On ne peut pas dire que le président de la République prenne ses adversaires en traître puisqu'il ne cesse de leur dévoiler ostensiblement sa stratégie.
En dehors de l'obsession de retrouver Marine Le Pen au second tour de 2022 - en en mesurant de plus en plus les risques -, il nous annonce son passage d'un pied à l'autre. Il a une jambe gauche qu'une part de LREM lui remet en mémoire avec ses engagements initiaux et il s'efforce, sur le tard, de muscler sa jambe droite.
Il oscille d'une posture à l'autre mais il espère bien que, pour l'immigration et la sécurité, sa prise de conscience affichée et son volontarisme verbal dameront le pion à tous ceux qui demeurent fidèles à la droite malgré ses multiples avis de décès.
Étrange cadavre qui bouge, résiste et serait encore plus pugnace si sa hiérarchie officielle, au lieu d'attendre, stimulait et entraînait !
Il est clair qu'Emmanuel Macron "drague" la droite et, comme tout est possible avec celle de Christian Jacob et d'Aurélien Pradié, l'attirance n'est pas totalement inconcevable (Valeurs actuelles) !
Pourtant, à bien y regarder, tant d'événements récents manifestent à la fois la bonne volonté de certains ministres et l'impuissance du pouvoir, une fermeté par tweets mais un délitement quotidien de l'autorité sur tous les territoires de la France, qu'aucune hésitation n'est acceptable. Il serait, en effet, scandaleux pour LR de ne pas s'engouffrer avec conviction, intelligence et audace, dans l'immense brèche qui lui est ouverte par l'échec étatique, précisément sur les plans de l'immigration, de la sécurité et de la Justice.
On aura, paraît-il, une loi pour renforcer les principes républicains. Elle a changé de nom mais pas de tonalité : modérée parce que, pour ne pas déplaire au seul dévoiement islamiste, elle a prétendu faire un sort aussi à deux autres religions irréprochables dans notre démocratie.
Sur le terrain de l'insécurité, prenons l'exemple d'un Gérald Darmanin qui nous avait fait espérer initialement, par comparaison facile avec son prédécesseur, une action plus cohérente et plus efficace. Or, laissant de côté une volonté ridicule d'équilibrisme, dans le domaine dont la responsabilité lui revient, nous avons droit à des allocutions martiales, à des tweets dénonciateurs, à des déplacements de consolation, à des renforts annoncés, à un Beauvau traitant de tout sauf de l'essentiel, à des expulsions d'étrangers condamnés passant de 14 à 17 %.
Du verbe, des promesses et une inaptitude à comprendre que si la politique menée peu ou prou sous toutes les latitudes politiques échoue, ce devrait être une motivation pour changer le logiciel et la philosophie. Et pour sortir de la bienséance d'un superbe Etat de droit qui nous fait perdre dans les règles au bénéfice d'une vigueur, d'une rigueur, d'un redressement de longue haleine comme à effets immédiats.
Doit-on féliciter un ministre qui se rend à Marseille et pourquoi pas à Saint-Ouen et qui paraît découvrir, surpris, une réalité de drogue et de délinquance pourtant l'ordinaire de ces cités ? Est-il acceptable qu'il vienne constater, déplorer, compter les morts, rendre hommage alors que sa seule responsabilité devrait être, par sa volonté mobilisatrice et la fermeté de sa politique partout où la France va mal, d'empêcher le pire et de ne pas être l'inspecteur des drames finis et des trafics consommés ?
Faut-il rendre hommage à cet apitoiement, qui serait navrant s'il n'était pas sincère, sur ces rixes, ces batailles de bandes, ces morts de tout jeunes et qui n'ose pas admettre que nous avons des mineurs de plus en plus violents et précocement engagés dans le pire ? Et d'en tirer les conclusions ? Au contraire on fait voter une loi qui est le contraire des sanctions immédiates dont certains transgresseurs ont besoin.
Pour une pertinente mise en chantier par le président d'une réflexion sur la responsabilité des magistrats, y a-t-il quoi que ce soit, dans les actions du garde des Sceaux (dont la parole sert à masquer la pauvreté de l'action comme hier elle parvenait parfois à masquer la culpabilité de ses clients), qui puisse rendre enthousiastes les citoyens ? On le saura que le budget de la Justice a augmenté ! Mais pour faire quoi sinon favoriser une République des avocats en tentant de leur complaire ?
Le comble est que même sur ce plan il y a des ratés, par exemple dans le fonctionnement d'une machine organisée principalement pour les avocats - une commission présidée par l'excellent Dominique Mattei - pour réformer "l'enquête préliminaire et le secret professionnel". Le moins qu'on puisse dire est que le rapport a été mal accueilli de tous côtés. La montagne accouchant d'une souris, parce que, selon l'heureuse formule de l'USM, il s'agissait de "répondre à une commande politique mais pas à une nécessité judiciaire" (Le Figaro).
Les calamiteuses cours criminelles qui auraient dû être supprimées ne le seront pas.
C'est avec ce médiocre bagage qu'Emmanuel Macron pense pouvoir emmener la droite avec lui ? Avec ces ministres qui promettaient beaucoup et se révèlent d'une triste banalité politique ?
C'est d'une révolution dont nous aurons besoin demain. Ce n'est pas un gros mot mais au contraire une obligation. Le plus terrible est de craindre, si elle gagnait d'une manière ou d'une autre, l'action d'une droite au ralenti, écartelée entre l'envie masochiste de plaire et la peur d'être véritablement elle-même, sans courage, incapable d'assumer ses valeurs comme si elle en avait honte et préférait se fondre plutôt que se distinguer.
Emmanuel Macron va continuer à draguer la droite. Qu'elle ne succombe pas à sa séduction mais considère son bilan, et la cause sera entendue.
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