Vais-je continuer, jusqu'à mon retour à Paris à la fin du mois d'août, à tenir mon rythme habituel d'un billet tous les deux jours ? Peut-être mais je n'aurais pas l'impression de me trahir si je m'autorisais un jour de plus.
Les sujets ne manquent pas forcément en juillet et en août mais ils appellent parfois des réactions plus légères qui peuvent bénéficier de la concision obligatoire de Twitter.
Par exemple, l'affirmation du talentueux et honnête Gabriel Attal, selon lequel "le constat d'un délitement de la société est très largement partagé dans notre pays" (Valeurs actuelles). Il me semble que les tribunes des généraux sur un mode plus rude et plus dénonciateur ne disaient pas autre chose.
Ou l'agression violente de policiers dans le Val-de-Marne. Cinq mineurs ont été relâchés car il n'y aurait pas eu suffisamment d'éléments contre eux selon le Parquet de Créteil. Un seul aurait été formellement incriminé. On voit, par cet exemple qui se reproduit trop souvent, l'absurdité de l'exigence d'une preuve individuelle alors qu'ils étaient une quarantaine à s'en prendre ensemble à la police. Encore une insigne faiblesse de notre Etat de droit pourtant tellement révéré !
Mais un blog en vacances a le droit de s'aventurer sur des chemins plus personnels, plus intimes, comme si son responsable, un temps délié de l'obligation d'être sérieux, pouvait vagabonder en soi ou non loin de soi, dans des confidences fuyant cependant l'impudeur.
Dans l'attente de la publication aux éditions de la Nouvelle Librairie (un éditeur de plus dans mon vivier), en septembre ou en octobre, de Pensées qui, je l'espère, auront le mérite d'être perçues comme libres et inventives, je me suis promis, durant ces journées de bonheur, d'enfants et de soleil qui m'attendent, d'écrire une sorte de lettre ouverte à Giovanni Falcone, magistrat italien assassiné par Toto Riina (voir mon billet du 3 novembre 2019).
Un héros immensément admiré pour lequel j'ai toujours éprouvé un respect à la hauteur de sa lutte intrépide contre la mafia et de son courage absolu qui ne l'a jamais, malgré la certitude d'une fin tragique inéluctable, détourné de sa mission. Cette lettre de pur hommage aurait, par contraste et en creux, fait apparaître la magistrature française. Je ne sais pas si je parviendrai à mener à bien ce projet. Il faut plus que du talent pour rivaliser avec un destin exceptionnel.
Allons plus loin dans la confidence.
Une émission récente sur Frank Sinatra, avec une part importante consacrée à sa relation magnifique mais aussi tumultueuse, intermittente, avec la fabuleuse Ava Gardner, m'a incité à compléter mon information sur cette femme qui a toujours été pour moi, sur le plan esthétique, ce que la nature a créé de plus beau, si une telle hiérarchie a du sens quand dans sa mouvance on a aussi Rita Hayworth, Gene Tierney ou Audrey Hepburn...
Ava Gardner est si présente dans mon univers intime, si ancrée dans ma mythologie, parce que je dois avouer qu'elle me fait songer à ma mère si belle dans ses années de splendeur qu'elle était souvent prise pour une actrice.
Ma mère qui aurait voulu être actrice, ou historienne, et qui m'a enseigné cette leçon paradoxale et si juste: on ne réussit vraiment bien que dans ce qu'on ne souhaitait pas initialement. La preuve, elle est devenue la première femme à créer une société d'importation de machines agricoles en 1950 et elle a supérieurement réussi comme chef d'entreprise alors qu'elle n'avait cessé de nous rappeler son peu de goût pour le commerce...
Bien plus encore que sur Giovanni Falcone, j'aurais rêvé d'écrire un livre où, mêlant Ava Gardner et ma mère, j'aurais réuni mon amour et mon admiration pour elle et ma passion du cinéma. Ce désir s'est vite éteint car une telle entreprise n'a de sens que si elle cumule une aptitude à faire de son singulier un univers, une mémoire qui permet de ne rien oublier et, surtout, la liberté de pouvoir tout dire sans que quiconque soit blessé autour de soi. À l'évidence, les trois conditions m'auraient fait défaut, en tout cas clairement les deux dernières.
Je pourrais regretter cette incertitude pour Falcone et cet abandon pour Ava Gardner si ce blog au fond, qu'il soit en vacances ou non, n'était pas un merveilleux et nécessaire exutoire, le remplacement de ce que je ne suis pas sûr d'accomplir ou même de vouloir, par la réalité d'une écriture toujours fidèle au rendez-vous.
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