Le président de la République s'en étant mêlé, il était impossible pour le garde des Sceaux de ne pas proposer au Conseil des ministres du 21 juillet un projet de loi sur l'irresponsabilité pénale. Pour répondre aux polémiques et à l'indignation suscitées, à tort à mon avis, par les experts ayant conclu à l'irresponsabilité pénale de Kobili Traoré, le meurtrier antisémite de Sarah Halimi.
Pendant que la Chancellerie réfléchissait et que deux députés LREM et LR - les mêmes s'étant distingués en démissionnant de la CJR !!! - avaient rédigé un rapport, on a pu constater que des procédures étaient conclues par des décisions d'irresponsabilité pénale qui n'ont pas causé le moindre émoi et que la législation n'avait nul besoin d'être modifiée sauf si on considérait comme offensant par principe le fait que dans l'affaire de Sarah Halimi, la folie pouvait être retenue.
La "bouffée délirante" qui a démonisé Kobili Traoré a été à ce point mêlée à l'alcool et à la drogue qu'on a fini par croire que ces deux addictions étaient seules à l'origine de cette horreur.
Le projet de loi exclut l'irresponsabilité pénale quand de l'alcool et de la drogue ont été consommés afin de se donner "du courage" pour perpétrer le crime. Comme avocat général, je n'ai jamais été confronté à des péripéties qui démontraient de manière irréfutable qu'elles n'avaient pu être réalisées que grâce à l'alcool et à la drogue délibérément ingurgités à cet effet.
En revanche, un second point est moins hypothétique et accessoire dans le projet: si un individu commettait un crime après avoir consommé avant alcool et/ou drogue sans qu'il y ait un lien de causalité, une infraction spécifique lui serait alors imputée. D'avoir bu et de s'être drogué de telle manière qu'ensuite ayant perdu toute conscience, il s'était livré au pire.
La nuance est importante. Il ne boit pas ou ne se drogue pas pour avoir le courage de tuer. Il se drogue et boit puis, plus tard, tue.
Ce projet de loi sera adopté. Je ne pense pas qu'il bouleversera de manière radicale la nature de l'expertise psychiatrique mais dans notre climat si prompt à l'indignation et à la fois à l'ignorance, il comblera ceux qui ne savaient pas mais dénonçaient haut et fort et n'offrira pas un autre choix, à ceux qui savaient mais étaient vilipendés, que son acceptation.
Le projet de loi comme baume.
Et si plus simplement, plutôt que d'éviter les assises à un justiciable au motif que des experts ont diagnostiqué, avec la marge d'erreur qu'un tel diagnostic peut toujours comporter, que son discernement était aboli au moment de l'accomplissement de l'acte, tout présumé assassin était systématiquement jugé quel que soit son état mental, laissant l'appréciation sur l'existence réelle et le rôle joué par cette altération mentale à la seule charge du tribunal ?
Le tribunal, au travers du déroulement du procès et de l'éclairage apporté lors des débats sur le dossier, dont entre autres la contribution des experts, n'est-il pas le mieux placé pour apprécier ce même dossier et juger de la sentence à prendre la mieux adaptée ?
À prévoir une multitude d'exceptions, veillons à ce que la loi ainsi complexifiée et hypertrophiée n'en devienne encore moins accessible et juste.
Rédigé par : Michel Deluré | 21 juillet 2021 à 16:18
Une façon élégante de combattre l'idée de Michelet "Lorsque l'Etat est faible les sorcières apparaissent"... Parfois je me demande s'ils sont à jeun les p'tits du château...
Rédigé par : Louis | 21 juillet 2021 à 15:40
@ Achille | 21 juillet 2021 à 13:24
« je dors comme un bébé »
Heureusement que pendant que vous dormez, certains veillent sur vous !
« Je suis le vieux guetteur
Qui monte la garde sur les remparts.
La nuit est bien calme
Et tu dors…
Les hommes ont effeuillé mes songes
Je n’avais pas, pour paraître devant eux
Ma robe de lin,
Ils me demandaient un parchemin.
Je n’avais qu’un bouclier de guetteur.
Le jour point
Et, nous retrouverons demain dans le jardin
En poussières d’argent sur le rosier
Nos rêves d’enfants.
Je suis le vieux guetteur
Qui monte la garde sur les remparts,
J’ai dans les yeux, les aurores des temps anciens
Et dans la tête, la chanson des temps futurs. »
Non ce n’est pas Zemmour qui a écrit ces quelques vers, et pourtant il aurait pu, tellement c’est beau, et de circonstances.
Enfin je ne suis pas sûr que Zemmour soit un poète, mais ce n’est pas important pour celui qui sera notre futur Président et Pascal Praud Premier ministre.
Réveillez-vous !… C’est de Bernard Dadié.
Rédigé par : Tipaza | 21 juillet 2021 à 15:25
@ Exilé
Vous êtes d’accord avec moi et pourtant vous semblez être atteint par le mal que je dénonce, vouloir toujours améliorer la loi : il n’y a pas et il n’y aura jamais de loi parfaite, de loi prévoyant tous les cas particuliers possibles, imaginables et non-imaginables.
Dura lex, sed lex : la loi est à appliquer telle qu’elle est, quelles que soient ses imperfections.
Et les décisions de justice, prises en applications de la loi, sont à accepter telles qu’elles ont été prises.
C’est la seule protection, aussi fragile qu’elle soit, contre l’arbitraire et l’injustice.
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 21 juillet 2021 à 15:13
@ sbriglia
"Je vais demander derechef à mon paysan du Cantal"
Je comprends mieux, Salers et Saint-Pourçain.
Si vous connaissez un coin où je pourrais me fournir en Gaperon fermier, je n'en trouve plus par chez moi, vous seriez un demi-Dieu. Je dis demi car il n'y a de Dieu que Dieu et Mohamed est son prophète.
Je ne veux pas d'ennuis avec la Kommandantur.
Rédigé par : Jérôme | 21 juillet 2021 à 15:02
"Je n'ai jamais été confronté à des péripéties qui démontraient de manière irréfutable qu'elles n'avaient pu être réalisées que grâce à l'alcool et à la drogue" (PB)
Sauf peut-être pour François Besse qui était manifestement drogué à l'évasion... Si ma mémoire est bonne, votre réquisitoire fut relativement modéré.
Rédigé par : Metsys | 21 juillet 2021 à 14:18
Vous n’allez pas me croire, mais depuis que Pascal Praud et Éric Zemmour sont partis en vacances, ma tension artérielle est redevenue normale, je n’ai plus de remontées gastriques et je dors comme un bébé. À la limite c’est même déprimant.
Heureusement il me reste encore les billets de Philippe Bilger pour me garantir un certain niveau d’adrénaline indispensable au bon fonctionnement de mes neurones.
Notamment ce dernier billet...
Rédigé par : Achille | 21 juillet 2021 à 13:24
Que l’opinion publique se mêle de justice, quel scandale ! Vite des juges et des experts encore plus irresponsables !
Rédigé par : Antonin Scalia | 21 juillet 2021 à 13:10
@ Achille
Très bien formulé.
Rédigé par : stephane | 21 juillet 2021 à 12:56
« Le projet de loi exclut l'irresponsabilité pénale quand de l'alcool et de la drogue ont été consommés afin de se donner "du courage" pour perpétrer le crime. »
« En revanche, un second point est moins hypothétique et accessoire dans le projet: si un individu commettait un crime après avoir consommé avant alcool et/ou drogue sans qu'il y ait un lien de causalité, une infraction spécifique lui serait alors imputée. » (PB)
"Le projet de loi comme baume." Vraiment ? C'est nouveau, cela vient de sortir.
C’est un billet qui n’arrive pas à démontrer que le meurtre de Sarah Halimi n’était pas un meurtre antisémite.
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« Un fait divers, une loi, un fait divers, une loi » : guérirons-nous de cette logorrhée législative, pathologie qui pourrait bien être mortelle ? »
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 21 juillet 2021 à 08:34
Une marche blanche aura lieu pour Doriane, pas pour Marc Floris, le fugitif retrouvé mort à Gréolières, qui a tué Doriane.
Maintenant, les histoires d'amour qui finissent mal deviennent un féminicide et du harcèlement. Roméo et Juliette c’est bien fini.
« Un virus, un vaccin, un virus, un vaccin » : guérirons-nous de cette logorrhée vaccinatrice, pathologie qui pourrait bien être mortelle ? »
Si la politique sanitaire était bien faite, le vaccin devrait être l'exception, et pas la règle.
Apparemment les Corona sont mieux connus que le VIH.
Le document d'ARTE a bien montré la course au vaccin des laboratoires, comme une course de chevaux, avec pour vainqueur un vaccin allemand-américain (Pfizer) comme par hasard. AstraZeneca out (comme par hasard).
Rédigé par : anne-marie marson | 21 juillet 2021 à 12:50
@ Denis Monod-Broca
« « Un fait divers, une loi, un fait divers, une loi » : guérirons-nous de cette logorrhée législative, pathologie qui pourrait bien être mortelle ? »
Exactement.
Cela démontre aussi l’incapacité du Législateur à prévoir tous les cas de figure impliqués par les lois qu'il promulgue.
Peut-être que moins de lois mais mieux faites serait préférable.
Mais c'est peut-être trop demander à des gens qui se croient obligés d'attacher leur nom à une loi pour avoir l'impression d'exister.
Rédigé par : Exilé | 21 juillet 2021 à 10:20
« …Pour répondre aux polémiques et à l'indignation suscitées, à tort à mon avis... »
Philippe nous fait, dans ce post, une belle « bilgerouette»(néologisme de mon cru consistant à condenser en un seul mot une pirouette sémantique de Philippe Bilger).
L’arrêt Sarah Halimi est du 14 avril 2021…
Trois ans auparavant, dans un arrêt du 13 février 2018 (Crim. 13 févr. 2018, n° 17-86.952, Dalloz jurisprudence), la Cour de cassation avait rejeté le pourvoi formé contre un arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles qui, dans une espèce dans laquelle une personne avait été mise en examen du chef de tentative d’assassinat et avait fait l’objet de trois expertises médicales, dont deux avaient conclu à l’abolition de son discernement et la troisième à l’altération de son discernement, avait exclu « tout trouble psychique » et avait décidé de renvoyer le mis en examen devant la cour d’assises en relevant notamment que « la consommation importante de stupéfiants ne doit pas s’analyser comme une cause d’abolition du discernement mais au contraire comme une circonstance aggravante ».
Ce qui signifie deux choses, au moins :
- la première que la Haute Assemblée peut dire tout et son contraire à trois ans d’intervalle,
- la seconde que Philippe, gangrené par un corporatisme qui lui met parfois des peaux de saucisson devant les yeux - à cet égard on pouvait espérer que la retraite et l’éloignement subséquent des salles d’audience auraient apporté à notre hôte un regard un tant soit peu plus objectif - ne nous a pas expliqué, en pénaliste avisé, en quoi l’arrêt de 2021 était mieux fondé, au regard des principes fondamentaux de l’irresponsabilité pénale, que celui de 2018…
Et devant ce brouillage jurisprudentiel, qui démontre pour la moins la nécessité, pour le législateur, de siffler la fin de la récréation, Philippe de faire la moue, d’écrire qu’il ne voit pas l’utilité d’une telle loi et de poursuivre par : « La nuance est importante. Il ne boit pas ou ne se drogue pas pour avoir le courage de tuer. Il se drogue et boit puis, plus tard, tue. »
C’est beau comme l’antique !
Je vais demander derechef à mon paysan du Cantal : « Marcel, quand vous roulez à 110 sur une route autorisée à 90, buvez-vous avant pour vous donner le courage de la transgression ? ».
Philippe, ne jamais oublier que la Justice est rendue au nom du peuple français : mon Marcel en fait tout autant partie que François Molins et le bon sens du premier vaut largement le savoir du second…
Rédigé par : sbriglia | 21 juillet 2021 à 10:17
Au fond, la contribution de ce Malien à la France n'a pas été nulle : il lui a apporté le bénéfice d'une loi.
Rédigé par : Jovien | 21 juillet 2021 à 09:30
... il était impossible pour le garde des Sceaux de ne pas proposer au Conseil des ministres du 21 juillet un projet de loi sur l'irresponsabilité pénale.
Je croyais pourtant qu'il aurait déjà dû démissionner ?
Rédigé par : Exilé | 21 juillet 2021 à 09:04
« Un fait divers, une loi, un fait divers, une loi » : guérirons-nous de cette logorrhée législative, pathologie qui pourrait bien être mortelle ?
Rédigé par : Denis Monod-Broca | 21 juillet 2021 à 08:34
"Le projet de loi exclut l'irresponsabilité pénale quand de l'alcool et de la drogue ont été consommés afin de se donner 'du courage' pour perpétrer le crime."
Je pensais qu'il y avait une différence entre le droit et les romans policiers ? Le droit et la psychologie de bazar ? Le droit et les commentaires sur Internet ?
Comment est-il possible de déterminer, lors d'un procès, si quelqu'un a bu pour se donner du courage, pour un autre motif ou sans motif du tout ? Depuis quand faut-il un motif pour se biturer dans les grandes largeurs, d'ailleurs ?
Il va venir un jour où n'importe quelle caissière de supermarché (pardon : travailleuse de la première ligne) pourra rédiger les lois, et on ne verra pas la différence.
Rédigé par : Robert Marchenoir | 21 juillet 2021 à 08:08
« La nuance est importante. Il ne boit pas ou ne se drogue pas pour avoir le courage de tuer. Il se drogue et boit puis, plus tard, tue. »
Pour la victime tuée dans des conditions abominables et sa famille, la nuance n’a pas beaucoup d’importance. L’antisémitisme qui est enfoui au plus profond de lui-même est toujours là, même quand il n’est pas sous l’emprise de la drogue.
Une fois libéré, avec bien sûr, un traitement approprié à son état, rien ne permet d’affirmer que cet individu ne recommencera pas. Mais bien sûr, vu qu’il s’était drogué sans intention de tuer, il ne sera pas jugé.
Il serait peut-être temps de revenir sur Terre !
Rédigé par : Achille | 21 juillet 2021 à 07:41
Bonne nuit Philippe,
S'il suffit d'être un peu bancal du côté cérébral comme le chantait je ne sais plus qui, et d'avoir bu deux trois canons agrémentés d'un petit pète pour être déclaré irresponsable, il y a de la marge. Sur ce blog par exemple... côté bancal... je divague.
J'en vois bien partir l'arme à la main en criant Allah ou Macron pour finir par... se tirer une balle dans l'slip, les maladroits. Décidément bons à rien. Ou hurler mort au baron de Münchhausen ! Ou... il y a l'embarras du choix. On peut facilement tirer de l'expérience du blog que la déviance mentale ne signifie pas irresponsabilité, inconscience de ses graves dysfonctionnements moraux.
Tenez, les vaccinolâtres par exemple... je m'éloigne un peu là, et comme disait le Debré, Michel de son petit nom, c'est pas en s'écartant du sujet qu'on va repeupler la France.
Bon j'en reviens à la Libye.
Ben ce soir-là monsieur le commissaire, j'étais au restaurant avec des amis ça peut pas être moi.
Chui pas mal là, je pense que je peux buter n'importe qui cette nuit et m'en tirer à bon compte.
Je vais de ce pas m'envoyer deux trois verres de Saint-Amour pour faire bonne mesure et m'assurer l'indulgence maximale.
Rédigé par : Jérôme | 21 juillet 2021 à 01:57