Il n'y a pas un président de la République plus sensible et attentif à la symbolique du pouvoir qu'Emmanuel Macron.
D'abord parce que face aux quinquennats précédents, il était facile de lui redonner une place éminente puisque ceux-ci l'avaient évacuée au bénéfice d'un prosaïsme sans allure.
Surtout, en raison du fait que le président de la République, dans sa réflexion sur la relation qu'il convenait d'entretenir avec les Français, avait naturellement mesuré l'importance des symboles, du rite, de la solennité et d'une attitude qui permettait à tous, même aux opposants, de s'identifier avec la représentation offerte.
Quelle terrible déception, alors, de constater que dans le domaine du régalien, à l'égard duquel Emmanuel Macron a manifesté pourtant un intérêt constant, la symbolique du pouvoir, dont on aurait pu espérer la contagion positive sur les institutions fondamentales pour la démocratie, a disparu malheureusement au profit d'une banalisation, d'une technocratie, d'une rationalisation prétendument inspirée par l'efficacité mais profondément perverse !
Ce ne sont pas les axes de la réforme de la Justice qui me désappointent. Au contraire les six mesures pour réduire les délais de la justice civile vont indéniablement dans le bon sens (Le Figaro).
Le préoccupant se rapporte à la Justice criminelle.
On projette la création du "tribunal criminel" qui composé seulement de magistrats jugera les crimes punis jusqu'à vingt ans tandis que les cours d'assises, avec leur jury populaire, demeureront compétentes pour les affaires les plus graves jusqu'à la réclusion criminelle à perpétuité comme les meurtres ou et les assassinats (Le Monde).
Je devine l'argumentation qui sera développée pour battre en brèche la dénonciation de cette dégradation, de cette dénaturation par le bas parce que la majesté tragique et populaire du haut devenait insupportable pour un régime qui veut bien de la symbolique pour la présidence mais l'exclut pour la société.
On pourra faire valoir tout ce qu'on voudra - rapidité et simplicité ? - mais il est clair que si on garde le peuple pour le jugement de certains crimes, on va allègrement s'en séparer pour l'appréciation d'autres transgressions comme par exemple les viols, les vols à main armée et les coups mortels au sujet desquels je perçois mal l'obligation de se priver des citoyens quand ils seraient nécessaires ailleurs.
Le fait que des dossiers criminels soient correctionnalisés, notamment des viols, ne justifie pas techniquement et judiciairement l'exclusion du jury populaire quand on les a considérés comme trop graves pour les faire échapper aux cours d'assises.
C'est le peuple dont on veut réduire la part, la mission, la présence parce qu'il est insupportable avec son désir de rigueur, sa conscience de la gravité des choses et son incroyable intuition collective pour donner à chaque crime, à chaque accusé le champ et la décision justes.
Aussi quelle surprenante contradiction que celle d'un gouvernement qui n'a pas lésiné sur la démagogie ces derniers mois au sujet des atteintes causées aux femmes et qui trouve le moyen, pour appréhender les plus scandaleuses : les viols, de faire sortir le peuple par la fenêtre alors que dans le débat d'aujourd'hui il aurait été beaucoup plus légitime que quiconque, en tout cas que les seuls magistrats, pour relever le défi de ce fléau criminel.
Pour aller plus loin, il me semble que dans cette approche à l'évidence concertée entre la garde des Sceaux et le président de la République, il y a davantage que cet apparent besoin de simplifier, de mutiler par efficacité et de banaliser par facilité. Je sens en effet une tendance propre au "macronisme" de ne rien prendre véritablement au tragique - sauf pour des points de vue validés par un humanisme rentable - et donc de concevoir sans état d'âme des processus et des réformes éliminant absurdement la symbolique du peuple, des cours d'assises et des crimes parce qu'elle est dorénavant jugée inutile et superfétatoire.
Parce que ceux qui réforment ne savent rien de cet univers criminel unique et de la richesse absolue qu'apporte le citoyen à tous les procès d'assises.
Parce que ceux qui en masse vont approuver ce projet de loi ignorent tout de ce monde et s'imagineront de bonne foi qu'on peut rendre hommage à une institution exemplaire en la rendant hémiplégique.
Il y a une insoutenable gravité à assumer, la tension qu'impose une société refusant de transiger avec tout ce qui l'offense et je conçois la tête lourde de l'Etat ne sachant comment s'en dépêtrer.
Mais on ne peut prétendre s'en défaire par d'incongrus "saucissonnages" ni pertinents ni utiles. Ils le seront d'autant moins qu'une tendance discutable vise à constituer de plus en plus les cours d'assises comme de "super correctionnelles". Ce serait un drame intellectuel et judiciaire que de poursuivre ce mouvement délétère en exilant un peu plus le peuple de ce qui le regarde et qui lui offre encore l'honneur d'attacher son intelligence et sa sensibilité à l'examen de tous les crimes. Sans frontières artificielles entre eux.
Il est désolant de constater que, pour lutter contre cette dérive, la présidente de l'Union syndicale des magistrats, en totale méconnaissance de ce qu'est la cour d'assises, fait défaut alors qu'un avocat, au contraire, lucidement apporte son soutien à cette juste cause (Le Parisien).
Le président de la République a fait beaucoup pour la France avec la symbolique du pouvoir, de son pouvoir. De quel droit, alors, peut-il si légèrement décréter que la Justice criminelle sera dépouillée de sa symbolique et le peuple de sa mission ?
@ Mary Preud'homme | 13 mars 2018 à 11:58
"Magnifique dans son numéro improvisé Dupond-Moretti. Comment il lui a rivé son clou à la vipère Angot !"
Il n'y avait plus qu'à passer à la seconde phase :
https://www.dailymotion.com/video/x5atb5d
Rédigé par : fugace | 15 mars 2018 à 14:53
Une dernière précision sur ce sujet. Il m'est revenu en tête la pratique de la correctionnalisation, à savoir la traduction devant un tribunal correctionnel de délinquants normalement passibles de la cour d'assises.
Si l'on remet le projet Macron en perspective, de fait cela revient à traduire de manière législative une pratique très ancienne de notre magistrature qui, sauf erreur, n'avait aucune base légale.
Tout cela relève d'un prosaïsme, de bon ou mauvais aloi ?
Rédigé par : Robert | 14 mars 2018 à 11:12
@ Franck Boizard
La bourgeoisie s’est surtout trahie elle-même en 1968. Elle a émigré loin de ses valeurs.
@Trekker
« Pour notre prince du verbe qu’est Macron ».
Prince du verbe qui le maîtrise mal et ne tient pas sa langue. Au point de ne pas supporter la contradiction. La supercherie Macron s'accuse dans le fait que personne ne relève que Macron est un élève laborieux qui veut tellement convaincre ses profs qu'il sait faire une bonne dissert qu'il est trop disert et fait trop long. Je serais le prof de Macron, je lui mettrais 14 en annotant : "On sait que vous savez des choses. Soyez plus bref et mettez de l'ordre dans votre "savoir"."
La fille de Brigitte a présenté son condisciple à sa mère : "Viens voir un camarade, non pas qui m'a dit tout ce que j'ai fait, mais qui sait tout sur tout !" Que devaient savoir les autres ! Le niveau baisse, ça fait peur. Macron "prince du verbe" parle beaucoup et pas très bien pour ne rien dire. Mais quand il agit, c'est encore pire.
Rédigé par : Julien WEINZAEPFLEN | 14 mars 2018 à 10:26
@ GLW | 13 mars 2018 à 20:36
« Mais il y a le temps de délibération des jurés me direz-vous. Est-ce que vous pensez sérieusement que les cinq magistrats de ce nouveau tribunal vont donner leur verdict dans le quart d'heure qui va suivre la fin de la plaidoirie de l'avocat de la défense ? »
On ne va pas sortir le chronomètre, mais je pense, en effet, que le temps des délibérations de douze jurés populaires sera sensiblement plus long que celui de cinq juges expérimentés.
Mais plus que la durée des délibérations qui peut être très variable en fonction de la complexité de l’affaire à juger, c’est le coût de la logistique liée à la prise en charge des jurés qui est très lourde : frais de déplacement, nuitées, indemnisations, dispositions administratives avec l’employeur pour la disponibilité de son salarié. Prise en charge qui entre aussi dans le compte temps, même si elle n’apparaît pas dans la durée du procès lui-même.
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F17783
Rédigé par : Achille | 14 mars 2018 à 01:06
"C'est le peuple dont on veut réduire la part, la mission, la présence parce qu'il est insupportable avec son désir de rigueur, sa conscience de la gravité des choses et son incroyable intuition collective pour donner à chaque crime, à chaque accusé le champ et la décision justes." (PB)
Le seul lieu où en plus le peuple était tiré au sort, plus juste cela n'existe pas !
Aujourd'hui le Président est enivré de sa propre réussite, qui au fond fut sans doute due aussi aux circonstances chères à Mongénéral.
Le second servait son pays, le premier ne semble plus servir que lui-même et une certaine caste, miroir mon beau miroir.
La cohésion d'un pays est sa force, elle se perd dans des décisions inopportunes, tout n'est pas bon dans le Macron. La route est encore longue, il va souffler la première bougie, il ne faudrait pas que la boue colle trop à ses semelles qui commencent à peser.
Rédigé par : Giuseppe | 13 mars 2018 à 21:41
@ Achille le 13/03/2018 à 14h14
Je ne mélange pas tout.
Par contre, l'appel et le tirage au sort des jurés qui peut comprendre aussi leur révocation par une des parties au procès est en général d'une durée d'environ une heure. Dites-moi si effectivement ce gain d'une heure a un sens alors que je le maintiens, les délais de jugement des affaires sont surtout ralentis par la durée de l'instruction et du retour des commissions rogatoires qui sont délivrées par le juge d'instruction et qui elles-mêmes sont ralenties dans leur exécution en raison des surcharges des services de police.
Mais il y a le temps de délibération des jurés me direz-vous. Est-ce que vous pensez sérieusement que les cinq magistrats de ce nouveau tribunal vont donner leur verdict dans le quart d'heure qui va suivre la fin de la plaidoirie de l'avocat de la défense ?
Rédigé par : GLW | 13 mars 2018 à 20:36
@ Robert
Reste à savoir si la société aura encore la capacité de réagir ou si « l’élite d’ombre » des experts des think tanks a déjà réussi à neutraliser toute forme de résistance intellectuelle. Aujourd’hui, l’opposition droite/gauche tend à se redoubler d’un conflit sourd entre deux visions du monde. Une métaphysique transhumaniste d’un cyberfutur (l’homme-robot gouverné par des experts) et un désir, encore mal défini politiquement, de liberté et de fraternité pour qui « la pluralité des humains est la loi de la terre » (Hannah Arendt).
C'est tout à fait cela : deux visions du monde, celle imposée par lesdits experts et celle du peuple qui vit tous les jours avec les règles que ces experts imposent dans une société robotisée et standardisée... sauf que l'être humain n'est pas standard.
Un autre exemple de standardisation : au 1er juillet, la règle des 80 km à l'heure sur le réseau secondaire non autoroutisé va être appliquée. Sauf que là encore, entre de petites routes de campagne où le 80 à l'heure sera compatible avec la réalité, et les routes secondaires départementales bien balisées où rouler à 80 à l'heure sera une idiotie, on voit bien que toutes les routes ne peuvent pas être traitées au même niveau.
Quant à la CSG des retraités compensée par l'annulation progressive de la taxe d'habitation, le pire ce sera pour les retraités qui continueront à payer cette dernière taxe parce qu'ils sont juste au-dessus du plafond et donc pas si riches que cela.
Pire encore, certains élus (M. Estrosi pour ne pas le citer) proposent de créer une nouvelle taxe foncière en remplacement de l'abandon de la taxe d'habitation... ce qui serait la triple peine pour certains retraités. Ils sont géniaux nos élus lorsqu'il faut puiser dans la poche des contribuables ou faire des économies sur ce qui ne les concerne pas.
@ Julien WEINZAEPFLEN
Il est évident que nos têtes pensantes vivent dans leur bulle, hors des réalités. C'est tout le problème. Qu'il s'agisse de justice ou de tout autre problème.
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 13 mars 2018 à 20:07
@ Franck Boizard | 13 mars 2018 à 17:36
Oui, je partage votre dégoût et comme la majorité des Français je suis écœuré de la présence de Macron à l'Elysée.
Aujourd'hui ses députés (pour ne pas dire autre chose) discutent d'une loi nouvelle qui devrait nous priver un peu plus d'informations.
Je n'en dis pas plus avec l'espoir que mon message passera.
Rédigé par : Jean-christophe | 13 mars 2018 à 19:22
@ Mary Preud'homme à 11h58
Nous sommes bien d'accord, c'est tout à fait ça. Une nouvelle usine à gaz.
Rédigé par : GLW | 13 mars 2018 à 18:05
Emmanuel Macron est une imposture, il est la marionnette consentante de l’hyper-classe apatride. François Hollande manquait d’envergure : il draguait les journalistes au point de coucher avec. Macron est monté un cran au-dessus, il est copain avec les patrons de presse. C’est beaucoup plus efficace.
Cette imposture Macron répond à un besoin politique. Rassurer la bourgeoisie (antinationale par l’effet de l’histoire (1)) que le Système dans lequel elle se sent bien ne sera pas remis en cause (pas d’éclatement de l’Euro, pas de fermeture des frontières, pas de rétablissement de la souveraineté nationale).
Seulement, même cette alliance des bourgeoisies est une imposture. Les petits et moyens bourgeois sont flattés de croire qu’ils partagent les intérêts de la haute bourgeoisie à la Drahi, à la Niel, à la Pigasse. Mais c’est faux, alors que les grands bourgeois ont réellement les moyens d’échapper aux conséquences néfastes des politiques qu’ils promeuvent, les petits bourgeois subiront comme le peuple le malheureux destin de la France. Peu nombreux sont ceux qui ont les moyens de monter dans un jet et de sortir du pays comme si de rien n’était.
Il n’y a aucune raison d’être optimiste à court terme. Il est probable que nous allons persister dans l’erreur macroniste.
****************
(1) L’histoire récente peut s’écrire comme le récit de la trahison de la bourgeoisie française : elle a trahi le roi en 1792, Bonaparte en 1815, Charles X en 1830, Louis-Philippe en 1848, Paris en 1870, la France en 1940 et les décennies qui suivent.
Rédigé par : Franck Boizard | 13 mars 2018 à 17:36
@ boureau | 12 mars 2018 à 19:04
"Puisqu'on se tue à vous écrire, depuis l'élection présidentielle, que Macron n'aime pas le peuple cher P. Bilger."
Macron s'aime et c'est déjà beaucoup...
Quant à aimer le peuple, c'est une activité réservée aux saints, ou à ceux qui ne sont pas sains d'esprit, pour la raison principale qu'il n'est pas aimable et plusieurs autres raisons qui ont à voir avec le discernement.
Rédigé par : duvent | 13 mars 2018 à 16:52
@ GLW | 13 mars 2018 à 08:09
"Non, le problème c'est la durée de l'instruction qui peut durer plusieurs mois et qui de toute manière reste obligatoire en matière criminelle... Il fallait recruter des juges d'instruction ce qui de manière automatique aurait diminué le nombre de dossiers sur l'étagère"
Pour notre prince du verbe qu’est Macron, l’important c’est de faire croire que sa réforme résoudra la majorité des problèmes de notre justice, et générera des économies. Ce qui est d’ailleurs le cas de ses X réformes précédentes, qui furent annoncées elles aussi comme le symbole de notre entrée dans un monde nouveau.
Sarkozy président était brouillon et manquait de constance, comparé à notre super joueur de bonneteau Manu 1er : c’est Merlin l’enchanteur en version 2.0 !
Rédigé par : Trekker | 13 mars 2018 à 15:46
Sur le fond, je suis certes d'accord avec vous.
La réalité quant à elle est bien moins idyllique.
Pour notre plus grand malheur.
J'ai en mémoire des cargaisons de cas où le justiciable se retrouve pieds et poings liés face à un jugement prononcé en dépit du bon sens par un juge formellement incompétent se retranchant derrière la possibilité pour la personne de porter l'affaire en appel... Qui ne le fera pas en raison des conséquences financières et dilatoires de la procédure.
...Ou victimes de l'incurie administrative de ces gens (perte d'emploi parce que le juge a omis de signer au bon emplacement sur le document permettant à l'intéressé de récupérer son permis de conduire).
...Condamnation d'un locataire parfaitement prévenant et honnête à rénover pour des dizaines de milliers d'euros la résidence - fortement dégradée avant son entrée dans les lieux - de son propriétaire franc-maçon ; tout comme le magistrat chargé de l'affaire... Tiens tiens !
Et ce n'est que le début de la liste.
Pendant ce temps-là, le dénommé Can.at se pose en victime de ne pas pouvoir se pavaner en concert après seulement quatre ans en prison pour avoir tué sa compagne de ses poings, et une totale impunité après la mort par sa faute de sa femme sans compter le harcèlement exercé sur une autre victime.
La loi à bon dos pour excuser les FAUTES des juges... Quant à eux non sanctionnables au pénal ni au civil pour les conséquences humaines de leurs jugements foireux; ben voyons ! Ni même au plan professionnel : ils sont "immutables".
"L'âne vint à son tour (..) manger l'herbe d'autrui, quel crime abominable ! Rien que la mort pouvait expier son forfait (...) Selon que vous serez puissant ou misérable...". La Fontaine n'a pas pris une ride.
Seule la manière a un peu évolué : le "haro sur le baudet" a seulement pris la forme d'un "mur des cons" établi par ces messieurs-dames sortis de l'ENM.
Et si j'ai un conseil aux lecteurs du présent blog : faites en sorte de vous tenir LOIN de la "Justice".
Toujours !
Rédigé par : julien benda | 13 mars 2018 à 15:43
Premières lézardes ?
Rédigé par : Antoine Marquet | 13 mars 2018 à 15:20
@ GLW | 13 mars 2018 à 08:09
Il ne faudrait pas tout mélanger. L’instruction est une chose et le jugement en est une autre.
La première est effectuée par des professionnels confirmés, enquêteurs, juge d’instruction, qui établissent le dossier de l'accusé en vue de son procès. Ils établissent les preuves, prennent en compte les témoignages et le cas échéant les aveux de la personne mise en examen.
Le second comprend le réquisitoire de l’avocat général, les plaidoyers des avocats de la défense et des parties civiles, la déposition des témoins et des experts assermentés amenés à apporter leurs conclusions. Après seulement vient le verdict des jurés sur la base de tous ces éléments.
Rien de nouveau dans la procédure judiciaire qui durera le temps qu'il faudra pour constituer le dossier de l'accusé.
Ce qui change c’est seulement la nature des procès d’assises qui ne disposeront de jurés populaires que pour les crimes les plus graves.
Pas de quoi en faire un fromage !
Rédigé par : Achille | 13 mars 2018 à 14:14
Bonjour.
Vous écrivez : “C'est le peuple dont on veut réduire la part, la mission, la présence parce qu'il est insupportable avec son désir de rigueur, sa conscience de la gravité des choses et son incroyable intuition collective pour donner à chaque crime, à chaque accusé le champ et la décision justes.”
Vos arguments pour cette défense enflammée de la nécessité du jury populaire ne correspond pas exactement à mon expérience de juré lors d’une affaire en appel (vous y étiez l’avocat général) dont le caractère particulièrement sordide des faits et le calvaire enduré par la victime étaient de nature à faire douter de l’espèce humaine.
J’ai vu un jury collectivement mû par des émotions à vif après des débats longs et éprouvants.
Si je vous accorde l’existence d’un désir de rigueur partagé, celui-ci manquait justement de la rigueur nécessaire que l’on peut souhaiter lorsqu’il s’agit de peines lourdes à prononcer. La demande d’un châtiment exemplaire donnait lieu à des surenchères pulsionnelles et désordonnées excluant toute émergence d’une sérénité d’esprit souhaitable en pareille situation. La réaction collective a pris le pas sur cette intuition incroyable que vous magnifiez. Il s’agissait plus d’une conversation au bar du commerce que d’un échange d’opinions dans la salle de délibérations d’une cour d’assises et je n’aurai pas la prétention d’avoir été très différent dans mon approche.
J’ai eu par la suite le sentiment trouble et désagréable qu’avant délibération, les magistrats ont su mettre à profit le manque de distance des uns et des autres pour amener le jury à des conclusions cohérentes par rapport à leurs attentes.
Il ne s’agit donc que d’une expérience unique, au goût un peu amer et certainement peu représentative du cas général.
Je n’en retirerai pas de conclusion définitive et avoue mon incapacité à émettre quelqu’avis que ce soit sur la nécessité ou non des jurys populaires.
Rédigé par : Gb | 13 mars 2018 à 13:10
@ Michelle D-LEROY | 12 mars 2018 à 20:02
Votre évocation de la réforme du baccalauréat m'a fait penser à un article récemment lu sur le site de Politis. Au-delà de l'option politique du site comme des auteurs de l'article, il y a me semble-t-il dans ce dernier une excellente analyse du mode de gouvernance à l’œuvre depuis longtemps en France, mais largement aggravée par le technocratisme de Monsieur Macron. A lire ici :
https://www.politis.fr/articles/2018/02/les-think-tanks-sinstallent-au-coeur-de-letat-38308/
Rédigé par : Robert | 13 mars 2018 à 12:04
@ GLW, 08:09
"Non, le problème c'est la durée de l'instruction qui peut durer plusieurs mois et qui de toute manière reste obligatoire en matière criminelle..."
Plusieurs mois seulement, monsieur est trop bon ! Moi j'aurais dit années.
Si bien que faire croire qu'au final on va gagner quelques jours en bricolant des assises à deux vitesses, créant ainsi une nouvelle usine à gaz judiciaire, c'est se payer la tête du peuple...
@ Patrice Charoulet, 11:04
Magnifique dans son numéro improvisé Dupond-Moretti. Comment il lui a rivé son clou à la vipère Angot !
Rédigé par : Mary Preud'homme | 13 mars 2018 à 11:58
@ Julien WEINZAEPFLEN 12 mars 2018 à 10:28
Ça fait un p'tit bout de temps que je n'avais pas visité le blog de M. Bilger, du coup avec votre intervention ça m'a requinquée.
Oui, mille fois oui, vous avez raison sur le sieur Macron qui ignorant le peuple, celui que l'on croise sur un quai de gare (pas lui, il ne prend pas le train), aimerait le voir disparaître. Il fera tout son possible pour cela.
En effet pourquoi garder ces illettrés, ces alcooliques, ces gens de peu auprès de magistrats si persuadés de leur bon sens indiscutable qu'ils épinglent sur un mur LEURS cons. Belle justice 'équitable' en perspective...
Personnellement je connais beaucoup de magistrats plus cons que mon charcutier :D mais le sieur Macron ne fréquente pas, non plus, les charcutiers, du coup il ne sait pas qu'un charcutier peut être moins con qu'un juge.
Monseigneur Macron confond instruction et intelligence. Du reste sieur Macron est très instruit ; la preuve ? il parle l'anglais de Rothschild à merveille. C'est dire...
Rédigé par : breizmabro | 13 mars 2018 à 11:23
Je n'écoute plus ONPC, pour diverses raisons. Alerté d'un échange un peu vif entre Christine Angot et Eric Dupond-Moretti, je suis allé écouter ce moment. Cela concernait l'agression de Virginie Calmels par la "torquemadette" (je tire cette expression d'un excellent article de la patronne de "Causeur" Elisabeth Lévy).
http://people.bfmtv.com/tv/onpc-echange-tres-tendu-entre-eric-dupond-moretti-et-christine-angot-1393323.html
Rédigé par : Patrice Charoulet | 13 mars 2018 à 11:04
@ Julien WEINZAEPFLEN | 13 mars 2018 à 07:58
« …sont-ce vraiment les juges qui prennent la décision finale ou sont-ils là pour éclairer les débats entre les jurés, même si leur voix est prépondérante ? »
Comment faire la différence entre éclairer le débat et l’orienter vers la décision qu’ils considèrent la plus appropriée et qui est la leur ?
Rédigé par : Achille | 13 mars 2018 à 10:54
@ Mitshane | 12 mars 2018 à 19:35
"La Justice est rendue « au nom du peuple français » ; la suppression possible des jurys populaires est donc une aberration, même si, j’en conviens, aucun système n’est parfait. C’est comme la démocratie, « le moins pire » des systèmes…"
Le peuple français a ses représentants, et les représentants représentent, enfin ici, j'ai un a priori sujet à caution...
Vous avez fait un petit catalogue instructif.
Par ailleurs, ce légendaire et fabuleux "peuple français" serait-il supérieurement pourvu ? Son jugement passerait-il par des voies qui, n'étant pas impénétrables devraient rassurer ? Je ne le crois pas...
Certains voient dans l'expression du peuple la bonté, la clairvoyance, et la justice en réalité dans ce peuple comme dans tous les autres, le jugement penche dangereusement du côté de l'accessoire et pourquoi ne pas le dire de l'intérêt (l'intérêt n'étant pas toujours du capital...)
Rédigé par : duvent | 13 mars 2018 à 09:14
Y a pas à dire notre Manu 1er est un sacré joueur de bonneteau.
Voilà donc l'annonce d'une nouvelle réforme, la création d'un "Tribunal criminel".
Bref, on ajoute un nouvel étage à la fusée et personne ne se demande où on va aller chercher les magistrats qui vont siéger dans ces tribunaux.
Il faut gagner du temps.
Mais ça signifie quoi ?
Est-ce que ces audiences vont se résumer à un énoncé des faits reprochés, un réquisitoire, une plaidoirie et quinze minutes chrono chacun ?
Quid des auditions des témoins, des victimes, des accusés et des divers experts ?
Quid des appels de ces jugements ?
Parce qu'enfin, s'il fallait booster quelque chose dans cette affaire, ce n'est pas la durée des audiences qui en général est de l'ordre de deux à cinq jours.
Non, le problème c'est la durée de l'instruction qui peut durer plusieurs mois et qui de toute manière reste obligatoire en matière criminelle...
Il fallait recruter des juges d'instruction ce qui de manière automatique aurait diminué le nombre de dossiers sur l'étagère.
Quant à la suppression des jurés au sein de ces tribunaux, on ne va pas mêler des gens croisés dans les gares et qui ne sont rien mais qui avec leur vécu amènent l'humain dans ces affaires à l'inverse de l'automatisme professionnel.
"Just do it" comme le dit notre très bien-aimé et très saint Manu 1er.
Rédigé par : GLW | 13 mars 2018 à 08:09
@ Achille
« Les juges ne sont pas toujours très à l’écoute de l’avis des jurés et ont tendance à prendre la décision finale sans vraiment se soucier des arguments que pourrait opposer un juré ».
Même s’ils établissent un rapport de forces comme l’explique Jabiru, même si les jurés, complexés de leur incompétence, tendent à se ranger à l’avis des juges, présumé compétent, sont-ce vraiment les juges qui prennent la décision finale ou sont-ils là pour éclairer les débats entre les jurés, même si leur voix est prépondérante ?
@ Michelle D-LEROY
« On a le sentiment qu'il faut réformer pour réformer. »
Ça fait du bien de l’entendre et ça s’appelle le réformisme, qui serait soi-disant plus sage que la « révolution permanente » -Et pourtant la terre est toujours en révolution, la terre ne s’arrête pas de tourner - Eclesia perfecta societas semper reformanda. J’entends parler de réforme depuis Balladur et son "Dictionnaire de la réforme" (je n’avais pas vingt ans à sa parution).
La révolution permanente est cette sagesse de la terre qui tourne sans qu’on le sente. Le réformisme met l’accent non sur la solution, mais sur le problème : « Il faut que la situation soit problématique pour susciter une alternance dont moi, le réformateur, je serai l’alternative. » Le réformiste est cette personnalité pathologique qui résout son problème en trouvant des solutions problématiques à ceux des autres. Le réformiste ne résout pas, il entretient le problème. Le réformisme est donc une maladie mentale de la politique.
« Et comme on sait que l'état de grâce passe très vite, les réformes sont faites à toute vitesse et donc a minima, pour ne vexer personne. »
Ça ne vous rappelle pas quelqu’un ? Sarkozy promettait qu’il faisait des « réformes structurelles » et BFM bizness lui en donnait acte. Aujourd’hui, on dit qu’il fut un roi fainéant comme les autres. Quand dira-t-on que les réformettes de Macron n’étaient qu’un écran de fumée et un ensemble de demi-mesures mal pensées, mal prises, mal apprises et même pas très bien présentées ?
« Donc, au lieu de donner du sens à la réforme, on marche dans le sens des économies mais pas forcément dans le bon sens. »
Parfait exemple de symbolique du pouvoir macronien et de banalisation de tout ce qui n’est pas le pseudo-roitelet nombriliste, petit page de l’argent roi : « Cela est vrai pour la réforme du bac, qui, au lieu de renforcer la symbolique du diplôme, va le déconsidérer. »
@ Mitsahne
Vous posez le débat de la responsabilité des magistrats. J’y serai favorable le jour où on en appellera à la responsabilité des politiques.
Les magistrats jugent au nom du peuple français qui les a nommés pour ce faire. Les politiques gouvernent au nom du peuple français qui les a élus pour ce faire. Quant aux grands patrons qui pantouflent d'entreprise publique en entreprise privée, corps informel souvent formé de hauts fonctionnaires sentimentalement détachés de la mission de service public, le conseil d’administration nomme ces grosses têtes ou ces crânes d’œuf pour bien diriger la boîte en leur faisant cette étrange promesse qu’ils partiront avec de l’argent plein leur chapeau, qu’ils l’aient fait marcher ou fait couler. C’est dans leur cas seulement qu’on pourrait réclamer des responsables et que le sens de la responsabilité décline. En effet le contrat devrait être : « Vous percevrez une indemnité de départ si vous laissez l’entreprise en meilleur état que vous l’avez trouvée. » On rapprocherait ainsi le sort d’un grand patron dont la vie n’est pas liée à l’entreprise ou au groupe qu’il dirige de celui d’un petit patron dont l’entreprise est toute sa vie.
La responsabilité patronale est économique. La responsabilité politique est sanctionnée par la réélection ou le renvoi aux chères études du candidat battu. Où l’on voit que la sanction n’est pas indexée sur la réussite, ce qui prouve que la responsabilité politique relève d’un autre domaine que la responsabilité économique : les administrateurs peuvent estimer le patron qui a coulé la boîte, les employés jamais. Mais les administrés peuvent continuer d’aimer le pacha qui a fait couler leur navire amiral.
Quant à la responsabilité judiciaire, un jugement est rendu dans le doute et selon l’intime conviction. Il n’y a que pour le juge d’application des peines que la question de la responsabilité se pose. Mais la question qui se pose en amont est : pourquoi faut-il aménager une peine ? Le juge est censé prononcer une peine pour appliquer la loi et cette peine devrait encore être « appliquée » ? Interprétation à toutes les phases du processus : le juge qui n’aime pas la loi peut en aménager l’application en prononçant une peine qui va à l’encontre de l’esprit de la loi ; et le JAP qui n’aime pas la peine prononcée peut faire de même. Tout ça n’est pas très corporate et la justice est trop subjective.
@ Thierry Berland
« Le juge » devrait-il vraiment « être au centre de la justice » ? N’est-ce pas plutôt le justiciable ?
« Le renchérissement de la procédure dissuade ici le recours au juge. » Que penser d’un pays qui proclame l’égalité devant la loi et laisse subsister l’inégalité devant la Justice, non seulement en raison de l’inégale qualité des avocats, mais d’abord parce que les différences de revenus font que l’accès à la justice est différencié suivant « que vous naîtrez puissant ou misérable », sans présumer des « jugements de cour » ?
Question subsidiaire à des membres du barreau : pourquoi l’Ordre des avocats n’est-il pas organisé de manière à permettre à chaque justiciable de savoir à qui s'adresser pour avoir une chance que son affaire soit prise ? Pourquoi n’existe-t-il pas de nomenclature référençant les avocats ville par ville, un peu comme on le fait des médecins, selon les spécialités, avec explication de ce en quoi elles consistent ? Le justiciable moyen ne sait pas, par exemple, ce qu’est un avocat pénaliste. Ne devrait-il pas exister une obligation de défendre similaire à l’obligation de soins qui incombe aux médecins, et au terme de laquelle un avocat serait tenu de prendre une affaire, sauf s’il a orienté le plaignant vers un de ses confrères, et jusqu’à ce que le client qui l’a sollicité ait trouvé un autre avocat ?
Rédigé par : Julien WEINZAEPFLEN | 13 mars 2018 à 07:58
Emmanuel Macron a tous les défauts, bientôt il aura la rage sans doute.
Il rassemble des morceaux comme il peut, il a été élu au suffrage universel à plusieurs tours, comment le critiquer alors que tous ceux qui l'ont précédé ont acheté par paresse et laxisme la misère qu'on lui reproche.
Bien sûr il fait briller l'argenterie, elle en avait bien besoin, la Lanterne servait bien mais personne ne faisait la vaisselle.
Maintenant les médias lui reprochent d'aller trop vite et trop loin, il faudrait savoir !
Rédigé par : Giuseppe | 12 mars 2018 à 23:14
Contrairement à ce que laissent entendre certains contributeurs, les jurés d’assises ne seront pas supprimés. Ils seront simplement réservés aux affaires les plus graves (prédateurs sexuels, hold-up meurtriers, assassinats). Le but n’est pas de permettre au pouvoir en place d’avoir la mainmise sur la Justice, mais tout simplement de réduire la durée du traitement des décisions de justice pour des faits qui ne sont certes pas mineurs puisqu’il s’agit de crimes, mais qui ne se sont pas traduits par la mort de la ou des victimes.
Les jurés issus de professions totalement décorrélées du milieu judiciaire ont besoin d’une certaine période d’adaptation pour accomplir la mission qui leur a été confiée et qui n’est pas facile.
Cela se traduit par des procès beaucoup plus longs que lorsque ce sont des magistrats professionnels qui traitent directement le dossier.
Ajoutons, ainsi que le fait fort justement remarquer Jabiru, que les juges ne sont pas toujours très à l’écoute de l’avis des jurés et ont tendance à prendre la décision finale sans vraiment se soucier des arguments que pourrait opposer un juré, partant du principe que, de toute façon, celui-ci n’a pas les compétences requises pour bien interpréter les faits en fonction de la loi en vigueur.
C'est d'ailleurs l'impression qu'avait eu mon collègue qui avait été sollicité pour devenir juré.
Rédigé par : Achille | 12 mars 2018 à 20:18
Un billet parfaitement clair et explicite.
"Le président de la République a fait beaucoup pour la France avec la symbolique du pouvoir, de son pouvoir"
En réalité plus le temps passe, plus les réformes sont connues du public, plus on constate qu'Emmanuel Macron travaille pour son image d'abord, et pour reprendre la récurrente phrase de Gilles Bouleau qui est "le candidat Macron l'a promis, le Président Macron l'a fait", il faut montrer qu'il respecte son programme.
On a le sentiment qu'il faut réformer pour réformer et comme on sait que l'état de grâce passe très vite, les réformes sont faites à toute vitesse et donc a minima, pour ne vexer personne avec la gestion du manque de moyens financiers. Donc, au lieu de donner du sens à la réforme, on marche dans le sens des économies mais pas forcément dans le bon sens.
Il faut changer pour changer, entrer dans le nouveau monde à moindre frais, et on bâcle.
Tout est question de l'impression donnée au peuple. Heureusement les professionnels ne s'en laissent pas conter.
Cela est vrai pour la réforme du bac, qui, au lieu de renforcer la symbolique du diplôme, va le déconsidérer.
Je pense même que la réforme du statut des cheminots sera aussi juste du tape-à-l'œil, puisque déjà il y a statu quo sur les avantages acquis.
Et ainsi de suite...
Rédigé par : Michelle D-LEROY | 12 mars 2018 à 20:02
Pour une fois, je ne suis pas d’accord avec M. Charoulet – dont par ailleurs j’estime la sagesse et la courtoisie – qui, je le cite, nous dit « Par quel miracle un charcutier, un employé de commerce, un marin pêcheur, un éboueur, un adjudant de carrière, un plombier... seraient-ils plus à même de juger un criminel que trois magistrats… »
Il y a une expression qui n’apparaît pas dans le débat de ce blog c’est L’INTIME CONVICTION que je considère comme la plus importante dans les débats d’un procès. Cette intime conviction fait contrepoids à la science des magistrats qui pourraient connaître le code pénal par cœur, être diplômés au maximum du possible, décorés des suprêmes honneurs de la République et qui n’en seraient pas moins des humains comme vous et moi, faits de chair et de sang avec tares et qualités, un passé inégal, des préférences, des partis pris, des impressions vraies et fausses, des noblesses de cœur et des côtés sordides, de saints hommes mais libidineux.
Pourquoi des jurés tirés au hasard d’une liste électorale, récusables par l’accusation et la défense, seraient-ils moins valables que des magistrats enfermés dans leur concept ou, au contraire, tellement libérés qu’ils en deviennent suspects ?
Quand on voit les dégâts d’un certain nombre de magistrats (souvenez-vous des célèbres « petits juges »). Quand on voit les dégâts occasionnés par le Syndicat de la Magistrature, cette association de gauchistes et de malfaisants, cet organe de destruction de la Justice mais intouchables, comme sont intouchables d’ailleurs tous les juges, y compris ceux qui ont commis les plus grossières erreurs (peut-on m’en citer quelques cas ?).
Quand on se souvient des mesures prises il y a trente-cinq ans par Badinter (j’ai supprimé l’adjectif peu amène que je lui adjoins d’habitude) qui, outre l’irréaliste suppression de la peine de mort a détruit toute l’échelle des peines. Ce qui en fait le générateur automatique de nouvelles victimes puisque tout criminel, même le plus atroce indomptable, est sûr d’être libre un jour pour recommencer, morituri te salutant, Badinter.
Pourquoi donc de tels magistrats faisant preuve – on peut le constater tous les jours – d’un laxisme incompréhensible seraient-ils considérés comme supérieurs ?
Je n’ai jamais été juré mais dans ma longue vie – je suis plus âgé que Claude Luçon ! – j’ai été amené à côtoyer une grande quantité de ce que l’on appelle des élites, avec et sans guillemets. Cela va du député vantard, bidon, qui a échoué partout sauf à son élection, au polytechnicien borné mais dictateur maniaque, en passant par le banquier féroce mais malhonnête, le célèbre libraire qui lit Tite-Live dans le texte, dont l’arrière-boutique est un lupanar permanent, le chef d’entreprise qui truque sa comptabilité pour obtenir des marchés publics, le viticulteur coté qui trafique ses achats de sucre et fabrique de fausses étiquettes, un Président de multiples sociétés et associations très respectables, auteur de quelques livres primés, dont la vie conjugale est un enfer sordide en grande partie par sa faute…
Croyez-vous sincèrement qu’un juge si notable soit-il est à l’abri de toutes les tentations qui l’encerclent et soit incapable de jamais y succomber ?
De grandes quantité de gens sont appelés à noter, donc à juger, d’autres gens, enseignants, hiérarchie, DRH, contrôleurs etc. décisions qui sont certes moins graves que de choisir des années de prison ou l’acquittement, mais qui influent largement sur l’avenir du jugé ; et malgré tout, malgré les apparences, les grades et les états de service, ce ne sont que des humains avec leurs grâces et leur turpitudes.
La Justice est rendue « au nom du peuple français » ; la suppression possible des jurys populaires est donc une aberration, même si, j’en conviens, aucun système n’est parfait. C’est comme la démocratie, « le moins pire » des systèmes…
Rédigé par : Mitsahne | 12 mars 2018 à 19:35
Vous m'inquiétez mon cher Philippe quand vous écrivez : "Ce ne sont pas les axes de la réforme de la Justice qui me désappointent. Au contraire les six mesures pour réduire les délais de la justice civile vont indéniablement dans le bon sens".
Je ne vous en veux pas car vous ne connaissez pas les conséquences des réformes actuelles : "déjudiciarisation",
(mon correcteur d'orthographe hurle avec raison) à tout-va, suppression drastique des juridictions en spécialisant tel ou tel tribunal ou telle cour d'appel sur des pans entiers du contentieux, numérisation à outrance, création de médiateurs obligatoires, le plus souvent associatifs, procédures écrites, etc.
Enfin tout ce qui éloigne le justiciable du contact et du dialogue avec le juge, lequel devrait être au centre de la Justice.
L'objectif est déjà partiellement atteint ; par exemple le nombre d'affaires portées devant les cours d'appel est en chute libre ; procédures compliquées, chausse-trapes multiples qui conduisent à la radiation des affaires. Le renchérissement de la procédure dissuade ici le recours au juge.
Non, tout cela ne va pas dans le bon sens ; l'argument majeur de la réforme est le désengagement des tribunaux civils, qui éloigne les justiciables de la Justice. Ils sont engorgés par le manque de moyens ; comment peut-on accepter que la France se place, dans le rapport budget de la Justice/PIB, dans la queue du peloton ; 24e rang de l'Europe élargie, et 45e des pays les plus développés, derrière la Turquie et la Russie ?
Rédigé par : Thierry Berland | 12 mars 2018 à 19:29
@ Zonzon
Très intéressant et donc, il aura fallu toute cette horreur pour finalement prendre une poignée de terre... Décidément vous êtes un poète et vous êtes sympathique.
Il n'est pas facile de défendre les hommes qui vont comme Epiméthée...
Rédigé par : duvent | 12 mars 2018 à 19:05
Puisqu'on se tue à vous écrire, depuis l'élection présidentielle, que Macron n'aime pas le peuple cher P. Bilger.
Cordialement.
Rédigé par : boureau | 12 mars 2018 à 19:04
Justice du peule ou justice des magistrats ?
Je dirais Justice du peuple parce que dans une démocratie, la justice est socialement contrainte lorsque la sanction influera sur la morale, de se rendre en vertu de la morale.
Or, lorsqu'un peuple est tombé si bas que sa morale est régicide et athée, il ne peut déléguer son devoir de justice ni à son roi ni à son prêtre. Par là même, la justice ne peut se rendre au nom de principes divins, mais de la paix sociale.
En conséquence, le peuple ayant voulu être livré à lui-même dans sa splendide ignorance de Dieu au sens de conscience de l'Homme (avec un grand H), le peuple est seul juge de sa morale aussi basse soit-elle - qui rappelons-le, est constituée des mœurs et donc aussi dépravés soient-ils.
Encore que face à lui-même, l'individu peut se détacher du peuple pour écouter Dieu à condition que le juge le respecte. Le salut retourne alors au jury populaire par l'espérance.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 12 mars 2018 à 17:40
@ semtob 12 mars 2018 à 01:07
"Que viendrait donc faire le peuple dans la galère de la justice ?"
Le peuple, à savoir les jurés, qui siègent dans une juridiction, n'ont de considération que celle du bon vouloir des magistrats professionnels avec lesquels ils siègent et en fonction de leurs affinités.
Ayant siégé pendant de très nombreuses années dans des audiences de départage présidées par des magistrats professionnels, il m'est arrivé d'avoir assez souvent la sensation de jouer les utilités.
Si vous n'êtes pas du sérail, l'osmose a du mal à faire son œuvre.
A partir du moment ou le Président d'audience a voix prépondérante se posent deux cas de figure.
1. Le magistrat respectueux qui prend en compte votre avis avec bienveillance et qui fait en sorte de respecter l'interlocuteur que vous êtes.
2. Le magistrat qui vous fait savoir que finalement la décision lui appartient quel que soit votre point de vue.
Et comme toute décision de justice a vocation à être interjetée en appel, laissons les professionnels régler leurs comptes entre eux.
Ce qui évitera de perdre du temps et de l'argent.
Rédigé par : Jabiru | 12 mars 2018 à 15:57
Avec cette funeste proposition de ne plus recourir aux jurys de cours d'assises, on a la preuve ou la confirmation que le dessein de Macron est de parvenir à gouverner avec une poignée de hauts fonctionnaires, de préférence énarques.
La réduction des possibilités d’amendement par les parlementaires, la réforme constitutionnelle en route, le projet de loi sur les « fake news », tout concourt à restreindre les contre-pouvoirs. On assiste à l’émergence d’une sorte de despotisme pas forcément très éclairé qui ne peut qu’inquiéter les démocrates.
Comme il faut occuper le terrain des médias pour dissimuler et mentir, les sempiternelles questions de harcèlement occupent une grande partie des écrans et des bavardages radiodiffusés. Et lorsqu’en plus, il y a Marine Le Pen qui tient congrès, le vilain Trump qui va rencontrer le dictateur nord-coréen et le méchant Poutine qui opprime son peuple, le rideau de fumée est en place qui interdit aux citoyens de prendre conscience de ce qui se trame chez nous.
Mon fils a été juré d’assises il y a quelques années et il en garde un souvenir vivace qui l’a rendu fier d’avoir contribué à ce que justice soit rendue par de "vrais gens" !
Rédigé par : caroff | 12 mars 2018 à 15:45
@ Catherine JACOB
Vous dites qu'il commence à ouvrir les yeux.
On pourrait aussi dire qu'il n'est pas un surdoué de la clairvoyance, mais je dirais surtout qu'à vouloir arriver à la notoriété par les chemins de la convenance, et de surcroît en se préservant des risques de la vérité, on est certain de le faire sans gloire ni honneur.
Entre le P. Bilger qui a commencé en dénonçant le poids des réseaux et fraternités, et celui qui caresse un Elusen dans son blog, quel grand écart !
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 12 mars 2018 à 14:47
Mais puisque le "peuple" d'hier n'existe plus.
Le mot "peuple" avait un sens précis quand on pouvait rassembler tous les citoyens d'une cité dans un Champ-de-Mars.
Aujourd'hui, si les citoyens constituent l’ensemble du corps social, il est probable que le peuple corresponde plus clairement à une partie des citoyens que JLM nomme "les gens". Pas seulement les petites gens, mais tous ceux susceptibles de s’affronter à l'entourage du nouveau roi, et que l'on peut nommer élites. Pour faire court, la France d’en bas, par exemple, en opposition à celle d’en haut.
Sur ces bases, quel peuple convoquer, et correspondant à quelle définition ?
Rédigé par : fugace | 12 mars 2018 à 13:37
"Parce que ceux qui réforment ne savent rien de cet univers criminel unique et de la richesse absolue qu'apporte le citoyen à tous les procès d'assises."
La démocratie en France est discrètement à la dérive depuis longtemps.
Le Peuple est supposé être maître et responsable du destin du pays comme du sien, peu à peu on nous a enlevé toutes formes d'autorité pour les mettre dans les mains de fonctionnaires aux ordres d'une caste soigneusement sélectionnée.
Je viens de découvrir qu'on ne peut même plus changer un seul pneu avant sur son véhicule, il faut changer les deux, et c'est un gamin de 18 ans qui me l'a dit. Si nous ne pouvons pas contrôler nos pneumatiques pourquoi aurions-nous le droit de juger les criminels ?
Nous sommes en dictature collégiale, il nous reste le droit d'approuver.
Nous avons un président que près de 80% des Français ne désiraient pas, qui a été élu par défaut. Il est normal qu'il se comporte en royauté, ce qu'il fait très bien d'ailleurs.
Pourquoi la Justice serait-elle laissée à la sagesse populaire ?
Le diplôme, surtout de l'ENA, Normale Sup, X et Sciences Po, a occulté le citoyen en France. Nous avons notre propre bande des quatre.
Nous avons aidé les Américains à s'émanciper et se donner une Constitution au centre de laquelle trône le citoyen, qui, entre autres, élit ses juges et ses shérifs, en plus de siéger lui-même au tribunal, mais nous sommes incapables de nous départir de notre bonne vieille monarchie absolue, d'une façon ou d'une autre, elle repointe son nez.
La loi ne devrait pas ignorer le bon sens. Les juges et magistrats viennent amplement de démontrer qu'ils ne sont pas insensibles aux influences extérieures.
De plus en plus la Liberté s'écrit en minuscule en France, le Peuple est devenu peuple.
A ce rythme la France ne sera bientôt plus qu'une belle et vaste garderie de grands enfants.
Rédigé par : Claude Luçon | 12 mars 2018 à 13:22
"Le président de la République a fait beaucoup pour la France avec la symbolique du pouvoir, de son pouvoir. De quel droit, alors, peut-il si légèrement décréter que la Justice criminelle sera dépouillée de sa symbolique et le peuple de sa mission ?"
Ve République. Le Judiciaire n'est pas un pouvoir, il est naturel que dans la logique du rapport de force, qui est celle de la politique et pas seulement, tout ce qui existe sans pouvoir soit de plus ne plus piétiné.
La Constitution ne vaut rien, la recherche de sauveur non plus. Si nos vins étaient aussi mauvais que nos institutions, personne n'en boirait.
Rédigé par : Noblejoué | 12 mars 2018 à 12:12
Pour faire suite, Monsieur Bilger, aux craintes que vous manifestez sur les intentions de Monsieur Macron quant à l'institution judiciaire, il est d'autres préoccupations qui se manifestent quant au projet de modifier notre Constitution. A ce sujet, je viens de recevoir une notification de mise à jour du site "Association pour une Constituante" créé par Monsieur André Bellon, ancien vice-président de l'Assemblée nationale
https://www.pouruneconstituante.fr/spip.php?article1453
Les craintes qu'il manifeste dans ce billet me semblent particulièrement fondées et son analyse très rigoureuse quant à la défense de notre tradition républicaine.
Mais cela est sans doute dû aussi à l'origine de notre haute administration, dont Monsieur Macron est issu, avec un formatage qui exclut tout esprit critique. Lire à cet effet cet autre billet figurant sur ce site et se rapportant aux surprises du jury de recrutement à l'ENA
https://www.pouruneconstituante.fr/spip.php?article1452
J'en retiens une phrase en forme de questionnement : "Que signifie être un grand serviteur de l’Etat alors que le discours dominant en France, en accord avec Bruxelles, critique en permanence l’Etat, alors que la notion même de démocratie républicaine, qui a fait la force de la nation est perpétuellement stigmatisée, traitée de populiste ou autres noms d’oiseaux".
A chacun d'y répondre en fonction de ses convictions, celles de nos énarques étant coulées dans le moule du système qui les a formatés.
Rédigé par : Robert | 12 mars 2018 à 12:09
Il est désolant de constater que, pour lutter contre cette dérive, la présidente de l'Union syndicale des magistrats, en totale méconnaissance de ce qu'est la cour d'assises, fait défaut (...)
Monsieur Bilger, ce que vous révélez nous inquiète.
Mais d'une certaine manière, cela ne nous surprend plus guère à une époque où les gens qui devraient avoir au moins connaissance de ce qui touche à leur domaine de compétence l'ignorent parfois (ne parlons pas de ce qui en sort, c'est une véritable catastrophe y compris et surtout chez les prétendues élites).
Rédigé par : Exilé | 12 mars 2018 à 11:53
Le mot peuple ne fait pas partie de l'univers macronien,
nous nous en doutions, nous commençons à en être convaincus !
Notre "plénipotentiaire" n'a aucun intérêt pour ce que nous pensons, seule son infaillibilité importe à ses yeux : en avant, maaarche !
Comme souvent, semtob met en images les réflexions qui nous empêchent d'adhérer à l'extravagant engouement médiatique...
Rédigé par : Saltapiou | 12 mars 2018 à 11:33
"C'est le peuple dont on veut réduire la part, la mission, la présence parce qu'il est insupportable avec son désir de rigueur, sa conscience de la gravité des choses et son incroyable intuition collective pour donner à chaque crime, à chaque accusé le champ et la décision justes.
Aussi quelle surprenante contradiction que celle d'un gouvernement qui n'a pas lésiné sur la démagogie ces derniers mois au sujet des atteintes causées aux femmes et qui trouve le moyen, pour appréhender les plus scandaleuses : les viols, de faire sortir le peuple par la fenêtre alors que dans le débat d'aujourd'hui il aurait été beaucoup plus légitime que quiconque, en tout cas que les seuls magistrats, pour relever le défi de ce fléau criminel."
Non, c'est logique. Il est des gens méprisables qui flattent pour abaisser, qui méprisent par le verbe complaisant comme par les mesures coercitives.
Qui vaut quelque chose dit ce qu'il a à dire, que cela plaise ou non, par trop de blâme, de lyrisme ou d'analyses, ne s'interdisant pas la pédagogie comme d’apprendre des autres, et basta.
Rédigé par : Noblejoué | 12 mars 2018 à 11:13
UN WEEK-END : 2 COUPS DE RAGE
Samedi 10 mars 13 h 15, France 2, Laurent Delahousse, le gendre des rêves les plus fous.
On nous donne à voir une personne dont on soupçonnait que la dernière de ce genre avait disparu depuis longtemps. Un paysan de France campé sur sa terre qu’il cultive depuis toujours à la suite de ses ancêtres. Une tête bien faite, bien pleine, une facilité d’expression et une culture générale qu’envieraient bien des profs de fac, une gentillesse à fleur de peau, une tristesse calme et retenue.
Il s’appelle Paul François ; plus Français tu meurs ! Il fait dans le maïs ! Autant dire une proie.
Un jour débarqua chez lui un US-carpetbagger qui lui vanta les bienfaits d’un produit « tout nouveau, ça vient de sortir », le glyphosate de chez Monsanto. Il fit le bon choix et se mit à tartiner ses champs avec cette saloperie. Le temps d’incubation passé il tomba malade. Rien d’anormal. Il fut soigné, la médecine française, quand même !
Alors, en dépit de l’opposition de son épouse – n’oublions pas que nous sommes dans la France profonde, rétrograde, impassible, imperméable aux progrès sociétaux, que cet homme avait épousé une personne du sexe opposé avec laquelle il avait conçu des enfants selon le processus traditionnel, personne avec laquelle il continuait à vivre malgré tous les aléas et décrépitudes de la vie – il demanda des comptes à la firme qui lui avait proposé, vendu, livré et relivré cette marchandise qui avait failli provoquer son décès.
En justice !
Singulièrement !
Le malheureux ne savait plus ce qu’il faisait !
Sa vie devint un enfer. On ne va pas chatouiller des monstres sans s’attraper des nasardes considérables. Ce n’est pas dans ce blog qu’il est nécessaire de donner des détails.
Mais à la surprise générale il gagna en première instance comme en appel. La bête ne fut pas terrassée ! Elle continua le combat.
Notre homme se prit au jeu. Il sentit en lui un besoin de se révolter, de se solidariser, d’entreprendre une lutte sans merci contre les vendeurs de mort.
Sa quête le conduisit en Argentine où Monsanto fait ses choux gras. Pourquoi se gêner avec les Patagons !
Il nous présenta un de ses amis dont l’état physique était insoutenable à regarder. Celui-ci avait toute sa tête, toute sa volonté et de son fauteuil de paralytique il nous expliqua sa lutte : 20 millions d’hectares arrosés à la louche par un peuple de péons terrorisés, esclavagisés par Monsanto and Bros, avec le seul espoir de ne pas succomber de la manne chimique. Il nous livra ce dernier détail insoutenable : sa maladie l’avait rendu « intouchable ».
Sa famille ne pouvait plus sortir dans le village sans être insultée, on voulait qu’il meure, qu’il disparaisse, on ne supportait plus cette « Victime » image de ce devenir commun.
« La peste » de Camus !
Retour en France avec notre Paul François. Depuis dix ans il s’est reconverti. Il fait du bio. Il gagne mieux sa vie sans les dérivés du benzène hexacyclique mortifère. Sa terre est redevenue vivante. C’est avec une joie communicante qu’il nous montre dans ses mains une poignée de terre grasse et vivante au milieu de laquelle se tortille un ver de terre gras et luisant - laboureur des ténèbres - preuve que son champ est renaissant.
Les vers luisants, c’est toute notre enfance !
Et la rage dans tout ça ! La voici.
La Cour de cass a finalement condamné notre Paul François. Et d’une !
Francesco di Lampedusa – ne pas confondre avec Tomasi – avant d’installer ses pénates au Vatican régnait sur l’Amérique latine. Lui, qui donne maintenant aux Européens de judicieux conseils pour l’invasion rationnelle du continent – c’est un catholique qui vous le dit – per carita, que n’a-t-il pas défendu son peuple d’alors contre le Monsanto du Diable ? Et de deux !
Rédigé par : Zonzon | 12 mars 2018 à 10:46
Très beau texte.
Le malheur est que toutes ces réformes, habilement habillées, passent complètement inaperçues au fur et à mesure, et que la télévision préfère parler du styliste de Madame Macron ou du changement de nom du FN, que de la perte progressive de ce qui nous paraissait appartenir pour toujours à notre système démocratique : on nous annonce subrepticement la surveillance d'Internet, la diminution du nombre des parlementaires, la paralysie finale du Sénat soupçonné de "mauvaise volonté", et la suppression des jurys populaires pour toutes sortes de crimes.
Si les dégâts continuent à ce rythme, nous allons nous retrouver effectivement dans une république des experts, "bienveillante mais ferme" (Macron), et de tendance orwellienne.
Il me semble que le président ajuste les institutions à sa personne et à sa réélection, sans oublier ses visées européennes. Cela au sein d'une UE de plus en plus administrative.
Rédigé par : Lucile | 12 mars 2018 à 10:40
Cher Monsieur Bilger (ou cher Philippe, comme on dit pour alléger, au risque d'encourir les foudres des fustigateurs de la République des prénoms, qui ont oublié que la République romaine était celle des surnoms et quasi des diminutifs),
Comme tous les macronistes, vous êtes victime d'une fascination collective : "Malheur à la ville dont le prince est un enfant" !
Aujourd'hui, on est jeune jusqu'à quarante ans et on ne devient jamais vieux puisque la génération 68 est toujours au pouvoir, après avoir crié: "Place aux jeunes !"
"Le président de la République a fait beaucoup pour la France avec la symbolique du pouvoir, de son pouvoir."
Mais non, il a fait beaucoup pour lui-même. On reprochait à Sarkozy d'abuser des "moi je". Que dire de Macron s'identifiant, non à l'idée qu'il se fait de la France, mais au pouvoir qu'il a sur elle : "Qu'est-ce que je ferais si une région faisait sécession, si un quidam me regardant dans les yeux me disait : "Vous n'avez rien fait contre le glyphosate", si mes villes ou si mes gens..." ?
Le macronisme, dit Alain Minc, c'est "le populisme mainstream", qui gouverne un pays qu'il ne connaît pas (la Guyane est une île et Villeurbanne est près de Calais), qui n'a pas le sens du peuple et qui professionnalise le gouvernement : limitation du droit d'amendement et correctionnalisation des cours d'assises.
Emmanuel Macron s'est si peu promené dans la rue qu'il s'imagine qu'on y trouve des gardiens de la paix qui viendront arrêter les siffleurs et les frotteurs de femmes sitôt qu'ils les auront outragées.
Emmanuel Macron est cet être vil qui nomme une pasionaria du féminisme branché, avant de l'obliger, par solidarité gouvernementale, à défendre des ministres soupçonnés de viol.
C'est encore ce président qui déclare vouloir faire de la lutte contre les violences faites aux femmes la grande cause nationale de son quinquennat (parce que c'est dans l'air) et qui, deux jours plus tard, soutient coup sur coup deux de ses ministres accusés de viol qu'il maintient en poste. Il n'y a pas d'exemple que des ministres ayant fait l'objet d'accusations aussi graves n'aient pas été démissionnés.
L'homme qui a neutralisé une prétendue loi sur la moralisation de la vie politique n'est pas seulement à la tête du gouvernement des pires conflits d'intérêt, je m'étonne qu'on ne crie pas encore au gouvernement des violeurs. On a bashé le tandem Hollande-Ayrault pour de bien moindres couacs, mais tout glisse sur les plumes du cygne Macron.
Macron est le mari de cette étrange cougar littéraire qui n'a jamais épousé que des banquiers.
Macron est fasciné par la figure du roi, dont il dit que le peuple ne se remettra jamais de lui avoir coupé la tête. Il proclame l'argent roi de la start-up-nation, calculant que le grand avantage de ce roi est de ne pas avoir de tête, donc on ne peut pas la lui couper, c'est lui qui nous la coupe ou nous coupe les jambes. Les marchés ne sont qu'une "main invisible" qui perd la tête au moindre coup de vent ou de sang politique.
Tout ceci se passe au vu et au su de tout le monde, mais on recouvre le berceau du petit Macron d'un édredon en plumes d'aigle, faute d'avoir retrouvé le tissu qui servit à confectionner le manteau de Noé, qu'il faut jeter sur la faiblesse humaine, lors même qu'elle servirait d'excuse à un pouvoir qui serait dur avec les faibles.
Les défauts de Macron sont visibles à l'oeil nu, mais on les cache et on ne les voit pas. Ainsi le veut la fascination collective. Or Macron est si peu fascinant qu'on se demande qui en est le commanditaire.
Rédigé par : Julien WEINZAEPFLEN | 12 mars 2018 à 10:28
D'ailleurs Macron 1er nous rapporte un cadeau empoisonné de son bref passage aux Indes :
Le gouvernement indien a l'intention de privatiser Air India qui accumule les pertes et affiche une perte de plus de 7 milliards de dollars et l’on ferait reprendre cette compagnie à Air France.
L’affaire Tata ne nous a pas calmés… on fait acheter des pertes ou l’on fait vendre des bénéfices… c’est la grande spécialité des escrocs !
Quelles autres mauvaises nouvelles rapporte-t-il dans son panier ?
Finalement en matière de business on fait faire ce que l’on veut à Macron, pourvu que l’on chatouille sa vanité ! Et dans les coulisses on le présente comme un génie ! Finalement serait-il bon à tout ou à rien ?
Nous avons perdu un moi je, pour le remplacer par un moi et rien d'autre.
Rédigé par : filou | 12 mars 2018 à 10:21
@ Patrice Charoulet
"Par quel miracle, un charcutier, un employé de commerce, un marin pêcheur, un éboueur, un adjudant de carrière, un plombier... seraient-ils plus à même de juger un criminel que trois magistrats professionnels connaissant à fond le dossier, connaissant la législation et ayant des points de comparaison nombreux pour juger équitablement ? Pour ma part, je trouve que ce gouvernement ne va pas assez loin. Tous les jurys populaires doivent passer à la trappe."
On peut tenir exactement le même discours au sujet du choix des dirigeants du pays, villes, etc.
Si la démocratie vous est irrespirable, peut-être faut-il avoir l'honnêteté de l'annoncer ouvertement.
Parce que, oui, juger un crime, c'est juger de l'humain. Ce n'est pas faire une dissertation de droit. Or un magistrat est un homme de droit, pas un humain amélioré.
Quant aux "points de comparaisons", c'est justement un péril de la professionnalisation, poussant à la relativisation extrême.
Rédigé par : Marcel P | 12 mars 2018 à 09:56
@ Patrice Charoulet
"Par quel miracle, un charcutier, un employé de commerce, un marin pêcheur, un éboueur, un adjudant de carrière, un plombier... seraient-ils plus à même de juger un criminel que trois magistrats professionnels connaissant à fond le dossier, connaissant la législation et ayant des points de comparaison nombreux pour juger équitablement ? "
Par quel miracle André Gide a-t-il pu écrire "Souvenirs de la cour d'assises" ? Etait-il à plus à même de juger un criminel que trois magistrats professionnels connaissant à fond le dossier, connaissant la législation et ayant des points de comparaison nombreux pour juger équitablement ?
Extrait :
"A présent, je sais par expérience que c’est tout autre chose d’écouter rendre la justice, ou d’aider à la rendre soi-même. Quand on est parmi le public on peut y croire encore. Assis sur le banc des jurés, on se redit la parole du Christ : Ne jugez point. Et certes je ne me persuade point qu’une société puisse se passer de tribunaux et de juges ; mais à quel point la justice humaine est chose douteuse et précaire, c’est ce que, durant douze jours, j’ai pu sentir jusqu’à l’angoisse. C’est ce qu’il apparaîtra peut-être un peu dans mes notes."
Je crois que le charcutier, l'employé de commerce, le marin pêcheur, l'éboueur, l'adjudant de carrière, le plombier, l'écrivain, le professeur, le chômeur, etc., tous sont à la hauteur de cette traversée humaine qu'est une cour d'assises. Il est indispensable, là aussi, dans un tribunal, d'équilibrer un pouvoir ; il est nécessaire que la porte reste grande ouverte aux choses et aux désordres de la vie.
"Je sens en effet une tendance propre au "macronisme" de ne rien prendre véritablement au tragique..." (le billet) et d'ignorer à quel point, pour reprendre l'observation d'A. Gide, la justice humaine est chose douteuse et précaire, d'être sans angoisse face à cette réalité, elle aussi, humaine.
Rédigé par : Véronique Raffeneau | 12 mars 2018 à 09:27
De quel droit, alors, M. Macron peut-il si légèrement décréter que la Justice criminelle sera dépouillée de sa symbolique et le peuple de sa mission ?
M. Macron a le droit d'avoir de l'ambition. Après Président de la République Française, il vise le poste de Président de l'Union européenne. Mais pour obtenir l'agrément de ses fonctionnaires, M. Macron doit justifier d'une expérience réussie dans le domaine de la gestion des coûts et des critères de convergence.
Par conséquent, M. Macron continue de contenir à défaut de réduire le budget de fonctionnement de la Justice en France. En diminuant le nombre de jurés populaires, la durée des audiences sera réduite et les coûts seront moindres.
Rédigé par : vamonos | 12 mars 2018 à 09:16
Je serais tenté, Monsieur Bilger, de résumer ce billet auquel j'adhère totalement, à ces deux alinéas qui me semblent réunir l'essentiel de votre propos :
"Quelle terrible déception, alors, de constater que dans le domaine du régalien, à l'égard duquel Emmanuel Macron a manifesté pourtant un intérêt constant, la symbolique du pouvoir, dont on aurait pu espérer la contagion positive sur les institutions fondamentales pour la démocratie, a disparu malheureusement au profit d'une banalisation, d'une technocratie, d'une rationalisation prétendument inspirée par l'efficacité mais profondément perverse !
[...] Le président de la République a fait beaucoup pour la France avec la symbolique du pouvoir, de son pouvoir. De quel droit, alors, peut-il si légèrement décréter que la Justice criminelle sera dépouillée de sa symbolique et le peuple de sa mission ?"
C'est quasiment la première fois que, comme lecteur fidèle et attentif de vos propos, je vois poindre de la déception provoquée par les choix de Monsieur Macron.
De fait, vous constatez ici les ravages d'une vision strictement "bercyenne" et technocratique du gouvernement de la France, du mépris de son peuple car par définition empreint de pensées nécessairement populistes inacceptables en tant que telles.
Dans le domaine que vous évoquez, Madame le garde des Sceaux, ministre de la Justice, a tenté de calmer le jeu dans les juridictions en décidant de ne pas modifier depuis la place Vendôme l'organisation judiciaire, en se refusant à la calquer sur la carte administrative, en envisageant certes de regrouper les tribunaux d'instance avec les tribunaux de grande instance, mais en en laissant l'initiative et la charge aux plus hauts magistrats compétents territorialement. Elle cherche ainsi à calmer la bronca qui commençait à se manifester dans le juridictions, avec pour effet de réunir dans leurs interrogations non seulement les magistrats et les greffiers mais aussi les barreaux, les avocats étant parfois mieux renseignés sur les évolutions envisagées que le personnel de base des tribunaux et cours.
Alors je vous rejoins dans cette déception, mais il y a longtemps que l'action de notre président de la République n'a pas l'heur de me convenir et dans nombre de domaines autres que la Justice. Même si l'on ne peut que reconnaître la qualité de sa prestation incomparablement supérieure à celle du banal Hollande... Ses qualités d'acteur en sont pour quelque chose assurément car il a appris à jouer des rôles !
Mais à quelques mois du premier anniversaire de sa prise de fonctions, tout dans son action n'apparaît plus aussi pur et blanc qu'au début. Les déceptions sont nombreuses, notamment chez les retraités (dont nécessairement vous êtes), aisés ou pas, qui ont vu leur revenus largement amputés et qui se rendront compte que les compensations annoncées pour la fin de l'année seront loin de couvrir les pertes.
Rédigé par : Robert | 12 mars 2018 à 08:15