principales sont visées par des instances européennes dénuées de neutralité, les dénégations des responsables du FN, l'évidence que des enquêtes et des informations n'épargnent pas ce parti sont autant d'éléments susceptibles de justifier banalement sa relative immunité politique.
Mais il y a autre chose, de bien plus profond, qui permet d'éclairer cette discrimination qui bénéficie au FN, avec des affaires qui ne l'affectent pas. Il caracole sans être entravé par ce qui lui est imputé ici ou là.
A force de sonner le tocsin, il n'est plus entendu.
A force de crier au loup, on le perd de vue quand il est là.
A force d'hypertrophier le danger fantasmé, on oublie de se préoccuper du véritable.
A force de crier que le FN est fasciste, qu'il n'est pas républicain et que ses électeurs sont peu ou prou des obtus indignes de notre conception, forcément la plus élevée, de la démocratie, on a habitué les citoyens à une sorte d'opposition constante et à l'intensité toujours maximale. Le FN ne cesse pas de baigner, dans l'espace national, pour la sphère médiatique, dans un climat paradoxal : il n'a pas été interdit mais on a eu l'impression parfois qu'il était traité comme s'il l'était. Il a été souvent la bonne conscience trop engagée et partisane de personnalités bien complaisantes par ailleurs.
La dédiabolisation opérée tant bien que mal par Marine Le Pen - il reste dans le parti encore des traces du diable mais pour l'essentiel on a fui l'indignité historique et éthique pour le registre politique, aussi discutable soit-il - n'a pas été perçue à sa juste valeur et on a continué un procès qui aurait mérité d'être amendé. Le discours politique et médiatique n'a pas évolué et malgré ses succès électoraux - ou à cause d'eux ? - le FN n'a pas changé de statut : pestiféré et menaçant.
Ce qui a permis à ce parti de s'entêter à jouer sur la corde victimaire alors que sa présence médiatique et ses avancées politiques, au moins dans les premiers tours, contredisaient cette approche.
Dans la mesure où l'objectivité, sauf circonstances exceptionnelles - sur sa prescience du terrorisme par exemple -, n'a jamais été considérée comme une obligation pour rendre compte des propos et de l'action du FN, ce dernier s'est naturellement toujours trouvé plongé dans des suspicions, des partialités, des accusations et des mises en cause qui ont eu l'effet singulier de rendre inaudibles, sans importance les allégations liées aux affaires. Le procès symbolique et idéologique constant a étouffé les possibles procès réels. L'opprobre policier et judiciaire est noyé dans le naufrage démocratique que les adversaires du FN ont déploré à son sujet sans aller au-delà, pour certains, de la pétition de principe généreuse et abstraite.
A partir d'une telle configuration, comment les intentions de vote pourraient -elles se dégrader, pourquoi les citoyens se détourneraient-ils d'un parti toujours attaqué au point que les procédures contre lui apparaissent au pire comme la continuation de l'hostilité, au mieux pour l'expression renouvelée d'une injustice ?
Les affaires du FN ne lui font pas mal. C'est la rançon d'une exacerbation morale qui n'a jamais été capable d'appréhender normalement ce parti, tant qu'il est et se maintient dans l'espace démocratique, de sorte que l'anormalité de ses possibles infractions s'est totalement fondue dans la masse, dans une indifférence lassée.
A force d'avoir désavoué le FN affirmant qu'il fait chaud en été, on fait douter des authentiques égarements dont on l'accable.
C'est la faute de ses ennemis compulsifs et sans imagination.
Rédigé le 22 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (103)
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Rédigé le 20 février 2017 | Lien permanent | Commentaires (55)
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Henri Guaino est une nature.
Nul ne trouve grâce à ses yeux que lui-même. En tout cas dans le domaine politique.
François Fillon est catastrophique et va faire perdre la droite et Emmanuel Macron est pire que Marine Le Pen, c'est dire. La classe politique est nulle car elle ne comprend rien. La France est quasiment la propriété exclusive d'Henri Guaino (Le Figaro).
On aimerait l'aider et lui trouver, dans son désert, une personne à estimer, voire à admirer. Certes il y a eu Philippe Séguin mais à la longue celui-ci doit se sentir un peu seul dans le panthéon d'Henri Guaino car il ne croise que lui dans le royaume des nostalgies.
Durant quelques années Nicolas Sarkozy avait semblé faire l'affaire mais il n'a pas été à la hauteur de l'orgueil d'Henri Guaino qui, n'étant pas n'importe qui, ne veut pas être floué et condamné à passer de l'enthousiasme à une sorte de résignation. Il aspire au meilleur mais non au moins pire.
Cette personnalité que je connais, avec laquelle j'ai dialogué à plusieurs reprises, pourrait n'être qu'insupportable. Pourtant je n'ai jamais pu me déprendre d'une lucidité à son sujet, mais sympathique, presque complice.
Parce qu'il faut avoir du courage pour oser s'affirmer de cette manière. Soi évidemment supérieur à tous les autres ! Il y a dans cette présentation élogieuse de soi-même - et en même temps amère car on n'est jamais assez reconnu ni écouté - un élan, une force qui ne manquent pas d'allure puisqu'ils vont avoir pour rançon inévitable de la dérision, de la moquerie, du sarcasme.
Qu'importe puisqu'Henri Guaino sait ne pouvoir compter que sur lui-même et n'avoir que lui à porter aux nues !
Dans la brutalité avec laquelle il se pose dans l'espace public et médiatique, je n'irais pas découvrir de la timidité mais plutôt comme une arrogance qui saisit souvent les êtres d'origine modeste quand ils craignent de n'être pas perçus à leur juste valeur et qu'ils ont tant d'humiliations à rattraper, tant de temps perdu à regagner.
Comment ne pas éprouver pour ces machines humaines toutes de fragilités, aussi brillantes qu'elles soient sur le plan intellectuel - il va de soi qu'elles sont incomparables, indépassables sur ce plan ! - un zeste de tendresse, une fraternité émue car qui oserait prétendre être à l'abri de ces terrains mouvants où l'humain ne se sauve qu'en s'hypertrophiant ? Qui est à l'abri des brisures qui désaccordent ce qu'on est de ce qu'on voudrait être ?
Henri Guaino n'est-il pas aussi de ceux qui abusent de cette pensée du philosophe grec, si souvent citée, incitant au mépris de soi quand on s'examine et à sa glorification si on se compare ?
Je suis persuadé qu'il y a un peu de cela chez lui. Qui pourrait d'ailleurs le blâmer, sauf à être inconditionnel de tout ce qui n'est pas soi, d'être rassuré aisément face à beaucoup de politiques, de journalistes et d'une infinité de parasites gravitant dans la sphère publique sans autre légitimité que celle que l'aveuglement et leur vanité ont réussi à leur octroyer ?
Henri Guaino devrait seulement prendre acte de ce gouffre entre lui et certains autres mais ne pas se célébrer pour autant et cracher avec tant d'énergie sur la médiocrité des autres. C'est paradoxalement les honorer puisqu'ils sollicitent son dénigrement ! Il ne devrait pas ignorer que la modestie, au moins feinte, est le meilleur moyen, dans un monde qui raffole des nivellements, pour faire accepter sa supériorité puisqu'elle n'offense, ne blesse personne.
Mais Henri Guaino ne relève pas de ces tièdes qui sont étrangers à la passion, même à l'égard d'eux-mêmes.
Il ne poussera jamais l'amertume et la clairvoyance jusqu'à s'engloutir dans le même opprobre accablant tous les autres. Son masochisme aura toujours cette limite de s'arrêter à lui-même.
Qu'il prenne garde cependant au risque qu'un jour on pourrait lui demander les preuves de l'excellence qu'il s'attribue et qu'alors il ne suffirait plus de s'afficher exceptionnel mais de le démontrer !
Rédigé le 20 février 2017 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (26)
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Benoît Hamon sera sans doute mécontent de cette référence évangélique à propos du monde profane de la politique. Mais pourtant je dois beaucoup au candidat socialiste pour la si proche élection présidentielle.
Il m'a obligé à me questionner plus avant, avec davantage de franchise, sur mon étrange comportement face aux émissions politiques qui, invitant une pluralité de responsables et de personnalités, au pouvoir ou dans l'opposition, permettent au citoyen d'écouter, de comprendre, d'analyser, de contredire ou d'approuver.
Jusque-là rien que de très normal. Je n'imagine pas que ma passion pour ces joutes médiatiques puisse être considérée comme pathologique.
L'excellent Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI que je ne manquerais pour rien au monde le dimanche m'a plongé, avec Benoît Hamon, dans un malaise voluptueux, dans une dissociation totale entre l'intellectuel et le partisan, entre la richesse discursive et argumentative d'un côté et, de l'autre, le caractère fiable, opératoire ou non de son programme.
Certes je n'avais pas le savoir assez sûr de lui-même pour approuver ou rejeter l'idée du revenu universel mais je percevais cependant qu'il y avait là une difficulté économique, sociale, financière et symbolique au regard de l'importance attachée à la valeur du travail.
Je me suis senti capable d'estimer infiniment risquée et incongrue sa position sur le cannabis. "Parce qu'il est dangereux de se droguer, il faut légaliser" (Le Figaro). Il n'a pas, lors de l'émission, renié ce point de vue.
Mais pour le reste qui était l'essentiel, j'avoue que j'étais moins en train de soupeser les impossibilités techniques et politiques que d'être séduit, presque convaincu par sa philosophie générale sur la démocratie, le besoin de faire respirer notre République, le refus de l'homme providentiel, la volonté de sortir d'une participation citoyenne intermittente et l'aspiration à battre en brèche les coups de menton idéologiques et sectaires.
Pourtant, par certains côtés, Benoît Hamon peut être sectaire, notamment dans la perception caricaturale qu'il a des projets de la droite et du centre.
Mon angoisse toutefois était plus profonde. Je l'écoutais développer avec talent, avec une complexité rassurante et des explications bienvenues, ce que les questions qui lui étaient posées appelaient comme réponses et je ne pouvais pas m'empêcher de penser qu'il avait raison.
Ce n'était pas seulement sa personnalité qui superficiellement m'inclinait à la bienveillance mais surtout, plus que son aptitude à la parole, la dialectique fine, non totalitaire, calme avec laquelle il s'efforçait d'aller au bout des interrogations. Je n'étais pas dupe de ses partis pris mais ils étaient, le temps de l'émission, totalement occultés par l'art qui renvoyait, j'en suis sûr, à une humanité authentique et donnait de lui-même une image ouverte sur le plan intellectuel, de partage plus que d'autorité.
Mon incurie politique ne me préoccupait pas outre mesure. Elle me semble assez partagée. Qui peut en effet de bonne foi, journalistes ou non, soutenir que dans l'instant, sauf à être encasernés et enkystés dans des forteresses obtuses inexpugnables, on est capable de séparer le bon grain de l'ivraie, la bonne ou la mauvaise politique économique, pénale, internationale ? Le tour de force de Benoît Hamon a été précisément de masquer ce qu'il y a d'insupportable dans les décrets partisans sous le consensus de l'intelligence et de l'urbanité.
Plus perturbant était le fait de devoir m'avouer que plus d'une fois, pas seulement avec lui et encore plus quand j'éprouvais une familiarité avec la vision et les concepts de l'invité, la politique était chassée au profit d'une adhésion molle et vague à une certaine manière d'être, de penser et de parler. Je ne l'aurais pas regretté si cette propension à fuir le sommaire de l'engagement tranché au bénéfice d'une politesse constituant l'intelligence, apparemment sans étiquette, comme seul vecteur du dialogue, n'avait pas été trop fréquente chez moi.
Cette tendance ne diminuait qu'à partir du moment où au lieu d'avoir une parole familière et de partage, une tonalité intimement aussi démocratique que celle qu'on rêvait d'instiller dans l'exercice du pouvoir et des responsabilités, la personnalité présente s'abandonnait au péremptoire, au clivage et à une contradiction qui méprisait la pensée de l'autre plus qu'elle ne s'appuyait sur elle.
Pour prendre des exemples, Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen ou Nicolas Sarkozy hier, en dépit de leur verbe de qualité tendu vers la persuasion d'autrui et probablement à cause de leur tempérament, ne m'ont jamais procuré cette sensation à la fois délicieuse et troublante de pouvoir les suivre où qu'ils m'entraînent.
Chez eux, la politique, qui est fracture et antagonisme, est toujours présente de sorte que ceux qui les écoutent ne peuvent jamais s'abandonner à la pure jouissance de l'adhésion intellectuelle. Il y a du plaisir à apprécier quelqu'un malgré ses convictions. En tout cas moins convenu que de l'applaudir grâce à elles.
A l'inverse, Alain Juppé, s'expliquant trop peu et abusant d'une forme de tiédeur puisqu'il répugnait à nous faire don des richesses infinies de son for intérieur, a déçu doublement : sur le plan politique et sur le registre intellectuel.
Marion Maréchal-Le Pen relève, elle, du genre de Benoît Hamon. Il me pardonnera cette comparaison. Au fond, le talent, en politique, ne serait-il pas de la faire oublier et d'assouplir la dureté de l'opinion, qui sépare, grâce au velouté de l'argumentation, qui rassemble ?
Après avoir dû constater que j'étais une sorte de girouette intellectuelle - donc le contraire du sectarisme politique -, je me console comme je peux. La vérité ne se trouve-t-elle pas dans la multitude de ces interventions qui, aussi contrastées qu'elles soient, autorisent le citoyen à faire une union nationale à sa mesure, à se constituer, dans et par son esprit, une maison commune et à accepter son intuition qu'il y a du vrai partout ? Puisque chaque politique ne nous offre jamais qu'une part, est-il honteux de considérer que c'est à l'électeur de composer le gâteau tout entier ?
Je me souviendrai, tout profane qu'il soit, de mon chemin d'Hamon.
Rédigé le 20 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (50)
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J'adore cette classe politique qui à droite comme à gauche donne des conseils à Emmanuel Macron comme s'il était un petit frère turbulent et à force insupportable.
Jean-Luc Mélenchon, par exemple, l'invite à "beaucoup réfléchir et à s'exprimer avec beaucoup de délicatesse sur les sujets centraux de l'Histoire de France" (Le Point). Qui pourrait nier la pertinence d'une telle suggestion en allant même jusqu'à l'appliquer à celui qui la profère ?
Sur le plan politique, Emmanuel Macron est devenu le sujet dont on parle dans les dîners en ville. Certains continuent à penser qu'il a été propulsé par François Hollande pour faire perdre la droite, une majorité lui reconnaît aujourd'hui un parcours autonome, indépendant.
On l'avait qualifié de bulle. Cette bulle ne crève pas.
Il est traité de "plein du vide" avec une mélancolie amère dans un dialogue entre Michel Onfray avec Marcel Gauchet. Plein, c'est trop d'honneur. Vide, c'est trop de pessimisme.
Il a rempli les salles en France avec un public fasciné et enthousiaste. Comme une sorte de gourou qui n'aurait pas de programme.
Il commence pourtant à décliner celui-ci thème par thème et récemment il a proposé des mesures pour la sécurité et la Justice. Certes il ne va pas dans le détail mais ses rivaux non plus. Dans cet entretien (Le Figaro), qui est tout sauf banal et convenu - il y a toujours chez lui quelque chose d'atypique qui fait grincer, frémir ou se réjouir -, il mêle à son projet des éléments d'actualité. Par exemple, si sa préoccupation principale est de lutter avec vigueur et efficacité contre la délinquance, la criminalité et la violence au quotidien, il n'oublie pas de cibler aussi "les violences policières". Emmanuel Macron est à la fois abstrait et au goût du jour. Il plaît aussi pour cela.
Son programme qu'on lui réclame à cor et à cri - ce qui évite à tel ou telle de proposer le sien, de le chiffrer ou d'en élaborer un dans l'urgence - sera soumis à notre attention le 2 mars. Emmanuel Macron quittera donc le doux terrain des orientations pour entrer dans le dur : là où la contradiction pourra s'appuyer pour démolir sa politique pour la France.
Emmanuel Macron, en tout cas, est toujours là, bien présent. Ceux qui soutiennent sa cause ne sont plus constitués par un socle volatil mais représentent une masse prête à le suivre fidèlement même dans ses pensées les plus provocatrices (les résultats d'une enquête Ifop/Tous sur l'Algérie montrent qu'un peu plus d'un Français sur deux le soutient sur la question de la colonisation).
Celles-ci, d'ailleurs, si on veut bien les analyser, fuient le sommaire et l'univoque comme la peste et ne peuvent pas être résumées selon l'habitude médiatique par des raccourcis qui dénaturent.
Il a bien affirmé, en Algérie, que la colonisation avait été "un crime contre l'humanité" puis, en précisant, contre l'humain mais en se plongeant dans sa complexité, on s'aperçoit que les polémiques commencent souvent avec lui parce qu'on n'a pas tout entendu, tout lu et qu'elles se terminent par le fait qu'on peut ne pas l'approuver mais que le fond mérite d'être soupesé avec finesse et bonne foi.
Autre pavé dans la mare, stimulante acidité dans le débat : les opposants au mariage pour tous ont été "humiliés" sous le quinquennat (L'Obs).
Une pensée discutable et à discuter pour la colonisation, un constat lucide sur le mariage pour tous, si on veut bien se rappeler la dureté avec laquelle le pouvoir socialiste a traité une multitude de manifestants et de familles qui n'avaient que le tort de n'avoir pas compris que dorénavant la culture allait supplanter la nature.
Mais il ne s'arrête jamais là : il déclare que "la communauté homosexuelle trouvera toujours en lui un défenseur". Emmanuel Macron est-il de ceux qui ne prennent aucun risque en pratiquant un brassage général de peur d'insulter l'avenir électoral dans sa richesse et sa diversité ou les prend-il tous, au contraire, en acceptant d'être traité de politicien alors que sincèrement il ne peut se dépouiller d'une aptitude à l'équité et à la globalité ?
Conséquence pour Emmanuel Macron : il est attaqué par la droite et l'extrême droite ici, par la gauche là.
Est-ce de sa part le comble du cynisme et de l'opportunisme qui va s'emparer un peu partout, sans la moindre exigence de cohérence, d'éléments épars et contradictoires ? Sa démarche relève-t-elle du grand art de la politique traditionnelle qui collecte, accumule, prend tout ce qui est à portée d'esprit et d'engagement pour se constituer un capital même parfaitement hétérogène ?
Ses adversaires ne se privent pas de juger Emmanuel Macron comme un aventurier sans principes mais très roué.
Alors un petit frère à qui il convient d'adresser de sympathiques injonctions ou un concurrent infiniment dangereux ?
Et si le saisissement de la classe politique n'était pas dû au fait qu'elle flottait dans un climat d'incertitude ? Intolérable pour elle que ces perceptions contrastées qui pourraient seulement manifester la liberté de l'esprit, le caractère équivoque du réel et le fait qu'Emmanuel Macron, en effet, n'est à droite que lorsqu'il le désire et à gauche seulement quand il en a envie.
S'il était authentique et convaincu ? Aussi bien pour la cause homosexuelle qu'à l'égard des opposants au mariage pour tous ? Si la plénitude et l'honnêteté étaient son lot, sa chance dans un monde qui n'aime rien tant que la réduction de l'humain et de la réalité à quelques schémas simplistes ?
Si l'agacement, voire la détestation des professionnels à son encontre résultait seulement de cette scandaleuse impression qu'Emmanuel Macron est inclassable, qu'il bouscule et dérange les lignes, de cette intuition douloureuse, pour le commun des politiques, qu'Emmanuel Macron n'est pas comme eux, véritablement ?
On ne peut pas le ranger alors qu'il conviendrait pourtant de remettre de l'ordre dans la pièce démocratique ! Il est un trouble-classicisme.
Emmanuel Macron est peut-être vilipendé seulement parce qu'il s'obstine à être un désordre fier de l'être.
Rédigé le 18 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (100)
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Pauvre société débile à laquelle des personnalités, affichées en une de Libération, doivent indiquer le bon chemin et l'engagement qui convient ! Sans elles, que deviendrait-on !
Pour Adama et Théo.
Pour le second, on était prêt à compatir puisque sa qualité de victime était indiscutable même si les circonstances de l'épisode l'ayant opposé à quatre gardiens de la paix mis en examen pour viol et violences aggravées demeurent encore imprécises. Mais l'exigence de ces journalistes, artistes, chanteurs et autres intervenants militants va bien au-delà : il faut se mobiliser contre les violences policières !
Au sujet du premier mort lors de son arrestation au mois de juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise, l'injonction était de "réclamer justice" comme si la cause de la famille Traoré et de ceux qui la soutiennent était forcément légitime !
Le fait que le Directeur général de la police ait condamné les propos "scandaleux" de ces pétitionnaires de luxe n'a évidemment pas eu le moindre effet. Que peut peser face à la provocation des combattants de papier l'expérience du terrain, contre l'irresponsabilité facilement généreuse, le pragmatisme des professionnels de la sécurité ?
A la suite de l'affaire Théo, 245 interpellations depuis le début des violences urbaines et aucun soutien de l'Etat aux forces de l'ordre (Le Figaro).
Alors ces célébrités ne s'égarent pas en s'indignant de l'exclusive activité policière ?
Dans le Nord de Paris, 200 manifestants, anticipant l'appel de Libération, crient leurs slogans : "Pas de Justice, pas de paix", "flics, violeurs, assassins" et, en chantant, hurlent "tout le monde déteste la police".
Ces célébrités sont-elles lucides en validant de telles éructations et ignominies ?
En Seine-Saint-Denis, notamment à Aulnay-sous-Bois, Bobigny et Sevran, bris de vitrines, magasins dévastés, matériel urbain détruit, véhicules incendiés alors que les occupants sont à l'intérieur parfois, autobus dégradés, ampleur des dégâts au point de scandaliser sur TF1 une adorable personne âgée effondrée devant cette quotidienneté massacrée ! Casseurs déchaînés dont 60% de mineurs. Les arrestations de ces malfaisants de plus en plus difficiles à opérer. L'ensemble de ce déplorable constat minimisé par Beauvau.
Qui peut croire que leur haine vise le chômage et ses effets ?
Aussi est-il normal que ces célébrités éprouvent une compassion et une compréhension hémiplégiques et ne se soucient que de Théo et Adama ?
En France, chaque jour, des victimes largement aussi respectables que Théo souffrent de la délinquance et, pire, tombent sous les coups de la criminalité et la police s'efforce de les défendre et de de les protéger.
Pourquoi ces célébrités, qui ont l'embarras du choix, sont-elles si chiches puisque je ne les ai jamais vues ni entendues protester pour ces malheureux et ces sinistrés des transgressions ordinaires ?
Sur notre territoire des fonctionnaires de police, dans des missions aussi difficiles et risquées dans la vraie vie que leur critique dans des bureaux est aisée, sont insultés, outragés, frappés, blessés, pire, tués et on leur demande des comptes bien plus qu'on ne leur exprime notre reconnaissance. En 2016, 26 tués et 16 000 blessés, policiers et gendarmes (Valeurs actuelles).
Etait-il vraiment opportun et équitable, malgré tout, de la part de ces célébrités, de pourfendre les violences policières dans ces cités où la police est dans tous les cas présumée coupable alors que la majorité des honnêtes gens n'attend que ses interventions !
Ainsi seuls Théo et Adama mériteraient l'engagement : pour un jeune homme vivant et pour un mort.
Et tous les autres partout, tout le temps ? Serait-il honteux de se pencher, en une, sur la banalité infinie des traumatismes, des misères et des souffrances qui n'ont pas eu la chance de permettre d'impliquer la police dans la cause ?
La majorité pénale à 16 ans est proposée par François Fillon. Cette mesure serait pertinente - mais est-elle possible ? - au regard de ce que la réalité montre : il est devenu ridicule d'apposer un baume éducatif, d'ailleurs inconcevable, sur des personnalités dont la précocité délictuelle et ravageuse est incontestable. Il faudra se résoudre un jour à condamner cette minorité pour ce qu'elle a fait et pas seulement l'absoudre pour ce qu'elle aurait pu être. La lutte contre la délinquance du quotidien est un objectif prioritaire pour Les Républicains, à juste titre. Ce combat devra s'inscrire dans l'élaboration d'une politique pénale globale qui s'attachera aussi bien à l'efficacité de celle-ci qu'aux possibilités concrètes de sa mise en oeuvre, y compris sur le plan pénitentiaire.
On ne peut que se féliciter, par ailleurs, que la loi de sécurité publique, malgré la procédure concernant Théo, ait, par ce texte, offert aux policiers "une forme de reconnaissance du travail accompli" et des protections supplémentaires en alignant les conditions d'ouverture du feu sur celles des gendarmes (Le Monde).
J'éprouve alors comme une nausée civique en relevant cette manière soyeuse et médiatique, façon Libé, de jeter de l'huile sur le feu social et sur des comportements exacerbés et prêts au pire puisque la police est décrétée l'ennemie. Je suis désolé mais "tout le monde ne déteste pas la police". Elle parvient à résister à toutes les démagogies et à toutes les injustices. Je ne la présume pas seulement innocente quand j'ai besoin d'elle.
Pour la fin, cette énormité : "Si on se tait, c'est toute notre société qui se salit".
C'est le contraire. S'ils se taisaient, c'est notre état de droit qui gagnerait, notre démocratie qui deviendrait propre.
Rédigé le 17 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (68)
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Rédigé le 16 février 2017 | Lien permanent | Commentaires (58)
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Cette interrogation m'obsède depuis quelques jours. Non pas seulement à cause d'une polémique largement ordurière et de mauvaise foi mais surtout parce que j'ai eu le grand bonheur de pouvoir questionner durant une heure Yasmina Reza et que je ne suis pas ressorti indemne de cet entretien où son incomparable personnalité n'a pas manqué de me faire réfléchir sur moi-même, mes faiblesses, mes limites par rapport à ses forces.
A vrai dire, la dureté du débat intellectuel, judiciaire et politique dans lequel je me vautre avec délectation même à un niveau modeste m'a alerté à plusieurs reprises sur l'obligation d'un examen d'esprit et de conscience tendant peu ou prou à me persuader que vivre, c'était devoir se taire.
En même temps je sens ce que cette extrémité a d'absurde et au fond de confortable. Le Tout ou Rien est une commodité et je ne peux pas me dissimuler que ma nature s'y est abandonnée trop volontiers.
Quand j'écoute Yasmina Reza, sa sincérité est évidente qui la met en état de malaise quand on voudrait l'entendre parler d'elle, de ses états d'âme, donner son opinion sur tout ce qui n'est pas littérature, roman, théâtre. Elle répugne totalement à cette forme d'exhibitionnisme et surtout ne prend pas prétexte de son infini talent pour s'estimer légitime dans l'expression d'elle-même sur tous les sujets qui sollicitent normalement son interlocuteur. Parce que ce dernier est dans son rôle en étant désireux de la voir surgir avec autorité ou modestie, toujours avec finesse, dans l'ensemble des débats qui seraient enrichis par son extrême intelligence.
Pourtant elle demeure, avec une inflexible amabilité, dans le registre qu'elle s'est assignée et auquel elle ne déroge jamais.
Je devrais en tirer des leçons. Et me garder d'une définition de l'humain qui justifierait une plénitude à la longue un tantinet encombrante. Pourquoi me suis-je condamné, par une sorte d'expansion vulgaire de moi-même, non pas à faire preuve de vanité - j'espère avoir toujours échappé à ce vice que je déteste - mais à définir forcément le souffle vital et la justification de sa présence sur terre par une multitude d'interventions destinées seulement à se démontrer qu'on n'est pas vivant pour rien, comme un poids mort qui attendrait la fin sans broncher ? Il n'y a pas de présomption dans cette volonté mais peut-être en effet une sorte de prurit qui refuse de considérer les conséquences de son verbe et de ses actions au seul bénéfice de l'affirmation plaisante ou déplaisante de soi.
Ce besoin de se jeter à corps et à esprit perdus dans toutes les mêlées qu'on vous offre et que la modernité médiocre propose à chaque instant ou dans celles qu'on invente parce que l'indifférence n'est pas votre fort est-il critiquable en lui-même ? Je ne crois pas mais il impliquerait que chacun respecte la même règle du jeu qui serait de jouir de l'accord entre un fond vigoureux, offensif et une forme civilisée, courtoise.
Faut-il aussi cesser de se croire investi par un pluralisme de missions, aussi contradictoires qu'elles soient les unes avec les autres, en s'enivrant d'une richesse plus préjudiciable que bienfaisante ? Observateur et acteur, engagé et analyste, partisan et en retrait, dedans et dehors, au bord et au centre, faux journaliste et vrai passionné de l'actualité, critique et piètre créateur, ne se surestimant pas mais jaloux des réputations trop souvent usurpées ? Il y a, dans cette multitude des rôles, un péril qui est aggravé par mon appétence démesurée pour la liberté d'expression. Même si mon mouvement principal est de venir au secours de celle des autres quand elle est menacée - la réciproque n'est pas mon lot -, il m'arrive, à cause de tout ce qui advient en moi, d'être en quelque sorte poussé à l'exagération et à la provocation. Convient-il donc de se dépouiller soi-même d'une part trop longtemps qualifiée d'essentielle comme s'il était urgent de se réduire pour mieux penser et moins choquer ?
Je songe à Yasmina Reza et à la résonance de ses intuitions, de ses fulgurances et de ses retenues dans ma personne trop débordante, envahissante au point parfois qu'elle m'encombre moi-même. J'aimerais tellement un jour, en répudiant le Rien, ne pas foncer à tombeau ouvert vers le Tout en ayant la sagesse de faire halte à l'étape du milieu qui est qualifiée sans doute trop vite de juste mais qui vous permet d'éviter au moins les leçons de morale, les conseils des tièdes par nature, les admonestations des opportunistes, les mollesses des lâches et les murmures hypocrites des adeptes trop doués pour la néantisation commode et très rentable de soi.
Vivre, est-ce alors vraiment se taire ? En dehors des quelques irruptions inévitables dans l'espace où ça pense, ça parle, ça écrit et ça s'agite, est-il fondamental, pertinent, moral de se tenir coi, de regarder le monde passer devant soi comme une vache humaine en se disant : "Encore combien de temps à tirer, quand la comédie sera-t-elle terminée ?".
Le pire est la rareté de ceux auprès desquels doutes, fragilités, hésitations et culpabilité pourraient s'épancher. J'évoquais au début de ce post la polémique grossière qui ne m'a pas mis à bas. J'aurais souhaité, comme un François Fillon du pauvre, proférer : "Vous voulez m'aider ou me compliquer la tâche ?".
Je ne serai jamais comme Yasmina Reza car il y a des enfances et des jeunesses qui se cachent avec allure dans l'ombre de l'âge adulte ou viennent ostensiblement l'irriguer. Mais je peux progresser sur le tard. Avec cette seule exigence : les procès acceptables ne viennent que de ceux qui vous comprennent.
Au fond, vivre est-ce se taire au point de mourir avant l'heure ou est-ce éclabousser, se multiplier au point de gaspiller son existence, de la perdre goutte à goutte ?
Rédigé le 15 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société, Télévision | Lien permanent | Commentaires (102)
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Le 2 février, il y a eu à Aulnay-sous-Bois l'intervention de quatre gardiens de la paix de la Brigade Spécialisée de Terrain (BST), un trafic de drogue interrompu, et l'interpellation d'un quatuor parmi lequel se trouvait Théo. Celui-ci a été maîtrisé par trois des fonctionnaires dans des conditions de brutalité qui ont été dénoncées puisque, selon Théo, une matraque lui a été délibérément enfoncée dans l'anus.
Je ne me prononce pas sur les versions contradictoires des uns et des autres (Le Parisien). L'IGPN, saisie de cette affaire, a conclu que l'atteinte grave causée à la victime l'avait été involontairement, par maladresse, du fait de l'empoignade. Ce que Me Dupond-Moretti, avocat de Théo, a vigoureusement contesté au motif qu'un viol ne pouvait résulter que d'une intention volontaire.
Depuis le déroulement de cette affaire, violences à Aulnay-sous-Bois et à Bobigny, saccages, bris de vitrines et de matériel urbains, véhicules incendiés, attaques des forces de l'ordre, casseurs, nombreuses interpellations, paroxysme du rapport conflictuel entre jeunes de ces cités et la police...
Le comble, ce sont Théo et sa famille qui ont dû appeler au calme et rappeler qu'on n'était pas en guerre ! Le président de la République lui a rendu visite sur son lit d'hôpital et même si sa démarche a été approuvée par beaucoup à droite comme à gauche, je maintiens que je la trouve inopportune. Sauf à accepter une multiplication de ces visites compassionnelles dans toute la France et d'abord auprès des fonctionnaires de police trop régulièrement blessés par de jeunes voyous ici ou là, dans des cités quasiment interdites à la loi. Dès qu'un président de la République sort de son rôle, il fait d'une affaire qui devrait rester policière et judiciaire une affaire d'Etat.
Plusieurs questions doivent être posées tant les conséquences du 2 février ressemblent à celles, trop nombreuses, qui suivent à chaque fois, dans certaines cités, l'affrontement entre une police accomplissant sa mission et des jeunes gens prêts en permanence à en découdre.
Pourquoi, d'ailleurs, cette inéluctable dégradation d'incidents particuliers en violences et en émeutes collectives ? Comme si l'état de droit, même dans sa version la plus minimaliste, n'était pas acceptable et devait être récusé par principe.
Théo est une victime. Il n'a jamais été condamné mais était-il rattaché de près ou de loin à l'environnement - message des guetteurs aux dealers - de drogue et de méfiance de la police ?
Comme Marine Le Pen, j'ai confiance par principe en la police et ne fais pas peser sur elle une présomption de culpabilité quand elle agit au demeurant dans les circonstances les plus difficiles qui soient. Elle sera coupable quand la Justice l'aura établi et si le gardien de la paix concerné l'est, il devra être sanctionné comme son acte le mérite. En tout cas, pour les cités, je n'éprouve pas cette démagogie miséricordieuse qui soutient les agresseurs et cherche à nous persuader que, brisant, saccageant et frappant, ils se révoltent contre le chômage alors qu'ils cassent du flic et haïssent seulement l'autorité qui vient s'immiscer dans leurs combines malpropres.
Pourquoi les politiques, gauche et droite confondues, sont-ils incapables, avec une énergie qui devrait relever de leur vigilance démocratique, de mettre le holà aux violences inadmissibles ? Pourquoi paraissent-ils valider le fait que la société serait coupable quand une minorité de voyous faciles à cibler, plus difficiles à interpeller, démontre clairement qu'ils sont eux-mêmes responsables et coupables ? Pourquoi chercher des excuses avant même la sanction alors que le jugement devra, lui, les intégrer si elles existent ?
Pourquoi les médias, dans leur grande majorité, attisent-ils cette incandescence en focalisant l'attention, de manière trop souvent partiale, sur les fauteurs de trouble plutôt que sur ceux qui, pour nous tous, font le sale boulot de maintenir ou de restaurer la tranquillité publique dans des lieux privatisés par des délinquants pour leur profit et leur impunité ?
Pourquoi médias et politiques, à chaque fois qu'une politique de fermeté cohérente et régulière est annoncée, formulent-ils comme première préoccupation le fait qu'elle sera impossible à mettre en oeuvre à cause de la résistance de ceux qu'elle devra concerner ? C'est inverser l'ordre et les principes. Parce que les coupables s'opposeraient à ce qui aurait pour finalité de les mettre hors d'état de nuire, il faudrait les laisser faire ? La peur qu'éprouve l'Etat avant l'action explique pourquoi celle-ci demeure lettre morte après.
Pourquoi ne pas restaurer l'autorité de l'Etat partout, avec fermeté, rigueur et en soutenant sans état d'âme les forces chargées d'en être les vecteurs et en même temps, veiller à imposer autant que possible une police de proximité qui devra être au quotidien toute d'urbanité si la situation le permet ? Au fond deux peurs se font face : la confiance ne serait pas inconcevable si à tous niveaux se manifestaient fermeté, exemplarité et contrôle.
Dans le pire il y a des lumières. Il y a Emmanuel Toula.
Au cours de l'une des manifestations violentes de Bobigny, alors que le capot d'une voiture encerclée par des jeunes et bloquée par une poubelle commençait à brûler et que sa conductrice avait seulement réussi à en sortir son petit garçon de deux ans et pas encore sa fillette de six ans, Emmanuel Toula, âgé de 16 ans, avec un infini courage s'est engouffré dans le véhicule, a détaché la ceinture de sécurité de l'enfant et l'a sauvée. Toula faisait partie des soutiens de Théo.
La préfecture de police, après en avoir crédité des policiers, a reconnu que le jeune homme était l'auteur de cette belle action (Le Figaro).
J'en tire la conclusion optimiste qu'il n'y a pas à désespérer de quelque personnalité que ce soit et qu'aucune crise humaine et sociale n'est insoluble. En tout cas il faut s'en persuader.
Rédigé le 13 février 2017 dans Actualité, Médias, Société, Télévision | Lien permanent | Commentaires (125)
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Rédigé le 11 février 2017 | Lien permanent | Commentaires (7)
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Monsieur le Premier ministre, cher François Fillon, vous seul pouvez faire cesser la curée personnelle et familiale, humaine et politique.
Je déteste, comme vous, que l'investigation légitime en démocratie se soit dégradée en sadisme médiatique.
Je déteste que jour après jour on ait alourdi un seul plateau de la balance, avec une obstination et une malfaisance qui s'éloignaient de plus en plus de l'exigence de vérité pour tomber dans une inquisition partisane et une volonté de destruction politique.
J'ai détesté que le Canard enchaîné ait abandonné sa pratique de pluralisme caustique et diversifié pour s'attacher seulement à vous depuis plusieurs semaines. Dès votre victoire éclatante à la primaire de la droite et du centre.
Je n'ai pas été étonné que Mediapart favorise et amplifie ces charges et même que Le Monde publie, le jour même de votre conférence de presse et d'explication, deux pages suspicieuses et des extraits des auditions de votre épouse et de vous-même, sans que l'autorité judiciaire daigne se pencher sur cette violation grave du secret de l'enquête.
J'ai bien compris votre argumentation principale lors de votre brillante prestation face à des journalistes dont le questionnement pauvre vous a interdit d'en dire plus, d'en révéler davantage. Si je résume votre propos dense : tout a été légal mais j'ai compris tardivement que l'opinion publique ait pu considérer ces mannes versées comme indécentes. Et je vais changer le système.
Pourtant votre déclin a continué ou s'est à peine stabilisé. Trop tard, trop peu ?
Il y a eu votre épouse, vos enfants, votre suppléant, vous-même. La Revue des deux mondes. Une périphérie licite apparemment mais troublante. Il y a votre rôle à Axa et la dénonciation qu'en a faite François Bayrou que certainement aujourd'hui vous ne portez pas en haute estime mais qui pour l'intégrité et la distinction du public et du privé a visé juste, me semble-t-il.
Autour de vous, que vous le vouliez ou non, flotte dorénavant, alors que votre réputation d'honnêteté a été le ressort fondamental de votre succès lors des joutes de la primaire, l'image d'un homme d'argent, par besoin personnel et solidarité familiale. Peut-être aussi à cause de ce sentiment que vous avez éprouvé d'une totale impunité, immunité du monde politique qui aurait eu droit, par nature, à des privilèges et des avantages indus. Ce n'est pas contradictoire avec ce que vous vous êtes efforcé de faire, Premier ministre, pour moraliser la vie publique.
Vous avez sans doute aussi sous-estimé l'aigreur médiatique à votre encontre. Les médias ont malheureusement toujours cette capacité de faire payer tôt ou tard, à celui qui ne les a pas flattés, son attitude critique, sa réserve. Ils ne vous ont pas oublié.
Vous avez également négligé le fait que la justice dispose d'un Parquet national financier qui n'a besoin que d'un article pour diligenter sur-le-champ une enquête qui même menée efficacement va encore durer. Vous faites confiance à la Justice, dites-vous, et j'espère que vous avez raison. Mais il n'est pas absurde d'imaginer que la mission policière terminée, une information soit ouverte et que, même en tenant compte de la décence républicaine, vous puissiez être mis en examen. Et comme vous l'avez promis, vous jetteriez alors l'éponge.
Au fond de vous-même existe probablement la certitude que vous gagnerez malgré tout l'élection présidentielle et que durant cinq ans vous serez en charge de notre destin national et débarrassé des scories et soupçons de la période qui l'a précédée.
Mais, sans douter forcément de votre sincérité, il y a maintenant, à côté de vos lumières politiques, trop d'ombres personnelles. Celles-ci non seulement vont vous rendre de plus en plus difficile une campagne qui structurellement est plombée par la machine de guerre médiatique lancée avec trop de vraisemblance contre vous - ces quelques énergumènes vous insultant à Troyes ! - mais, à supposer le miracle, votre élection au mois de mai, tout ce à quoi vous attachez du prix sera battu en brèche, décrédibilisé, pire, tourné en dérision. Je crains que vous ne puissiez plus être notre président de la République ou que, si vous le deveniez par les effets d'une providence politique, vous ne puissiez plus vous comporter comme celui que vous aviez rêvé d'être.
Autour de vous des soutiens fidèles vont vous persuader que vous devez tenir à tout prix parce que le présent va peu à peu se décanter, se purifier pour laisser votre avenir présidentiel émerger en éclat et majesté. Y croyez-vous vous-même alors que ces calamiteux dix jours sur le plan de votre communication ont été sans doute la conséquence d'un "coup à l'estomac" mais surtout, j'en suis sûr, de votre intuition d'un dérèglement capital sur une voie qui s'annonçait royale ?
Vous n'êtes pas de ceux qui, avec cet orgueil contenu qui a tant plu en certaines circonstances, pouvez vous contenter seulement de participer. La troisième place derrière Emmanuel Macron n'est pas une configuration acceptable pour vous. Vous gagnerez ou vous ferez gagner. L'alternative est simple.
Des politiques, des experts vous accompagnent et modestement je ne vous offre que la voix d'un citoyen qui avait voté pour Alain Juppé mais avait très vite saisi que si ce dernier voulait gagner, il aurait dû y mettre plus du sien. Mais il a été remarquable, vaincu, dans l'attitude qu'il a adoptée à votre égard. Ce n'est pas un médiocre et c'est un homme d'expérience. Malgré les apparences de vos tempéraments qui d'ailleurs ne sont pas si dissemblables et de la tonalité plus tiède ou plus vive de vos projets, aucun gouffre entre vous. C'est le seul plan alternatif plausible : le plan J.
Si vous vous mainteniez sans espoir, il y a des rivaux en embuscade qui feraient plus que grappiller vos déçus !
Vous devinez où je souhaite en venir et sans illusion vous proposer une sortie par la grande porte. Ce n'est pas la même chose d'être poussé hors de son ambition suprême par quelques députés ambitieux, aigris, revanchards ou manipulés ou de l'être par une bienveillance nostalgique de la radicalité intelligente de votre programme mais attristée par l'accumulation des nuages et des obstacles qui ne laissent plus la moindre chance à votre cause.
Soyons sérieux : qui imagine demain Xavier Bertrand, Laurent Wauquiez ou François Baroin président de la République, candidat consensuel d'une droite et d'un centre aujourd'hui dénudés, dépouillés ? Le seul qui soit digne de la présidence à venir est Alain Juppé qui, même battu, doit vite, très vite être adoubé par vous. Vous seul avez la légitimité pour le faire et votre acte de courage et de lucidité accompli, votre camp se réunira derrière lui.
Vous ne laisserez pas gagner le Canard, Mediapart ou le Monde ou la Justice si, selon vous, elle s'égarait. Vous sortirez par la grande porte. Librement. Sans être contraint par rien d'autre que votre résolution. Résistez à la tentation de démontrer non plus seulement votre capacité de résistance et votre souci de sauvegarde de l'honneur conjugal et familial - c'est fait, on vous en donne acte - mais votre aptitude suicidaire à préférer noyer votre chute dans celle de tous. Ce n'est pas vous offenser que de douter que "votre chemin de croix puisse être suivi par votre résurrection" (Le Figaro). Songez à la multitude des citoyens qui vous ont fait confiance.
Monsieur le Premier ministre, vous seul pouvez prévenir un désastre politique.
Rédigé le 09 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (435)
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La personnalisation de la vie politique, celle inévitable de la campagne présidentielle font que chaque candidat est obligé de présenter aux citoyens l'image qu'il veut donner de lui-même, qu'il souhaite qu'on retienne. C'est une tâche difficile parce que la moindre erreur est fatale.
Rappelons-nous le président "normal" que François Hollande rêvait d'être et qui ne l'a été que trop parce qu'il n'avait pas compris qu'au-delà de la pertinence du projet, les Français attendent un homme ou une femme qui sera à la fois proche d'eux mais à distance, avec cette simplicité et cette allure qui ne sont pas incompatibles et que les pouvoirs du nord de l'Europe cultivent si bien. Ils aspirent en même temps à ressentir de la fierté et à éprouver de la fraternité.
Avec Nicolas Sarkozy et François Hollande, nous avons manqué de la première. Pour la seconde, l'ancien président n'en a pas abusé et l'actuel nous en a donné trop souvent une version verbeuse, de compassion sans action, imprégnée d'un humanisme facile et confortable. Il ne coûtait rien de le dépenser à outrance.
La posture de Benoît Hamon est intéressante et très habile parce que, pour connaître un peu le personnage, le voir et l'entendre dans ses prestations médiatiques, il ne feint pas d'être quelqu'un d'autre. Quand dans ses interventions, ses discours, encore récemment pour l'investiture du parti socialiste, il refuse de se faire passer pour "un homme providentiel" en expliquant qu'aucun candidat n'est et ne sera un miracle, on peut bien sûr d'abord se moquer en soulignant qu'il n'y a aucun risque à récuser ce que dans tous les cas on ne pourrait pas être.
Cette dérision serait de mauvais aloi si elle s'arrêtait là. Car Benoît Hamon, en s'exprimant de la sorte, fixe lui-même les limites, avec intelligence, de sa future politique et de sa capacité personnelle à opérer d'éclatantes métamorphoses. Cet aveu sinon de faiblesse du moins de finitude est en réalité une attitude de force. Je n'ai pas besoin de me déguiser en homme providentiel, contrairement à tant d'autres, parce que je ne le suis pas et que cette sincérité est précisément la preuve de ma singularité positive.
Si jamais Benoît Hamon devenait président de la République - pourquoi lui interdirait-on de se battre avec cette espérance ? -, il ne faudrait tout de même pas qu'il abusât de cette modestie en contraignant le citoyen non plus à prendre son procédé au figuré mais au propre. N'être absolument pas "providentiel", ne même pas tenter de l'être inspireraient à la longue plus de déception et d'aigreur que d'estime. La société, ses partisans se sentiraient floués.
Quand François Fillon, dans sa décisive conférence de presse qui a revigoré son camp et une multitude de Français, exprime des regrets et présente ses excuses, il n'est pas loin, même s'il a été contraint d'adopter cette position que j'aurais désirée immédiate, de se camper dans une sorte de fragilisation tactique et nécessaire au demeurant très efficace (Le Figaro).
Peut-être l'humanité contrite de François Fillon ne sera-t-elle pas un complément inutile à la domination sans partage de la primaire mais une manière de faire accepter par avance une présidence qui ne serait pas toute d'airain et de majesté ? Les épreuves d'avant rendent impossible le mythe de l'homme providentiel après.
Benoît Hamon, en accouplant son idée de revenu universel à celle de "président non providentiel", me paraît avoir ciblé une alliance très porteuse dans notre démocratie aujourd'hui. D'une part on agit, on dépense pour tous et de l'autre on se minimise, on s'efface presque. Un président donc qui ne surestimerait que les citoyens et jamais lui-même !
Il me semble évident qu'un chemin s'ouvre qui à l'avenir rendra décalés les promesses d'omnipotence personnelle, les engagements de matamore, la cohorte de fiers-à-bras qui ont encombré, trop souvent pour le pire, les allées présidentielles.
Manuel Valls, honnête et sans forfanterie, en a pâti. Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon seront probablement perçus comme très inférieurs à la représentation grandiose et infiniment volontariste qu'ils cherchent à diffuser. Dorénavant on paie cher les prétentions dont on n'a pas les moyens.
Qu'on ne se leurre pas : rien n'est plus difficile que d'arrêter une simplicité avant qu'elle devienne vulgarité, il est frustrant de devoir limiter son autorité pour éviter qu'elle ne se dégrade en pouvoir délicieux, narcissique et personnel.
Etre comme tout le monde, soit. N'être pas comme tout le monde, oui. Il y a des caractériels, des atypiques et des originaux qui feront très bien l'affaire.
Un président comme tout le monde mais pas trop, cela relève du tour de force républicain!
On ne sait jamais...
Rédigé le 08 février 2017 dans Actualité, Médias, Société, Télévision | Lien permanent | Commentaires (62)
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Depuis plusieurs jours j'ai l'idée de ce billet mais l'affaire - réelle ou gonflée - de François Fillon m'a beaucoup mobilisé et surtout j'ai conscience que s'il y a une chose à ne pas faire en France, c'est de discuter le pouvoir et la compétence des journalistes, notamment les journalistes politiques, catégorie la plus "noble".
D'ailleurs il est frappant de constater que même les pensées et les paroles les plus libres se gardent bien de toucher à la qualité du vecteur médiatique. D'abord par crainte des rétorsions.
Je m'engage cependant dans cette voie risquée pour plusieurs raisons.
Daniel Schneidermann dont l'intelligence n'a pas peur d'affronter le réel a proposé la suppression du journalisme politique (L'Obs). Ce n'était pas une provocation de sa part mais l'expression d'une pensée lucide et argumentée. La politique est l'apanage citoyen de tous quand l'agriculture ou la Justice imposent des savoirs particuliers. Ce qui est indéniable.
Jérôme Fenoglio, directeur du Monde, a récemment publié un éditorial sur "La défense des faits", dans lequel il célébrait un certain type de journalisme qui se fonderait seulement sur les faits et serait donc légitime en allant dénoncer sur Internet les fausses informations. Comme une sorte de chien de garde de la vérité !
Ce n'est tout de même pas à cet homme fin, si doué pour manier l'équilibrisme cher au quotidien qu'il dirige, qu'il convient de rappeler cette évidence que les "faits" ne constituent pas un socle fixe et incontestable qu'il suffirait au journaliste de transmettre mais qu'ils sont d'une certaine manière, à partir d'un noyau dur souvent infime, construits, élaborés et interprétés. Le fait n'est jamais à disposition telle une denrée stable, même sa matérialité peut prêter à discussion.
Plus gravement, au-delà, évoquer "la défense des faits" néglige l'élément capital que l'information tient moins à leur identification qu'à leur sélection, à leur exclusion ou à leur hypertrophie. Un exemple parmi d'autres de cette étrange discrimination. La mairie de Béziers fait l'objet d'une vigilance médiatique constante mais, pour qui connaît la réalité de cette ville et de sa gestion, frappée d'une infirmité regrettable : l'essentiel qui obligerait à en dire du bien est occulté au profit d'épisodes montés en épingle dont le seul mérite est de donner bonne conscience à la partialité de la plupart des journalistes.
Ces considérations s'inscrivent dans un mouvement général qui, selon une enquête réalisée par l'Institut Kantar pour La Croix, confirme pour 2016 une pente descendante nette pour la confiance qu'inspirent au public les supports d'information. Tous sont concernés : radio, télévision, journaux et web. Particulièrement, une forte majorité de sondés éprouve une défiance envers les journalistes politiques "qui ne seraient pas indépendants des pressions des pouvoirs politiques et du pouvoir".
Année après année, cette approche négative s'amplifie à proportion, me semble-t-il, de l'appréciation très positive, quand on les écoute ou qu'on les lit, dont les journalistes continuent à se prévaloir. Comme s'il y avait chez eux, notamment pour l'analyse de la politique, quelque chose d'irremplaçable.
Tout démontre au contraire que pour un citoyen bien informé - et il en est de nombreux qui passionnés sont capables de s'appuyer sur le même terreau que celui des journalistes spécialisés -, il n'y a pas de partage à opérer entre les amateurs et les professionnels. L'intelligence, la psychologie, l'analyse des rapports de force, l'humus à la fois divers et au fond vieux comme le monde qui imprègne l'actualité politique et sociale ne paraissent pas représenter une frontière infranchissable entre ceux qui ont fait de ces exigences un métier et tous les autres qui se projettent dans cet univers avec une curiosité et une liberté d'autant plus intenses qu'elles ne sont ligotées par rien ni personne.
Mon expérience personnelle, toujours dans un aimable contexte, m'a confronté parfois à cette situation. Pressenti pour une émission, j'étais reporté au motif que le sujet devait être d'abord traité par des journalistes.
Par exemple à une ou deux reprises pour C dans l'air.
Caroline Roux que j'apprécie au plus haut point fait pourtant, assez souvent, débattre des journalistes entre eux.
Comme si leur présence garantissait une vision plus clairvoyante et offrait une capacité d'intelligibilité qui dépasserait par principe celle d'autres invités "profanes" eux aussi épris de joutes intellectuelles et politiques. Ce n'est pas en offenser certains, piliers de cette emblématique moment, que de les écouter certes avec intérêt mais sans être frappé de saisissement par l'originalité de leur perception.
Je pense même - je rejoins sur ce plan Daniel Schneidermann et la défiance considérable à l'égard des journalistes politiques - qu'ils n'ont qu'un avantage, mais pervers et préjudiciable, par rapport à l'amateur éclairé : ils connaissent tous les politiques et ont des liens de complicité avec eux, qui ont forcément une incidence sur les modalités de leur analyse et de son expression. Quand il y a connivence, c'est pire.
C'est la raison qui explique cette impression que j'ai souvent ressentie en écoutant les journalistes de droite ou de gauche : une liberté encadrée, un souci de vérité mais limité, de l'audace contrôlée, des susceptibilités à ménager, des évidences à ne pas dire, un enlisement dans les données techniques mais des tiédeurs intellectuelles, des prudences calculées pour ne pas insulter l'avenir. Règne alors comme une objectivité molle, plus précautionneuse qu'exigeante.
Sans doute ne serais-je pas autant sollicité par cette envie d'universalité au détriment des enfermements professionnels si ce n'était pas chez moi une obsession qui touche bien d'autres domaines. La Justice est trop fondamentale pour être laissée aux seuls magistrats : les citoyens aux assises sont une bénédiction. Le football est un sport trop populaire pour être abandonné aux commentateurs et experts qui nous en privent en mauvais français. Le cinéma est une passion trop partagée pour être livrée aux seuls spécialistes. J'imagine le Festival de Cannes ouvert aux vents du grand large.
J'en suis sûr.
Les citoyens sont des journalistes comme les autres.
Rédigé le 06 février 2017 dans Actualité, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (215)
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Je ne me prononce pas sur l'aspect judiciaire ni sur le caractère dévastateur de l'indécence de ces sommes, même licites, pour le commun des citoyens.
Je reconnais que la cause du vainqueur éclatant de la primaire de la droite et du centre est aujourd'hui dramatique mais pas encore désespérée. Il y a des gouffres qui s'ouvrent après les triomphes. Il peut y avoir aussi des résurrections qui se produisent avant l'hallali.
Aussi légitime que soit, en démocratie, l'inquisition médiatique, je ne peux me déprendre cependant, face à cette curée systématique et renouvelée, d'une sensation de nausée qui n'est pas contradictoire avec l'agacement que m'inspire la médiocrité de la cellule de communication de François Fillon.
La formule est belle et percutante, mais il ne s'agit sans doute pas d'un "coup d'Etat institutionnel" même si des révélations récentes suscitent pour le moins un questionnement sur le rôle de l'Elysée. Il y a un moment où il convient d'affronter les accusations et leur substance plutôt que de se demander d'où elles viennent.
Surtout quand tout laisse penser que les aigreurs les pires surgissent de son propre camp. Donc la délation la plus laide.
La double rançon de l'affaire Fillon est politique et éthique. Elle sera à payer même si François Fillon ressort indemne, autant que faire se peut, des procès qui lui sont faits par deux médias acharnés à sa perte, les autres suivant le mouvement.
Avoir entendu Georges Fenech saisi par je ne sais quelle pulsion prendre les devants au nom de la morale en réclamant la mise hors jeu de François Fillon était déjà assez réjouissant. Que je sache, il ne s'était guère élevé, sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, contre la conception dévoyée de l'état de droit ayant gangrené le cours de certaines affaires. Mais le plus grave n'est pas là. Car si on était contraint, pour se parer des plumes du paon irréprochable, de l'être soi-même, la vie publique ne serait plus drôle ni tenable. Non, il a osé déclarer dès le premier jour que le résultat de la primaire était caduc... Il a été rembarré mais la pique avait été lancée.
Alors que la primaire a été un immense succès, consacré par l'électorat de la droite et du centre, et que le meilleur candidat, par sa tenue, sa radicalité et ses principes, avait été largement élu, quel étrange procédé que de prétendre discuter la validité de ce résultat !
Comme si les attaques contre F.Fillon avaient eu pour finalité de faire rejouer le match et qu'il convenait de leur complaire alors qu'au contraire c'est ce vainqueur précisément qui leur importe et qu'elles ciblent ! En mettant sans nécessité le débat de la primaire dans les polémiques qui ont suivi, Georges Fenech participe d'un mouvement visant à discréditer ce formidable processus démocratique au prétexte qu'il n'aurait pas désigné le bon gagnant ! (Le Figaro)
Quand Henri Guaino vitupère le système de la primaire malgré la forte légitimité qu'elle a donnée en proposant une candidature inconcevable, la sienne, qui n'a pour elle que d'être spontanée et libre, on croit rêver (BFMTV). Encore une banalisation d'une démarche spécifique au général de Gaulle et qui n'avait de sens qu'avec lui ! Où est la légitimité historique d'Henri Guaino ? Où serait celle de Michèle Alliot-Marie parce que de mauvaise ministre elle prétendrait se métamorphoser en grande présidente ?
S'il fallait trouver un argument décisif en faveur de la primaire, à l'exception d'Alain Juppé qui y a participé et qui même battu ne serait pas indigne de la charge présidentielle, qui aujourd'hui accepterait de voir François Fillon supplanté par Xavier Bertrand, Laurent Wauquiez et même François Baroin heureusement délivré, pour ceux qui l'apprécient, de la virtualité de devenir Premier ministre de Nicolas Sarkozy ?
Quant au président du Sénat, aussi poussé qu'il soit par certains, nous ne serions pas prêts à prendre ses désirs secrets pour nos réalités. Sa faconde volubile remplacerait la roideur élégante de François Fillon mais pour l'essentiel, ça ne le ferait pas comme on dit !
La première rançon de l'affaire Fillon sera, pour demain, pour les prochaines années, une discussion sur l'utilité de la primaire, sa suppression peut-être.
La seconde sera plus accablante. François Fillon a gagné parce qu'il a été le premier, le seul, à attacher l'importance qu'elles méritaient à l'éthique personnelle, à la morale publique. On se souvient de sa phrase si juste sur la mise en examen du général de Gaulle. On se rappelle comme lui-même s'était présenté comme un modèle d'intégrité. Il peut l'être encore aujourd'hui ou non - homme probe ou homme d'argent par solidarité familiale ? -, le mal est fait dans tous les cas.
Le hiatus entre son discours victorieux et la réalité d'après, de quelque manière que les choses tournent, rendra dorénavant inaudible, lors des joutes de droite et du centre, tout propos ferme sur l'éthique, toute exigence de morale publique. On pensera à tort que toute promesse de rectitude est mensongère, tout engagement d'honnêteté est faux et hypocrite.
Au-delà de l'affaire Fillon qui est loin d'être terminée, je ne voudrais pas qu'à droite et au centre nous ayons à payer cette double rançon.
Alors que la primaire ne s'est pas trompée et qu'on a plus que jamais besoin de morale.
Rédigé le 04 février 2017 dans Actualité, Justice, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (246)
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Thierry Lévy est mort le 30 janvier 2017.
Je déambulais et soudain j'ai appris la terrible nouvelle. Un ami cher venait de disparaître.
Le 10 février 2008 j'avais écrit sur ce blog un billet : "Vraiment Maître", dans lequel j'analysais et célébrais l'avocat incomparable qu'il était.
Le 1er mai 2015 il m'avait fait la grâce d'un entretien sur ma chaîne YouTube. Saisi, je l'avais découvert avec les stigmates d'une grave maladie et quand il m'a quitté, il a rassuré mon inquiétude avec un sourire dont j'espérais n'avoir pas à suspecter la sincérité. Ses réponses, au cours de notre échange de 45 minutes, ont été éblouissantes d'intelligence, de profondeur et de provocation stimulante. Beaucoup d'avocats m'ont fait savoir qu'ils avaient entendu un "Maître" et un exemple.
Un dîner où nous l'avions convié, il y a quinze ans. Nous quittant, avec un sombre satisfecit il me déclare : "Tu es le seul magistrat avec lequel je consente à partager le pain et le sel".
Ce n'était pas un vain mot de sa part. Le signe que, pour ses appétences et ses choix, il ne transigeait sur rien. Et que le bonheur était d'avoir été élu.
On ne fait pas le tour de son immense personnalité en la réduisant à sa part judiciaire et à ses combats contre la prison et, plus généralement, à sa détestation de tout ce qui de près ou de loin apparaissait comme une répression. On devine comme nos philosophies pénales étaient opposées mais cet antagonisme n'avait pas la moindre importance parce que j'estimais trop la force de son engagement, la puissance de sa pensée, la singularité de sa démarche pour me préoccuper de ces divergences. J'admirais son éloquence, la plus belle langue du barreau, son refus absolu du narcissisme, du cynisme et de la médiatisation judiciaires, sa solitude hautaine mais jamais condescendante, cette capacité inouïe qu'il a eue toute son existence de ne jamais laisser sa personne se dégrader en personnage, l'avocat tourner à l'histrion même talentueux. Jamais Thierry Lévy n'a pu être pris en flagrant délit de représentation de soi. L'orgueil de défendre, jamais la vanité d'être.
Un avocat d'exception.
Si Thierry Lévy a été ce professionnel à l'envergure indépassable, c'est qu'il était irrigué, nourri et sublimé par la densité et la culture de l'intellectuel, la passion de l'écriture et le génie de l'écrivain capable aussi bien d'essais fulgurants sur la justice et la société que de développements complexes et riches sur l'art de convaincre ou d'une biographie magnifique, pour finir, de sa mère Rose. Rien de ce qui relevait du registre de l'esprit et de la sensibilité, malgré l'apparence parfois roide qu'il affectionnait pour décourager les importuns, ne lui était étranger.
Je le vois, je l'entends, dans certaines émissions rares où il acceptait d'aller - notamment "Ce soir (ou jamais !)" chez Frédéric Taddéï - avec son air indigné ou serein, jamais méprisant, et sa concentration intense dans l'écoute et pour sa réplique qui allait surgir, le plus souvent grave mais parfois lestée d'une ironie décapante et sans merci. Là où il intervenait, la futilité et la superficialité s'effaçaient.
De sa bouche, de son intelligence ne sortaient jamais les banalités que l'univers médiatique impose pourtant même aux invités les plus libres, les plus rétifs. Il n'avait peur de rien parce qu'il avait une indicible confiance, sans arrogance, en son courage de penser et de dire. Cette extraordinaire indépendance qui lui était consubstantielle, il ne la déniait pas aux autres et ce n'est pas de lui qu'auraient pu surgir des menaces de judiciarisation de la pensée.
La liberté d'expression qui était la sienne à laquelle il ne dérogeait jamais et qui me touchait d'autant plus qu'elle était tendue vers la vérité, était inséparable d'une infinie faculté de compréhension et d'écoute. C'est en ayant bénéficié souvent de cette dernière que je lui ai dédié en connaissance de cause mon livre sur Robert Brasillach : "A Maître Thierry Lévy qui comprend tout et n'a peur de rien".
Un intellectuel d'exception.
Dans les notices nécrologiques (Le Monde, Le Figaro) qui lui ont été consacrées, aussi complètes qu'elles soient, manquaient forcément l'intimité de l'amitié, la douceur et la fraternité de liens irremplaçables, aussi rarement qu'ils aient pu se manifester à la fin de sa vie.
Ce sont les instants magiques glissés entre les obligations, nos déjeuners qui restent le plus intensément gravés dans ma mémoire parce que Thierry m'offrait ce dont naturellement il disposait et usait à profusion, avec une générosité de coeur et d'esprit qui me laissait reconnaissant et comblé.
Je ne tiens pas pour rien la complicité joyeuse, les rires qui permettaient à notre relation de jouer sur toute la gamme. Je n'oublie pas la tendresse et la fierté du père quand il évoquait ses enfants, et comme il était heureux alors d'en côtoyer deux qui avaient choisi comme lui - grâce à lui ? - la splendide mission de parler pour les autres quand elle n'est pas dévoyée ni assumée médiocrement. Je retiens encore les confidences jamais impudiques sur un compagnonnage amoureux qui le montrait toujours plus inquiet pour l'autre que pour soi.
Thierry Lévy n'était pas de ces amis qui se contentent des mots de l'amitié sans en donner les preuves. Je me rappelle, lors de l'ignominieuse attaque de Francis Szpiner à la suite du premier procès Fofana, qu'il était immédiatement accouru à ma rescousse, me proposant d'engager, avec son aide, une action qui aurait mis au jour les facettes multiples de l'avocat de la mère d'Ilan Halimi. Je n'avais pas osé, j'étais encore avocat général, et je me suis contenté du processus disciplinaire.
Mais il avait été le premier.
Au cours de ces deux dernières semaines, je l'avais eu au téléphone et sa voix affaiblie m'avait angoissé. Il répondait moins vite à mes SMS. Mon ultime question : tu ne me mens pas, tu vas bien, ce n'est pas la suite du cancer ? Mais non, Philippe, je vais bien.
C'était tout lui que ce voile jeté sur le trouble, la possible tristesse de l'autre, pour les étouffer.
Un ami d'exception.
Thierry Lévy n'a pas cessé de tenir les promesses qu'il s'était faites à lui-même, de rigueur, d'intégrité et de solitude si la vie sociale le contraignait à des compromissions. J'ose à peine l'exprimer tant il aurait en horreur un extrémisme de la louange, même le plus sincère qui soit. Je me risque. Je l'ai fréquenté, écouté, aimé comme s'il me présentait, parfois, le modèle de ce que j'aurais désiré être avec une rectitude et une liberté dont lucidement, par comparaison avec lui, je m'avouais n'incarner que des brouillons.
Je revois son visage puissant, fier, inoubliable.
Et je me souviens.
Rédigé le 02 février 2017 dans Actualité, Justice, Livres, Médias, Société | Lien permanent | Commentaires (53)
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