La frustration du débat du mardi soir (CNews) engendre parfois la réflexion du mercredi matin sur ce blog.
Comment ne pas avoir envie de poursuivre dans mon for intérieur les interrogations que le meurtre de Louise suscite chez tous ceux que le crime indigne et, en même temps, interpelle sur notre propre humanité ? Owen Legrand est passé aux aveux après 30 heures de garde à vue (franceinfo).
J'écris ce billet parce qu'avec cette petite Louise de 11 ans ayant suivi sans crainte un voisin de 23 ans qui, après avoir tenté de lui voler son portable, l'a tuée sauvagement avec un Opinel (pris de rage après, nous dit-on, "une défaite sur un jeu vidéo"...), nous voyons bien le partage honnête et nécessaire à effectuer entre les responsabilités des autorités régaliennes et ce que mon titre a nommé "la terrible imprévisibilité du crime", contre laquelle aucun dispositif préventif ne peut être mis en place.
Certes on peut considérer que ce jeune homme était déjà connu pour des vols et des faits de violence, notamment sur sa soeur - elle avait déposé une main courante au mois d'avril 2023. Le 4 février, il avait entraîné une autre jeune fille pour la voler. "Fils de famille ordinaire se donnant des airs de racaille, un branleur" selon certains dans le quartier (Le Figaro).
Ces incidents, signifiants, auraient dû alerter mais n'étaient pas à ce point préoccupants pour laisser deviner ce futur atroce.
Les expertises psychologique et psychiatrique éclaireront sur la personnalité de ce meurtrier dont le crime ne pouvait pas être pressenti en amont et dont la commission n'incrimine pas forcément des défaillances institutionnelles graves.
Or on ne doit exiger d'un pouvoir, mais alors absolument, que ce que nous sommes en droit d'attendre de lui. César n'est pas responsable de toutes les malfaisances délictuelles et criminelles qui sont perpétrées sur le territoire national.
Nous sommes voués à déplorer, sans que quiconque y soit pour rien, l'abjecte rencontre entre l'innocence et la cruauté, voire la folie. Partout en France, et à tout instant, le hasard fait s'affronter ceux qui deviendront victime sacrifiée face aux pulsions d'un être délesté de toute morale, seulement préoccupé d'assouvir, sous quelque forme que ce soit, la part sombre de lui-même.
Contre l'improvisation de ces instincts libérés, l'État ne peut rien. Il est absurde d'incriminer sa faiblesse dans des circonstances où lui-même est dépassé et ses représentants sincèrement horrifiés.
On comprend aisément que ce n'est pas du tout la même configuration quand le comportement gravement délictuel ou criminel s'inscrit dans une destinée qui n'a jamais été irréprochable et dont les étapes aussi bien administratives que judiciaires ont été multiples. Combien d'histoires sont ainsi proposées aux citoyens saisis d'effroi, toutes de transgressions renouvelées, qui auraient dû être interrompues par la force publique, la rigueur judiciaire ou la rectitude administrative ! Il y a des délits et des crimes qui dépassent leur gravité ou leur horreur intrinsèque parce qu'ils sont révélateurs d'une mansuétude coupable en amont, d'une incurie blâmable ou d'une désinvolture sans compétence ni conscience.
Quand l'exécution des sanctions est laissée à l'abandon, quand des services qui devraient être solidaires ne s'informent pas les uns les autres, quand l'État et son dispositif régalien acceptent leur médiocrité ou leur impuissance, quand la France n'use pas des moyens dont elle dispose pour faire plier les autres pays, quand tout ce qui devrait être mis au service de la tranquillité publique et de la préservation d'une identité nationale est laissé en friche, il ne faut pas s'étonner de la survenue du pire. Il y a alors, de la part des structures officielles, une non-assistance à citoyens en danger, comme un devoir de protection qui n'est pas rempli.
Dans la première situation, l'État est innocent. Dans la seconde, il est fautif.
Si on cherche à tout prix un lien entre les deux situations, on pourrait se pencher sur l'éducation familiale. Sans qu'il y ait évidemment l'assurance d'une parfaite normalité de la part de ceux qui ont bénéficié d'une véritable éducation, il est permis de constater que pour la terrible imprévisibilité du crime comme pour toutes les infractions graves, des failles existent, des manques sont présents. Et des facilités, des dérives ont souvent été tolérées. Car il y a toujours de la liberté et de la responsabilité chez le délinquant, chez le criminel.
Mais cela ne devrait pas nous interdire de nous questionner : "Où a été notre erreur" ?
Les commentaires récents