Comme magistrat, il m'était arrivé de croiser Me Jacques Isorni (JI) et même de requérir dans un procès où il était prévenu, avec trois autres personnalités, pour apologie de crime concernant une tribune qui vantait l'action du maréchal Pétain.
Je connaissais évidemment son implication de défenseur dans plusieurs "procès historiques", que ce soit par exemple celui du susnommé ou celui de Robert Brasillach condamné à mort et fusillé. Puis-je, pour ce dernier, me permettre de renvoyer à mon livre "20 minutes pour la mort" ?
Ce qui a suscité mon envie d'écrire ce billet de "justice-fiction" est la mine que constitue le "Isorni - Les procès historiques" de Gilles Antonowicz (GA) devenu au fil des années le spécialiste aussi bien de JI que de Maurice Garçon sur lequel il ne cesse de projeter une lumière passionnante sur tous les aspects d'un talent multiple.
Une citation de Jacques Vergès (JV) en particulier, m'a intéressé parce qu'elle se rapportait au rôle de l'avocat et de l'avocat général à la cour d'assises et que, selon GA, elle expliquait bien "la patte" et la démarche de JI.
"Défendre, c'est présenter avec les mêmes faits qui servent de support à l'accusation, une autre histoire tout aussi fausse et tout aussi vraie que la première... Et sur le plan esthétique au moins, les chances sont du côté de la défense. Chargé de défendre, puisqu'il parle au nom de la société, les idées et les valeurs de la majorité, le procureur est condamné à faire du roman de gare. Tandis que l'avocat de la défense, contraint à chaque coup de rechercher d'autres règles, atteint parfois au chef-d'oeuvre".
Je pourrais voir dans cette supériorité prêtée à l'avocat une sorte d'inévitable corporatisme, le réflexe naturel d'un représentant éminent - quoique discuté - de cette profession. En même temps il me serait facile de montrer comment JV a choisi parfois les causes les plus difficiles non parce qu'elles seraient les plus belles mais en raison du fait que, qualifiées de désespérées, elles permettaient à l'avocat de ne jamais être jugé. Combien de fois n'a-t-il pas annoncé des révélations et des coups d'éclat qui n'ont jamais eu lieu... Il a souvent été meilleur hors des procès que durant leur cours ! Omar Raddad ne serait pas le plus mauvais exemple de cette carence...
JI,incomparable sur le plan de la verve, de la fougue et du courage intellectuel et judiciaire, n'a cependant rien à voir avec ce qui est soutenu par son confrère Vergès. Certes il a aussi plaidé dans de terribles affaires où le décret de condamnation était pris avant l'heure. Pour Robert Brasillach notamment, sa défense, aussi exaltée et convaincue qu'elle ait été, était vouée à demeurer un brillant exercice sans la moindre espérance de succès. Le sort n'aurait en rien été modifié même si JI, résidant sur le même palier que l'avocat général Reboul, n'avait pas été d'une certaine manière limité, entravé par cette proximité et cette familiarité.
C'est surtout la vision de l'avocat général, telle que décrite par JV, qui me semble totalement fausse, caricaturale. Non seulement par rapport à la conception que j'en avais et à ma pratique qui tentait le moins médiocrement possible de correspondre à mon idéal mais aussi, j'en suis sûr, si on considère aujourd'hui la manière dont la plupart des accusateurs publics exercent leur fonction.
Prétendre que l'avocat général aux assises en serait réduit à faire "du roman de gare" est une absurdité alors que précisément il est le seul protagoniste, au cours des audiences, qui dispose de l'immense liberté de pouvoir récuser la fiction. Avocat de tous les citoyens, il n'a d'autre maître que lui-même et ses propos, son discours, ses réquisitions ont la chance de ne pouvoir être dictés que par sa perception exclusive et évidemment évolutive des débats. L'accusateur qui se laisserait aller aux stéréotypes serait impardonnable. Il se priverait de la fabuleuse opportunité de l'oralité et de l'incomparable apport, par rapport au dossier de papier, de l'effervescence et du désordre stimulant des mille joutes, questionnements et réponses, de quelque côté qu'ils viennent, qui irrigueront la justice criminelle.
Ni roman et encore moins de gare alors que l'accusateur n'est tenu par rien d'autre que par le devoir passionnant de se plonger au coeur de la fournaise de ces journées dont il devra bien se garder de définir l'issue avant l'heure, ce qui serait le moyen le plus sûr et le plus calamiteux pour manquer l'objectif de la vérité : condamnation, acquittement de l'innocent ou acquittement motivé par le doute. Il n'a pas de roman à proposer puisque la réalité dont il a la charge sera infiniment plus bouleversante, dans tous les cas, que la fiction même la plus achevée.
L'avocat général est la personne la plus libre dans le procès criminel s'il parvient en plus à ne jamais tomber dans cet écueil de trop concéder au personnage et trop peu au professionnel, trop au narcissisme et trop peu à l'authenticité. Quel que soit le talent de l'avocat, qui aura évidemment une incidence sur l'arrêt futur, il accomplit une belle mission. Mais il est ligoté par le mandat ou la subtile injonction qui émane de l'accusé. Au mieux, sa liberté sera surveillée. Pour l'avocat de la partie civile, l'assujettissement sera encore pire : rien de plus totalitaire que l'emprise d'une famille tragiquement meurtrie.
Alors, si revenant en arrière, aux assises, je m'étais retrouvé face à Me Isorni, au moment capital de la confrontation de nos verbes, je n'aurais pas inventé le mien mais j'aurais admiré le sien.
Et nous aurions attendu ensemble le verdict.
AVOCATS
Chez les avocats, les écus pleuvent plus dru que pluie. (Cholières, 1587)
*
Mon humeur est de regarder autant à la forme qu'à la substance, autant à l'avocat qu'à la cause. (Montaigne)
*
Apprendre un plaidoyer par coeur est un tour de force. (Eustache-François Hua, 1820)
*
La gloire d'un bon avocat consiste à gagner de mauvais procès. (Balzac)
*
Mais que les avocats soient désormais plus courts. (Racine, 1668)
*
Je veux qu'on puisse couper la langue à un avocat qui s'en sert contre le gouvernement. (Napoléon)
*
Des avocats femelles... (Mme de Staël)
*
Dieu m'avait fait pour être avocat. (Voltaire, 1775)
*
Les révolutions commencent par les avocats, mais ne finissent pas par eux. (Royer-Collard)
*
Je n'ai pas besoin de faire remarquer que, chez nous, comme à Athènes et à Rome, la profession (d'avocat) est interdite aux femmes. (François-Etienne Mollot, 1842)
*
Le siècle est aux avocats. (Stendhal, 1839)
*
L avocasserie se glisse partout, la rage de discourir, de pérorer, de plaider. (Flaubert, 1846)
*
Je mourrai à la barre. (Alphonse Paillet, grand avocat, qui mourut au milieu d'une plaidoirie)
*
Un avocat qui a de l'ambition ne doit jamais oublier qu'il a toujours sous sa robe l'étoffe d un député, et que tout député peut devenir ministre. (Lucien Rigaud, 1881)
*
-La cour vous ordonne de conclure.
-Eh bien, dit l'avocat, je conclus à ce que la cour m'entende. (X, au XIXe siècle)
*
Un réquisitoire contient tous les arguments d'une bonne défense. Si l'on sait bien l'écouter, on sait bien y répondre. (Aristide Briand)
*
Être avocat, c'est se battre, s'opposer sans cesse. (Jacques Isorni, 1945)
*
Une grande partie du talent d'un orateur consiste à dissimuler son art et à montrer un naturel qui crée entre celui qui écoute et lui-même un courant de sympathie. (Maurice Garçon)
*
On ne gagne jamais un procès contre l'opinion. (Edgar Faure)
*
L'avocat est jugé par le juge. (Jean-Denis Bredin, 1990)
*
L'Etat devient le banquier de l'avocat. (Philippe Boucher, 1978)
*
Les avocats se bouffent entre eux. (Jacques Vergès, 2001)
*
Le barreau doit toujours être dans l'opposition. (Paul Lombard, 2002)
*
L'avocat est une espèce de roi. (Jacques Trémolet de Villers, 1997)
*
Un avocat, cela s'achète. (Michel Foucault, 1971)
*
Quand on est avocat, on est entraîné à mentir. (Arno Klarsfeld, 2006)
*
L'avocat est un auxiliaire de justice. (André Damien, 1991)
*
Ce qui me passionne dans ce métier, c'est de traverser les milieux et d'explorer l'âme humaine. (Gilbert Collard, avocat, 2003)
*
Un avocat est un combattant. (Patrick Garriges, 2004)
*
Un avocat qui devient ministre est un avocat raté. (Jacques Vergès, 2006)
*
Plaider, c'est bander. Convaincre, c'est jouir. (Badinter)
*
Je ne suis pas un militant. Ma robe n est pas un battle-dress. (Jean-Marc Varaut)
*
Un avocat gagne même de l'argent en perdant la cause qu'il plaide. (Fénelon, 1714)
*
Un avocat, à la bonne heure ! Cela peut être utile, ça parle, ça fait du bruit. (Scribe, 1837)
*
Je quittais ces avocats, qui se noyaient dans leurs paroles, je fis marcher la troupe. (Napoléon)
*
Les avocats ne sont pas faits pour découvrir de nouveaux mondes. (Régis Debray)
*
- Quels sont les trois plus grands avocats français ?
- Je ne me souviens plus des deux autres. (Maître Paul Lombard, avocat)
*
On est avocat à vie. (Jean-Louis Borloo)
*
L avocat n'est pas libre à la barre, s'il est servile dans la vie. (Jacques Trémolet de Villers, 1997)
*
On n'empêchera jamais un nain (Me Georges Kiejman) de pisser sur une statue (: sur moi). (Jacques Vergès, avocat 2002)
*
Je suis un avocathodique. (Gilbert Collard, avocat)
*
Le Palais est un essaim de jalousies, un nid de haines rentrées, de jaunisses inguérissables. (Jacques Trémolet de Villers, 1997)
*
Du barreau aux barreaux. (Richard Malka, 2009)
*
(Dans la profession d'avocat) Les ténors et les totors...(François Gerber, 2011)
*
Mon avocat s'appelle Maître Pitbull. (Bruno Solo, 2012)
*
Il n'y a pas de plus grand honneur, pour un avocat, que de défendre un avocat, sinon celui de défendre un magistrat. (Francis Szpiner, 2012)
*
L'avocat n'est pas un magicien. (Francis Szpiner, 2012)
*
Pendant dix ans, je suis aller vomir avant de plaider (en cour d'assises). (Eric Dupond-Moretti, 2012)
*
Je suis une espèce de gitan de la justice. (Eric Dupond-Moretti, 2012)
*
On ne peut pas être avocat sans être insolent. (Eric Dupond-Moretti)
*
L'avocat n'est pas l'annexe de la police. (Eric Dupond-Moretti)
*
Défendre, c'est combattre. (Jean-Yves Le Borgne, 2014)
*
Un juriste est un hongre, un avocat est un étalon. (Marc Bonnant, 2014)
*
La fonction de l'avocat n'est pas la recherche de la vérité. (Hervé Temime)
Rédigé par : Patrice Charoulet | 22 décembre 2023 à 12:03
Répétons-le, puisqu'il le faut :
"La religion c'est ce qui relie et rien n'est plus religieux que la haine: elle rassemble les hommes en foule sous la puissance d'une idée ou d'un nom quand l'amour les délivre un à un par la faiblesse d'un visage ou d'une voix."
(Christian Bobin)
Il n'est même plus besoin de parler de Dieu pour comprendre cela.
Rédigé par : Aliocha | 12 août 2023 à 07:47
@ Axelle D | 11 août 2023 à 13:57
J'ai une opinion sur ce que vous donnez à voir de votre auteur, et ce que j'en ai lu par ailleurs sur Internet ne me transporte pas d'envie d'approfondir davantage le sujet.
Il y a beaucoup à lire, chacun ses choix.
Il se peut que votre auteur soit plus intéressant qu'il en ait l'air, j'ai pour ma part beaucoup apprécié un autre penseur dont je ne trouve pas que la manière dont on a a parlé ici ait été juste ou donne envie à quiconque de l'approfondir.
Et alors ? C'est à chacun de défendre les auteurs qui l'ont porté, comme un enfant aide à son tour les parents qui l'ont aidé... Tout le monde n'a pas l'obligation de lire tous les auteurs pour en faire l'inventaire ou s'en infuser un dont les faux-fuyants sur la religion font pitié.
Un auteur semble-t-il à faux fuyant qui sert de faux-fuyant pour nier que le monothéisme prédispose au pouvoir absolu, à la violence et à la malhonnêteté intellectuelle.
Non seulement la croyance en dieu unique, mais aussi à ce qui en dérive, homme providentiel, institution telle que la police sacralisée - ou diabolisée, ce qui revient au même.
Là où il y a de l'unique, il y a en fait, sous la fausse lumière de dieu ou d'autre chose, le mal chimérique du diable qu'on combat en faisant des choses évoquant réellement l'enfer.
Si les croyants ne sont pas capables de l'admettre, ils ne peuvent se surveiller, et commettront les mêmes abus à l'infini.
Mais ce ne sera jamais leur faute : celle de l'époque, la mauvaise part de la religion - qu'on me présente la bonne, pour voir - ceux qui les auront laissé faire ou allez savoir encore.
S'ils mettaient leur intelligence à progresser plutôt que de nier l'état où ils sont, ils parviendraient peut-être à quelque chose.
Mais non !
Sans commentaire.
Rédigé par : Lodi | 11 août 2023 à 21:34
@ Axelle D (@ Lodi)
"Vous confondez foi et croyance."
Il n'y a en effet pas de réelle différence.
La foi est une notion liée à la notion de providence, qui, elle, dérive directement de la croyance. Sans croyance, il n'y a pas de providence, et il n'y a donc pas de foi.
Rédigé par : F68.10 | 11 août 2023 à 20:46
@ Lodi | 10 août 2023 à 23:38
Je constate qu'à défaut d'avoir lu et pris le temps de méditer sur un seul des ouvrages de Jacques Ellul - de l'ordre de soixante, dont celui cité précédemment en rapport étroit avec le sujet - plus d'innombrables articles, vous vous contentez de lire un résumé de Wikipédia pour forger votre opinion.
Sans commentaire !
Rédigé par : Axelle D | 11 août 2023 à 13:57
@ Axelle D
Chacun parle avec ses mots... Donc, votre auteur de référence est Ellul. Je pioche sur Internet et trouve :
"La croyance apporte des réponses aux questions de l'homme, la foi pose des questions ou déplace les questions de l'homme.
Foi et doute - Association Internationale Jacques Ellul"
Je pense que Jacques Ellul prend les plumes du paon de la philosophie pour en orner la foi.
On peut se demander pourquoi. Coup d’œil sur Wikipédia :
"Auteur profondément original, atypique et inclassable, il a été qualifié d'« anarchiste chrétien » et se disait lui-même « très proche d'une des formes de l'anarchisme », mais rejette tout recours à la violence."
Chrétien, bref, il croit en une religion, et si original qu'il soit, défend sa religion, qu'on l'appelle croyance, foi ou rutabaga.
La religion étant justement considérée par les non adhérents à la chose comme improuvée, improuvable et point trop rationnelle, on remonte sa cote comme on peut, certains en la rapprochant de la philosophie, d'autres de la science. Je ne trouve pas cette démarche très honnête.
D'un côté, les religions, en tout cas, monothéistes, ont mis tous les freins possibles à la science et à la philosophie, d'un autre, elles ont toujours essayé de récupérer tout ce qu'elles pouvaient de ces deux activités.
Voyons voir, quand un organisme, d'un côté, nuit à un autre organisme, tout en se nourrissant de l'autre, on l’appelle comment ? un parasite, je crois.
Mais enfin, je sais qu'on peut tout rebaptiser, si on veut... La question est de savoir, je le répète, si la question est de faire ou de se faire plaisir ou de voir et dire sans filtre.
Comment dire ? Avec une franchise antique, que nous avons perdu à coup d'aveuglements divers, en strates, de faussetés accumulées le long des siècles, qui paraissent vraies à certains comme on pouvait supposer le système de Ptolémée vrai alors qu'il n'était que tradition et apparence.
À ce stade, ça n'a guère de sens de savoir si le croyant en Dieu - ou en autre chose, la croyance inconditionnelle se diffuse à tous les domaines - ment ou pas.
S'il ajoute un mensonge à des strates d'illusions.
Les gens, on les comprend, ont vite tendance à taxer de menteuse toute personne relayant des choses fausses ou ne militant pas pour la découverte de la vérité. Les accusés, on les comprend, se défendent, gens que je suis prêt à croire honnêtes dans la mesure où ne mentant pas volontairement.
Voire, soyons gentil, faisant un certain effort dans leur cadre de référence.
Le problème, c'est que le cadre en question déforme gravement le regard. Les religions, surtout monothéistes, sont liberticides, la police, comme tout ce qui exerce un pouvoir, peut en abuser, surtout dans des pays autoritaires, voire seulement dans des pays comme le nôtre.
Je veux dire divisé entre "j'aime" et "je déteste" la police... Dans les pays raisonnables on comprend la nécessité de la police comme celle d'en limiter les possibles abus. On n'est pas trop dans le trip de l'homme providentiel, de l'institution qui ne l'est pas moins ou de la Révolution, espèces d'avatars à l'unique qui va nous sauver.
En France, on n'a guère eu de réforme protestante aux multiples sectes et traditions de débats religieux et politique. Donc le pouvoir joue au roi absolu, l'opposition à la Révolution, il n'y a pas de débats mais des excommunications réciproques, comme souvent sur Internet qu'il est plus commode de diaboliser plutôt que de se regarder en face.
Sinon, bien sûr, il se pourrait qu'Ellul soit différent de ce qu'il paraît après un rapide sondage, mais ce que j'en ai vu ne paraît pas très prometteur. Ni ce que j'en ai lu, ni le fait que cela semble pouvoir servir de cache-misère à la religion et choses défendues comme si elles en étaient.
Ce qui est bien embêtant pour les victimes de la chose, et pour la chose elle-même, parce qu'elle sombrera de plus en plus dans le discrédit.
Vous allez dire que ça m'arrangerait... Pas tellement, je suis contre les abus, c'est tout, que les gens croient n'est pas un abus en soi, le problème est qu'il y prédispose.
D'autre part, si on peut penser que la fin des religions serait une bonne nouvelle, on n'en est pas là.
Or il n'est pas sain que les gens s'adonnent à une activité quand elle est corrompue. Cela peut les corrompre, donner le mauvais exemple aux autres et donc les corrompre aussi.
Et ils peuvent en nourrir du ressentiment envers les autres qui n'y sont pour rien.
Ce dans tous les cas : si on critique, ils sont persécutés, si on ignore, on les méprise, si on fait semblant de ne pas voir ce qu'ils sont en disant amen à tout, et qu'après il en sort évidemment des cas d'abus, on est coupable de ne pas les avoir surveillés, car ceux qui prêchent aux autres sont en vérité des gens qui ont besoin d'être sauvés par les autres.
Bref, c'est toujours une catastrophe.
C'est à cause de l'unique, que ce soit Dieu unique, parti unique et autres uniques, un pouvoir sans contre-pouvoir amène les humains à leur perte. Tout pouvoir corrompt, tout pouvoir absolu corrompt absolument, comme dit l'autre, et j'ajouterais, surtout en religion.
Car alors l'unique est transcendant, sans contre-pouvoir, prise même imaginaire par les humains, et leur tombe dessus comme une masse.
Contre-pouvoir alors ? Presque rien, études religieuses chez tous les croyants juifs et protestants, référence au monde païen, concurrence entre diverses religions de ce type prétendant à la domination, critique corrosive des témoins atterrés par cet amas de désastres.
Bien sûr, d'un certain point de vue, il y a eu progrès, grâce à la concurrence entre toutes ces forces.
Au prix de bien des carences en liberté et de bien des violences dont je n'oublie pas les victimes sous prétexte qu'elles ne sont plus, dont le peu de temps de vie aura été encore plus douloureux qu'il aurait pu l'être, dommage à jamais irréparable.
Au prix du fait que le monothéisme reste liberticide quand il le peut, voire l'Islam et ceux qui réclament de l'imiter.
Au prix que tout peut s'effondrer ailleurs... Car ce qui permet de contrecarrer la perversion de l'unique est comme tous les dispositifs de sécurité, tous les efforts, tout ce qui va contre l'entropie… cela a tendance à céder...
Reste quoi alors ?
L'unique.
Je dirais bien au secours, mais il n'y a pas de secours.
Lutte sans fin.
Rédigé par : Lodi | 10 août 2023 à 23:38
@ Lodi | 10 août 2023 à 09:13
Vous confondez foi et croyance, ce qui rend votre raisonnement incohérent, sinon obtus.
Pour y voir un peu plus clair, vous devriez lire "La Foi au prix du doute" de Jacques Ellul, un livre qui aborde, entre autres, le sujet religieux avec une grande ouverture d'esprit et sans concession.
Rédigé par : Axelle D | 10 août 2023 à 10:01
"Ni roman et encore moins de gare alors que l'accusateur n'est tenu par rien d'autre que par le devoir passionnant de se plonger au coeur de la fournaise de ces journées dont il devra bien se garder de définir l'issue avant l'heure, ce qui serait le moyen le plus sûr et le plus calamiteux pour manquer l'objectif de la vérité : condamnation, acquittement de l'innocent ou acquittement motivé par le doute." (PB)
Intéressant et rassurant si toutes les hermines sont aussi immaculées... De loin, on a plutôt l'impression que l'accusateur public attaque systématiquement aussi bien que l'avocat défend de la même manière, jeu de rôle mécanique.
Le mis en cause ? Un enjeu disputé comme une balle ou comme une proie. Que peut-il faire au tribunal ?
Je ne vois pas trop, dans ces conditions, le sachant, il se peut que certains accusés s'endorment, je pense, tant par ennui que parce que le sommeil est une échappatoire.
Enfin, comme ils faut bien faire acte de présence, ils doivent plutôt dormir debout, pardon assis, ce qui fait que s'ils sont comme avocats et accusateurs publics dans une situation de demandeur, leur position est celle du magistrat qui décide.
On peut aussi se voir sur le banc de touche : si mon avocat est trop calamiteux, je me risque à plaider ma cause, perdu pour perdu ! Ou alors, on se voit comme son partenaire, allez savoir, mais comme on n'a pas eu le temps de tellement se familiariser avec lui, il y a des risques qu'on ne forme pas une équipe de double bien assurée, d'où chez certains la nostalgie de ceux de tennis.
Revenons aux hermines. Et la question des liens entre hermines assises et debout, et celles des hermines debout et des policiers ?
Là on a eu la concurrence avec les avocats, maîtres du verbe contre maîtres du verbe L'avocat dit qu'il est plus profond que l'accusateur public qui rétorque tu rêves, moi je suis impartial, je suis éloquent et juste, toi tu es juste éloquent !
Et vlan. Un jour ce sera : et si on rédigeait les décisions de justice dans un style agréable ?
On ne le croirait pas à première vue, mais avocat général semble la position la plus intéressante dans le processus judiciaire.
Enfin, j'extrapole... Ou pas tant que ça ? Mystère de la Justice.
J'apprécie l'acquittement motivé par le doute, sinon, que faire, prouver qu'on est innocent ? Bon courage, à mon avis, déjà, pour un accusé à tort ou un témoin, il est difficile de se rappeler ce qu'on faisait tel jour, vu que souvent, ils ne se distinguent guère les uns des autres.
Et on n'était pas occupé à se forger un alibi. À mon avis, courir le fournir est suspect, car comme je le disait, les gens n'ont pas de raison de se rappeler ce qu'ils faisait tel jour telle heure, il faut le dire au moment opportun. Être transgresseur demande de la maîtrise de soi, je pense, enfin, à un certain niveau, donc en somme une qualité importante pour être juste, dommage qu'elle serve à un autre usage, c'est déchoir.
Ou pas.
Dans certains cas, non... Voyons, imaginez n'être socialement rien, mais soucieux de votre dignité, néanmoins, de votre liberté.
En somme, oubliez que vous êtes d'un peuple de la liberté pourquoi faire. Bien... Voyons ce que vous pourriez être comme déchet soucieux de se recycler, voyons voir.
Eh bien, vous pourriez être esclave. Que ce soit pour retrouver votre liberté, ou juste pour rendre le mal subi, cessant d'être un pantin, il est juste et bon de nuire à son maître - mais pas à ses enfants ou aux visiteurs, les dommages collatéraux sont pour la guerre.
Eh bien, vous pourriez être une femme. Il n'y avait pas de viol entre époux, mais vous pourriez troquer votre terreur du foyer contre la vie bien plus aimable de veuve joyeuse.
Bien sûr, plus une société devient juste, plus le périmètre de ce que je nommerais les meurtres de défense de son intégrité* deviennent rares. Moins il est légitime d'en faire.
Ce que je trouve étonnant est que des gens ressortent le même genre d'idée avec "pas de justice pas de paix" ou "justice pour Nahel".
Je ne vois pas le plaisir d'un tel jeu de rôle, de s'imaginer quasiment esclaves pour le plaisir de se révolter. Non, être libre ne plaît pas aux Français, la preuve, quand certains en ont assez de se demander s'ils auraient été résistants, ils jouent à l'antifa.
Et en face, ce n'est pas mieux : on nous demande de croire en la police, après les dieux ou le dieu abrahamique, les humains divins, après l'homme providentiel, les agents extraordinaires.
Il faut croire... C'est pourquoi, de même que les croyants religieux ou politiques, les croyants en la police se moquent de la vérité. Attention, je ne dis pas qu'ils mentent, ils croient tellement à la police qu'ils jugent superflu d'enquêter et de réformer.
Affreux, la croyance, n'est-ce pas ? La foi en une chose interdit de la perfectionner. L'amour d'une chose la laisse en déshérence, non défendue de ses vices ou de ceux qui la critiquent... Bref, tout ce qui se drape dans de grands mots mais vit dans l'illusion condamne cela même qu'il promeut. Ironie ! Existe-t-il des romans, études historiques, pièces sur le sujet ? En voilà un intéressant en soi ou bon à pimenter quelque autre thème, je pense.
Bref, en un mot, le croyant croit défendre la vérité, mais son aveuglement répand l'erreur, souvent inconsciente, parfois consciente.
De même qu'un artiste doit se détacher de son oeuvre pour l'évaluer ou la donner à juger par d'autres s'il veut progresser, thème connu, au fond, chacun doit le faire en tout pour le même but. Même le croyant y est tenu ! Peut-être surtout lui, face à la forte partialité et pente vers l'illusion qui s'agitent en son esprit, il doit être d'autant plus détaché.
La question est : se plaît-on à croire à une chose parce qu'elle fait plaisir ou parce qu'elle vraie, bonne et belle ? Si c'est non pour ronronner mais pour la protection des citoyens et une confiance fondée en la police, il faut reconnaître tant la difficulté des défis qu'elle relève que ces éventuels errements.
"La police a tort mais vive la police !" en somme, comme l'a dit notre hermine, aussitôt entendue qu'oubliée.
*Ou de meurtre pour l'intégrité des autres, meurtre civique, comme quand on élimine un tyran.
Rédigé par : Lodi | 10 août 2023 à 09:13
La cour s'endort, et Ellen prend la voix innocente pour conclure de sa prière la plaidoirie.
L'inquisiteur Nebout revêt la robe pourpre du deuil de celui qui traversant la mort, pourtant nous permet d'accéder à la vie.
Il prononce l'anathème et ferme la porte des insultes pour rejoindre la nuit.
Tout est accompli.
"Ce chant est fini — le doux cri du désir
Est mort dans ma bouche :
C’était un enchanteur, l’ami du bon moment,
L’ami du midi — non, ne demandez pas qui —
Il était midi, quand un est devenu deux……
Nous célébrons unis, certains de la victoire,
La fête des fêtes :
Zarathoustra vint, l’ami, l’hôte des hôtes !
Le monde rit, le noir rideau s’est déchiré,
La lumière à l’obscurité s’est unie…… "
https://fr.wikisource.org/wiki/Par_del%C3%A0_le_bien_et_le_mal/%C3%89pilogue_:_Sur_les_plus_hautes_montagnes
Au fond de la taverne, certain de son amour, entendez-vous Siebel qui rit ?
Pourtant ce n'est pas lui que Marguerite choisit.
https://www.youtube.com/watch?v=oc2S7Mg9Cug
Rédigé par : Aliocha | 10 août 2023 à 07:58
@ Ellen
Que dire de ce prodige de Amira Willighagen à la voix d'ange :
Lors de cette interprétation de l'Ave Maria de Gounod, en 2003, elle n'avait que neuf ans
https://youtu.be/IMY5PCCjdlE
Ou encore exécutant à la même époque, avec le brio d'une grande cantatrice, une aria de Puccini "O mio babbino caro" :
https://youtu.be/qDqTBlKU4CE
Rédigé par : Axelle D | 09 août 2023 à 21:20
Il n’y a pas lieu de donner cher du salut de l’âme des magistrats qui ont obtenu ou prononcé des condamnations injustes par arrivisme ou idéologie, ou seulement par erreur s’ils n’en ont pas poursuivi le repentir.
Au dernier instant de leur vie, la robe rouge de représentant du roi ou du deuil du Christ de l’ancienne justice ecclésiastique pèsera lourd sur leurs épaules, pour supporter le regard de ceux qui leur crieront « salaud ! ».
Peut-être certains chercheront-ils la main de Jésus, mais encore faudrait-il qu’ils puissent la voir avant que s’ouvre devant eux les portes de l’enfer.
Les athées, rationalistes etc., s’économiseront un sourire imbécile en lisant « Et nox facta est » de Victor Hugo qui ne prenant pas toujours de la camomille comme tisane, y avait manifestement fait un tour.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 09 août 2023 à 20:43
Intermezzo (4:45)
C'est phénoménal. Âgée de 8 ans, pas encore toutes ses dents et déjà mondialement connue
https://www.youtube.com/watch?v=J4Q2sL613xw
Rédigé par : Ellen | 09 août 2023 à 18:18
Justice-fiction
Ah, si Clemenceau avait fait fusiller Pétain pour défaitisme devant l'ennemi au début 1918, comme le lui avait demandé Foch (il en fait part dans ses mémoires) !
Rédigé par : Olivier Seutet | 09 août 2023 à 18:18
Jacques Vergès, un avocat mystérieux et spécial en affaires bien douteuses.
Je l'ai rencontré un après-midi au pub des Champs-Elysées-Publicis Etoile en compagnie de trois de ses amis autour d'une table parlant affaires et où je l'ai entendu leur dire: je vous ai réunis ici parce que je suis hébergé chez mon amie, elle ne serait pas heureuse si on faisait la réunion chez elle.
Notre table était à un mètre de la leur. Pas très discrets les hommes. Faut dire que les smartphones n'existaient pas encore en 1988 pour prendre discrètement les photos et activer le dictaphone.
Sa vie cousue de fil noir.
https://www.nouvelobs.com/justice/20141110.OBS4562/dumas-dettes-et-amour-les-derniers-jours-de-jacques-verges.html
Rédigé par : Ellen | 09 août 2023 à 17:53
@ Mitsahne | 08 août 2023 à 16:41
"Me Isorni était un avocat qui faisait partie de ceux « qui plaident au cœur » par comparaison à ceux « qui plaident aux preuves matérielles ». Il a toute mon adhésion"
Pour assurer la Justice il est préférable de faire partie de ceux « qui plaident au cœur » ET de ceux « qui plaident aux preuves matérielles »
L'un n'empêche pas l'autre !
"Bien évidemment, l’importance de la lettre de Hitler – qui à elle seule aurait pu faire basculer le procès – ne lui avait pas échappé."
C'est effectivement possible quand on lit la lettre :
Lettre du 29 novembre 1943 adressée au Maréchal Pétain par Joachim von Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères du Reich –
Citée dans Histoire élémentaire de Vichy – Amiral Auphan (1971)
A lire sur
http://rustyjames.canalblog.com/archives/2016/04/04/33616473.html
"Il semble, Monsieur le Maréchal, que vous ayez en cela totalement omis de tenir compte du fait que cette assemblée nationale est la même assemblée qui, en septembre 1939, a déclaré sans le moindre motif la guerre à l’Allemagne.
Cela malgré les assurances solennelles de paix échangées entre l’Allemagne et la France encore le 6 décembre 1938."
Nous avions des accords sur le gouvernement de la France avec Hitler en décembre 1938 ??
"sans le moindre motif"
Pourtant si ! Les accords de Munich et l'attaque de la Pologne le 1er septembre 1939 !
Pour le reste il est clair que Pétain ne s'empressait pas de respecter ce qu'Hitler attendait de lui.
Rédigé par : Claude Luçon | 09 août 2023 à 15:04
« Comme magistrat, il m'était arrivé de croiser Me Jacques Isorni et même de requérir dans un procès où il était prévenu, avec trois autres personnalités, pour apologie de crime concernant une tribune qui vantait l'action du maréchal Pétain. » (PB)
Épilogue ?
https://juricaf.org/arret/CONSEILDELEUROPE-COUREUROPEENNEDESDROITSDELHOMME-19980923-2466294
Rédigé par : Exilé | 09 août 2023 à 14:20
Ce qui est sûr c'est que vous ne semblez pas avoir le profil intraitable du procureur André Mornet.
Une humanité qui vous fait honneur et ne semble pas vous avoir empêché lors de votre carrière de faire appliquer la justice avec rigueur et sans complaisance aucune pour les auteurs de crimes ou délits, tout en gardant votre compréhension et votre compassion pour les victimes.
Chapeau Monsieur l'avocat général !
Rédigé par : Axelle D | 09 août 2023 à 12:57
@ Aliocha | 09 août 2023 à 07:21
Je crois que votre plaidoirie, si vous étiez un avocat, risquerait d'endormir la cour. Vous seriez même capable de lui demander de faire sa prière avant de délibérer.
Rédigé par : Ellen | 09 août 2023 à 09:40
Lazare, sors de là !
La tentation est grande de sortir le cadavre du placard sous les quolibets populaires - mais, Seigneur, il sent ! - au risque d'affronter le verdict de la vérité, semblable pour l'accusateur comme pour le défenseur, c'est par la loi que nous mourrons à la loi, afin de vivre pour Dieu, car si la justice s'obtient par la loi, Christ est donc mort en vain.
L'innocence est un aveu de culpabilité et l'amoureux romanesque aux fleurs fanées sait proclamer sous les voûtes de la gare céleste :
"Satan, je ris de toi !"
https://www.youtube.com/watch?v=XAB5Twv3Fec
Rédigé par : Aliocha | 09 août 2023 à 07:21
@ Mitsahne
Soyez remercié pour ce très intéressant témoignage.
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 09 août 2023 à 06:49
"Comme magistrat, il m'était arrivé de croiser Me Jacques Isorni et même de requérir dans un procès où il était prévenu, avec trois autres personnalités, pour apologie de crime concernant une tribune qui vantait l'action du maréchal Pétain" (PB)
Voici ce que vient d'écrire le président de l'Association pour défendre le maréchal Pétain à Elisabeth Borne au sujet de Philippe Pétain:
"En qualifiant récemment sur Radio J le Rassemblement National « d’héritier de Pétain » et de « porteur d’une idéologie dangereuse » vous venez, hélas, de contribuer à entretenir le discrédit d’un des plus grands héros de l’Histoire de France et, de ce fait, de porter atteinte à l’image de notre pays.
Le Maréchal Pétain a été à l’origine de la retraite par répartition et 80 % des lois sociales dont il a été l’initiateur sont encore en vigueur. Par l’armistice, il a sauvé les 440 000 juifs d’Afrique du Nord et 75 % de ceux résidant en France où il a interdit le port de l’étoile jaune en zone libre, même après son occupation, et s’est opposé à la dénaturalisation de plus de 50 000 juifs en août 1943, empêchant ainsi leur déportation.
Victime d’un procès politique à la Libération, il n’a pas eu droit à la révision de son procès et le discours officiel est devenu l’otage de groupes de pression (…)"
https://marechalpetain.com/pour-lhonneur-du-marechal/
Rédigé par : Xavier NEBOUT | 09 août 2023 à 05:34
La bataille entre les avocats et les juges a toujours été un rapport de force. C'est celui qui aura la plus belle éloquence et un culot à toute épreuve et sans limite qui a le plus de chance de remporter la victoire, à quelques exceptions rarissimes prononcées par la Cour européenne des droits de l'Homme pour trancher en dernier ressort. Patience...
Dans des affaires lourdes, compliquées et très longues, il est recommandé d'être fortuné et de prévoir un bataillon d'avocats de grande renommée.
Rédigé par : Ellen | 09 août 2023 à 04:47
Quand on est à la fin de sa vie, on n'a plus de nombril, on attend seulement qu'un quinquet vienne éclairer les reliefs alentour. Mais il est bon, en face, de hausser les épaules et de se muer en escholier rejetant sa faluche pour lever son verre, évoquant Brander chez Goethe. Ça fait bien, ça pose, ça propulse au rang de sceptique souriant, oublieux de soi-même, tout entier à la célébration des choses importantes dont il détient la connaissance ; dédaignant les petites vérités, médiocres, minoritairement exprimées mais qui, pour ceux qui ont la petitesse de les regretter, sont des prurits qui gênent jusqu'au dernier jour. Ce sera tout, perinde ac cadaver.
Rédigé par : genau | 08 août 2023 à 23:30
Le monde judiciaire est décidément impitoyable. Non seulement nous assistons en permanence à la guéguerre entre policiers et juges, mais Philippe Bilger nous rappelle qu’il en est de même entre procureurs et avocats. Chacun revendiquant l’importance de leur corps de métier.
Il est vrai que Me Jacques Vergès avait le sens de la formule. Réduire l’avocat général à faire du « roman de gare » est pour le moins vexant, d’autant qu’il attribue à l’avocat de la défense le beau rôle avec des plaidoiries pouvant atteindre au chef-d’œuvre. Ce qui n’est pas faux. Celle de Robert Badinter défenseur de Patrick Henry est encore dans toutes les mémoires.
Voilà un sujet qui aurait bien plu à Me sbriglia qui semble avoir déserté ce blog. Enfin, s’il le lit, peut-être pourra-t-il nous donner son avis éclairé…
Maîtres Jacques Isorni, Gilles Antonowicz et Maurice Garçon, je ne connais pas mais je connais Me Jacques Vergès qui a fait la une des médias pendant de nombreuses années et qui avait une prédilection pour défendre les causes désespérées. Il faut lui reconnaître un réel talent.
Il semble que nous ayons un de ses émules en la personne de Juan Branco qui, lui aussi, aime bien se distinguer en défendant les causes sulfureuses.
Expulsé du Sénégal pour avoir pris la défense d’un opposant politique au pouvoir en place, il a débarqué à l’aéroport de Roissy-CDG, où l’attendait son fan-club, arborant un air de triomphateur.
Sera-t-il reconnaissant au Quai d’Orsay d’être intervenu pour le faire libérer ? Rien n’est moins sûr !
Rédigé par : Achille | 08 août 2023 à 18:15
Une des plus grandes émotions de ma vie fut celle où je me trouvai, très fortuitement, placé au restaurant presque en face de Me Isorni, lui-même en déjeuner privé. C’était au début des années 60, Charles de Gaulle régnant.
En fin de repas, je n’ai pu m’empêcher, avec beaucoup de précautions, de lui demander pourquoi, au procès du Maréchal Pétain, il n’avait pas plus insisté sur un document capital pour la défense : la lettre adressée à lui par Adolf Hitler en personne fin 1943, soit quelque huit pages de reproches véhéments pour son manque d’enthousiasme envers la politique de collaboration qui avait été « promise » lors de l’entrevue de Montoire en octobre 1940.
La réponse de Me Isorni fut très claire. Au procès Pétain, il n’était pas l’avocat principal, lequel était Me Fernand Payen, bâtonnier. Bien évidemment, l’importance de la lettre de Hitler – qui à elle seule aurait pu faire basculer le procès – ne lui avait pas échappé. Mais dans l’atmosphère de haine absolue à la limite du lynchage entretenue par les communistes présents en grand nombre, ordre lui avait donné par le bâtonnier de « ne pas insister ». Nous étions en plein été 1945.
N’oublions pas que quelques mois avant, en novembre 1944, De Gaulle s’était rendu à Moscou et avait obtempéré aux ordres du maréchal Staline qui avait exigé que le déserteur Maurice Thorez fût gracié et nommé ministre d’Etat ; De Gaulle en rajouta une louche en nommant six ministres communistes aux postes-clés de l’économie française. Nous payons toujours cette fantastique erreur aujourd’hui.
Me Isorni était un avocat qui faisait partie de ceux « qui plaident au cœur » par comparaison à ceux « qui plaident aux preuves matérielles ». Il a toute mon adhésion.
Rédigé par : Mitsahne | 08 août 2023 à 16:41
« Comme magistrat, il m'était arrivé de croiser Me Jacques Isorni et même de requérir dans un procès où il était prévenu, avec trois autres personnalités, pour apologie de crime concernant une tribune qui vantait l'action du maréchal Pétain. » (PB)
Peut-être s'agit-il de cette affaire :
https://www.lemonde.fr/archives/article/1986/06/30/le-monde-est-relaxe-du-delit-d-apologie-de-collaboration_2913962_1819218.html
Rédigé par : Exilé | 08 août 2023 à 16:17
Maître Vergès souligne la "trivialité" du rôle du procureur.
Il représente la société des gens bien propres sur eux, qui sortent faire pisser Mirza, grimpent sur Bobonne une fois par mois et veulent manger des cacahouètes et boire du rosé en toute tranquillité.
Vaccinés contre le Covid, pour la retraite à 65 ans, retraités depuis 15 ans, prêts à sacrifier n'importe qui pour se protéger, les gens bien sont frileux, peureux de tout.
Le procureur doit les rassurer.
L'avocat donne dans le trouble, l'équivoque, le salaud, le malandrin. Il se doit d'inventer, de broder, avec mauvaise foi s'il le faut.
La défense c'est rappeler l'humanité du sordide, de l'inhumain, accepter de rôtir en enfer.
Rédigé par : Jérôme | 08 août 2023 à 16:04
@ genau | 08 août 2023 à 12:53
"Ah ! Quel moment de lecture. N'ayant jamais occupé de bien hautes fonctions, mais restant un révolté contre moi-même, mes défauts de fabrication et mes travers jamais corrigés, je mesure l'autre branche de périls auxquels j'aurais dû me plier."
En fait vous êtes comme la majorité et... Mais ceci est une autre histoire, nous pourrions y passer la nuit, mais mon Bourgogne aligoté n'attend pas. Tout le monde se regarde le nombril un jour, le problème c'est de ne pas s'y attarder.
Rédigé par : Giuseppe | 08 août 2023 à 14:12
Ah ! Quel moment de lecture. N'ayant jamais occupé de bien hautes fonctions, mais restant un révolté contre moi-même, mes défauts de fabrication et mes travers jamais corrigés, je mesure l'autre branche de périls auxquels j'aurais dû me plier.
J'ai vu de grands avocats tout de même, mais au petit pied, avec des ficelles en guise de lacets, et d'autres, d'une dignité convaincue, parler peu pour mieux convaincre. Au Parquet, le désespoir patent du magistrat, ligoté par sa plume serve et ne sachant pas comment faire comprendre la liberté de sa parole. On souffrait alors pour lui. Une fois, le bureau n'a gardé que la toque, redoutable mise en garde au siège.
Jacques Isorni a toujours fait vibrer, Vergès, intéressé, mais sans empathie car on sentait trop son désir de choquer, brouiller, tarabuster pour faire passer une vérité, la sienne alors qu'Isorni enchantait, émouvait, un peu comme savait le faire Henri Leclerc aussi dans un registre politique différent.
On a tremblé en écoutant le calme M. Giresse, redoutable et impavide bretteur, détruisant les argumentations, épinglant partout les incidents comme des sous-vérités.
Cet ensemble anecdotique, pauvre par rapport à la logique subtile de notre hôte, tend seulement à exprimer l'humilité de la condition des membres de la juridiction et ceux qui l'ignorent s'exposent à de graves mécomptes car il n'y a rien de plus fragile que l'arrogance qui aveugle et prive l'auteur de la vision des dangers de l'audience: le désintérêt, l'éloignement progressif des assesseurs, voire de l'institution.
Dans les procès politiques, la justice s'éteint, la passion renaît car jamais la vérité ne sera explorée jusqu'au tréfonds. Le procès Pétain en est le plus parfait exemple, conforté par le mépris de de Gaulle dans son application. Le mot de justice est d'autant plus invoqué que le régime en place est incapable de la rendre ou simplement d'en comprendre les exigences, par son implication même. L'accommodement serait-il d'ailleurs possible ? À la Libération ou en Algérie dite française, le poids des mensonges et des compromissions rendait impossible toute composition et le goût du pouvoir effaçait toute humanité.
La politique fait haïr la justice qui n'en peut mais. La justice est indispensable à la politique dont le degré d'implication dans l'horreur est une nécessité cynique.
Rédigé par : genau | 08 août 2023 à 12:53