Qu'on me laisse m'occuper des riens, de tous ces petits riens qui, dans la quotidienneté privée, politique, médiatique, judiciaire, sociale et culturelle, sont laissés à l'abandon parce que, paraît-il, trop dérisoires et insignifiants ! Qu'on n'éprouve pas à mon égard une sorte de condescendance ironique parce que je serais en charge du vain et de l'inutile !
Ce n'est pas de la fausse modestie mais qu'irait faire un homme comme moi dans le traitement des sujets nobles, gravissimes, sociétaux, alors que je ne suis qu'humeurs, subjectivité, liberté, contradiction, superficialité rapide et admiration de quelques rares grands esprits, authentiques éclaireurs ? Pourquoi me priverais-je des délices et des poisons de la politique politicienne quand tant se consacrent aux enjeux du monde, aux rapports de force internationaux, à la géopolitique et, avec une assurance qui ne se démentira jamais malgré les résultats contraires, nous déchiffrent le rébus d'un univers de plus en plus illisible ?
Qu'on ne vienne me chercher des noises, puisque je ne vais gêner personne ni faire de l'ombre à quiconque, quand dans mon minuscule pré carré j'égrènerai, avec un inventaire qui ne pourra pas être exhaustif, tous ces riens qui m'agacent, me sollicitent, me mobilisent, m'indignent, me découragent ou me font prendre au sérieux, voire au tragique, ce qui, pour la plupart des êtres, serait à peine considéré !
Ces élus qui s'insultent sans s'écouter, pour précisément ne pas avoir à s'écouter.
Ces malappris confondant la contradiction des idées avec la haine de ceux qui les expriment.
Ces critiques littéraires ou cinématographiques qui oralement ou par écrit suintent la complaisance, s'en sortant par des "jubilatoire" ou des hyperboles aussi grotesques que leurs massacres.
Cette humanité qui ne sait pas regarder dans les yeux, dire bonjour ou bonsoir, se lever pour les personnes âgées, faire preuve de la politesse la plus élémentaire, souvent dans ces rames de métro où sourire à un enfant est un crime et ne pas se plonger dans son portable une anomalie !
Cette indignation quand on refuse d'appréhender en gros mais qu'on désire évaluer au détail ! Lorsqu'on ne se soumet pas au devoir de détester toute la France Insoumise et la gauche parce qu'elle serait la gauche mais qu'on a envie de privilégier les lumières des personnalités par rapport aux ombres délétères des antagonismes. Par exemple préférer un Jérôme Guedj socialiste à certains conservateurs obtus !
Ce petit cénacle de la droite intellectuelle et médiatique qui donne des leçons à la société tout entière mais qui n'est pas fichue de s'appliquer les mêmes règles, qui ne sait pas, par exemple, que le savoir-vivre n'est pas que pour les autres...
Ces inquisiteurs de droite comme de gauche qui sont incapables de la moindre nuance, qui adorent ou haïssent Israël en bloc et font dépendre leurs convictions du vent dominant ou de préjugés jamais questionnés. Pour la liberté d'une Élisabeth Lévy, que de médiocres idéologues, de déplorables castrateurs !
Ces justiciers de mauvais aloi qui ne distinguent pas le bon grain de l'ivraie, qui s'estiment plus sages et compétents que les juges, n'acceptent pas la moindre compréhension à l'égard de ceux qu'il était capital de honnir - par exemple Nicolas Bedos - ou la plus petite réserve à l'encontre de ces personnes qui sont sanctifiées à proportion de leurs ennuis judiciaires, notamment Nicolas Sarkozy.
Ces journalistes écorchant la langue française, persuadés d'être plus importants que leur invité, avec leurs questions tellement longues que la réponse est réduite à la portion congrue.
Ces moutons de Panurge créant, dans le monde culturel et médiatique, des vedettes qui ne valent pas tripette mais bénéficiant d'un monopole abusivement engendré. Pour un Michel Drucker, que de piètres modèles !
Ces amis de tous registres prêts à vous aider quand vous n'avez pas besoin d'eux mais absents quand vous les sollicitez !
Ces pourfendeurs, ces éradicateurs de la liberté d'expression des autres mais se vantant de respecter ce beau principe à usage strictement personnel.
Ces médiocres crachant sur des mondes, par exemple politique, dont ils sont pourtant à des années-lumière pour l'esprit et la qualité. Ces petits maîtres s'érigeant en modèles quand ils ne sont que des repoussoirs !
Ces interminables monologues dans la vie sociale comme si l'art de la conversation avait disparu et que les conférences, partout, avaient substitué aux causeurs les didactiques.
Ces quelques hommes et femmes de pouvoir oubliant que sans exemplarité sur tous les plans, ils dégradent une République dont ils ont sans cesse le mot à la bouche.
Cette vertu essentielle qui, dans toutes les séquences de la vie collective ou singulière, devrait dominer mais qu'on recherche aujourd'hui désespérément : le courage.
Tous ces humains, ces professionnels qui se prennent pour des emblèmes, des institutions avant de l'avoir démontré par le plus petit commencement de preuve.
Tous ces compassionnels prêts à être infiniment généreux sur la peau des autres et déniant aux transgresseurs l'honneur d'avoir été responsables de leurs actes. La société ne les a pas engendrés, ils ont mal usé de ce qu'elle leur avait donné ou refusé.
Ces riens qui viennent, seconde après seconde, irriter ma susceptibilité, ma sensibilité, je ne les tiens pas pour rien ! Il faut se battre pour les traiter comme ils le méritent.
Les commentaires récents